POINT TECHNIQUE SUR LA MORBIDITE RECURRENTIELLE EN

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POINT TECHNIQUE SUR LA MORBIDITE RÉCURRENTIELLE EN CHIRURGIE THYROIDIENNE
POINT TECHNIQUE SUR LA MORBIDITE RECURRENTIELLE EN CHIRURGIE
THYROIDIENNE
JP CHIGOT
La crainte de tout opéré de la thyroïde est de « perdre la voix » et il est vrai que la
morbidité récurrentielle a une incidence non négligeable et probablement sous-estimée.
Les paralysies récurrentielles unilatérales ne laissent généralement que peu de séquelles,
mais certaines, même transitoires, ont un retentissement important lorsque la voix est
« l'outil de travail » de l'opéré. Les paralysies bilatérales, si elles sont beaucoup plus
rares, peuvent, quant à elles, avoir des conséquences dramatiques.
La prise en compte du risque récurrentiel doit donc être un souci constant en chirurgie
cervicale.
1 – Il importe de se souvenir que certains facteurs peuvent favoriser une atteinte
récurrentielle.
L'installation du malade en hyper extension rend le nerf plus superficiel et plus
vulnérable. Dans la chirurgie du rachis cervical par voie antérieure où l'hyper extension est
souvent importante, l'incidence des paralysies récurrentielles est relativement élevée.
L'incision a aussi un rôle. Une petite incision, au prétexte que l'on souhaite un bon
résultat esthétique, peut conduire à une dissection aveugle et dangereuse.
Il existe des anomalies anatomiques. Parfois le nerf récurrent présente une division
précoce et ceci peut induire en erreur. Du coté droit, le nerf peut être non récurrent (0.3 à
1 %) et traverser le champ opératoire dans le plan des vaisseaux jugulo-carotidiens.
Lorsque le nerf n'a pas encore été vu et que l'on constate la présence d'une structure
évoquant un filet nerveux il ne faut pas la sectionner avant d'être certain qu'il n'existe pas
un récurrent en position habituelle. Les nerfs non récurrents s'accompagnent en principe
d'une autre anomalie anatomique qu'il faut rechercher : un trajet anormal du tronc
brachio-céphalique qui passe entre trachée et œsophage voire en arrière de celui-ci.
2 - Le repérage du nerf doit être systématique et certaines précautions prises.
Toute thyroïdectomie débute par une ligature des vaisseaux thyroïdiens supérieurs. Une
ligature en masse, à l'aveugle, peut léser le nerf. La ligature doit être faite le plus haut
possible en plusieurs pédicules. Cette technique permet en outre de respecter le plus
souvent la vascularisation de la parathyroïde supérieure et de ne pas blesser le nerf
laryngé externe.
Certes, avec une certaine expérience, on peut une fois le lobe thyroïdien exposé, palper le
nerf dans sa partie basse, en le faisant « rouler sous le doigt » mais cette palpation est
insuffisante et peut prêter à des erreurs d'interprétation. En fait il faut voir le nerf.
En règle générale le mieux est de repérer l'artère thyroïdienne inférieure et de rechercher
le nerf au moment où il croise l'artère selon une direction pratiquement toujours identique
mais variable selon le coté (à gauche il repose sur l'œsophage, à droite il vient de la
profondeur). Une fois que le nerf est repéré il faut le suivre de bas en haut jusqu'à sa
pénétration dans le larynx. En cas de division précoce les 2 branches doivent être suivies.
Cette visualisation du nerf doit être la plus atraumatique possible. Les instruments ne
doivent jamais être trop proches du nerf. Le mieux, une fois qu'il est repéré, est de le
suivre sur sa face antérieure avec un dissecteur de Redon.
Pour s'aider dans la dissection il est parfois utile, si l'artère thyroïdienne inférieure a été
liée de placer son moignon d'amont sur un fil tracteur, ce qui dégage la partie haute du
nerf. On peut aussi conserver l'artère thyroïdienne inférieure ce qui protège la
vascularisation des parathyroïdes et réaliser des ultraligatures au contact de la thyroïde,
tout en suivant progressivement le nerf, qui ne doit jamais être perdu de vue.
Dans les interventions difficiles (thyroïdectomies totales avec curage central,
réinterventions) l'utilisation de lunettes binoculaires est très utile et dans mon expérience
diminue notablement la morbidité récurrentielle.
Au cours de l'intervention, l'usage de la coagulation, même bipolaire, doit être proscrit à
proximité du nerf. C'est particulièrement vrai dans la portion terminale du nerf qui est
proche de la trachée. Une coagulation sur celle-ci, même à une distance d'un centimètre
peut entraîner sa brûlure car la trachée est très conductrice de la chaleur. La dissection
aux ultrasons est sans doute plus sure mais elle n'élimine certainement pas le risque
d'atteinte récurrentielle.
L'utilisation du repérage per opératoire par électrostimulation, recommandée par certains,
est à nos yeux d'un intérêt discutable.
L'application de gaze hémostatique type Surgicel R doit être proscrite au contact du nerf.
S'imbibant progressivement de sang et augmentant de volume elle peut entraîner une
compression du nerf et l'apparition retardée d'une dysphonie.
Lorsqu'un drain aspiratif est laissé en place il faut veiller à ce qu'il soit dirigé vers l'arrière
et ne soit pas au contact du nerf.
3 – Les cas particuliers.
Dans les thyroïdectomie subtotales on a tendance à attirer vers le haut le lobe thyroïdien
et lorsque l'on sectionne la parenchyme à utiliser un plan de coupe qui risque de se
rapprocher dangereusement du récurrent. Il ne faut pas trop extérioriser le lobe et faire
une coupe rigoureusement horizontale. L'hémostase du moignon doit se faire avec des
ligatures superficielles et sans utiliser la coagulation.
En cas de goitre volumineux, surtout s'il est plongeant, le repérage premier du nerf à sa
partie basse est difficile et dangereux. L'extraction du pôle inférieur de la thyroïde,
notamment à droite peut étirer le nerf qui « vient avec » et le léser. Dans ce cas il faut
toujours commencer par libérer totalement le pôle supérieur de la thyroïde. Ceci permet
de repérer le nerf à sa terminaison et de le dégager de haut en bas. Ceci permet
également d'extraire le pôle inférieur sans risquer d'exercer une traction sur le nerf.
Les rapports entre la partie terminale du nerf et la thyroïde sont parfois très étroits. Il
existe parfois des adhérences intimes et du parenchyme thyroïdien peut s'intercaler entre
le nerf et la trachée. Dans ces cas il ne faut pas hésiter, quelle que soit la pathologie en
cause à laisser un petit mur postérieur de parenchyme thyroïdien. Encore faut il en assurer
l'hémostase avec minutie avec des points très superficiels et des fils très fins.
En cas de réintervention il faut toujours faire un examen pré opératoire des cordes
vocales. Certaines paralysies récurrentielles sont asymptomatiques ou du moins le
malade a oublié, si l'intervention est ancienne, qu'elle avait été suivie d'une dysphonie.
La mise en évidence d'une paralysie d'un coté conduira à être particulièrement prudent du
coté opposé. S'il existe une fibrose importante vouloir à tout prix voir le nerf peut
conduire à sa blessure. Dans ce cas il vaut mieux pratiquer des ultraligatures au contact
de la thyroïde et ne pas hésiter là encore à laisser un mur postérieur.
En cas d'hématome compressif nécessitant une réintervention en urgence, il faut être
particulièrement vigilant. L'hématome évacué il faut prendre son temps, s'abstenir de
toute hémostase hâtive, de toute coagulation intempestive qui pourraient léser le nerf.
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Voie d'abord cervicale : mini-incision
Hémostase et ultracision en chirurgie thyroidienne
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