Introduction
I. Les Égyptiens et leur histoire
’idéologie égyptienne tend à présenter l’histoire de sa civilisation, qui s’étend sur plus de trois
millénaires, dans le cadre d’une continuité assez figée. L’histoire est mise en scène de manière à
effacer les événements propres à être interprétés comme des ruptures. Ainsi l’inscription d’un haut
fonctionnaire nommé Mès mentionne l’an 59 d’Horemheb (environ – 1290), alors que ce pharaon ne
compte guère plus de vingt-neuf ou trente années de règne. Il ne s’agit pas d’une erreur mais d’un acte
volontaire. En effet, on a ajouté aux années de règne effectif du roi l’intervalle de temps qui le sépare
d’Amenhotep III (environ – 1385 à – 1345), Akhenaton/Amenhotep IV et ses successeurs étant rejetés
de cette histoire reconstruite par l’idéologie égyptienne. Dans la présentation de leur histoire, les
Égyptiens ne cherchent pas à mettre en lumière les particularités des événements les uns par rapport
aux autres. Ils souhaitent au contraire montrer ces événements comme la répétition ininterrompue de
ce qui a été mis en place aux âges de la création et durant le règne des dieux sur terre. Jean Leclant
définissait ainsi la civilisation égyptienne en 1969 : « Civilisation de la pierre, tournée obstinément
vers les résultats de ses commencements, cherchant à les répéter ». L’histoire selon les Égyptiens
anciens se définit comme la recherche d’un passé qui puisse fournir des modèles pour le présent.
Toutefois, l’affirmation de l’identité et de la personnalité égyptienne, qui sont des éléments
significatifs d’un individu et d’une époque, tient également une large place dans cette idéologie. Dans
le récit de leurs actes, les Égyptiens cherchent à surpasser leurs devanciers : les annales étaient
consultées pour vérifier le caractère exceptionnel du pharaon. Cette compétition ne doit néanmoins
pas s’inscrire dans la rupture. Dans ce même esprit, le concept d’intervention divine est fréquemment
utilisé pour expliquer des événements singuliers. Ces conceptions doivent rester à l’esprit lorsque
l’on se propose d’étudier l’histoire de l’Égypte ancienne.
II. Le découpage de l’histoire égyptienne
L’Égypte antique connaît trois grandes phases historiques : la préhistoire, l’époque pharaonique et la
période gréco-romaine. Début et fin de l’époque pharaonique s’inscrivent dans des contextes
particuliers. L’époque thinite (Ire et IIe dynasties) est marquée par la mise en place des principaux
éléments qui vont caractériser l’Égypte, pendant plus de trois millénaires. La société de la Basse-
Époque fortement empreinte des influences étrangères s’inscrit dans un contexte de profond
changement des valeurs et des mentalités égyptiennes. La civilisation égyptienne s’épanouit sous trois
grands empires : l’Ancien Empire, le Moyen Empire et le Nouvel Empire. Chaque époque de fin
d’empire s’est ouverte sur des périodes de troubles, qualifiées de Périodes Intermédiaires. Celles-ci
se caractérisent principalement par l’éclatement de l’unité politique et territoriale de l’Égypte après
une baisse de l’autorité du pouvoir royal. Ce pouvoir défaillant peut alors être relayé selon les
périodes considérées par des dynasties locales qui se partagent le pouvoir ou par des dynasties
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