rentedeceux quimarquentle frontderecul—dépérissement,mortalitéouéchecdurenouvel-
lement.Rien ne permetdepenser queces deux frontsprogresserontaumême rythme. Onpeut
imaginer queles peuplementsinstallés d’espèces pérennes,comme les arbres forestiers,auront
lacapacitéderésister pendantuncertain temps àl’évolution défavorable deleurs conditions
environnementales. Les “îlotsderésistance” ainsi formés seraientàterme réduitssoitpardes
événementsclimatiques sévères,soitparnon renouvellementdes générations.
Demême,les aptitudes fortdifférentes des espèces àladissémination (Dupouey
etal.
,2002)
devraientinduire des vitesses différentielles d’avancementdufrontdeprogression,se traduisant
parune modification delacompositiondes couvertsauprofitdes espèces mobiles,etdoncen
particulier des pionnières,mais aussi auprofitdes espèces déplacées parl’homme,defaçon
volontaire ounon,cemodededispersion étant,àn’en pasdouter,le plusrapide!Ledévelop-
pementduPalmier chanvre,
Trachycarpusfortunei
(Hook.) Wendl. (Walther,2007)dans les forêts
duTessin,ouencore celuiduLaurier-cerise(
Prunuslaurocerasus
L.) dans denombreuses forêts
en Franceouen Suisse (M.Dobbertin,communicationpersonnelle) estunexemple demodifica-
tion delacomposition des peuplementssousl’effetduchangementglobal—iciréchauffement
plustransporthumain —quinemanquerapasdefrapper les esprits.
Pourprendre unexemple moins anecdotique,considérons deux espèces forestières dontl’aire de
répartition en Francedevraits’étendre sousl’effetduréchauffementglobal:le Chêne vertetle
Pin maritime. La première estjusqu’icipeuoupasutilisée en reboisement,etn’estsusceptible
d’atteindre naturellementquedes vitesses deprogression limitées (bien quetrès supérieures à
celles des espèces les moins mobiles),quel’on peut supposer del’ordre decelles atteintes par
les chênes européensàfeuilles caduques aucours deleurrecolonisation post-glaciaire,c’est-à-
dire del’ordre de500 m/an(selon HuntleyetBirks,1983,cités parPetit
etal.
,2002). Inverse-
ment,le Pin maritime aétélargementétenduparl’homme au-delàdeson aire derépartition
spontanée,au-delàmême dubioclimatquiluiestfavorable. EnforêtdeFontainebleaupar
exemple,il afaitl’objetdepremières tentatives d’acclimatation souslerègne deFrançois I er.Ces
plantations etles semis naturels quiensontissus,très bien adaptés aux sols sableux deFontai-
nebleau,ontparcontre étédécimés pardes épisodes froids(1709,1879…),etle Pin sylvestre,
mieux adaptéauclimatduBassin parisien,aétépréféré dans les reboisementsplusforestiers
entrepris àpartir delafin duXVIIIesiècle (d’après Perraud, 2003). Cependant,icioulà, dans les
chaos rocheux dumassif,àlafaveurd’unmicro-abri ouparmeilleure adaptationindividuelle,
des sujetsdePin maritime se sontmaintenus. Onpeut imaginer qu’unréchauffementduclimat
permettraàl’espèce,àpartir decetype “d’avant-postes”,deconquérir rapidementles zones de
progressiondeson aire potentielle,d’autantplusqu’il s’agitd’une espècepionnière,àgraines
légères. Ainsi,il yatout lieudepenser quelaconquêteparlePin maritime des nouveaux terri-
toires favorables seraplusrapidequecelle duChêne vert.
Ces exemples permettentdecomprendre queles différentes espèces d’arbres ne répondrontpas
delamême façon aux changementsclimatiques. Ilenrésulteraune évolution delacomposition
des mélanges,mais cetteévolution se traduira-t-elle parunappauvrissementouunenrichisse-
mentdeladiversitéenespèces ?
La diversitéenespèces ligneuses dans les forêtsvatrès généralementdécroissantdes basses
latitudes vers les hautes latitudes,des forêtstropicales aux forêtsboréales (Franc, 2008). Dans
cegradient,les forêtsméditerranéennes présententunniveaudediversitéélevé(d’après Quézel
etal.
,1999,elles seraientdeux fois plusriches en espèces ligneuses queles forêtsdetype
européen). Cettediversité,cependant,se manifesteessentiellementdans les strates arbustives.
Àl’échelle delaFrance,larichesse en espèces d’arbres suitplutôtungradientdécroissantd’est
en ouest(IFN, 2006),lié probablementàlaprésence,àl’estdenotre pays,desols calcaires et
demontagnes,aux forêtsmixtes ethétérogènes. Les régions les plusriches en espèces d’arbres
182Rev.For. Fr. LX -2-2008
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