Le hibou des marais Prenez une part active à sa conservation

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Le hibou des marais
Prenez une part
active à sa
conservation
© Gilles Allard
Avant-propos
Le hibou des marais occupe les milieux ouverts et les terres agricoles, dans lesquelles il
chasse les petits mammifères. Il consomme une dizaine de petits rongeurs par jour et
contribue ainsi efficacement à la lutte biologique contre les populations de ravageurs dans les
cultures. Malheureusement, les populations de ce hibou sont en déclin en Amérique du Nord.
Pour assurer la conservation du hibou des marais, la collaboration de tous est nécessaire,
tant des ornithologues, que des agriculteurs et autres passionnés de faune ailée.
Ce document vous aidera à prendre une part active à sa conservation. Vous y trouverez
notamment de l’information pertinente sur la biologie de l’espèce, ainsi que sur le projet pilote
d’inventaire du hibou réalisé au Saguenay-Lac-Saint-Jean par le Ministère des Forêts, de la
Faune et des Parcs (MFFP) et le Zoo sauvage de Saint-Félicien dans la région.
Ce symbole attirera votre attention sur des points importants d’identification ou de
repérage
Présentation et situation de l’espèce
Le hibou des marais (Asio flammeus) est un représentant de la famille des strigidés, de taille
moyenne avec une hauteur variant de 33 à 43 cm. Ses aigrettes sont à peine visibles et
souvent repliées sur la tête, en vol. Ses yeux jaunes sont cerclés de noir dans un disque
facial pâle entouré de blanc. Son plumage est chamois, strié de lignes brunâtres et l’on
remarque des bandes blanches sur le devant des ailes (voir photo de la page de couverture).
En vol, le dessous pâle des ailes et la tache sombre au niveau du poignet se remarquent
facilement. Son vol inégal se distingue par des mouvements amples qui ressemblent au vol
d’un papillon (Figure 1).
Figure 1. Un hibou des marais en vol. On remarque la tache brune sous
l’aile pâle. © Gilles Allard.
Cette espèce possède l’une des plus vastes distributions géographiques parmi les strigidés.
On la retrouve aussi bien sur le continent américain qu’en Eurasie. Par contre, elle est peu
abondante dans l’ensemble de son aire de répartition et la population mondiale serait en
décroissance. Au Canada, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada évalue
le statut du hibou des marais à « espèce préoccupante » (COSEPAC 2008). Au cours des dix
dernières années, la population canadienne n’a cessé de décroître avec une diminution totale
estimée à 27 %. Au Québec, l’espèce est susceptible d’être désignée menacée ou
vulnérable. Le hibou des marais est principalement observé dans la plaine du Saint-Laurent,
dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et dans les terres de la baie d’Ungava.
Biologie
Habitat
Comme son nom l’indique, l’habitat de prédilection de ce hibou est représenté par des milieux
ouverts comme des marais, mais aussi des prairies côtières, des marécages, des tourbières,
d'anciens pâturages et la toundra arctique. On le trouve également en milieu agricole durant
la saison de reproduction. L’espèce niche au sol et recherche un couvert végétal dense avec
une hauteur variant de 30 à 60 cm pour la protection du nid (Figure 2).
Figure 2. Un hibou des marais dans son habitat de prédilection. © Gilles Allard
Comportement
Le hibou des marais effectue une migration entre les sites d’hivernage et de reproduction.
Certaines parties de son aire de répartition seraient cependant occupées à l’année. Il est
plutôt nomade et n’a pas d’attachement à un site en particulier ou à son lieu de naissance.
L’abondance de proies influence grandement son choix face à la sélection de son site de
reproduction.
Alimentation
L’alimentation du hibou des marais est composée de micromammifères, soient
principalement des campagnols, jusqu’à plus de 95 %. Sa diète inclut aussi des souris, des
musaraignes, des petits oiseaux et même des lemmings au nord de son aire de distribution.
En chasse, il vole au ras du sol entre 1 et 3 m de hauteur. Les hiboux peuvent aussi chasser
en scrutant les mouvements des proies du haut d’un perchoir comme des piquets de clôture,
un monticule de terre ou des roches (Figure 3). Le hibou des marais est crépusculaire,
chassant principalement à l’aube et au crépuscule, mais il est possible de l’observer durant le
jour.
Figure 3. Un hibou des marais perché sur un poteau à la recherche d’une proie.
© Gilles Allard
Reproduction
Les couples se forment vers la fin de l’hiver sur les sites d’hivernage ou sur les sites de
nidification pour les individus qui ne sont pas encore appariés. L’espèce est monogame pour
une saison de reproduction donnée. C’est le mâle qui se livre à des parades nuptiales,
composées de cris, de plongeons et de claquement d’ailes, pour conquérir la femelle en avril
ou en mai.
Le hibou des marais est l’une des rares espèces de strigidés à construire un nid, les autres
espèces utilisant souvent des nids abandonnés ou des cavités naturelles. La femelle creuse
une légère dépression dans le sol à travers un couvert végétal dense et utilise de l’herbe et
des plumes pour le tapisser. Les nids sont difficiles à trouver, en particulier au stade de l’œuf
(Figure 4).
Figure 4. Le hibou des marais fait son nid au sol, dans un épais couvert
de végétation. La femelle peut pondre jusqu’à 14 œufs.
© Alexandre Rivard, Service canadien de la faune
Nichant au sol, il est primordial pour la femelle qui couve et la survie des jeunes d’être bien
camouflés dans la végétation. C’est le comportement des hiboux revenant régulièrement au
même endroit qui donne une indication sur la présence possible d’un nid. L’incubation
commence dès la ponte du premier œuf.
Le mâle nourrit la femelle durant la ponte et l’incubation. Il assurera aussi
l’approvisionnement en proies pour les jeunes. Il remet les proies à la femelle qui s’occupe de
nourrir les petits. Elle recommence à chasser quand les jeunes ont quitté le nid ou si les
proies sont peu abondantes. La grosseur de la couvée est intimement liée à l’abondance de
nourriture. On compte de 3 à 14 œufs par couvée et l’incubation dure en moyenne de 24 à 29
jours.
Les jeunes devenus plus mobiles s’éloignent du nid, mangent des insectes tout en
quémandant de la nourriture à leurs parents. Ils demeurent dépendants des parents pour la
nourriture jusqu’à quelques semaines après l’envol, qui se produit entre l’âge de 24 à 42
jours. De 46 à 50 % des jeunes vont survivre jusqu’à l’envol (Figure 5).
Figure 5. Un jeune âgé d’environ 14 à 17 jours attend le retour
de ses parents qui lui apporteront de la nourriture.
© Alexandre Rivard, Service canadien de la faune
Menaces
La perte et la fragmentation des habitats de nidification et d’hivernage comptent parmi les
principales menaces pour l’espèce. Le développement agricole, l’urbanisation et les activités
humaines récréatives contribuent à la diminution des milieux ouverts et humides nécessaires
à la survie de l’espèce.
La perte d’habitats naturels pousse le hibou des marais à adopter des terres agricoles
comme sites de nidification. Ce faisant, le nid, les œufs et les jeunes peu mobiles sont
susceptibles d’être fauchés par la machinerie agricole (Figure 6).
Figure 6. Un petit dans une zone récemment fauchée.
© Alexandre Rivard, Service canadien de la faune
Les décès naturels comprennent la famine, les maladies et les prédateurs. La prédation se
fait surtout sur les œufs et les oisillons. Les prédateurs incluent des mammifères (renard
roux, moufette rayée, chat et chien errant et mustélidé) et plusieurs espèces d’oiseaux
(oiseaux de proie, le goéland argenté et le grand corbeau). Les décès accidentels sont liés à
la fauche par la machinerie agricole et aux collisions, entre autres, avec des véhicules, des
câbles de services publics, des clôtures et des avions.
Mise en place d’un inventaire spécifique du hibou des marais pour le
Québec
Au Québec, les données sur l’espèce sont incomplètes, d’une part, car elle est relativement
rare et d'autre part, car les inventaires d’oiseaux traditionnels sont peu adaptés à détecter la
présence de cette espèce. De 2012 à 2014, le Zoo Sauvage de St-Félicien a collaboré avec
le MFFP afin de développer une méthode d’inventaire spécifique à l’espèce. Les travaux se
sont déroulés dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, une région propice à l’observation
de ce hibou. La méthode d’inventaire s’est avérée relativement efficace. En 2012, 7 des 8
sites sélectionnés pour l’inventaire étaient occupés par le hibou des marais, alors qu’en 2013
et 2014, seulement 4 des 9 sites étaient occupés (voir détails dans Gagnon et al. 2015).
La nidification : une période critique
La nidification est une période cruciale pour la conservation du hibou des marais. En
protégeant les jeunes pendant la période où ils sont confinés au sol, on maximise les
probabilités qu’ils s’envolent et qu’un jour, ils puissent à leur tour se reproduire et contribuer à
faire augmenter la taille de la population. Or, pour assurer la protection des nids, il faut avant
tout les trouver, et ce n’est pas chose facile. De 2012 à 2014, malgré plusieurs signes
encourageants, comme l’observation de couples ou de parades nuptiales, aucun nid n’a pu
être détecté dans les 9 sites inventoriés.
Comment contribuer à la conservation du hibou des
marais ?
Pour les prochaines années de suivi, il est primordial d’obtenir plus de mentions du hibou des
marais, afin d’augmenter la probabilité de détection des nids. Que vous soyez agriculteur,
ornithologue ou encore passionné de la faune, vous êtes aux premières loges pour observer
un hibou des marais dans son habitat. Si tel est le cas, SVP, rapportez-nous votre
observation dans les plus brefs délais. Grâce à vos informations, nous serons en mesure de
mieux comprendre l’écologie de cette espèce fascinante et, on l’espère, de l’aider à se
rétablir.
Références
COSEPAC. 2008. Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur l’Hibou des marais
(Asio flammeus) au Canada – Mise à jour. Comité sur la situation des espèces en péril au
Canada, Ottawa.
Gagnon, C., J. Lemaître, G. Lupien et J.A. Tremblay. Mise en place d’un inventaire spécifique
du hibou des marais pour le Québec. Le Naturaliste canadien. Volume 139, numéro 1,
hiver 2015, p. 12-16.
Équipe de rédaction :
Christine Gagnon, biologiste, Zoo sauvage de St-Félicien
Jérôme Lemaître, biologiste Ph.D., Direction générale de l'expertise sur la faune et ses
habitats, MFFP
Mathieu McCann, technicien de la faune, Direction de la gestion de la faune Saguenay - LacSaint-Jean, MFFP
Nous tenons à chaudement remercier tous les contributeurs au projet. Un merci spécial à
Gilles Allard, Philippe Beaupré, Guy Biron, Daniel Girard, Serge Gravel, Gilles Lupien,
Nicolas Perron, Jean Tanguay et Junior A. Tremblay.
Vous voyez un hibou des marais?
Contactez-nous :
Lac Saint-Jean : Christine Gagnon, Zoo sauvage de Saint-Félicien.
Tél. 418 679-0543 # 5278
Saguenay : Sophie Hardy, Direction de la gestion de la faune Saguenay - Lac-Saint-Jean,
MFFP.
Tél. 418-695-8125 # 357
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