revue Virologie 2008, 12 (2) : 105-16 L’entrée du virus de l’hépatite C dans ses cellules cibles F. Helle L. Cocquerel Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Institut de biologie de Lille, CNRSUMR8161 Laboratoire Hépatite C, 1, rue Calmette, BP 447, 59021 Lille <[email protected]> Résumé. Pour initier son cycle infectieux, une particule virale doit d’abord traverser la membrane plasmique de la cellule hôte afin d’atteindre les composants cytosoliques et nucléaires nécessaires à sa réplication. Pour un virus enveloppé, cela implique une liaison à la membrane plasmique suivie par une migration du virion vers un microdomaine ou une vésicule d’endocytose où les enveloppes virale et cellulaire vont fusionner. Le mécanisme exact par lequel le virus de l’hépatite C (HCV) entre dans ses cellules cibles, les hépatocytes, reste à élucider. Néanmoins, les données accumulées jusqu’à ce jour indiquent que le mécanisme d’entrée du HCV est un processus lent et complexe faisant intervenir plusieurs facteurs d’entrée. Dans une première étape, le virion s’attacherait à la surface cellulaire par l’intermédiaire des glycosaminoglycanes et du récepteur des lipoprotéines de faible densité. Cet événement serait ensuite suivi par une série d’interactions avec le récepteur scavenger de classe B et de type I, la tétraspanine CD81 et une protéine des jonctions serrées Claudine 1, 6 ou 9. Dans cette revue, nous avons résumé l’essentiel des connaissances accumulées sur les étapes d’entrée du HCV dans ses cellules cibles. Mots clés : virus de l’hépatite C, entrée virale, glycoprotéines d’enveloppe, facteur d’entrée, processus multiséquentiel Abstract. To replicate its genome, a virus needs to cross the plasma membrane of a host cell and get access to cytosolic and/or nuclear components. For an enveloped virus, this involves binding to the plasma membrane, followed by migration of the virion to a microdomain or an endosomal vesicle where fusion between the virion envelope and a host cell membrane occurs. Although we are still far from understanding the details of hepatitis C virus (HCV) entry, recent data show that this virus enters into target cells in a slow and complex multistep process involving the presence of several entry factors. Initial attachment of the virion may involve glycosaminoglycans and the low-density lipoprotein receptor, and it is followed by the sequential interaction with the scavenger receptor BI, the tetraspanin CD81 and the tight junction protein Claudin-1, -6 or -9. The current knowledge accumulated on HCV entry is summarized in this review. doi: 10.1684/vir.2008.0163 Key words: hepatitis C virus, virus entry, envelope glycoproteins, entry factor, virus attachment, multistep process L’interaction sélective des virus animaux avec leur(s) récepteur(s) spécifique(s) présent(s) à la surface des cellules est une étape essentielle à l’initiation de leur cycle Tirés à part : L. Cocquerel Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 infectieux. Une telle interaction détermine souvent le spectre d’hôtes et le tropisme cellulaire ou tissulaire du virus et joue un rôle essentiel dans la pathogénicité du virus. Si le virus ne peut se lier à la surface cellulaire, l’infection ne peut alors être initiée. Une connaissance détaillée des mécanismes impliqués dans l’entrée d’un virus permet non 105 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. revue seulement de comprendre comment ce virus infecte ses cellules hôtes mais également d’entrevoir la possibilité de développer de nouvelles drogues antivirales. Les mécanismes régulant l’entrée du virus de l’hépatite C (HCV) dans ses cellules cibles, les hépatocytes, sont aujourd’hui encore mal connus. L’hépatite C est un problème majeur de santé publique. Cette infection touche environ 130 millions de personnes à travers le monde [1]. En France, on estime que 600 000 à 1 million de personnes seraient atteintes par cette maladie. L’infection par le HCV est généralement chronique (60 à 80 % des cas) et les aspects cliniques peuvent se caractériser par un portage asymptomatique, une hépatite chronique active et une cirrhose qui est fortement associée au développement d’un carcinome hépatocellulaire. À l’heure A actuelle, il n’existe aucun vaccin pour lutter contre le HCV et les thérapies antivirales utilisées actuellement ont une efficacité relativement limitée ([1]). Le HCV est un petit virus enveloppé appartenant au genre Hepacivirus de la famille des Flaviviridae [1]. Ce virus à ARN de polarité positive est constitué d’une nucléocapside entourée d’une enveloppe lipidique dans laquelle sont ancrées deux glycoprotéines d’enveloppe, E1 et E2 (figure 1). Ces deux protéines forment des hétérodimères non covalents qui jouent un rôle majeur dans le mécanisme d’entrée du HCV. Ces quinze dernières années ont été marquées par l’absence d’un système de culture cellulaire permettant de multiplier efficacement le HCV. Différents outils ont donc été développés afin de pouvoir étudier l’entrée du HCV dans ses cellules cibles. L’utilisation de tels outils a permis Glycoprotéines d'enveloppe E1 et E2 ARN simple brin de polarité positive Enveloppe virale Nucléocapside B C E1 E2 E1 P NS2 7 NS3 NS NS4B 4A NS5A NS5B E2 Figure 1. A. Représentation schématique d’une particule du HCV. L’enveloppe virale est composée d’une bicouche lipidique (en vert) dans laquelle sont insérées les deux glycoprotéines d’enveloppe E1 et E2 (en jaune). Cette enveloppe renferme une nucléocapside (en bleu) à l’intérieur de laquelle se trouve la molécule d’ARN simple brin de polarité positive (en beige). B. Le génome du HCV code une polyprotéine unique qui, après maturation par des protéases cellulaires et virales, va libérer une dizaine de protéines dont les deux glycoprotéines d’enveloppe E1 et E2. Ces deux protéines présentent un large ectodomaine N-terminal hautement N-glycosylé et sont ancrées dans les membranes par leurs domaines transmembranaires C-terminaux. 106 Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 revue de mettre en évidence des interactions avec un certain nombre de protéines de surface cellulaire et a permis de caractériser le rôle des glycoprotéines E1E2 dans l’entrée virale. Le développement récent d’un système de production du HCV en culture cellulaire permet aujourd’hui de confirmer les données obtenues jusqu’à présent. Dans cette revue, nous avons résumé l’essentiel des connaissances accumulées sur les étapes précoces du cycle infectieux du HCV. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Cycle infectieux du HCV Un cycle viral du HCV, essentiellement basé sur le modèle des Flavivirus d’autres membres de la famille des Flaviviridae, est représenté dans la figure 2 [2]. La première étape correspond à la liaison des virus à la surface des cellules, sur le(s) récepteur(s) spécifique(s). Le virus est alors endocyté par une voie dépendante de la clathrine. Ensuite, la membrane virale fusionne avec la membrane des endosomes précoces de la cellule, conduisant à la libération de l’ARN viral dans le cytoplasme. Le génome sert alors à la synthèse du brin négatif qui permet la production d’ARN brin positif. En parallèle, les protéines virales sont synthétisées sous forme d’une polyprotéine adressée dans le réticulum endoplasmique (RE). Finalement, les protéines de structure vont s’assembler dans un compartiment encore inconnu pour former de nouvelles particules virales qui suivront la voie de sécrétion jusqu’à leur export hors de la cellule. Le passage d’un virus de l’extérieur vers l’intérieur de la cellule est appelé entrée virale. Pour les virus enveloppés, ce processus peut être divisé en plusieurs étapes : l’attachement du virus à la surface des cellules, l’interaction avec le(s) récepteur(s) spécifique(s) du virus et finalement la fusion de l’enveloppe lipidique virale avec une membrane cellulaire (plasmique ou endosomale) permettant l’intro- 1 7 2 3 (+) RNA 6 4 5 Figure 2. Cycle viral du HCV basé sur le modèle des Flavivirus. (1) Le virus se lie à la surface des cellules sur leur(s) récepteur(s) spécifique(s). (2) Le virus est ensuite endocyté par une voie dépendante de la clathrine. (3) L’enveloppe virale fusionne alors avec la membrane des endosomes précoces, permettant la libération de l’ARN viral dans le cytoplasme. (4) Le génome sert à la synthèse des protéines virales dans le réticulum endoplasmique (RE). (5) En parallèle, le génome du HCV sert à la synthèse de brins négatifs qui serviront de matrice pour la synthèse de nouvelles molécules d’ARN de polarité positive. (6) Les protéines structurales servent à l’assemblage de nouvelles particules qui suivront la voie de sécrétion jusqu’à leur export hors de la cellule (7). Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 107 revue duction du génome viral dans le cytoplasme de la cellule infectée. Ces étapes du cycle viral mettent en jeu deux grands acteurs : les protéines d’enveloppe à la surface du virus et les récepteurs et co-récepteurs à la surface des cellules. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Les glycoprotéines d’enveloppe du HCV Les protéines d’enveloppe jouent un rôle prépondérant dans l’entrée virale. En effet, en plus de permettre l’interaction avec le(s) récepteur(s) cellulaire(s), ces protéines permettent d’induire la fusion entre les enveloppes virale et cellulaire. Le génome du HCV code une polyprotéine d’environ 3 000 acides aminés qui est clivée de façon co- et post-traductionnelle, par des protéases virales et cellulaires, pour produire une dizaine de protéines [1], dont les deux glycoprotéines d’enveloppe, E1 et E2 (figure 1). Ces deux protéines possèdent un large ectodomaine N-terminal et sont ancrées dans les membranes par leurs domaines transmembranaires (TM) C-terminaux [3]. Les ectodomaines de E1 et E2 sont hautement N-glycosylés, et cette glycosylation semble jouer un rôle important dans le repliement des protéines, l’entrée virale et la protection contre des anticorps neutralisants [4-6]. Durant leur synthèse, les ectodomaines de E1 et E2 sont dirigés vers la lumière du RE et leur domaine TM est inséré dans la membrane de ce compartiment [3]. L’extrêmité C-terminale de la forme immature de la protéine de capside (C) contient une séquence signal responsable de la translocation de l’ectodomaine de E1 dans la lumière du RE, et les domaines TM de E1 et E2 contiennent également un signal permettant une réinitiation de la translocation dans la lumière du RE. Les domaines TM de E1 et E2 sont multifonctionnels car, en plus de leur rôle d’ancrage membranaire et de séquence signal, ces domaines contiennent des signaux de rétention stricte dans le RE et jouent un rôle majeur dans l’hétérodimérisation de E1 et E2 [3]. Par ailleurs, la mutation de certains résidus des domaines TM de E1 et E2 altère la propriété de fusion des glycoprotéines d’enveloppe, suggérant que ces domaines jouent également un rôle majeur dans le mécanisme de fusion [7]. Une étude récente de Lavilette et al. a également permis d’identifier trois régions de E1 et E2 impliquées dans le mécanisme de fusion [8]. Systèmes d’étude de l’entrée du HCV En 1989, le génome du HCV a été cloné par Choo et al. [9]. Cela a permis une analyse rapide de son organisation génomique ainsi qu’une caractérisation biochimique de ses protéines. Néanmoins, jusqu’en 2005, aucun système de culture cellulaire permettant de produire de manière efficace le 108 virus n’a pu être développé. L’absence d’un tel système a donc constitué pendant plus de quinze ans un véritable obstacle à l’étude du cycle réplicatif du HCV. Des particules issues de sérum de patients infectés ont été utilisées par certains groupes pour étudier l’entrée du HCV. Néanmoins, du fait de leur faible taux de réplication et de leur grande hétérogénéité, ce type de particules n’a permis qu’une exploration partielle du cycle infectieux du HCV. C’est pourquoi d’autres outils ont été par la suite développés. Une forme soluble de la glycoprotéine E2 a permis d’identifier un certain nombre de protéines de surface cellulaire potentiellement impliquées dans l’entrée du HCV [10]. D’autres laboratoires ont également utilisé des virus-like particles (VLP) produites en cellules d’insectes ou des pseudoparticules recombinantes du virus de la stomatite vésiculaire (VSV) [10-12]. Néanmoins, ces systèmes n’ont pas permis d’étudier l’étape de fusion faisant intervenir les hétérodimères E1E2. En 2003, une avancée majeure dans l’étude de l’entrée du HCV a été le développement de particules rétrovirales pseudotypées avec les protéines d’enveloppe du HCV (HCVpp) [13-15]. Ces pseudoparticules sont produites après transfection de cellules humaines 293T par trois vecteurs d’expression : le premier exprime les glycoprotéines E1 et E2 natives, le deuxième exprime les protéines codées par les gènes gag et pol du virus de la leucémie murine (matrice, capside, nucléocapside, protéase, reversetranscriptase, intégrase) et le troisième exprime un ARN codant un gène rapporteur, qui sera intégré dans le génome des cellules infectées (figure 3). Les HCVpp sont sécrétées dans le milieu de culture cellulaire et permettent une bonne transduction des cellules qui est dépendante de la présence des protéines E1 et E2 à la surface de ces particules. Du fait de leur tropisme préférentiel pour les cellules d’origine hépatique et de leur neutralisation spécifique par des anticorps monoclonaux reconnaissant la protéine E2 ainsi que par des sera de patients infectés, ces pseudotypes ont représenté pendant plusieurs années l’outil le plus proche des particules natives du HCV. Toutefois, ces HCVpp ne reflètent pas complètement le virus produit chez les patients. En particulier, contrairement au virus natif dont la production semble liée à l’assemblage et à la sécrétion des lipoprotéines de très faible densité (VLDL, very low density lipoproteins) [16], les HCVpp sont supposées s’assembler indépendamment des VLDL. Par ailleurs, les HCVpp ne contiennent pas de génome capable de se répliquer. Elles ne permettent donc d’étudier que l’étape de l’entrée virale. En 2005, un clone du HCV isolé chez un patient japonais atteint d’une hépatite fulminante a finalement permis le développement d’un système de culture cellulaire permettant de produire efficacement des particules infectieuses du HCV [17]. Ce système est basé sur la transfection d’une lignée d’hépatocarcinome humain (Huh-7) avec des ARN de la souche JFH1 (génotype 2a). Ce système permet de Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 revue Plasmide 2 CMV gag-pol CMV HCV-E1E2 Plasmide 1 CMV LTR Plasmide 3 luciférase Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. PBS LTR PPT Transfection de cellules 293T Glycoprotéines d'enveloppe du HCV E1 et E2 Transcriptase inverse Intégrase Capside du MLV ARN codant la luciférase HCVpp Infection de cellules Huh-7 Quantification de l'activité luciférase Figure 3. Représentation schématique de la production des HCVpp. Pour la production des HCVpp, des cellules de rein embryonnaires humaines 293T sont transfectées avec trois vecteurs d’expression. Le premier code les glycoprotéines E1 et E2 du HCV qui sont responsables du tropisme cellulaire. Le second vecteur exprime les protéines codées par les gènes gag et pol du virus de la leucémie murine (matrice, capside, nucléocapside, protéase, transcriptase inverse, intégrase). Les protéines de matrice, capside et nucléocapside permettent l’encapsidation de l’ARN grâce au signal d’encapsidation (w), l’assemblage de la particule et son bourgeonnement à la membrane plasmique. Finalement, le troisième vecteur code l’ARN qui va être encapsidé dans les particules. Cet ARN contient des séquences rétrovirales nécessaires à la transcription inverse et à l’intégration de l’ADN proviral dans l’ADN génomique de la cellule infectée (LTR, long terminal repeat ; PBS, primer binding site ; PPT, polypurine track) et contient un gène rapporteur codant la luciférase. Les HCVpp sont sécrétées dans le surnageant de culture des cellules 293T et sont utilisées pour infecter des cellules d’hépatocarcinome humain Huh-7. Les cellules infectées vont intégrer le gène codant la luciférase dans leur ADN génomique grâce à la transcriptase inverse et à l’intégrase, et par conséquent, vont exprimer la luciférase. L’infectiosité des HCVpp pourra alors être évaluée par quantification de l’activité luciférase dans les cellules Huh-7. produire de manière relativement efficace du virus natif, appelé HCVcc, capable de réinfecter des cellules naïves [17-19]. Les cellules Huh-7 peuvent être infectées de façon chronique, même si des événements d’adaptation du virus et des cellules ont lieu afin de favoriser leur survie. Ces particules permettent une infection productive chez le chimpanzé et chez des souris transplantées avec des hépatocytes humains [20]. Depuis, des systèmes de culture Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 cellulaire permettant de produire des particules infectieuses issues d’autres génotypes ont été décrits, mais l’efficacité de ces systèmes de production est plus faible. Pour la première fois depuis quinze ans, les différentes étapes du cycle infectieux du HCV incluant l’entrée des particules virales dans leurs cellules cibles, la réplication du génome viral, l’assemblage et la sécrétion des particules néosynthétisées, peuvent maintenant être étudiées. 109 revue Les protéines cellulaires impliquées dans l’entrée du HCV Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Les glycosaminoglycanes Les glycosaminoglycanes (GAG) présents à la surface des cellules représentent un premier site de liaison pour de nombreux virus, incluant les Flaviviridae. Il existe différents types de GAG : le chondroïtine sulfate, le dermatane sulfate, le kératane sulfate, l’héparane sulfate et l’acide hyaluronique. En utilisant différents systèmes d’étude (protéine E2 soluble, VLP, HCVpp, HCVcc, virus issu de plasma), plusieurs auteurs ont montré que l’héparine, un homologue des héparanes sulfates, et l’héparinase, capable de dégrader les héparanes sulfates à la surface des cellules, inhibaient l’adsorption du HCV [21-24]. Au contraire, les autres GAG ne semblent pas avoir d’effet inhibiteur. Des analyses en résonance plasmonique de surface montrent que l’affinité de la protéine E2 soluble pour l’héparine est très forte et qu’une région hypervariable dans E2, appelée HVR1, joue un rôle important dans cette interaction. En revanche, en utilisant des hétérodimères E1E2 issus de HCVpp, aucune interaction avec les héparanes sulfates n’a pu être mise en évidence. Par ailleurs, l’analyse de la séquence de E2 ne permet pas de trouver de séquences consensus impliquées dans l’interaction avec les GAG. Ainsi, l’interaction de la protéine E2 avec les GAG n’est pas clairement établie. La formation d’un site d’interaction avec les GAG dans la structure tridimensionnelle des particules n’est pas exclue. Par ailleurs, il est possible que les particules du HCV interagissent avec les GAG de façon indirecte, par exemple, par l’intermédiaire des lipoprotéines associées aux particules du HCV. Une étude récente suggère d’ailleurs que la lipoprotéine lipase (LPL) permet une interaction indirecte du HCV avec les GAG [25]. Toutefois, l’attachement des particules virales via la LPL semble diriger les particules vers une voie non productive puisque la LPL inhibe l’infection par les HCVcc. Le récepteur des LDL Du fait de l’association du HCV avec des lipoprotéines, le récepteur des LDL (LDL-R) a été proposé comme un récepteur potentiel de ce virus [26]. En effet, l’adsorption du HCV et l’accumulation d’ARN viral dans les cellules peuvent être inhibées par des anticorps dirigés contre le LDL-R ainsi que par des LDL et VLDL purifiées [26-28]. De plus, Molina et al. ont montré qu’il existait une corrélation entre l’accumulation d’ARN viral dans les hépatocytes primaires, l’expression de l’ARN messager du LDL-R et l’entrée des LDL [28]. Finalement, l’inhibition de l’entrée de HCVcc par des anticorps anti-apoE [29] est un autre argument en faveur d’un rôle du LDL-R dans l’entrée du HCV. 110 La protéine CD81 En utilisant une forme soluble de la protéine E2 pour identifier des protéines cellulaires de surface impliquées dans l’entrée du HCV, Pileri et al. ont identifié la protéine CD81 [30]. C’est une protéine de 26 kDa appartenant à la famille des tétraspanines. Les protéines de cette famille contiennent quatre passages transmembranaires, un court domaine intracellulaire et deux boucles extracellulaires appelées « petite boucle extracellulaire » (SEL) et « grande boucle extracellulaire » (LEL) (figure 4). La LEL présente un motif particulièrement conservé constitué de trois résidus (CCG) impliqués dans la formation de ponts disulfures. CD81 est une protéine impliquée dans un grand nombre de fonctions cellulaires telles que l’adhésion, la morphologie, l’activation ou encore la prolifération et la différentiation [31]. De nombreuses études utilisant des HCVpp et des HCVcc ont confirmé l’implication de CD81 dans l’entrée du HCV [10]. En effet, des anticorps monoclonaux dirigés contre CD81 ainsi qu’une forme soluble de la LEL de CD81 sont capables d’inhiber l’entrée des HCVpp et des HCVcc dans des cellules d’hépatocarcinome. Par ailleurs, une réduction de l’expression de CD81 à l’aide d’ARN interférents abolit l’infection par les HCVpp et les HCVcc. Finalement, les cellules HepG2 qui n’expriment pas naturellement CD81 deviennent permissives à l’infection par les HCVpp et les HCVcc après expression ectopique de CD81. Plusieurs études montrent que la susceptibilité des cellules à l’infection est étroitement liée au niveau d’expression de CD81 [32, 33]. CD81 issue de différentes LEL SEL SR-BI CD81 EL1 EL2 CLDN1 Figure 4. Représentation schématique de SR-BI, CD81 et CLDN1. SR-BI est constitué de deux passages transmembranaires, deux domaines intracellulaires [de 11 et 45 acides aminés (aa)] et une grande boucle extracellulaire (411 aa). SR-BI contient neuf sites potentiels de glycosylation représentés en rouge. CD81 est constitué de quatre passages transmembranaires, deux domaines intracellulaires (chacun de 12 aa), une petite boucle intracellulaire (5 aa) et deux boucles extracellulaires SEL (« petite boucle extracellulaire ») (30 aa) et LEL (« grande boucle extracellulaire » (89 aa). CLDN1 est constitué de quatre passages transmembranaires, un court peptide N-terminal intracellulaire (7 aa), une boucle intracellulaire (13 aa), une queue intracellulaire C-terminale (27 aa) et deux domaines extracellulaires, EL1 (53 aa) et EL2 (27 aa). Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. revue espèces et exprimée dans le contexte d’hépatocytes humains est capable de conférer de la permissivité au HCV à des niveaux variables [34], suggérant que la tétraspanine semble en partie responsable de la spécificité d’espèce du HCV mais que des facteurs additionnels sont probablement également nécessaires. Les résidus de CD81 impliqués dans l’interaction avec la protéine d’enveloppe E2 du HCV sont localisés dans la LEL. De même, une dizaine de résidus de la protéine E2 semblent importants pour l’interaction E2-CD81 [35, 36]. Même si plusieurs études suggèrent que CD81 agit à une étape post-attachement [23, 37-40], le rôle exact de CD81 dans l’entrée du HCV n’est pas encore complètement élucidé. Le tropisme du HCV est restreint aux cellules hépatiques humaines exprimant CD81. Toutefois, l’expression ectopique de CD81 dans des cellules non hépatiques ne rend pas les cellules permissives à l’infection par les HCVpp, suggérant que d’autres molécules sont indispensables. De façon intéressante, les membres de la famille des tétraspanines sont capables de s’associer entre eux mais également avec d’autres protéines appelées partenaires pour former des complexes multimoléculaires appelés tetraspanin webs [31]. L’interaction entre une tétraspanine et un partenaire forme un complexe primaire. Deux partenaires majeurs de CD81 ont été identifiés : EWI-F (aussi appelé CD9P-1, FPRP ou CD315) et EWI-2 (aussi appelé PGRL, IgSF8 ou CD316), tous les deux appartiennent à la famille des protéines EWI, une nouvelle famille de protéines à domaines immunoglobuline (Ig). Les membres de cette famille contiennent une courte queue cytoplasmique fortement chargée, un domaine TM constitué d’un seul passage et un ectodomaine composé de quatre domaines Ig portant un motif EWI conservé. En étudiant si les interactions entre CD81 et les hétérodimères E1E2 étaient similaires lorsque CD81 est impliqué ou non dans un tetraspanin web ou dans un complexe primaire, nous avons récemment identifié un partenaire de CD81 capable de moduler l’entrée du HCV [41]. Ce partenaire, appelé EWI-2wint (pour EWI-2 without its N-terminus) est un produit de clivage de EWI-2, correspondant à EWI-2 sans son premier domaine Ig. EWI2wint est exprimé dans un grand nombre de lignées cellulaires mais est absent dans les hépatocytes. L’expression ectopique d’EWI-2wint dans des cellules permissives à l’infection par le HCV bloque l’entrée virale en inhibant l’interaction des glycoprotéines d’enveloppe du HCV avec la protéine CD81. Ainsi, ces données suggèrent que l’entrée du HCV requiert la présence de CD81 mais aussi l’absence de EWI-2wint. Ces résultats permettent d’émettre l’hypothèse que l’hépatotropisme du HCV ne serait pas lié uniquement à la présence de récepteurs spécifiques mais également à l’absence d’un inhibiteur spécifique au niveau des hépatocytes [41]. Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 La protéine SR-BI En utilisant une forme soluble de la protéine E2 pour identifier des protéines de surface impliquées dans l’entrée du HCV, Scarselli et al. ont identifié le récepteur scavenger de classe B et de type I (SR-BI, encore appelé Cla-I chez l’homme) comme un autre récepteur potentiel du HCV [42]. SR-BI est une protéine de surface de 509 acides aminés, contenant deux courts domaines cytoplasmiques, deux passages TMs et une large boucle extracellulaire (figure 4). L’utilisation de HCVpp et de HCVcc a permis de montrer que SR-BI est impliqué dans l’entrée du HCV [43]. En effet, la préincubation de cellules Huh-7 avec des anticorps anti-SR-BI réduit de manière significative l’infectiosité des particules. La réduction de l’expression de SR-BI par des ARN interférents semble aussi diminuer l’infectiosité des HCVpp et des HCVcc. SR-BI est exprimé dans une grande variété de cellules de mammifères, mais son expression est particulièrement importante dans le foie. SR-BI est un récepteur des lipoprotéines de faible densité (LDL) acétylées et oxydées mais aussi des lipoprotéines de haute densité (HDL) [44]. Il a été montré que les LDL oxydées étaient capables d’inhiber l’infection par les HCVpp et les HCVcc [45]. Au contraire, et de façon surprenante, les HDL facilitent l’entrée des HCVpp de façon dépendante de la capacité de transfert lipidique de SR-BI [43]. La région HVR1 de la glycoprotéine E2 semble moduler l’interaction de E2 avec SR-BI puisque la délétion de celle-ci abolit l’interaction de E2s avec SR-BI ainsi que l’effet facilitateur des HDL sur l’entrée du HCV [42, 46-48]. Récemment, il a été mis en évidence que SR-BI pouvait interagir avec l’apolipoprotéine sérum amyloïde A (SAA) et l’internaliser. SAA est une protéine produite principalement par le foie après une infection, un dommage tissulaire ou une inflammation, ce qui suggère un rôle bénéfique de cette protéine dans la protection de l’hôte. De façon intéressante SAA inhibe l’entrée des HCVpp et des HCVcc [49, 50]. De façon surprenante, l’analyse en système HCVpp a indiqué que l’inhibition par SAA était due à une interaction avec les particules virales et non à une compétition pour le récepteur SR-BI. Par ailleurs, il a été montré que les HDL modulent l’activité antivirale de SAA, probablement par une association des deux protéines, suggérant une action interconnectée de SAA et des HDL dans la modulation de l’infection par le HCV. En conclusion, le rôle exact de SR-BI dans l’entrée du HCV reste à élucider. SR-BI est une protéine capable de modifier la composition lipidique de la membrane plasmique. Ainsi, il est possible que l’effet accélérateur sur l’entrée du HCV soit la conséquence d’une modification de la membrane plasmique facilitant ainsi une des étapes de l’entrée (par exemple, la fusion). Alternativement, une étude récente propose que le HCV pourrait interagir avec SR-BI par l’intermédiaire des lipoprotéines [51], permettant ainsi un 111 revue mécanisme d’entrée de substitution en présence d’anticorps neutralisants. Toutefois, une autre étude montre que l’infection en l’absence de lipoprotéines peut être inhibée par des anticorps monoclonaux anti-SR-BI [40], suggérant une interaction directe entre les particules virales et SR-BI. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Les protéines claudines Très récemment, Evans et al. ont identifié une nouvelle protéine impliquée dans l’entrée du HCV : claudine-1 (CLDN1) [39]. Cette protéine appartient à la famille des claudines composée de 24 membres impliqués dans la formation des jonctions serrées [52]. Ces protéines sont constituées de deux boucles extracellulaires, trois domaines intracellulaires et quatre passages transmembranaires (figure 4). Les claudines sont des protéines de petite taille (entre 20 et 27 kDa) caractérisées par la présence d’un motif W-GLWC-C hautement conservé dans la grande boucle extracellulaire. CLDN1 est exprimée principalement dans le foie. En criblant une banque d’ADN complémentaire produite à partir de cellules permissives au HCV, Evans et al. ont montré que l’expression de CLDN1 rend des cellules non hépatiques 293T permissives à l’infection par des HCVpp et des HCVcc [39]. Ainsi, CLDN1 est la première protéine décrite qui permette de rendre des cellules non hépatiques permissives à l’infection par le HCV. La réduction de l’expression de CLDN1 à l’aide d’ARN interférents entraîne une diminution de l’infection par les HCVpp et les HCVcc, mais la surexpression de CLDN1, dans des cellules exprimant cette protéine de façon endogène, n’augmente pas l’infectiosité. Des anticorps dirigés contre un épitope inséré dans la première boucle extracellulaire de CLDN1 bloquent l’infection par le HCV de façon dose-dépendante, suggérant que cette boucle est impliquée dans l’entrée du HCV. De plus, des expériences de mutagenèse dirigée ont permis de montrer que les résidus I32 et E48 présents dans cette boucle sont essentiels à l’entrée du HCV. Aucune interaction directe entre CLDN1 et le HCV n’a été décrite, mais il n’est pas exclu que cette interaction ait lieu après un changement conformationnel des protéines d’enveloppe. Très récemment, il a été montré que deux autres membres de la famille des claudines, CLDN6 et CLDN9, sont également capables de rendre des cellules non hépatiques permissives à l’infection par le HCV [53, 54]. Il est intéressant de noter que, contrairement à CLDN1, CLDN6 et CLDN9 sont exprimées au niveau du foie mais également au niveau des PBMC (peripheral blood mononuclear cells), suggérant que ces deux molécules pourraient être impliquées dans le mécanisme d’infection extrahépatique du HCV [54]. Le rôle exact des CLDN n’a pas encore été élucidé mais, puisque ces protéines sont strictement localisées au niveau des jonctions serrées dans les hépatocytes polarisés, les 112 CLDN pourraient agir après une migration latérale des complexes virus-récepteurs au niveau des jonctions serrées. L’endocytose Les virus enveloppés entrent dans leurs cellules cibles selon deux stratégies. Certains, comme de nombreux rétrovirus, pénètrent dans le cytoplasme de la cellule hôte en fusionnant directement leur enveloppe avec la membrane plasmique. Ce processus est indépendant du pH et les changements de conformation des protéines d’enveloppe nécessaires à la fusion sont induits par une interaction directe des protéines d’enveloppe virales avec leurs récepteurs. D’autres virus enveloppés, comme le virus influenza ou le virus de la stomatite vésiculaire, entrent dans leurs cellules cibles par endocytose. Dans ce cas, le pH acide des endosomes conduit à un changement conformationnel des protéines d’enveloppe qui est nécessaire à la fusion. La libération du génome viral dans le cytoplasme se fait alors par fusion de l’enveloppe virale avec la membrane endosomale. L’utilisation d’inhibiteurs d’acidification des endosomes tels que la bafilomycine A1, la concanamycine A, le chlorure d’ammonium ou encore la chloroquine, a permis de montrer que l’entrée des HCVpp était dépendante du pH [15, 55, 56]. Par la suite, en utilisant ces mêmes inhibiteurs, il a été montré que l’entrée des HCVcc était également dépendante du pH [23, 57, 58]. L’ensemble de ces résultats suggère que le HCV entre dans ses cellules cibles par endocytose. Par ailleurs, l’utilisation de molécules ou d’ARN interférents ciblant la clathrine a permis de montrer que le HCV entre dans ses cellules hôtes par endocytose dépendante de la clathrine [56, 57]. Finalement, l’utilisation de mutants dominants négatifs de protéines impliquées dans l’endocytose suggère que le virus fusionne avec les endosomes précoces et non les endosomes tardifs [56]. La fusion L’utilisation des différents systèmes d’infection (HCVpp et HCVcc) a permis de montrer que le mécanisme de fusion du HCV est dépendant du pH, suggérant que le pH acide des endosomes entraîne un changement de conformation de la protéine de fusion vers une conformation active [59]. La fusion entre les HCVpp et des liposomes est aussi dépendante du pH, avec un seuil à 6,3 et un optimum à 5,5 [8]. Pour de nombreux virus enveloppés, un pH acide active un changement conformationnel irréversible nécessaire à l’événement de fusion entre les membranes virale et endosomale. De tels virus sont généralement inactivés par un traitement physique à pH acide. Dans le cas du HCV, un tel traitement n’a pas d’effet sur l’infectiosité des particules [56, 58]. Le HCV adopte donc probablement une conforVirologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. revue mation sensible au pH acide après une (des) interaction(s) avec son (ses) récepteur(s) ou co-récepteur(s) présent(s) à la surface des cellules cibles. Le système de fusion entre les HCVpp et des liposomes développé par Pécheur et al. a également permis de montrer que la fusion est dépendante de la température et ne nécessite pas la présence de protéines à la surface des liposomes, mais qu’elle peut être facilitée par la présence de cholestérol. Finalement, ce modèle de fusion du HCV a permis l’identification d’une molécule capable d’inhiber cette étape de l’entrée du HCV : l’arbidol [60]. Par ailleurs, le développement des HCVpp a permis d’observer que la surexpression de E1E2 dans des cellules 293T conduisait à l’export d’une fraction de ces protéines à la surface des cellules. Sur la base de ces observations, Kobayashi et al. ont développé un test de fusion cellule-cellule entre des cellules 293T surexprimant E1E2 et des cellules Huh-7 qui sont permissives à l’infection. Ce système a permis de confirmer certains résultats décrits ci-dessus [61]. Par homologie aux protéines de fusion de classe II, auxquelles la protéine de fusion du HCV est susceptible d’appartenir, il est probable que les hétérodimères E1E2 métastables se réorganisent pour former des trimères de protéines de fusion thermodynamiquement très stables. En effet, l’hétérodimère E1E2 des Alphavirus et les homodimères EE des Flavivirus se dissocient pour former des trimères de E1 et de E respectivement [62, 63]. Le réarrangement oligomérique conduit alors à l’exposition du peptide de fusion qui va s’insérer dans la membrane cellulaire. Cette étape est nécessaire à la poursuite du changement conformationnel permettant le rapprochement entre le domaine transmembranaire de la protéine de fusion et le peptide de fusion. De façon intéressante, une étude récente montre que la mutation de certains résidus des domaines transmembranaires de E1 et E2 altère la propriété de fusion de ces glycoprotéines d’enveloppe [7]. Il est probable que ces mutations empêchent les changements d’oligomérisation. La fusion s’achève lorsque les lipides des membranes virale et cellulaire se mélangent et forment un pore. À ce stade, les protéines de fusion ont atteint leur conformation la plus stable et la nucléocapside ou l’ARN est libéré(e) dans le cytosol des cellules. Conclusions Le développement récent de différents modèles d’étude du HCV a permis l’identification de plusieurs protéines cellulaires de surface impliquées dans l’entrée du HCV. Les données actuelles mettent en évidence que l’entrée du HCV est un processus complexe composé de plusieurs étapes séquentielles. Par ailleurs, il semble que ce processus soit assez long puisque des cinétiques d’inhibition suggèrent que CLDN1 intervienne plus d’une heure après la fixation Virologie, Vol. 12, n° 2, mars-avril 2008 du virus. La contribution exacte de chaque molécule impliquée dans l’entrée du HCV reste à déterminer, mais l’état actuel des connaissances nous permet de proposer un modèle (figure 5). Les GAG et le LDL-R pourraient faciliter l’attachement initial des particules virales sur les cellules, par une interaction directe avec les protéines E1E2 ou par l’intermédiaire des lipoprotéines (représentées par une sphère jaune) associées aux particules virales. Après cette étape initiale de liaison, la particule interagit probablement avec SR-BI et CD81. Bien que la cinétique d’interaction avec ces deux facteurs d’entrée n’ait pas encore été déterminée de manière univoque, les données actuelles suggèrent qu’un premier contact avec SR-BI soit un prérequis à l’interaction de la particule avec CD81. L’interaction avec SR-BI peut être directe ou indirecte par l’intermédiaire des lipoprotéines associées. Il est à noter que ces étapes précoces de l’entrée du HCV peuvent être modulées par différentes molécules présentes dans le sérum des patients, qui peuvent faciliter (HDL) ou inhiber (LDL oxydées, LPL et SAA) l’entrée du HCV dans ses cellules cibles. CLDN1 agit à une étape tardive du processus d’entrée, après l’attachement, l’interaction avec CD81 et probablement après une migration latérale des complexes virus-récepteurs jusqu’aux jonctions serrées. Le HCV entre alors dans les cellules par endocytose dépendante de la clathrine jusqu’aux endosomes précoces où la fusion des membranes se produit. Il est important de noter que le processus d’entrée du HCV est peut-être encore plus complexe qu’on ne le pense. En effet, certaines cellules exprimant à la fois CD81, SR-BI et CLDN restent résistantes à l’infection par le HCV, suggérant qu’un ou plusieurs facteurs d’entrée restent à identifier. Dans le sens de cette observation, l’identification d’EWI2wint comme un nouveau partenaire de CD81 capable de bloquer l’interaction E2-CD81 fournit une preuve supplémentaire de la complexité du processus d’entrée du HCV. La découverte récente de CLDN comme facteur d’entrée suggère que la polarisation cellulaire pourrait jouer également un rôle dans l’entrée virale. En effet, il a été récemment montré que les particules virales interagissent de manière préférentielle avec la surface apicale de cellules Caco-2 polarisées [64]. De plus, les jonctions serrées semblent bloquer physiquement l’accès des particules virales aux facteurs cellulaires présents aux pôles latéral et basolatéral. Finalement, la possibilité d’une transmission de cellule à cellule a été évoquée ouvrant ainsi une voie supplémentaire à la propagation virale [65]. Néanmoins, le mécanisme de transmission de cellule à cellule n’a pas encore été caractérisé et l’importance de ce mode de transmission dans le foie n’a pas encore été déterminée. En conclusion, bien qu’une progression rapide ait été récemment réalisée sur l’identification des facteurs cellulaires impliqués dans l’entrée du HCV, le rôle précis de 113 revue ? SAA LPL/LDLox SR-BI CD8I CLDN1 H+ Fusion H+ Vé ne Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. LDL-R GAG EWI-2wint sic th ri + HDL ule recouverte de cla Endosome précoce Libération du génome Figure 5. Modèle de l’entrée du HCV dans ses cellules cibles. Les détails de ce modèle sont décrits dans le paragraphe conclusions. chacune de ces molécules dans les étapes précoces du cycle infectieux du HCV reste à déterminer. Remerciements. Nous présentons nos excuses aux auteurs dont le travail n’a pu être cité suite à des restrictions de taille de document. Nous remercions Sophana Ung pour la réalisation des différentes illustrations. Références 1. Lemon SM, Walker C, Alter MJ, Yi M. Hepatitis C Virus. In : Knipe DM, Howley PM, eds. Fields Virology. Philadelphia : Lippincott Williams & Wilkins, 2007 : 1253-304. 2. Lindenbach BD, Thiel HJ, Rice CM. Flaviviridae : the viruses and their replication. In : Knipe DM, Howley PM, eds. Fields Virology. Philadelphia : Lippincott Williams & Wilkins, 2007 : 1101-52. 3. Lavie M, Goffard A, Dubuisson J. Assembly of a functional HCV glycoprotein heterodimer. Curr Issues Mol Biol 2007 ; 9 : 71-86. 4. Falkowska E, Kajumo F, Garcia E, Reinus J, Dragic T. Hepatitis C virus envelope glycoprotein E2 glycans modulate entry, CD81 binding, and neutralization. J Virol 2007 ; 81 : 8072-9. 5. Goffard A, Dubuisson J. Glycosylation of hepatitis C virus envelope proteins. 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