Résumé
L’évaluation de l’impact des nuages sur le bilan radiatif du système Terre-atmosphère représente un
intérêt majeur pour l’étude du climat et de son évolution. Cependant, compte tenu de la grande variabilité des
propriétés morphologiques et microphysiques des particules nuageuses, la représentation des processus couplés
microphysiques et radiatifs reste limitée dans la plupart des modèles de climat atténuant ainsi la crédibilité des
scénarii prévisionnels proposés. Le développement de paramétrisations microphysiques capables de retranscrire
correctement les propriétés radiatives des nuages requiert alors un grand nombre de mesures de leurs propriétés
microphysiques et optiques à différentes échelles d’observation.
C’est dans ce cadre que s’inscrit cette étude en proposant une caractérisation fiable et précise des
propriétés optiques et microphysiques de nuages de phases thermodynamiques différentes à l’aide de mesures in
situ. L’exploitation de l’information déduite de la synergie entre différentes sondes aéroportées à une échelle
d’observation fine permettra ensuite d’améliorer et de valider les algorithmes d’inversion appliqués aux mesures
satellitales à une échelle globale.
La quantification des relations entre propriétés microphysiques et propriétés optiques ou radiatives des
nuages nous a, dans un premier temps, conduit à développer un modèle microphysique hybride basé sur une
combinaison de particules sphériques d’eau liquide et de cristaux hexagonaux de rapport d’aspect variable. Bien
que cette approche ne soit pas réaliste d’un point de vue microphysique, il a été montré que le modèle hybride
était capable de simuler des propriétés optiques en accord avec les observations in situ, quelle que soit la phase
thermodynamique du nuage.
Dans un deuxième temps, une base de données regroupant une grande variété d’évènements nuageux a
été construite à partir de mesures issues de différents instruments et campagnes d’observations. Une analyse
statistique en composantes principales (ACP) a ensuite été implémentée sur les mesures de sections efficaces de
diffusion volumique réalisées par le « Néphélomètre Polaire » aéroporté du LaMP. Elle nous a permis de
regrouper les mesures en fonction de leur « signature » optique, révélatrices des variations des propriétés
microphysiques des nuages au sein de la base de données. La classification des tendances observées dans
l’espace des composantes principales a été rendue possible par l’utilisation d’un réseau de neurones (perceptrons
multicouches). La complémentarité de l’ACP et des réseaux de neurones nous a ainsi permis de classifier
l’ensemble des mesures en trois groupes de nuages de phases thermodynamiques différentes (nuages de
gouttelettes d’eau liquide, nuages en phase mixte et nuages de cristaux de glace). Cette classification a ensuite
été validée par des mesures microphysiques indépendantes réalisées par les sondes de la gamme PMS (FSSP-100
et 2D-C).
Il fut ainsi possible d’extraire trois sections efficaces de diffusion volumique moyennes, documentées
entre 15° et 155° à une longueur d’onde de 0.8 µm, représentatives des trois types de nuages identifiés.
L’interprétation de ces indicatrices de diffusion, à partir d’une méthode d’inversion basée sur la modélisation
physique des processus de diffusion par l’intermédiaire du modèle hybride, a montré que l’information contenue
dans les mesures de diffusion était suffisante pour restituer la composition et les distributions dimensionnelles
caractéristiques des trois classes de nuages. Cette assertion a ensuite été validée par le fait que les spectres
volumiques inversés étaient en bon accord avec les granulométries obtenues à partir des mesures microphysiques
directes du FSSP-100 et du 2D-C. Néanmoins, les résultats obtenus par ces analyses ne décrivent pas l’ensemble
des propriétés de diffusion simple des nuages.
La dernière étape a donc consisté à exporter l’information contenue dans les indicatrices de diffusion
documentée entre 15° et 155° à une longueur d’onde de 0.8 µm vers les zones de diffusion avant et arrière puis
de la projeter pour deux longueurs d’ondes du proche infra-rouge (1.6 µm et 3.7 µm), significatives pour la
modélisation du transfert radiatif. A partir du modèle hybride de diffusion, des indicatrices de diffusion
correspondant aux distributions volumiques restituées par la méthode d’inversion, ont ainsi pu être calculées
entre 0° et 180° pour des longueurs d’ondes de 0.8, 1.6 et 3.7 µm. Cette procédure a été appliquée aux trois types
de nuages ainsi qu’à des nuages de type cirrus dont l’impact radiatif reste encore mal appréhendé par la
communauté scientifique. Des propriétés microphysiques et optiques moyennes ont ainsi pu être déterminées
pour ces quatre catégories de nuages et nous ont permis de construire des tables d’interpolation représentatives et
directement exploitables dans les algorithmes de restitution de paramètres nuageux utilisés en télédétection
passive.