Astronomie versus astrologie
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ancienne, et la « mère » de l'astronomie actuelle et qu'elle reçut
même le nom de « science des sciences ». Dès les premières
civilisations, les hommes ont observé et étudié le ciel, non
seulement pour y déchiffrer des présages – ils croyaient que la
volonté des dieux se manifestait à travers les phénomènes
célestes – mais encore pour mesurer le temps, les cycles du
soleil et de la lune ayant servi de base aux premiers
calendriers. Ainsi naquirent les concepts de jour, nuit, mois,
année, saison, etc. Le traité systématique d'astrologie le plus
connu – et l'un des plus anciens – est l'Almageste de Ptolémée,
écrit à Alexandrie vers l'an 150 de notre ère. Il est encore
réputé de nos jours comme la « bible de l'astrologie ».
Dans Mémoires d'Hadrien, comme dans l'Antiquité,
l'astrologie se fonde sur une conception unitaire du monde, le
microcosme étant de même matière que le macrocosme :
« puisque l'homme, parcelle de l'univers, est régi par les
mêmes lois qui président au ciel, il n'est pas absurde de
chercher là-haut les thèmes de nos vies, les froides sympathies
qui participent à nos succès et à nos erreurs » (MH, p. 162).
Pour Marullinus, « le monde était […] d'un seul bloc » (ibid.,
p. 40) ; le vieillard lit dans les astres comme il lit dans la
paume de l'enfant, croyant y trouver une « confirmation des
lignes inscrites au ciel ». La fracture entre l'homme et l'univers
ne s'est pas encore produite. Voilà ce qui explique pourquoi
Marullinus construit le thème de la nativité de son petit-fils,
pourquoi Hadrien cherche chez les astrologues la signification
de ses rêves et observe les mouvements des constellations,
croyant voir une « étrange réfraction de l'humain sur la voûte
stellaire » :
Je ne manquais pas, chaque soir d'automne, de saluer au sud
le Verseau, l'Échanson céleste, le Dispensateur sous lequel
je suis né. Je n'oubliais pas de repérer à chacun de leurs
passages Jupiter et Vénus qui règlent ma vie, ni de mesurer
l'influence du dangereux Saturne. (MH, p. 162)
Le point culminant de cette étroite relation entre l'être
humain et le cosmos nous est montré dans l'une des plus belles
pages du roman, à travers la description de l'extase de la nuit