DÉCISION KOUFAKI ET ADEDY c. GRÈCE 5
La réduction des rémunérations et pensions de retraite tend à limiter les dépenses du
gouvernement, ce qui contribuera à réduction du déficit budgétaire du pays. Les
dépenses du gouvernement incluent celles des organismes de sécurité sociale,
indépendamment du fait que ces organismes constituent des personnes morales de
droit public ayant une autonomie financière. Compte tenu du fait que la réduction de
la rémunération des fonctionnaires et plus largement des travailleurs du secteur public
tend à atteindre le but susmentionné, la question de savoir si cette réduction peut
entraîner aussi celle des salaires de ceux qui travaillent dans le secteur privé n’a
aucune incidence sur l’opportunité de cette mesure. En fait, une réduction éventuelle
des salaires de ceux qui travaillent dans le secteur privé conduira, comme le
législateur s’y attend, à une réduction du coût de production des produits grecs, à un
ajustement des prix des produits et des services, à une baisse de l’inflation, à une
augmentation de la compétitivité de l’économie grecque, à un renforcement de
l’emploi et, en définitive, à une augmentation du produit intérieur brut.
Les allégations selon lesquelles il y aurait violation du principe de la
proportionnalité sont mal fondées, notamment quant à l’omission [prétendue] du
législateur d’examiner, avant de prendre les mesures litigieuses, la possibilité de
trouver des solutions alternatives plus douces (...). L’assainissement des finances
publiques du pays ne dépend pas seulement de la réduction des dépenses relatives aux
salaires et des dépenses des organismes de sécurité sociale, mais [aussi] de l’adoption
des mesures économiques, financières et structurelles dont l’application intégrale et
coordonnée contribuera à sortir le pays de la crise et à améliorer les données
budgétaires de manière viable, c’est-à-dire après l’écoulement de la période de trois
ans visée par le mémorandum.
Certaines des mesures précitées ont été établies par les dispositions des lois
nos 3833/2012 et 3845/2010 (augmentation des recettes publiques par l’augmentation
de la TVA et des taxes spéciales sur la consommation et par l’imposition de taxes
extraordinaires). D’autres lois ont introduit des mesures pour rétablir la justice fiscale
et pour faire face à l’évasion fiscale, pour réformer le système de sécurité sociale et le
système de mise à la retraite des fonctionnaires, pour revoir les procédures de
vérification et de contrôle des finances publiques (...), pour ouvrir certaines
professions fermées, pour assainir les entreprises publiques, pour restructurer et
développer l’organisme ferroviaire grec (...).
Il convient aussi de rejeter l’allégation selon laquelle il y aurait eu violation du
principe de la proportionnalité en ce que les mesures litigieuses ne revêtent pas un
caractère seulement provisoire. (...) Le législateur, en adoptant un ensemble de
mesures, dont les mesures en cause, tend non seulement à remédier à la crise
budgétaire aiguë mais aussi à assainir les finances publiques de manière durable.
Les mesures litigieuses (...) assurent un équilibre entre les exigences de l’intérêt
général et le besoin de protéger les droits patrimoniaux des salariés et des retraités, eu
égard à l’ampleur limitée des réductions et au fait que les allocations de fête et de
congés ont continué à être versées à ceux dont la rémunération ou la pension ne
dépassent pas 3 000 ou 2 500 EUR, même si elles sont réduites par rapport aux
montants antérieurs (...). Compte tenu de ce qui précède, la législation litigieuse n’est
pas contraire à l’article 1 du Protocole no 1 ni au principe de proportionnalité garanti
par l’article 25 § 1 d) de la Constitution (...). Il n’y a pas non plus violation du
principe de la sécurité juridique car le droit à recevoir une rémunération ou une
pension d’un montant déterminé n’est garanti par aucune disposition constitutionnelle
ou autre et il n’est pas exclu de les faire varier en fonction des circonstances du