Enfants de la Lune

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Un éclairage sur la maladie des enfants
de la lune
Touchant de 30 à 50 personnes en France et de 3 000 à 4 000 dans le monde, la « maladie des
enfants de la lune », ou Xeroderma pigmentosum, est une pathologie génétique aussi rare que
grave : elle provoque une hypersensibilité de la peau au soleil, des troubles oculaires et un risque de
cancer de la peau ou des yeux multiplié par 1 000, obligeant les patients à vivre à l'abri de la lumière
naturelle, et à sortir seulement la nuit ou vêtus d'une combinaison intégrale développée par la NASA.
À ce jour, il n'existe aucun traitement définitif, faute d'une bonne connaissance de ses causes
moléculaires. Or, voilà que Frédéric Coin et Jean-Marc Egly, de l'Institut de génétique et de biologie
moléculaire et cellulaire de Strasbourg (IGBMC)1, viennent de décrire2 très finement un mécanisme
de base de cette pathologie, impliquant la protéine XPB. En effet, celle-ci fonctionne mal chez des
patients souffrant du Xeroderma, à cause d'une mutation sur le gène qui contrôle sa fabrication.
D'ordinaire, cette molécule intervient dans les processus de réparation de l'ADN, lorsque celui-ci est
altéré par les rayons ultraviolets de la lumière. « Jusqu'ici on pensait que XPB agissait normalement
comme une “hélicase”, c'est-à-dire une molécule capable d'ouvrir la double hélice d'ADN afin que
celui-ci puisse être réparé », précise Frédéric Coin. Et là, surprise : en analysant les conséquences de
différentes mutations de XPB, le chercheur strasbourgeois et son équipe ont montré que la protéine
n'intervient pas directement dans l'ouverture de l'ADN. En revanche, elle orchestre sur l'ADN des
molécules permettant de repérer le site lésé ; et c'est une autre protéine « complice », qui ouvre
ensuite l'ADN. « Or, chez les patients portant une mutation sur le gène XPB, l'activité d'ouverture de
l'ADN par cette autre protéine est divisée par dix par rapport à la normale », indique Frédéric Coin.
Autre résultat tout aussi important, il est apparu que la molécule XPB mutée fonctionne mal car elle
ne peut pas être « stimulée » correctement. « Nous avons, en effet, observé que chez les patients
portant une XPB mutée, il y a manque d'interaction de celle-ci avec la protéine qui régule son activité,
soit p52 », précise Frédéric Coin.
Cruciaux, ces résultats soulèvent de nombreuses et nouvelles questions : comment fonctionne
l'activateur p52 ? Quel type de molécule est impliqué dans la réorganisation par XPB de la structure
de l'ADN avant l'ouverture de celui-ci par une autre molécule ? Comment tout ce mécanisme est-il
initié ? Éclaircir ces zones d'ombre sera primordial pour la conception d'un traitement de la maladie
des enfants de la lune.
Kheira Bettayeb
Notes :
1. CNRS / Université Strasbourg-I / Inserm
2. Molecular Cell, vol. 26, n° 2, 27 avril 2007, p. 231.
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