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RÉSUMÉ
Défendant le parti pris d’une recherche culturelle appliquée qui ne s’interdit pas a priori de
considérer positivement son objet au service d’objectifs externes ou extra-culturels, ce travail
de thèse vise à explorer l'articulation, aujourd’hui opérée autour de la notion de « créativité »,
entre l’offre culturelle des territoires et leurs capacités attractives durables en faveur d’un
redéploiement économique et urbain. Au plan conceptuel, la démarche s’appuie sur les
arguments offerts par les théories contemporaines sur les économies régionales pour
soutenir l’hypothèse d’un lien entre l’émergence et la concentration géographique en
quelques zones urbaines centrales de nouvelles activités industrielles technocréatives et
l’animation artistique et culturelle dans laquelle elles se développent. La pertinence et
l’originalité de la démarche résident à cet égard dans la tentative de formuler un cadre
intégrateur des différentes grilles de lecture en présence, qu’il s’agit ensuite de mettre à
l’épreuve des faits.
Le cadre de référence exploratoire est ainsi construit à partir de trois grandes perspectives
explicatives, ou intuitions plausibles de recherche, portées par les approches plus récentes
du développement économique régional: 1/ des effets de type « milieu », promus par les
hypothèses issues du « tournant relationnel » dans l’analyse du développement (socio-)
économique urbain : « district créatif », « communautés créatives », « réseaux sociaux
d’échanges créatifs »… ; 2 / des effets de « lieu », décrits par des analyses inspirées d’une
certaine géographie dite culturelle, d’inspiration phénoménologique, qualitative et sensitive,
qui invitent à lier l’aptitude à la créativité à l’expérience même de la ville, dans ses
dimensions matérielles mais aussi sensibles et idéelles; 3 / des effets de « culture » (en
termes de valeur et d’aspiration), qui reformulent cette fois sous l’angle plus classique de
l’économie résidentielle et du marketing culturel urbain, la question de l’incidence de la
dimension culturelle du cadre de vie sur l’attractivité territoriale auprès d’activités et de
populations « stratégiques ».
La validité des schémas d’explication préétablis est explorée au moyen d’une méthodologie
qualitative appliquée à une étude de cas unique : l’industrie du jeu vidéo à Montréal et son
personnel « créatif ». Cette entrée méthodologique par le travailleur (le monde quotidien de
la vie et du travail) permet de dépasser une réduction de la « ville créative » à des questions
de densité urbaine (d’intensité, de diversité et/ou de connectivité), au profit d’une analyse
microsociologique qui interroge au plus près de la réalité des acteurs concernés les
mécanismes et les critères d’éventuelles rencontres productives entre les différents