« C’est la communication entre les équipes qui permettra de construire autour des patients un cadre de soins adapté » Entretien avec le Dr Sarah Dauchy
Centre national de ressources (http://www.parlons-fin-de-vie.fr/)
Les difficultés sont ensuite d?ordre psychologique ou psychiatrique. L?existence de troubles cognitifs
peut rendre l?information et l?obtention du consentement problématiques, ce qui peut être majoré
par des carences éducatives parfois sévères en ce qui concerne l?éducation à la santé. Un patient
instable émotionnellement aura plus de mal à accepter les soins et à se conformer à leurs
contraintes.
Enfin, les difficultés sont en termes de collaboration pluridisciplinaire. La prise en charge d?une
double affection physique et psychiatrique implique la collaboration d?équipes de compétences très
distinctes et de fonctionnement - objectifs, temporalités, etc. - très différents également. A défaut
d?une excellente communication et de la réalisation d?un projet de soin commun, les équipes se
retrouveront rapidement en difficulté des deux côtés.
Pouvez-vous nous donner un ou deux exemples de situations pour
lesquelles vous avez mené une réflexion éthique ?
Le cas suivant illustre bien cette problématique, et avait fait l?objet d?une saisine du Comité
d?Ethique de la Ligue Nationale contre le Cancer. [5] Une patiente âgée de 46 ans, adressée par
l'hôpital de G. pour une tumeur du massif facial, carcinome mucoépidermoïde, présentait une
pathologie psychiatrique mal étiquetée, soit une « psychose infantile» ancienne, responsable d'une
dégradation sociale majeure et d'une vulnérabilité certaine. Elle requérait un traitement chirurgical
lourd, sous peine de l'extension d'une tumeur potentiellement très symptomatique notamment en
termes de douleur. La difficulté posée par cette patiente était son consentement très aléatoire, avec
une demande de soins intermittente mais un refus des traitements, tant psychiatriques que
cancérologiques. Ce refus était intriqué à ses troubles psychiatriques, en particulier à ses
fluctuations d'angoisse avec instabilité et impulsivité. Précisément, ces troubles psychiatriques, dont
le caractère curable est loin d'être évident, étaient aussi l'élément qui mettait en péril le succès de
l'intervention chirurgicale lourde nécessaire, qui pourrait aussi lui laisser d'importantes séquelles
esthétiques et fonctionnelles, qu'elle n'était peut-être pas capable de supporter.
Mme B. semblait comprendre les informations données, a demandé un traitement, surtout quand
elle était symptomatique, mais a retiré son consentement à plusieurs reprises, et notamment le
matin même de l'opération prévue.
Cette situation a posé la difficile question du consentement aux soins des malades mentaux, alors
même que le refus est sans doute lié aux troubles mentaux, mais sans garantie de leur curabilité, et
avec un risque de catastrophe médicale en cas de mauvaise acceptation d'un traitement lourd chez
un patient très vulnérable.
Ce cas soulevait un questionnement éthique d'autant plus aigu que le refus de la thérapeutique
proposée pouvait sembler entaché d'un défaut de discernement chez un malade en état de
souffrance, dans un état de vulnérabilité particulière.
Quels messages transmettriez-vous aux professionnels confrontés à ces
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