La Lettre de l’Infectiologue - Tome XV - n° 8 - octobre 2000
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MISE AU POINT
– Pasteurellose aiguë sur terrain débilité. Les pasteurelloses
survenant sur un terrain non fragilisé sont généralement d’évo-
lution favorable. Sur un terrain débilité, la mortalité est impor-
tante. Elle est, par exemple, de 60 % chez le cirrhotique (11).
Les autres facteurs de risque sont notamment les affections néo-
plasiques, les hémopathies, les connectivites, une corticothé-
rapie, la présence de matériel étranger comme les prothèses
vasculaires.
Les bronchopneumopathies surviennent sur des pathologies
respiratoires anciennes comme les dilatations des bronches ou
les bronchopneumopathies chroniques obstructives.
#Prise en charge thérapeutique. Les Pasteurella sont naturelle-
ment sensibles à la plupart des bêtalactamines. Cependant, il existe
des souches résistantes, et particulièrement celles d’origine
bovine, dont 12 % produisent une bêtalactamase de type ROB-1.
Elles sont sensibles au chloramphénicol, au cyclines, aux fluo-
roquinolones, aux sulfamides et au cotrimoxazole. Elles sont
de sensibilité intermédiaire aux macrolides et résistantes à bas
niveau aux aminosides.
Le traitement d’une pasteurellose d’inoculation doit prendre en
compte le fréquent polymicrobisme de ces affections, car de
nombreuses espèces bactériennes (y compris des bactéries anaé-
robies), commensales de la cavité buccale du chien ou du chat,
sont présentes dans la morsure. On réalise d’abord un prélève-
ment bactériologique et quelques gestes chirurgicaux simples
(irrigation ou lavage et débridement de la plaie). Puis une anti-
bioprophylaxie (3 à 5 jours) est instaurée en monothérapie, avant
toute documentation bactériologique. Chez l’adulte, on recom-
mande l’association amoxicilline-acide clavulanique, et en
seconde intention des cyclines ; chez l’enfant, on utilisera plu-
tôt l’association amoxicilline-acide clavulanique ou une cépha-
losporine orale. Si le traitement est instauré plus tardivement
pour une infection patente, sa durée sera de 10 à 14 jours (4,12).
Le risque de tétanos doit être également pris en compte par le
contrôle de la vaccination ou l’injection de gammaglobulines
chez un sujet non ou mal vacciné. Le risque de la rage doit aussi
être évalué et une vaccination peut s’avérer nécessaire (12).
Le traitement des pasteurelloses systémiques doit faire appel à
des molécules bactéricides. On propose habituellement une
bêtalactamine par voie intraveineuse associée ou non à une fluo-
roquinolone pendant 10 à 15 jours.
Le traitement de la pasteurellose subaiguë par antigénothéra-
pie par voie intradermique avait été proposé par l’équipe de
Reilly en 1952 (13). Après avoir été utilisée en France, cette
méthode a été abandonnée, principalement parce que son inno-
cuité n’était pas garantie.
!Bactéries transmises par les griffures
$Bartonella henselae (14, 15). Depuis les travaux de Debré
(16),on sait que le chat peut transmettre une infection après grif-
fure. C’est ce qu’il est convenu d’appeler la maladie des griffes
du chat, ou lymphoréticulose bénigne d’inoculation. La mala-
die des griffes du chat, typique chez un sujet immunocompé-
tent, se caractérise par un antécédent de griffure, de morsure ou
de contact étroit avec un chat. Il s’agit souvent d’un chaton
récemment adopté. Sur le trait de griffure se développe, en 3 à
10 jours, une papule ronde, d’un rouge-brun et dont la taille est
de un à quelques millimètres. Elle ne persiste habituellement
que pendant quelques jours, mais peut subsister plusieurs
semaines. Dans les une à deux semaines suivantes, un ou plu-
sieurs ganglions lymphatiques drainant la zone d’inoculation
subissent peu à peu une augmentation de volume, et atteignent
une taille de plusieurs centimètres en deux à trois semaines. Leur
volume ne change pas durant les deux à trois semaines suivantes,
puis décroît en deux à trois semaines supplémentaires. En tout,
la durée de la maladie est de deux à trois mois. Certains cas plus
sévères durent plus longtemps, et beaucoup sont si discrets qu’ils
ne sont pas diagnostiqués. Dans leur évolution tardive, les gan-
glions peuvent devenir fluctuants dans 10 % des cas environ,
avec, en regard, un érythème cutané. Ils peuvent suppurer s’ils
ne sont pas drainés à l’aiguille. Chez la moitié des patients, la
maladie des griffes du chat ne se traduit que par une adénopa-
thie. Carithers (17) observe que 41 % des patients infectés ne
sont pas fébriles et que, pour les autres, la température peut
dépasser 39 °C dans 9 % des cas. Certains de ces patients souf-
frent d’anorexie, de céphalée, d’arthralgies, de myalgies et de
douleurs du cou, du dos et des extrémités. Les ganglions atteints
se situent préférentiellement aux membres supérieurs (aisselle,
épitrochlée), puis, par ordre de fréquence décroissante, à la
région cervicale et sous-mandibulaire et à la région fémorale.
Les autres localisations (préauriculaire et claviculaire) sont plus
rares.
La maladie des griffes du chat peut se présenter dans 5 à 13 %
des cas sous une forme atypique sévère. Chez ces patients, des
symptômes systémiques sévères en raison de la dissémination
de l’infection existent, en plus des adénopathies (18). Ces
patients présentent une fièvre prolongée de plus de deux
semaines, un malaise, une fatigue, des arthralgies et des myal-
gies ; chez certains, on note une éruption cutanée, une perte de
poids et une splénomégalie, voire des lésions osseuses. Des
lésions hépatiques et/ou spléniques peuvent être détectées par
échographie ou par tomodensitométrie par scanner. Il existe
également des patients immunocompétents ayant une maladie
des griffes du chat disséminée sans adénopathie périphérique
détectable. Cette affection se traduit alors par de la fièvre, des
douleurs abdominales et des symptômes périphériques sévères.
Une hépato-splénomégalie peut accompagner ce tableau ; le
scanner met en évidence de multiples lésions hypodenses ; à la
ponction-biopsie du foie, des bacilles colorables par la tech-
nique de Warthin-Starry peuvent être détectés. B. henselae est
aussi responsable, chez les patients immunocompétents d’en-
docardite, d’affections neuroméningées, du syndrome oculo-
glandulaire de Parinaud (qui est la cause principale), de la neu-
rorétinite de Leber, de névrite optique et de nombreuses
manifestations vitro-rétiniennes.
Chez les patients immunodéprimés, B. henselae est aussi res-
ponsable d’affections diverses : angiomatose bacillaire, péliose
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