Le circuit mon”taire keyn”sien dans un cadre th”orique et compt

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Le circuit monétaire keynésien dans un cadre théorique et comptable cohérent
Marc Lavoie
Conférence de l’Association Charles Gide
John Maynard Keynes: bilan et perspectives
UQAM, Montréal, juin 2002
Contrairement à ce qui se fait en Amérique, les enseignants français ont toujours apporté une
grande importance au cadre comptable de leurs théories économiques. Il n’est que de consulter
les manuels français pour le constater. Même dans les manuels avancés, celui de Malinvaud
(1982) en étant le meilleur exemple, de longs développements sont consacrés à une présentation
assez complète des diverses comptabilités. Par contre, les manuels américains, sauf les plus
anciens comme ceux de Paul Samuelson, ne présentent ni la comptabilité nationale ni la
comptabilité d’entreprise, ni a fortiori la comptabilité des flux financiers ou celle des bilans.
Depuis plus de deux décennies, Wynne Godley, ancien directeur du Department of
Applied Economics à l’Université de Cambridge, s’est employé à développer une théorie
économique construite à partir d’un cadre comptable cohérent, qui, comme le suggérait Jean
Denizet (1969), fasse la jonction entre la comptabilité des flux et celle des stocks, tout en
intégrant adéquatement la monnaie, à la fois sous l’angle du crédit bancaire et sous celui du
choix de portefeuille des ménages. Bien que la plupart de ses idées aient été présentées il y a déjà
plus de vingt ans (Godley et Cripps 1983), ce n’est que tout récemment que Godley est parvenu à
trouver une façon adéquate de représenter sa théorie macro-économique sous la forme d’un tout
entièrement cohérent (Godley 1996, 1999a).
Les travaux de Godley s’inscrivent clairement dans la tradition des post-keynésiens de
l’école de Cambridge, Godley ayant été marqué particulièrement par la pensée de Kaldor. Les
parentés post-keynésiennes sont bien visibles, qu’il s’agisse de sa vision monétaire ou de sa
théorie de la fixation des prix. Pourtant, jusqu’à tout récemment ses travaux avaient été presque
complètement laissés dans l’ombre par l’hétérodoxie keynésienne. Même dans la toute récente
histoire de l’économie post-keynésienne rédigée par John King (2002), le nom de Godley
n’apparaît que deux fois, sans qu’on sache ce qu’est sa contribution. Pourtant, comme on va le
voir, sa théorie est intimement liée à une vision circuitiste de la monnaie endogène.1
L’objectif du présent texte est de présenter la méthode prônée par Godley, tout en
montrant comment sa méthode permet de bien représenter les principales étapes du circuit
monétaire, et par là-même comment sa méthode permet de mieux comprendre la théorie de la
monnaie endogène, quel que soit le cadre institutionnel dans lequel on se trouve. L’autre objectif
est dé montrer que Godley a réussi là où bon nombre d’économistes ont échoué: sa méthode
permet de faire la jonction entre la monnaie-flux, celle qui apparaît en début de période au
moment où les crédits sont consentis aux entreprises, et la monnaie-stock, celle qui sursoit en fin
de période et qui résulte des choix de portefeuille.
1
Je l’ai relevé, mais trop brièvement, dans Lavoie (1987, p. 77).
2
Les matrices de stocks
Commençons par le plus simple, soit la représentation du bilan des actifs, c’est-à-dire la matrice
des stocks. Celle-ci ressemble au tableau d’ensemble des actifs présenté par Malinvaud (1982, p.
17), mais la présentation de Godley est légèrement différente de la représentation
conventionnelle, mais à mon avis elle est aussi plus éclairante.
Supposons une économie à trois secteurs, le secteur des ménages, celui des banques, et
celui des entreprises non financières, c’est-à-dire les entreprises de production. Nous laissons de
côté pour l’instant tout le secteur des administrations, notamment la banque centrale. On suppose
que seules les entreprises disposent de capital matériel, et qu’elles sont les seules à émettre des
actions e (dont le prix est pe). Il suit que les banques constituent un service public, qui
n’accumule aucun fonds propres, et dont le seul élément au passif est constitué par la monnaie
bancaire M. Le tableau 1 représente une telle économie. Les actifs prennent un signe positif,
tandis que les dettes (comme les prêts L requis par les entreprises) ont un signe négatif. Puisque
les bilans sectoriels doivent être cohérents les uns avec les autres, il suit que la somme des
éléments de chaque ligne doit être égale à zéro lorsqu’il s’agit des actifs financiers; la créance
d’un agent est la dette de l’autre. Dans le cas du capital tangible ou matériel, ici le capital fixe K
et les stocks d’inventaires IN, ceci n’est évidemment pas le cas.
TABLEAU 1 ICI
Nous voulons également que les éléments des colonnes aient une somme nulle. Pour
chaque secteur, il nous faut donc rajouter un terme qui va permettre d’équilibrer les comptes
sectoriels. C’est le solde ou la valeur nette de chaque secteur. C’est ici que la présentation de
Godley est quelque peu iconoclaste, du moins dans le cas des entreprises, puisque la valeur nette
des ménages – leur richesse – ne pose pas problème. Plus la valeur à la bourse des actions en
circulation est élevée, plus petite doit être la valeur nette de l’entreprise. Ceci est quelque peu
surprenant. Nous savons que le rapport d’évaluation, qui s’appelle aussi le ratio q de Tobin, est
défini par l’équation:
q = (e.pe)/(K + IN - L)
Donc plus élevé est le rapport d’évaluation, plus petite est la valeur nette de l’entreprise.
De fait, quand le ratio q est supérieur à l’unité, ce qui signifie que les participants au marché
boursier surestiment la valeur des entreprises, la valeur nette des entreprises est négative. Ceci
peut sembler bizarre, mais le Tableau 1 est la seule façon cohérente de représenter les bilans
sectoriels vus d’un point de vue macro-économique aux prix de marché ou au coût de
remplacement. Autrement dit, la valeur nette des entreprises selon Godley est égale à:
Vf = (K + IN) - (L + e.pe)
La mesure selon Godley doit inclure la valeur boursière des actions dans les dettes des
entreprises. Dans la représentation traditionnelle, la valeur boursière des actions n’est pas
soustraite des actifs de l’entreprise, et donc la valeur nette de l’entreprise serait égale à:
Vfcon = (K + IN) - L
La représentation conventionnelle pose problème, comme le reconnaît d’ailleurs
Malinvaud. Après avoir présenté sa comptabilité des bilans, Malinvaud (1982, p. 13-14) admet
qu’elle “suppose que l’évaluation des droits (actions notamment) dans les patrimoines des agents
propriétaires est en parfaite concordance avec l’évaluation des actifs dans les bilans des
3
entreprises en question. C’est une condition sévère ... [qui] n’est pas satisfaite dans la réalité
quand les propriétaires d’une société cotée en Bourse se réfèrent aux cours de Bourse: car la
capitalisation boursière (somme des valeurs des actions) est rarement égale à l’actif net résultant
du bilan de cette société”. La logique prônée par Malinvaud voudrait que le la valeur des actions
apparaissant au bilan des ménages soit égal à la valeur nette comptable des entreprises, et non à
celle du marché.2 Ceci est illogique. Autrement dit, la représentation conventionnelle n’est
valable que dans un cas particulier (quand le ratio d’évaluation est égal à l’unité). Celle de
Godley est valable dans tous les cas. Ceci étant dit, il faut préciser que dans les modèles de
Godley (1996, 1999a), aucune des équations de comportement ne repose sur cette définition.
Pour les relations de comportement, seule importe la richesse nette des ménages, qui en toute
logique, doit inclure l’évaluation boursière des actifs, comme on le suppose ici.
Prenons le cas des États-Unis. Les comptes de flux financiers américains du 4ème
trimestre de 2001 montrent que le ratio d’évaluation des sociétés non-financières et non agricoles
est de 1,30. La valeur nette des entreprises, en milliards de dollars, selon la mesure
conventionnelle est:
Vfcon = (K + IN) - L = 17526 - 9177 = 8349
où les actifs comprennent à la fois des actifs tangibles et des actifs financiers.3
Mais la valeur boursière des actions émises par ces sociétés et qui sont en circulation est
égale à 10887 milliards. La valeur nette des entreprises qui apparaîtrait dans notre matrice serait
donc de:
Vf = (K + IN) - (L + e.pe) = 17526 - (9177 + 10887) = - 2538
Les matrices des flux d’opérations
La matrice des flux d’opérations possède des caractéristiques encore plus tranchées que celle des
bilans. Toutes les lignes doivent individuellement avoir zéro pour somme; ces lignes représentent
les flux de transactions pour chaque actif ou pour chaque type d’opération. De plus, les éléments
de chaque colonne, chaque colonne représentant encore une fois un secteur, doivent avoir zéro
pour somme: c’est la contrainte de budget de chaque secteur. Cette contrainte illustre comment
les écarts entre les flux de dépenses et les flux de revenus ou de transferts engendrent des
modifications aux stocks de créances ou de dettes. Cette comptabilité matricielle permet de
s’assurer que rien n’est omis: tout flux provient de quelque part et doit aller quelque part. Sans
cette armature, il est facile, du moins dans un modèle de grande échelle, d’oublier un détail, et
ainsi d’en arriver à des conclusions erronées. Godley et Shaikh (2002) démontrent d’ailleurs que
c’est le cas du modèle néoclassique habituel à la Patinkin, au sein duquel les entreprises émettent
des obligations pour se financer mais dont les paiements en intérêts sont omis. De telles erreurs
ne seraient pas possible avec l’approche matricielle prônée par Godley. Avec l’approche
matricielle, comme le dit Wynne Godley (1996, p. 7), “il n’y a pas de trou noir”.
La présentation matricielle proposée par Wynne Godley, et qu’on trouve sous une forme
très similaire dans un texte de Tobin et de ses associés (Backus et al., 1980), aide à comprendre
que s’il y a N lignes, alors il n’y a que N-1 équations indépendantes. Ceci signifie que la Nième
équation peut être laissée de côté. De fait, lorsque le modèle est modélisé et soumis au test de la
2
C’est aussi le cas du post-keynésien Dalziel (2001, p. 77).
3
Voir www.federalreserve.gov/releases/z/.
4
simulation, il est nécessaire de mettre de côté cette dernière équation, faute de quoi le modèle
sera surdéterminé et l’ordinateur refusera de résoudre le modèle. Ceci fait penser à la fameuse loi
de Walras, et de fait, certains auteurs néoclassiques ont l’habitude de présenter cette
caractéristique comme une émanation de la loi de Walras. Dans les modèles néoclassiques
habituels, il est courant d’ignorer le marché des titres (obligations ou actions), et de postuler que
la recherche de l’équilibre sur les marchés financiers va se faire par l’intermédiaire du marché de
la monnaie.
Ce choix n’est pas sans conséquences. Qu’est-ce que le marché de la monnaie? Quelle est
sa signification. Par exemple, dans le cas où la monnaie est constituée par des dépôts bancaires,
qu’est-ce que “l’offre de monnaie”? Comme le dit avec ironie Charles Goodhart (1984, p. 268),
“de quelle façon les banques offrent-elles des dépôts à vue?”.Comment peut-on affirmer sans
sourciller que l’offre et la demande de monnaie sont véritablement différentes l’une de l’autre? Il
semble bien qu’il soit plus raisonnable d’évacuer le prétendu marché de la monnaie, et de
raisonner en terme d’offre et de demande de titres, en supposant que l’équilibre sur les divers
marchés de titres est obtenu à l’intérieur du cadre de la période, grâce à des fluctuations dans le
prix de ces actifs.
Une matrice des flux d’opérations avec monnaie bancaire
Prenons pour exemple la matrice des opérations du tableau 2, qui est la contrepartie de la matrice
des bilans du tableau 1. Le tableau 2 est la matrice légèrement modifiée du modèle de Lavoie et
Godley (2001-2002). Comme on l’a déjà dit, le secteur gouvernemental et sa banque centrale
sont exclus, comme dans le modèle wicksellien de crédit pur. Le secteur bancaire est quant à lui
réduit à sa plus simple expression, comme on l’a déjà dit, n’accumulant aucun fonds propre. Ceci
pourrait être le cas si les profits des banques étaient entièrement versés sous forme de
dividendes, mais on postule ici que même ceux-ci sont inexistants, et les taux prêteur et
emprunteur sont identiques. Le secteur productif est plus réaliste. Grâce à ses ventes, il fait des
profits nets de ses frais d’intérêt, et une partie de ces profits (FU) sont conservés en entreprise, et
il émet des actions. Les ménages reçoivent des salaires W, des dividendes FD et des intérêts sur
les dépôts accumulés à la période précédente. Ils peuvent consommer leurs revenus ou acquérir
de nouvelles créances. Comme toutes les matrices de flux d’opération, les éléments de chaque
ligne et de chaque colonne doivent avoir zéro pour somme.
TABLEAU 2 ICI
Regardons avec davantage d’attention le secteur des entreprises non-financières, qui est
plus complexe puisqu’il comprend un compte courant et un compte capital. Les deux comptes se
doivent d’arriver à zéro. Toutes les variables avec un signe négatif sont des emplois de flux
financiers; toutes les variables accolées à un signe positif sont les ressources financières du
secteur. Dans le compte courant, les flux financiers avec un signe positif sont les ventes de bien
de consommation et d’investissement. Les produits qui ont été fabriqués mais qui n’ont pas été
vendus sur les marchés sont réputés avoir été acquis à leur coût de production. Ils apparaissent
donc avec un signe positif au compte courant. Ces flux positifs doivent être exactement
compensés par l’emploi de ces ressources: les paiements en salaires, dividendes et intérêts versés
par les entreprises, plus les sommes conservées en entreprise – le profit non distribué.
Au compte capital, l’acquisition de capital fixe et de nouveaux stocks d’inventaires doit
être financée par les profits non distribués, l’émission de nouvelles actions au prix courant, et un
endettement supplémentaire auprès des banques.
La matrice illustre certaines des affirmations des post-keynésiens, du moins certains
d’entre-eux, notamment les “horizontalistes” et les circuitistes. La première affirmation, c’est
5
que l’offre et la demande de monnaie sont nécessairement égales. Nous avons déjà discuté de
cette égalité dans une section antérieure. La seconde affirmation, c’est que le montant des prêts
fournis par les banques est nécessairement égal au montant des dépôts conservés par les ménages
(dans un modèle simple comme celui des tableaux 1 et 2). Quel est le mécanisme qui permet
cette seconde égalité?
Cette question a fasciné de nombreux auteurs, et ce depuis longtemps.4 A première vue, il
semblerait que la demande de monnaie et l’offre de crédit sont déterminés par des mécanismes
complètement indépendants. Dans le modèle de Lavoie et Godley (2001-2002) par exemple, la
demande de crédit en fin de période dépend du niveau des dépenses d’investissement qui n’ont
pas été financées par l’émission de nouvelles actions ou par les profits non distribués. D’autre
part, la demande de dépôts bancaires est déterminée par un mécanisme de choix de portefeuille,
qui s’inspire des équations proposées par Brainard et Tobin (1968). Chez Godley, la demande de
monnaie et la demande de titres est une certaine proportion de la richesse qui est prévue en fin de
période, modulée par le revenu anticipé, le taux d’intérêt sur les dépôts, et le taux de rendement
sur les titres de la période antérieure (ou le taux de rendement anticipé, si on veut prendre le
risque de modéliser de telles anticipations).
Le fait que les mécanismes de création de prêts et de demande de monnaie semblent
complètement indépendants a conduit certains auteurs à prétendre qu’il pourrait exister un
déséquilibre entre la quantité de prêts consentis par les banques aux entreprises et la quantité de
dépôts bancaires demandés par les ménages. A mon avis, ce point de vue est erroné. Il repose sur
une illusion, celle qui voudrait que les besoins en prêts des entreprises soient parfaitement
indépendants de la demande de monnaie des ménages. Ces deux types de décisions sont
apparemment indépendants, mais dans les faits, en raison des contraintes de cohérence
comptable illustrées par les matrices sectorielles de la macroéconomie, les résultats de ces deux
décisions sont liés entre eux. La décision des ménages de détenir davantage d’encaisses
monétaires a un effet compensatoire tout à fait équivalent sur les besoins de prêts bancaires des
entreprises. Dans le cadre du petit modèle des tableaux 1 et 2, la monnaie détenue par les
ménages ait nécessairement égale aux prêts requis par les entreprises.
Si les ménages désirent détenir une proportion plus grande de monnaie, les banques
devront accroître les prêts consentis aux entreprises. Ceci peut se faire sans qu’il n’y ait aucun
changement au taux d’intérêt sur les prêts ou sur les dépôts. De fait, l’ajustement se fera
entièrement par la chute du prix des actions pe et donc par la hausse éventuelle du taux de
rendement sur les actions (au moment de la chute, le taux de rendement réalisé de la période
courante baisse). Par contre, si les banques s’inquiètent du taux d’endettement des entreprises, il
est possible qu’elles décident d’augmenter le taux d’intérêt. Mais cette décision d’accroître les
taux d’intérêt prêteurs est discrétionnaire. Elle ne provient aucunement d’un quelconque
mécanisme de marché. Il en va de même des décisions des banques centrales d’accroître leur
taux d’escompte quand l’économie est en expansion. Cette décision est entièrement
discrétionnaire; elle ne relève aucunement des prétendues forces du marché.
La matrice des opérations et la théorie du circuit
La matrice des flux d’opérations permet de comprendre parfaitement le fonctionnement du
circuit monétaire. Plaçons nous dans le cadre d’une économie verticalement intégrée, d’où les
consommations intermédiaires de marchandises sont exclues. Ainsi, lorsque le secteur des
entreprises produit un bien, il ne le produit qu’à l’aide du stock de capital déjà en place et grâce
4
Voir Goodhart (1984, pp. 232-3) par exemple.
6
au travail de ses travailleurs. Supposons, comme il est raisonnable de le faire, que les paiements
en intérêts et en dividendes ne sont versés qu’en fin de période.
Au début du circuit, au début de la période de production, les entreprises doivent
emprunter
les montants qui leur sont nécessaires pour payer leurs employés. Ainsi, le montant emprunté
pour la période courante est égal au montant des salaires de la période courante.5 C’est la
première étape du circuit. Notons qu’il est indifférent que les sommes empruntées ait pour
objectif la production de biens de consommation ou de biens d’investissement.
Ainsi, lors de cette toute première étape du circuit, les entreprises sont débitées d’un prêt
consenti par les banques, tout en étant simultanément créditées d’un dépôt bancaire. Mais cette
situation, sauf circonstances exceptionnelles, ne peut durer qu’un temps très court. En général,
les entreprises ne tirent sur leur ligne de crédit que lorsqu’elles doivent procéder à des
paiements.6 Peu après l’apparition du prêt, les entreprises transfèrent ces fonds aux ménages qui
leur ont fourni leur force de travail. Ceci se fait soit par l’émission de chèques soit par voie
électronique, comme c’est maintenant la pratique courante. Au moment même où ces fonds sont
transférés aux ménages, ils entrent dans la composition des revenus des ménages. Et donc, avant
que ces revenus n’aient été dépensés, ils constituent nécessairement une épargne de la part des
ménages. Ainsi, du moins avant la seconde étape du circuit, celle durant laquelle les revenus
reçus seront dépensés, le montant entier des dépôts nouvellement acquis constitue une épargne
des ménages.
Tout ceci est illustré au tableau 3, qui est un tableau 2 simplifié par l’omission des lignes
qui ne jouent aucun rôle. Les exigences que nous nous sommes imposés, à savoir que chaque
ligne et chaque colonne de la matrice des flux d’opération doit avoir zéro pour somme. Les biens
produits mais encore invendus constituent une accumulation de stocks d’inventaire IN. C’est un
principe comptable primordial que les stocks d’inventaires doivent être évalués à leur coût de
production ou à leur coût de remplacement. Dans le cas présent, dans le cadre de notre économie
verticalement intégrée, le coût de production des stocks est égal aux salaires versés aux ménages
dans la période. Il suit que la valeur de l’accroissement des stocks est égal aux salaires W qui ont
été versés aux ménages, comme on peut le lire au compte courant des entreprises.
TABLEAU 3 ICI
Passons maintenant au compte capital des entreprises. Il est clair que la valeur de
l’investissement dans les stocks doit être entièrement financé, dans ce premier temps, par les
nouveaux prêts consentis aux entreprises par le secteur bancaire. Le tableau 3, si on le compare
au tableau 2, aide à comprendre la distinction absolument fondamentale que font à la fois les
circuitistes et les post-keynésiens entre le financement initial et le financement final. Cette
distinction a été maintes fois relevées par Augusto Graziani (1985), mais aussi par Paul
Davidson (1982, pp. 48-49) lorsqu’il distingue entre construction finance, qui a lieu en début de
période, lorsque la production a lieu, et le investment funding, qui a lieu en fin de période,
Dans un modèle complet, on peut montrer que les entreprises ne peuvent distribuer leurs profits que si
les stocks d’inventaires sont financés par endettement bancaire.
5
Dans des circonstances exceptionnelles, une entreprise va tirer sur sa ligne de crédit même si aucune
dépense n’est prévue. Un cas récent est celui de Nortel Networks, une compagnie canadienne.
L’équipementier géant s’était prévalu d’une ligne de crédit garantie, et avait emprunté 1,75$ US le 9 avril
2002, somme qu’elle a finalement entièrement remboursée le lendemain. La ligne de crédit venait à
échéance le 10 avril et Nortel n’avait pas encore obtenu l’assurance que le syndicat bancaire prolongerait
celle-ci. La somme empruntée a été remise lorsque Nortel a conclu une entente avec les banques, lui
garantissant une ligne de crédit quelque peu réduite (Le Devoir, 11 avril 2002, p. B1).
6
7
lorsque les différentes décisions de portefeuille se dénouent et lorsque les entreprises encaissent
leurs profits.
En outre, le tableau 3 définit la relation triangulaire entre les entreprises, les banques et
les ménages, qui est fréquemment évoquée par les circuitistes dijonnais et aussi plus récemment
par Parguez et Seccareccia (2000: 101). Selon Gnos et Rasera (1985, p.10), par exemple, “la
monnaie créée est ‘triadique’ .... La monnaie pour exister doit être définie sur ces trois pôles,
simultanément”.
La transition du tableau 3, qui représente la première étape du circuit, vers le tableau 2,
qui représente la seconde et dernière étape du circuit, s’accomplit quand les entreprises
acquièrent les biens d’investissement et lorsque les ménages se défont des encaisses monétaires
acquises grâce aux salaires, mais aussi grâce aux dividendes et aux intérêts reçus dans la période,
sur la base des profits de la période précédente et sur la base du stock de dépôts bancaires détenu
à la fin de la période précédente. Au fur et à mesure que les ménages se défont de leurs dépôts
bancaires, les entreprises récupèrent les leurs, ce qui leur permet de rembourser les prêts
supplémentaires qui leur avaient été consentis en début de période. Les entreprises décident aussi
du nombre de nouvelles actions qu’elles veulent bien émettre (ou même soustraire à la
circulation sur les marchés boursiers). Mais si les entreprises peuvent décider du nombre
d’actions à émettre, es , elles ne peuvent décider du prix pe de ces nouvelles actions et des
actions déjà existantes.
Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’au fur et à mesure que les ménages accroissent
leur consommation, leurs encaisses monétaires décroissent tout comme les besoins en prêts
bancaires de la part du secteur des entreprises de production. De façon assez similaire, lorsque
les ménages se départissent de leurs dépôts bancaires pour acquérir les nouvelles actions émises
par les entreprises, ces dernières peuvent réduire les prêts qu’elles ont contracté pour fins de
production. En d’autres mots, au début du circuit, les nouveaux prêts exigés par les entreprises
sont exactement égaux aux nouveaux dépôts obtenus par les ménages. Puis, comme les ménages
se départissent de leurs dépôts, les dettes bancaires des entreprises diminuent pari passu. Bien
qu’elles soient déterminées par des mécanismes qui semblent indépendants, la demande de prêts
par les entreprises et la détention de monnaie des ménages ne peuvent qu’être égales, du moins
dans le cadre bancaire simplifié qui est le nôtre, avec un seul élément à l’actif et au passif.
La matrice des flux d’opérations avec monnaie banque centrale
Considérons maintenant un autre type d’économie, une économie de services, dans laquelle les
entreprises n’investissent pas. Les entreprises qui fournissent les services ne s’endettent pas, ce
qui permet de supposer qu’il n’existe pas de banques commerciales. On suppose dorénavant
qu’il existe un secteur gouvernemental, avec une banque centrale. Quand le gouvernement doit
financer ses déficits, il émet des bons du Trésor B. Ceux-ci sont des actifs à court terme, dont le
prix est constant et égal à un. Chaque bon procurent un intérêt de rb. Ces bons sont achetés par la
banque centrale et par les ménages. Ceux-ci ont le choix entre détenir des bons qui rapportent
intérêt ou détenir les billets de banque émis par la banque centrale, la monnaie H.
Les flux d’opérations impliqués dans une telle économie simplifiée sont présentés au
tableau 4. Encore une fois, les éléments de chaque ligne et de chaque colonne ont zéro pour
somme. On y voit en particulier que si la banque centrale reçoit des intérêts sur son actif
constitué de bons du Trésor, tandis qu’elle ne paie aucun intérêt sur les billets de banque émis, la
banque centrale fera nécessairement des profits. Il faut donc supposer, comme c’est d’ailleurs le
cas dans la réalité, que la banque centrale reverse tous ses profits au gouvernement.
TABLEAU 4 ICI
8
Dans les modèles développés par Wynne Godley, le nombre d’équations et de variables
est tel qu’il est possible pour la banque centrale de fixer le taux d’intérêt rb de son choix. Les
ménages décident des proportions de leur richesse anticipée qu’ils veulent attribuer au stock de
bons et aux encaisses monétaires, en fonction du taux de rendement des bons rb fixé par la
banque centrale, du revenu anticipé, et de la richesse anticipée en fin de période.
Comment la banque centrale est-elle en mesure de fixer le taux de rendement sur les
bons, quelle que soit la demande de bons des ménages, et quelles que soient les fluctuations du
déficit du gouvernement? La réponse se trouve encore une fois dans les contraintes qu’une
comptabilité cohérente impose à tout modèle, mais aussi dans le comportement qui est attribué à
la banque centrale. Si les ménages désirent conserver une plus forte proportion de leur richesse
sous la forme de bons, la banque centrale devra restreindre sa propre demande de bons, ou même
devra vendre sur l’open market les bons qui sont réclamés par les ménages. De façon symétrique,
si les ménages font preuve d’une forte préférence pour la liquidité et qu’ils désirent se
débarrasser de leurs bons, la banque centrale devra acheter les bons offerts.
Autrement dit, la banque centrale est l’acteur qui “fait” le marché. C’est l’acheteur ou le
vendeur résiduel. La banque centrale vide le marché des bons au prix de son choix, en ayant une
demande nette de bons endogène, demande nette qui est égale à la différence entre l’émission de
bons résultant du déficit gouvernemental et de la dette publique existante d’une part et la
demande de bons des ménages d’autre part. En termes nets, comme le présente Godley (1999a),
quand la banque centrale est intégrée au secteur gouvernemental, l’offre de bons par le secteur
gouvernemental intégré est endogène et égale à la demande de bons des ménages.
Comme dans le modèle avec monnaie bancaire, lorsque les équations de comportement
appropriées ont été incluses, il n’est nul besoin d’ajouter au modèle une équation explicite qui
assure l’égalité entre la demande et l’offre de monnaie (Hd = Hs). Lorsque le marché des bons a
été pris en considération, le prétendu marché de la monnaie doit être laissé de côté. Dans le
modèle informatique, introduire cette équation rendrait le modèle surdéterminé encore une fois,
et le programme informatique refuserait de résoudre le modèle. Il ne peut y avoir de création ou
d’offre de monnaie excédentaire. Ceci est tout le contraire du modèle néoclassique traditionnel,
où le taux de rendement des bons est endogène et l’offre de monnaie exogène.
Dans la formulation habituelle, comme on la trouve chez Tobin (1982, p. 182) et Backus
et al. (1980, p. 267), mais aussi chez certains auteurs post-keynésiens comme Dalziel (2001, p.
104), la banque centrale ou le gouvernement décide de façon arbitraire de la proportion du déficit
qui sera financée par l’émission de bons ou par l’émission de monnaie banque centrale. Dans les
modèles de ces auteurs, ces proportions sont des variables exogènes.
Il en va tout autrement, ou à tout le moins il devrait en aller tout autrement dans un
véritable modèle de monnaie endogène de type post-keynésien ou circuitiste. Le gouvernement
ou la banque centrale ne décide pas à l’avance de la proportion du déficit qui sera monétisée.
Cette proportion dépend des décisions de portefeuille des ménages, selon le taux de rendement
sur les bons fixé par avance par la banque centrale.
Le circuit monétaire et les dépenses gouvernementales
Encore une fois, la matrice des flux d’opération va nous permettre de mieux comprendre
comment la création monétaire et les déficits gouvernementaux sont liés, en en donnant une
interprétation circuitiste. Au début du circuit, le gouvernement ordonne la production de biens et
services au secteur des entreprises. Pour pouvoir payer ces biens, le gouvernement émet des
nouveaux bons, qui sont achetés par la banque centrale. La contrepartie de ces bons, dans les
comptes de la banque centrale, est constituée par les dépôts qui sont crédités au gouvernement.
9
Cette première étape du circuit, comme dans le cas de la monnaie bancaire, est quasi-instantanée.
Les dépôts du gouvernement sont immédiatement versés aux entreprises qui ont fourni ces biens
et services, puis reversés aux ménages qui ont fait le travail ou qui possèdent ces entreprises.
Les encaisses monétaires ainsi créées vont ultimement aboutir dans les mains des ménages.
Tout ceci est illustré à l’aide du tableau 5. Encore une fois les lignes et les colonnes
doivent répondre aux exigences d’une somme nulle. Avant que les ménages ne décident quoi
faire de leurs nouvelles encaisses monétaires, les dépenser ou acquérir des actifs rapportant
intérêts, tous les comptes doivent pouvoir se solder. Il suit, dans le cadre de ce modèle simplifié,
que le déficit ne peut qu’être monétisé, du moins au début du circuit, comme l’affirment les
auteurs dits néo-chartalistes (Wray 1998, ch. 4-5; Mosler et Forstater 1999). Lorsque les
ménages révisent leurs anticipations de revenus et de richesse, en tenant compte du taux de
rendement sur les bons du Trésor, la demande additionnelle de bons provenant des ménages doit
être compensée par une offre additionnelle de bons tout à fait identique, du moins tant et aussi
longtemps que la banque centrale désire conserver le taux d’intérêt sur les bons au niveau
existant. La banque centrale doit vendre aux ménages les bons qu’ils désirent, et ce faisant, la
banque centrale absorbera toutes les encaisses monétaires que les ménages ne souhaitent plus
détenir.
Le circuit monétaire de le cas de la banque centrale européenne
Le modèle décrit par les matrices des deux sections précédentes correspond au système financier
dit anglo-saxon, celui qui existe aux États-Unis, en Grande-Bretagne et au Canada notamment.
C’est un système financier que de nombreux auteurs qualifient de système financier de marché,
parce qu’il repose sur le marché des titres. Quant à moi, je préfère l’appellation d’économie
fondée sur les actifs, puisque les banques, et même les entreprises vendent des titres, les leurs ou
ceux qu’ils avaient préalablement accumulés, lorsqu’elles ont besoin de liquidités.
La plupart des autres pays du monde ont cependant un autre système financier, celui dit
de l’économie d’endettement. Dans ces systèmes financiers les entreprises ont des liens
privilégiés avec certaines banques, et elles ont peu recours au marché des titres, préférant obtenir
les liquidités nécessaires en les empruntant auprès des banques. Quant à ces dernières, elles
empruntent à la banque centrale la monnaie banque centrale qu’elles doivent se procurer, soit
pour répondre aux exigences de réserves obligatoires soit pour fournir aux ménages les billets de
banque qu’ils réclament en échange de leurs dépôts bancaires. Le tableau 6 illustre le cas d’une
économie d’endettement. Les banques commerciales réapparaissent, au côté de la banque
centrale. Pour simplification, on n’a inclus que les lignes de la matrice qui sont pertinentes pour
expliquer la création monétaire dans une économie d’endettement. En particulier, la distinction
entre le compte courant et le compte capital des banques a été omise.
L’économie d’endettement décrite ici est à mon avis une bonne illustration du système
financier régi par le nouveau cadre de l’union monétaire européenne. En Europe, les banques
commerciales prises dans leur ensemble sont endettées vis-à-vis les banques centrales nationales.
De plus, les nouvelles provisions qui régissent le système financier européen sont telles qu’il est
interdit, autant aux banques centrales nationales qu’à la banque centrale européenne, de prêter
directement des fonds aux gouvernements nationaux (régionaux et autres). De fait, il est
formellement interdit aux banques centrales européennes d’acheter directement des titres émis
par les administrations publiques. Par contre, les banques centrales nationales et la banque
centrale européenne ont la possibilité de racheter des titres gouvernementaux achetés par le
secteur privé lors de leur émission, et toutes ces banques centrales européennes peuvent
continuer à faire des avances aux banques. Il suit qu’un gouvernement européen qui subit un
10
déficit budgétaire ne peut financer son déficit qu’en émettant des obligations qui seront placées
sur les marchés financiers ou en obtenant des prêts de la part des banques commerciales ou des
autres institutions financières. Dans le tableau 6, j’ai supposé que les gouvernements financent
leurs dépenses en émettant des bons du Trésor et que ces bons sont achetés par les banques
commerciales. On aurait pu supposer aussi que les banques consentent des prêts directs aux
gouvernements, comme je l’ai fait ailleurs (Lavoie 1992, p. 167).
TABLEAU 6 ICI
Le tableau 6, comme le tableau 5, illustre ce qui advient quand le gouvernement
augmente ses dépenses. Comme on peut le voir à la colonne du secteur gouvernemental, G = B,
ce qui signifie que la dépense est entièrement financée par l’émission d’obligations, comme le
voudrait l’orthodoxie financière. Les entreprises sont payées pour leurs services, et le flux de
revenus revient immédiatement aux ménages, si bien que pour eux Y = G. Normalement, les
banques feraient l’acquisition des bons en créant des dépôts au bénéfice du gouvernement. Ces
dépôts seraient ensuite transférés au compte bancaire des entreprises ayant fournis les services,
puis à celui des travailleurs ou des propriétaires de ces entreprises. Avant la fin du premier temps
du circuit, c’est-à-dire avant que les ménages ne fixent les sommes à consacrer aux dépenses de
consommation, on suppose néanmoins que les ménages décident de transformer une partie de
leurs dépôts nouvellement acquis sous la forme de billets de banque, ne gardant ainsi qu’un
montant M sous la forme d’un dépôt bancaire et un montant H sous forme de monnaie banque
centrale. Il suit que les banques commerciales doivent se procurer les billets de banque désirés
par les ménages auprès de la banque centrale. En supposant que les banques commerciales
désirent conserver les bons obtenus, afin d’améliorer leur liquidité par exemple, ces banques
seraient dans l’obligation de s’endetter davantage auprès de l’une des banques centrales
nationales, ou auprès de la banque centrale européenne. Les avances requises seraient donc A =
H.
Ainsi, l’obligation pour les gouvernements nationaux de se financer uniquement sur les
marchés, ou par des emprunts directs auprès des banques, ne change rien à la logique du circuit
monétaire. La création de monnaie reste endogène, et la proportion du déficit qui est ultimement
monétisée dépend entièrement des décisions des agents, des ménages en particulier. Même si les
diverses conventions signées par les participants à l’union monétaire européenne laisse croire
qu’il est impossible de monétiser les déficits gouvernementaux, il n’en est naturellement rien. La
proportion des déficits qui est monétisée est une variable endogène, qui dépend du taux en autre
chose du taux d’intérêt sur les bons, taux qui relève essentiellement du taux au jour le jour fixé
par la banque centrale européenne.
Conclusion
L’objectif du présent texte était de montrer que l’utilisation systématique des matrices des bilans
et des matrices des flux d’opération évite d’omettre certains flux et permet de prendre en compte
toutes les interdépendances. Le problème avec cette méthode prônée par l’économiste postkeynésien Wynne Godley, c’est qu’elle porte toute l’attention de l’analyse sur ce qui survient en
fin de circuit, à la fin de la période comptable. On peut néanmoins aller au-delà, en utilisant les
matrices des flux d’opération pour retracer ce qui advient en début de circuit. On s’aperçoit alors
que la méthode matricielle proposée par Godley permet de formaliser la théorie du circuit et de
justifier les principales affirmations de la thèse de la monnaie endogène.
Ici, c’est la méthode de Godley que j’ai voulu mettre de l’avant. Sa méthode peut tout
aussi bien s’appliquer dans le cadre des économies ouvertes, mais alors il faut une description
complète d’au moins deux économies, car en raison du principe selon lequel tout flux doit aller
11
ou venir de quelque part, on ne saurait traiter du monde extérieur comme s’il s’agissait d’un
élément exogène du modèle (Godley 1999b, Lavoie 2002). Le lecteur intéressé par la
modélisation de modèles complets, utilisant la méthode prônée, peut se référer aux articles de
Godley (1999a) et Lavoie et Godley 2001-2002). Dans un futur que nous espérons proche, il
pourra aussi lire un livre, présentant une succession de modèles simples, mais de plus en plus
complets et réalistes, intégrant ultimement de façon cohérente à la fois les profits non distribués,
les stocks en inventaire, les gains en capital, et les effets de l’inflation (Godley et Lavoie 2002).
12
Références
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13
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14
Tableau 1: Matrice des bilans sectoriels avec monnaie bancaire
Ménages
Entreprises
Banques

Capital tangible
+ (K + IN)
Prêts
L
+ (K + IN)
+L
0
M
0
Monnaie
+M
Actions
+ e.pe = + E
 e.pe = E
Solde
 Vh
 Vf
0
 (K + IN)

0
0
0
0
0
Compte
Tableau 2: Matrice des flux d’opérations avec monnaie bancaire
MénagesEntr Banques

eprises
Courant
Capital
Courant
Capital
Consommation
C
+C
0
Investissement
+I
I
0
stocks en inventaire
+ IN
IN
0
Salaires
+W
W
0
Profits nets
+ FD
 (FU +FD) + FU
0
 rl.L(-1)
Intérêts sur prêts
Intérêts sur dépôts
+ rm.M(-1)
 des prêts
+ rl.L(-1)
0
 rm.M(-1)
0
+ L
 des dépôts
 M
émission d’actions
  e.pe

0
 L
0
+ M
0
0
+  e.pe
0
0
0
0
0
15
Solde
Investissement en
inventaires
Salaires
Tableau 3: Le circuit monétaire avec monnaie bancaire
MénagesEntr Banques
eprises
Courant
Capital
Courant
Capital
+IN
+W
0
IN
0
W
 des prêts
+ L
 des dépôts
 M

0
0

0
0
 L
0
+ M
0
0
0
16
Tableau 4: Matrice des flux d’opérations avec monnaie banque centrale
Ménages
Entreprises Gouvernement
Banque
centrale
Courant
Capital
Consommation
Dépenses
gouvernementales
PIB (salaires et
profits)
Intérêts
+C
C
0
+G
+Y
T
 en monnaie
 Hh
 en bons
 Bh

0
0
G
0
Y
+ rb.Bh-1
Profits de la
banque centrale
Taxes

rb.Bs-1
+ rb.Bcb-1
0
+ rb.Bcb-1
 rb.Bcb-1
0
+T
0
+ Bs
0
0
0
+ Hcb
0
Bcb
0
0
0
Table 5: Le circuit monétaire avec monnaie banque centrale
Ménages
Entreprises
Gouvernement
Banque
centrale

Courant
Government
expenditures
GDP (wages and
profits of firms)
Change in money
+G
+Y
0
+ H
0
+ Bs
Bcb
0
0
0
0
 H
0
0
G
Y
Change in bills

Capital
0
17
Tableau 6: Le circuit monétaire dans une économie d’endettement européenne
Ménages
Dépenses du
gouvernement
PIB
+Y
 en dépôts
- M
 en billets
- H
Entreprises
+G
Gouvernement
-G
0
0
+ M
0
+ H
+ B
 en avances
0
0

Banque
centrale
-Y
 en bons

Banques
0
- B
0
0
+ A
- A
0
0
0
0
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