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front, comme les Alliés l’ont fait ; (b) utiliser les chars en coordination (radio) avec
l’aviation d’assaut et d’appui au sol (les Stukas) utilisée comme artillerie hypermobile. A
noter que c’est la conjonction de (a) et de (b) qui a fait la différence.2
- Au plan stratégique, ce fut le retour, du côté allemand, mais non du côté allié, à la notion
de guerre de mouvement (par opposition au statisme de la ‘guerre de positions’, c’est-à-
dire aux tranchées et aux fortifications, dont le fameuse Ligne Maginot) – une guerre de
mouvement dont le meilleur exemple est le fameux ‘plan Manstein’3 mis en œuvre en mai
1940 : d’abord, une attaque sur une assez grande échelle au nord par des forces classiques,
sans (beaucoup de) blindés et via la Belgique – et, cette fois-ci, aussi la Hollande –,
comme en 1914. C’était pour faire croire aux Alliés (qui tombèrent dans la piège malgré
les avertissements reçu, entre autres, semble-t-il, des SR suisses4) qu’on assistait à une ré-
pétition du plan Schlieffen de 1914.5 Mais le but véritable était d’attirer les armées alliées
vers le nord, c’est-à-dire dans un guet-apens. Puis, une fois les Alliés engagés à fond en
Belgique, ce fut la percée des chars allemands plus au sud, par des Ardennes réputées in-
franchissables pour eux, suivie d’un très rapide mouvement de faucille – le Blitzkrieg –
vers la Manche. D’où Dunkerque. A noter encore que les forces franco-britanniques dans
le nord s’étaient engagées si profondément en Belgique qu’il ne leur fut pas possible
d’effectuer une volte-face et de se diriger vers le sud, de sorte à contrer la percée des blin-
dés allemands.
- Bien entendu, tactique et stratégie allemandes n’étaient pas indépendantes, mais formaient
un tout cohérent. Par ailleurs, les troupes allemands étaient mieux entraînées, motivées et
encadrées que les troupes alliées.
2 Pour la petite histoire : dans ses écrits des années 1930, Charles de Gaulle a clairement vu
l’importance de (a), mais pas de (b).
3 Erich v. Manstein (1887-1973), qui finit la guerre comme maréchal, était l’un des plus brillants stra-
tèges allemands. En février 1940, il réussit à faire adopter son plan par Hitler.
4 Le personnel navigant suisse sur le Rhin avait remarqué une forte concentration de forces allemandes
bien au sud du théâtre belgo-hollandais, c’est-à-dire à la hauteur des Ardennes.
5 L’essence du plan Schlieffen était, sur le théâtre occidental, un mouvement enveloppant des forces
allemandes à partir du nord – d’où la violation de la neutralité de la Belgique, laquelle violation fournit
la justification morale de l’entrée de l’Angleterre dans la guerre. Le ‘paquet’ devait d’abord être mis
contre la France, l’idée étant de la vaincre en qq semaines, puis de se retourner contre la Russie, en
comptant sur la lente mobilisation de cette dernière (mais elle fut plus rapide que prévu - voir plus
loin). Après avoir percé au nord, les armées allemandes sur le théâtre occidental devaient marcher
ensuite vers le sud, pour se rabattre ensuite vers l’est en passant à l’ouest de Paris, de sorte à prendre
les forces françaises dans une nasse et à les pousser vers l’est, c’est-à-dire en particulier vers la fron-
tière suisse. Le plan ne réussit pas parce que les Allemands n’avaient en fait pas assez d’hommes mal-
gré l’utilisation des réservistes, et aussi parce qu’à un moment crucial ils envoyèrent une partie de
leurs forces en Prusse orientale menacée, plus tôt que prévu, par une offensive russe (laquelle échoua
d’ailleurs avant que les renforts n’arrivent… - batailles des Lacs de Mazurie et de Tannenberg, sous le
commandement de Hindenburg et Ludendorff). A l’ouest, les forces allemandes se rabattirent donc à
l’est de Paris. En outre, étant trop peu nombreuses, des failles se créèrent entre les différentes armées
allemandes. D’où la sortie de Galliéni à partir de Paris (avec l’anecdote des ‘taxis de la Marne’), la
contre-offensive de Joffre et de French, et la ‘victoire de la Marne’. Un succès initial décisif et une
guerre courte échappèrent ainsi aux Allemands et la guerre sur le théâtre occidental s’enlisa … dans
les tranchées, avec pendant quatre ans une succession d’offensives alliées qui furent autant d’échecs et
de boucheries et qui marquèrent profondément les générations qui y prirent part (à ‘brutalization’ de
l’Europe ; cf. le livre de cours).