La médaille de Sainte-Hélène, dans le Calvados
1857-1870
par Joël BEAUVAIS
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Contexte général
En février 1848 le roi Louis Philippe est ren-
versé. Louis Napoléon Bonaparte, fils du roi
Louis, un frère de Napoléon 1er est nommé
Président de la République le 10 décembre
1848 ; le 2 décembre 1851 il réalise un coup
d’état et se proclame Empereur des Français.
Dès 1849 il s’inquiétera de la situation morale
et matérielle des anciens militaires en créant
une commission chargée de recenser les
demandes d’aide et de secours. Devenu
Empereur il donnera une suite favorable au tes-
tament de son oncle qui avait légué la moitié de
son domaine dit privé aux officiers et soldats qui
avaient combattu pour lui. Pour cela il ouvre un
crédit de 8 millions à répartir entre les survi-
vants et il crée une commission en 1854 prési-
dée par le Comte d’Ornano. Commission
appelée d’Examen des Réclamations des
Anciens Militaires.
Au travers des rapports de ses proches,
Napoléon III prend conscience du faible niveau
de vie, voire des graves difficultés d’existence
des anciens militaires qui sont en grande majo-
rité sans pension malgré les « fatigues de la
guerre » (campagnes de Russie et de l’hiver
1814 en France – pour ne parler que des der-
nières).
Il est aussi conscient que depuis 1840 et le
retour des Cendres de Napoléon Ier aux
Invalides, toute action vers cette partie de popu-
lation lui apportera soutien et popularité.
Cette Commission peut réparer quelques injus-
tices. On donne ainsi des secours ponctuels et
quelques secours viagers sous réserve de pou-
voir faire état de trois blessures. De plus,
quelques Légions d’honneur sont accordées.
Mais les anciens militaires sont peu nombreux à
pouvoir entrer dans ces critères étroits.
Par ailleurs, en 1855 l’armée française avec
30.000 hommes est engagée dans la cam-
pagne de Crimée avec les Anglais contre les
Russes. L’ennemi de l’oncle est devenu l’ami du
neveu, et le fait que Victoria décerne sa
médaille de cette campagne à tous les soldats
alliés (la médaille de campagne est dans la tra-
dition de ce pays, ainsi il y a une médaille
anglaise pour Waterloo) n’est pas peu pour sus-
citer le désir d’une récompense collective mais
individuelle, une façon de dire que chacun a
tenu sa place.
La médaille de Sainte-Hélène est la première
médaille commémorative française d'importance
puisqu'elle a été distribuée à plus de 350 000 et
peut-être 400 000 exemplaires aux survivants
des armées de la Révolution et de l’Empire.
Ses archives détenues par la Grande
Chancellerie de la Légion d'Honneur ont été
détruites avec le Palais de Salm pendant les
troubles de la Commune et n’ont pas été
reconstituées, à l'inverse de celles de la Légion
d'Honneur.
Créée par le décret du 12 août 1857 signé
Napoléon III la médaille de Sainte-Hélène a eu
un retentissement considérable en France et
même en Europe (Belgique, Pologne, Italie,
États allemands). Elle représente peut-être le
point culminant de la légende napoléonienne
lorsqu'elle a été distribuée. Napoléon III en a
tiré une assise politique importante.
Le texte du décret précise quatre choses impor-
tantes : une médaille commémorative, premier
emploi du terme pour une médaille « portée »,
est donnée (donnée, insistons, pas vendue) à
tous les militaires français et étrangers (à l’ins-
tar de la médaille de Crimée) qui ont combattu
sous les drapeaux de la France.
Description de la médaille
Elle est en bronze très foncé quasiment couleur
chocolat, d’où son surnom ironique de médaille
en chocolat, mais ceci n’a pas nui à son prestige.