• Herbes sylvatiques liées au sous-bois ombragé du bosquet, notamment l’anémone
sylvie, le sceau de Salomon commun, l’ail des ours, la jacinthe des bois, la corydale
solide, la primevère élevée ;
• Herbes des lisières et sous-bois clairs comme la stellaire holostée et l’épipactis à
larges feuilles, orchidée qui est apparue spontanément et compte bon an mal an de
vingt à trente individus (photo).
Une partie des espèces sauvages se sont installées spontanément, arrivant dans le jardin soit
par le vent (plantes anémochores), soit grâce aux oiseaux (plantes ornithochores) ; d’autres,
en particulier les annuelles, appartenaient au stock grainier du sol (2) ou ont été introduites
involontairement lors du repiquage de plantes potagères achetées au marché ; d’autres
encore ont été introduites volontairement, soit par le semis de graines récoltées dans les
champs, prairies et bois, soit par la plantation. Dans ce dernier cas, il s’agit surtout des
espèces de sous-bois à floraison printanière dont la plupart ne s’installent pas d’elles-
mêmes dans les boisements de recolonisation spontanée ou artificielle d’anciennes cultures.
Les seules plantes sylvatiques qui arrivent facilement en sous-bois par la voie des airs ou
avec les animaux sont le lierre, les fougères, les ronces, la benoîte et le gouet tacheté.
Aussi, nombre des plantes forestières citées ci-dessus proviennent-elles de la récupération,
et en quelque sorte du sauvetage in extremis, des plantes lors du lotissement de terrains
boisés des environs.
Conclusions
On voit qu’un « jardin sauvage » ou « refuge naturel » ne se crée pas tout seul.
Paradoxalement, il exige une attention et une intervention soutenues qui s’appuient
d’abord sur la connaissance des plantes, ensuite sur le désir de les avoir chez soi parce
qu’elles sont intéressantes, rares, attractives pour les oiseaux et insectes ou tout
simplement parce qu’elles sont aussi belles que les plantes cultivées (3). De plus, dans ce
jardin rixensartois, nombre d’entre elles ont une petite histoire comme ce Telekia speciosa
plantureux dont les graines ont été récoltées dans les montagnes de la Transylvanie, lors
d’un arrêt d’urgence, pour cause de crevaison, d’une voiture trop petite pour cinq
personnes et leurs bagages !
Cette conception de l’horticulture (parce qu’il s’agit bien de cela) relève donc d’un esprit à
tout le moins naturaliste, autrement dit de la sensibilité à la nature au sens de F.
TERRASSON, c’est-à-dire à ce que l’homme ne contrôle pas. Une attitude caractéristique de
celui qu’on pourrait qualifier d’ « horticulteur naturaliste », c’est l’attention portée à
toutes les plantes qui apparaissent spontanément au cours des années, au contraire du
réflexe d’éliminer systématiquement tout ce qui est inconnu et étranger à ce que l’on a
semé ou planté.
On peut imaginer que cela ne simplifie pas la vie ; surtout lorsque la tondeuse doit louvoyer
entre dix pieds d’une orchidée sauvage qui s’obstine à pousser en plein milieu de la pelouse
ou que des nouvelles venues se comportent finalement comme des envahisseuses, telles que
le gratteron, l’épiaire des champs, l’égopode ou la ronce laciniée pourtant si généreuse en
mûres énormes et succulentes.
Cela ne facilite pas non plus les relations avec les voisins qui ont un autre idéal horticole :
celui du jardin tiré au cordeau, net et aseptisé dont l’uniformité est sans doute source de
repos pour les yeux et l’esprit comme le jardin zen tout simplement dépourvu de végétaux.
(1) Cette troisième caractéristique ne constitue pas toutefois une condition sine qua
non ; elle est simplement complémentaire et participe de la même conception
écologique générale.
(2) Le jardin en question, comme beaucoup d’autres à Rixensart, est issu du lotissement
d’anciennes terres de culture.
(3) Une autre motivation peut être la création de véritables écosystèmes comme un
étang ou un bosquet où plantes et animaux sauvages vivent en équilibre avec le
milieu et entre eux.