Concilier sécurisation et développement routier avec préservation d

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Concilier sécurisation et développement
routier avec préservation d’espèces
faunistiques et floristiques patrimoniales :
le cas de la route du littoral (RN1) sur l’île
de La Réunion
JY. Kernel*, M. Souquet*, C. Poinsot*
*Biotope – www.biotope.fr
- pôle Recherches et Développement,
22 bd Maréchal Foch, 34140 Mèze
- Agence Océan Indien, 969 chemin Cent
Gaulettes, 97440 Saint-André. [email protected]
La route du littoral (RN1) (Réunion – France)
est le seul itinéraire permettant une liaison
rapide entre Saint-Denis et l’ouest de la
Réunion. Cette 2x2 voies longe de hautes
falaises sur environ 13 km, et est soumise à
des aléas importants d’éboulements, notamment après des intempéries. Le projet
consiste en la pose de 440 000 m² de filets
pour garantir la sécurisation des nombreux
usagers (>40 000 véhicules/jour).
Cette section de route est au pied d’un écosystème de
configuration unique à l’échelle de l’Océan Indien. Des
falaises littorales volcaniques extrêmement instables,
d’une hauteur de plus de 200 m par endroits, surplombent cette infrastructure fréquentée lien entre la ville
du Port et le Chef lieu du Département. Les falaises
abritent des formations végétales remarquables où
sont présentes de nombreuses espèces indigènes,
endémiques et protégées de faune et de flore (Mahot
rempart Hibiscus columnaris, Bois puant Foetida
mauritiana, etc.), très peu représentées à l’échelle de
l’île. Ce site est également référencé comme exceptionnel pour la nidification d’oiseaux marins (Pailleen-Queue, Puffin de Baillon, Puffin du Pacifique) et il
est le dernier lieu connu de stations de certaines espèces végétales (Bois de senteur blanc Ruizia cordata,
Liane Mucuna gigantea) ce qui lui confère un intérêt
d’envergure local, régional, mais également international en termes de biodiversité.
Dans le cadre de ces travaux de sécurisation,
le bureau d’études Biotope a été mandaté
pour concilier «la mise en sécurité du tracé de
la route du littoral et la préservation de la
faune et de la flore patrimoniale », en tant
que « référent environnement » auprès de la
Direction Départementale de l’Equipement
(DDE) Maître d’Ouvrage et d’Œuvre de
l’opération (MOE).
Extrait de la cartographie des espèces protégées recensées sur les parois.
Paille-en-Queue dans son nid
Déroulement de la mission
Pour mener à bien cette mission de référent environnement
(Encart 1), Biotope qui a également participé aux phases d’études
préalables (étude d’impact) est intervenu dans la phase
préparatoire de ces travaux, en participant à l’affinage du projet
technique, à l’élaboration des clauses environnementales des DCE,
la phase de consultation et de sélection des entreprises du point de
vue environnemental ; puis pendant les travaux à travers la
formation du personnel, et des interventions sur le chantier mais
aussi auprès de l’ensemble des acteurs de l’environnement
régional et de la société civile. Un suivi a été instauré afin de
vérifier l’efficacité de ces mesures.
Encart 1 : Démarche du référent environnement Biotope :
II.1.
Phases avant travaux
- Phase projet
- Phase d’élaboration des DCE
- Phase de consultation des entreprises
II.2.
Phases travaux- Formation et Interventions sur le terrain
- Phase de formation
- Phase travaux au sol
- Phase de travaux in situ
II.3.
Suivi et bilans
- Etude avifaune complémentaire
- Suivis et l’élaboration des bilans (bilan à 1 an et à 4 ans)
Résultats
Après une phase d’inventaire précise et de recensement des espèces concernées,
des adaptations sur les filets ont été réalisées en phase d’élaboration du projet
(PRO) afin de permettre le maintien de la fonctionnalité «habitat de nidification»,
des falaises et la préservation de la flore patrimoniale. Dès nomination des
entreprises, un livret a été édité et diffusé auprès de l’ensemble des personnes
intervenant sur le chantier de sécurisation de la falaise.
Des dispositifs de protection des espèces végétales lors de la pose des filets et
des dispositifs d’emmaillotages en tête de falaises ont été imposés dans les
cahiers des charges aux prestataires (cf. schéma).
Des dispositifs pour les Puffins ont été mis en œuvre. Dès la pose du premier filet
en grillage, les experts en cordée ont découpé une ouverture dans la maille, de
façon à ouvrir un accès au nid situé dans la roche. Cette fenêtre est ensuite
équipée d’un tube grillagé qui est raccordé au filet ASM (Anti Sous Marin), ce qui
sécurise l’accès pour les oiseaux qui ne risquent pas ainsi de se retrouver piégés
entre roche et grillage. Mais ce dispositif - invisible de la route - ne peut être
employé que lorsque le filet est très proche de la paroi, sans quoi le risque de
chutes de pierre est trop grand et la pose trop délicate.
En complément de ces ouvertures, des nichoirs artificiels propices
notamment pour le Paille-en-Queue ont été posés (cf. photo).
En parallèle et durant l’ensemble de la mission, un travail de
concertation est animé en permanence par Biotope et la MOE sur
les questions environnementales, avec l’ensemble des acteurs de
la gestion des milieux naturels à la Réunion et en particulier avec
la DIREN et les associations naturalistes au travers de réunions
spécifiques. De nombreux contacts avec des spécialistes régionaux
de la faune et de la flore ainsi qu’avec les entreprises de terrain
ont également été conduits de façon à adapter les dispositifs
proposés.
L’ensemble de ces aménagements fait et fera l’objet de suivi
programmé sur 5 ans.
La réussite de cette mission tient particulièrement à l’ensemble
des adaptations de chantier que les experts de Biotope ont
engendré avant et pendant la phase travaux et qui ont permis de
préserver des colonies d’oiseaux et des espèces végétales
protégées. L’occupation des nichoirs artificiels reste en 2007 de
l’ordre de l’anecdotique, les oiseaux ayant préféré se rabattre sur
des secteurs de ravine encore préservés.
Bois de senteur blanc
Nichoir
La volonté du maître d'ouvrage a permis l'engagement de cette
démarche et la mise en place de l'ensemble de ces mesures même
si la compréhension sociale de l'intégration environnementale a
été difficile compte tenu des enjeux de sécurité sous-tendus par le
projet.
Recherche & Développement
©2007
Ivan Martin-Chef du SGR
[email protected]
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