LES COLLECTIONS ISSUES DES FONDS CONSERVÉS À ALISE-SAINTE-REINE DEUX ENSEMBLES MÉCONNUS Le Département conserve dans les collections du Musée Alésia deux ensembles d’objets et d’armes issus des fouilles du siège de 52 avant J.-C. L’un provient des fonds de l’ancien Musée Municipal d’Alise-Sainte-Reine, l’autre des collections collectées par la Société des Sciences de Semur-en-Auxois et appartenant au propre au Musée Alésia. Ces deux ensembles n’ont presque pas été vus du public. Ils constituent l’essentiel des collections archéologiques qui seront exposées dans le Centre d’Interprétation. LE FONDS DU MUSÉE MUNICIPAL : REDÉCOUVERTE D’UN ENSEMBLE OUBLIÉ ISSU DES FOUILLES DU SECOND EMPIRE Un premier ensemble provient des collections de l’ancien Musée Municipal d’Alise-Sainte-Reine. Ce musée a été souhaité par Napoléon III qui en a choisi personnellement l’emplacement pour la vue qu’il offrait sur la plaine, théâtre des principaux combats lors du siège. Il a été financé sur sa cassette personnelle. Inauguré en 1862, ce petit musée est le premier musée de site jamais réalisé en France, et l’un des plus anciens d’Europe. Il s’intégrait –déjà !- dans un programme plus important de mise en valeur globale du site du siège de 52 avant J.-C., dont la statue de Vercingétorix par Aimé Millet est l’élément le plus spectaculaire et le mieux connu. Le Musée Municipal d’Alise a définitivement fermé ses portes en 1971. L’ensemble de ses collections a été déposé par la commune au Musée Alésia. La conservation départementale en a conduit le récolement complet qui a abouti à la signature d’une convention de dépôt entre le Département de la Côte-d’Or et la commune en janvier 2011. Le récolement a permis de reconnaître quelques vestiges recueillis aux cours des fouilles impériales : 1 aiguillon de stimulus, 1 exceptionnel manipule (poignée) de bouclier gaulois, 2 fers de pilum, 5 fers de lance et des boulets en calcaire. Longtemps perdus de vue, totalement oubliés des chercheurs, ces précieux témoignages seront à nouveau présentés au public dans les vitrines du Centre d’Interprétation. LE FONDS DU MUSÉE ALÉSIA : LE FRUIT DES DIFFÉRENTES CAMPAGNES DE FOUILLE DU XXE SIÈCLE Les collections réunies par la Société des Sciences de Semur-en-Auxois tout au long du XXe siècle ont été transférées au Département de la Côte-d’Or en 2006. Ces collectons renferment elles aussi des vestiges du sièges de 52 avant J.-C. Quelques-uns proviennent des campagnes de fouilles qui ont été réalisées sous l’égide de la Société des Sciences de Semur sur certains segments des lignes de retranchement romaines. L’ensemble le plus important et le plus significatif a été collecté lors de l’important programme de fouilles entrepris sur ces mêmes lignes sous la direction des professeurs Michel Reddé et Siegmar von Schnurbein entre 1991 et 1997. UN IMPORTANT PROGRAMME DE RESTAURATION Depuis 2002, le Département de la Côte-d’Or finance avec l’aide de l’État-Ministère de la Culture et de la Communication un important programme de restauration sur l’ensemble des collections des musées d’AliseSainte-Reine. Les objets qui se rapportent au siège de 52 avant J.-C. ont été prioritaires dans ce programme. Leur restauration a été anticipée de longue date car certains protocoles d’intervention (en particulier pour stabiliser le fer) peuvent s’étaler sur plusieurs années. Les objets en métal, surtout en fer (armes, objets en rapport avec la vie des légionnaires dans leurs camps), ont été restaurés au Laboratoire d’Archéologie des Métaux de Nancy-Jarville et au Centre de restauration et d’Études Archéologiques Municipal Gabriel Chapotat de Vienne. La partie mobile d’une meule à moudre le grain en granite a fait l’objet d’une intervention conjointe de Florence Godinot, une restauratrice nancéenne spécialiste du traitement du lapidaire, et du Laboratoire d’Archéologie des Métaux de Nancy-Jarville pour les vestiges de scellement en plomb. C’est le laboratoire Arc’Antique de Nantes qui est intervenu pour restaurer une panse d’amphore à vin italique, autre témoignage de la vie quotidienne des légionnaires. Élément tout à fait exceptionnel, le fragment de tente militaire romaine en cuir a été restauré par le laboratoire Arc Nucléar de Grenoble, spécialisé dans le traitement des objets organiques archéologiques retrouvés dans les milieux humides. QUELQUES OBJETS SIGNIFICATIFS Parmi les témoignages du siège de 52 avant J.-C. conservés dans les collections des musées d’Alise-SainteReine qui trouveront tous placent dans les vitrines du Centre d’Interprétation, certains sont particulièrement significatifs et méritent une attention particulière : FRAGMENT DE TENTE EN CUIR Grâce à des conditions particulièrement favorables dans le fond humide d’un fossé de la porte nord du camp « A », un fragment de tente en cuir de chèvre s’est conservé jusqu’à ce qu’il soit découvert en 1997. Les troupes romaines qui ont cantonné autour du Mont-Auxois habitaient sous des tentes. Les tentes utilisées par l’armée romaine étaient en cuir de veau ou de chèvre. Le fragment conservé mesure une cinquantaine de centimètres de long. Sa fonction exacte a pu être déterminée par comparaison avec des vestiges de tentes plus récents (époque impériale) découverts en Allemagne, en Hollande et en Angleterre. Il s’agit d’une pièce qui servait à renforcer l’angle supérieur d’un panneau latéral. C’est le plus ancien fragment de tente romaine conservé en Europe et le seul jamais retrouvé en France. HACHE-HERMINETTE (ASCIA) Fer L’ascia est, par excellence, l’outil le plus caractéristique des légions romaines. Elle est l’équivalent de notre pelle américaine puisqu’elle permettait de travailler aussi bien le bois que la terre et la roche lors de la construction des camps et des lignes d’investissement. AIGUILLON DE STIMULUS Parmi les pièges qu’il fait implanter le long de ses lignes de retranchement, César décrit dans ses Commentaires ce qu’il appelle des stimuli : « En avant, des pieux longs d’un pied auxquels des crochets de fer étaient fixés étaient entièrement enfouis dans la terre ; on en plaçait partout, à peu de distance les uns des autres ; on les nommait aiguillons. » (César, BG, 73, 9) Les fouilles du Second Empire ont permis de retrouver plusieurs crochets en fer qui correspondent au texte de César. Six sont aujourd’hui conservés au Musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye. Un septième a été retrouvé lors du récolement des collections du Musée Municipal d’Alise-Sainte-Reine. Un huitième a été découvert en 1958 au pied du mont Réa, près de la ligne de circonvallation. Ces crochets sont forgés en forme de baïonnette. Ils sont caractérisés par un coude qui permettait de les planter dans le support en bois sans endommager la pointe. Ce coude avait une autre fonction : il empêchait l’élément métallique de s’enfoncer trop loin dans le bois ou de subir une déformation latérale lorsqu’il subissait une pression à sa parte supérieure. Il a fallu attendre les années 1990 pour identifier les traces archéologiques des aiguillons sur le terrain, plus précisément sur le glacis de la contrevallation de la plaine des Laumes. Il s’agit de petites poches de gravier et de pierres de calage disposées de manière très régulière, sur six rangées et en quinconce, à une distance d’1,20 m (4 pieds) l’une de l’autre. En coupe, il a été possible d’observer entre les pierres de calage une trace ligneuse plus sombre, droite, haute d’environ 30 cm (1 pied) laissée par le support en bois. FERS DE PILUM Le pilum est, par excellence, l’arme de jet qui caractérise l’armée romaine à partir du Ier siècle avant J.-C. Il s’agit d’une arme assez légère qui était équipée d’un fer très long et particulièrement effilé. Le pilum était utilisé lors des assauts, juste avant le corps à corps. Il pouvait être propulsé sur une distance de 20 à 30 m. Particulièrement meurtrier, il était aussi utilisé pour neutraliser la défense de l’ennemi en se fichant dans son bouclier de manière à le rendre inutilisable. Grâce aux vestiges du siège conservés dans les musées d’Alise-Sainte-Reine, deux des trois principaux modèles de fers de pilum en usage dans l’armée de César pouvaient être évoqués dans le Centre d’Interprétation. Deux exemplaires du troisième modèle sont mis en dépôt par le Musée d’Archéologie nationale de SaintGermain-en-Laye afin de compléter cette présentation. PROJECTILES DE MACHINES DE GUERRE ROMAINES L’armée de César disposait de deux types de machines de guerre : des onagres, qui lançaient des boulets en pierre, et des scorpions, sortent de grosses arbalètes qui propulsaient à plus de 200 m des traits caractérisés par une pointe en fer massive à section carrée. Cette puissance de frappe sera évoquée dans le Centre d’Interprétation par des boulets en calcaire et un ensemble de pointes de traits de scorpions qui proviennent des collections des musées d’Alise. Ces témoignages archéologiques seront présentés à côté des reconstitutions grandeur nature des deux types de machines de guerre.