Réforme des soins psychiatriques : voir clair dans une

Centre de droit JuriSanté
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de droit hospitalier et de la santé
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et de la doctrine répondant à vos demandes
Le service téléphonique de renseignements juridiques
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du CNEH
N°76
Décembre 2011
Revue trimestrielle, 35
L’information juridique au service
des professionnels de la santé
Petites notes
de Jurisprudence
page 33
Panorama
Textes parus du 1er septembre
au 6 décembre 2011
page 35
Actualités
Fixation d’un délai de conservation
des bandes sonores des SAMU :
l’appel du juge entendu par le pouvoir
réglementaire
page 31
Édito
L’autonomie financière
des établissements publics
de santé existe-t-elle encore ?
page 1
3, rue Danton • 92240 Malakoff
DOSSIER
Réforme des soins
psychiatriques : voir clair
dans une réforme encore
obscure
page 3
1
Édito
Clotilde Poppe,
Juriste, Consultante au Centre
de droit JuriSanté du CNEH
Directeur de la publication
André Lestienne
Rédactrice en chef
Isabelle Génot-Pok
Secrétariat de rédaction
Brigitte de Lard-Huchet
Assistante
Nadia Hassani
Communication
Constance Mathieu
Comité de rédaction
Patrick Chiche, Directeur des affaires juridiques,
CHU de Nice ; Lin Daubech, Directeur des
affaires juridiques, CHU de Bordeaux ; Cécile
de Boisset, Chargée d’administration, Centre
départemental de repos et de so
ins de Colmar
;
Robert Haas, A
ffaires juridiques, Fondation
Hôpital Saint- Joseph ; Eric Rossini, Directeur
Général adjoint, Centre de lutte contre le cancer
Paul-Strauss de Strasbourg ; Christian Vallar,
Professeur, Doyen de la faculté de droit et
science politique de Nice, Avocat au barreau de
Nice ; Claudine Bergoignan-Esper, Professeur
des Universités ; Hervé Tanguy, directeur d’hô-
pital.
Conception et impression
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35 TTC
ien sûr, l’article L. 6141-1 du Code de la santé publique l’affirme : « les établis-
sements publics de santé sont des personnes morales de droit public dotées de
l'autonomie administrative et financière ».
Bien sûr, la réforme de la tarification à l’activité renforce l’autonomie financière !
Celle-ci fait table rase de la culture financière et administrative passée : tandis que
dans l’ancien système, la production était conditionnée par le montant de l’enve-
loppe global accordé par la tutelle ; dans le nouveau système, ce sont les ressources
qui vont permettre la production future. De la gestion de la dépense au manage-
ment de la recette…
Mais l'instruction ministérielle DGOS/PF1 n° 2010-350 du 23 septembre 2010 rap-
pelait à tous les agents du secteur public local l'obligation de signaler à leur hiérar-
chie tant les infractions pénales et illégalités que les dérives de gestion constatées
dans l'exercice de leur fonction. Cette instruction avait donc pour objet d’appeler les
comptables publics à dénoncer auprès des directeurs d'ARS les fautes, voire les sim-
ples erreurs de gestion des directeurs des établissements publics de santé. Et même
si la circulaire interministérielle n° DGOS/PF1/DGFiP/2011/274 du 8 juillet 2011
relative aux conditions et modalités d'échanges d'infor mations entre les services de
la direction générale des finances publiques et les agences régionales de santé, ainsi
qu'à l'appui du comptable public à l'exécutif hospitalier dans le cadre du devoir
d'alerte revoit les formes de cette procédure et abroge l’instruction du 23 septem-
bre 2010, le devoir d’alerte demeure bel et bien. Désormais le texte précise que le
comptable public est tenu « d'effectuer l'opération comptable en application de la
réglementation en vigueur même s'il constate un risque pour l'établissement et ses
gestionnaires. Pour autant, la stricte délimitation de ses contrôles ne dispense pas
le comptable de faire part aux autorités compétentes de ses interrogations sur la
régularité de certaines opérations et, prioritairement, au directeur de l'hôpital (…) ».
Il précise également qu’ils peuvent informer leur supérieur hiérarchique de faits
dont ils ont eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions et qui sont suscepti-
bles de constituer des actes contraires à la loi et/ou d'engendrer des préjudices
pour les finances publiques, sans se substituer aux autres administrations de l'État
dans l'exercice de leurs prérogatives (services des ARS et judiciaires notamment).
Ainsi, le comptable garde un rôle d’alerte mais prioritairement exercé au bénéfice
du directeur d’établissement.
Mais le nouveau décret n° 2011-1872 du 14 décembre 2011 encadre le recours à
l’emprunt des établissements publics de santé. Le texte soumet ainsi le recours à
l’emprunt à l’autorisation du Directeur général de l’ARS pour les hôpitaux fortement
endettés et limite la souscription de certains types d’emprunts et de produits dérivés.
Par conséquent, la difficile situation financière des établissements les rendent de
plus en plus dépendant de la tutelle.
Bien sûr, l’autonomie financière demeure…
B
L’autonomie financière des établissements
publics de santé existe-elle encore ?
Actualités JuriSanté n° 76 – Décembre 2011
 tous nos lecteurs,
Toute lquipe de la rdaction vous prsente ses meilleurs vux pour cette
nouvelle anne 2012 dont lactualit juridique retiendra sans nul doute toute
notre attention. La Rédaction
Sommaire
3
Dossier : Réforme des soins psychiatriques :
voir clair dans une réforme encore obscure
4 Petit historique de la loi pour les néophytes : histoire de comprendre
Isabelle Génot-Pok
6 La période d'observation et de soins initiale : Ce qu'il faut mettre en place
Aude Charbonnel
11 Partenariat établissements MCO/psychiatriques dans la réforme : Une coordination sans faille…
Brigitte de Lard-Huchet
16 Interview sur la mise en place de la réforme au Centre Hospitalier La Valette :
regards croisés des professionnels
Patrick Martin, Bernadette Vaissayre, Marie-Christine Campanaud
19 Brève interview d’un Juge des Libertés et de la Détention (JLD)
sur la mise en place de la réforme
Marie-Paule Regnault Lugbull
21 FOCUS :
Demande de levée de la mesure de soins sur décision du préfet :
cas de désaccord entre le préfet et le psychiatre
23 FOCUS :
Les soins sans consentement aux personnes ayant fait l’objet d’une
décision d’irresponsabilité pénale
25 Incohérences de la réforme : morceaux choisis…
Isabelle Génot-Pok
31 Actualités
Fixation d’un délai de conservation des bandes sonores des SAMU :
l’appel du juge entendu par le pouvoir réglementaire
Adeline Guellec
33 Petites notes de jurisprudence
35 Panorama des derniers mois
L’équipe du Centre de droit JuriSanté
Hervé
TANGUY
Claudine
BERGOIGNAN-
ESPER
Stéphanie
SÉGUI-
SAULNIER
Jean-Yves
COPIN
Isabelle
GÉNOT-POK
Brigitte
de LARD-
HUCHET
Clothilde
POPPE
Nadia
HASSANI
« Retrouvez la revue en ligne et des articles complémentaires
sur le site www.cneh.fr dans l’espace publications ».
Actualités JuriSanté n° 76 – Décembre 2011 3
ous les mécontentements sur la réforme des soins psychiatriques sans consente-
ment ont été exprimés avant, pendant, et juste après sa publication le 6 juillet 2011
(date demeurée mystérieuse dans son choix). Il n’est plus tant de faire la harangue.
Après 4 mois d’application, qu’en est-il réellement ? Quels sont les points d’achoppement
juridiques qui existent encore ou qui se révèlent à l’épreuve de la pratique ?
Aussi, dans son domaine d'action, le Centre de droit JuriSanté a l’avantage, d’être autant
dans l’analyse juridique pure que dans l’application pratico-pratique du droit. Aussi, les
7 derniers mois que nous avons passé à étudier cette loi et à l’expliquer aux hospitaliers,
à les aider à la mettre en place, nous permettent d’avoir un œil plus pointu sur les diffi-
cultés juridiques et pratiques.
C’est sous cet angle que nous avons choisi de traiter la mise en œuvre de la loi.
Il ressort tant de la lecture que de l’application de la loi que tous les acteurs de la santé
sont concernés et pas uniquement ceux de la prise en charge psychiatrique.
Dès lors, loin de prétendre à l'exhaustivité, le choix des thèmes de ce dossier a pour
objectif de sensibiliser sinon d’alerter tous les acteurs (hospitaliers, justice, administra-
tifs) sur leur rôle et la nécessité de travailler ensemble et de manière coordonnée et
commune. Les témoignages des acteurs sont aussi essentiels puisqu’ils permettent
d’appréhender, de l’extérieur comme de l’intérieur de l’hôpital, la réalité de l’application
de la loi. Au travers des différents articles que nous proposons, nous avons souhaité
pointer ce que nous avons vu ou perçu comme difficultés persistantes ou nouvelles.
Réforme des soins
psychiatriques : voir clair
dans une réforme encore obscure
T
Introduction
Isabelle Génot-Pok,
Juriste, Consultante au Centre
de droit JuriSanté
Actualités JuriSanté n° 76 – Décembre 2011
4
Dossier Réforme des soins psychiatriques :
voir clair dans une réforme encore obscure
La loi Évin du 27 juin 1990 (1), relative aux droits et à la
protection des personnes hospitalisées en raison de
troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation,
est venue réformer la loi du 30 juin 1838 sur les aliénés,
dite loi Esquirol (2). C’est cette seconde grande réforme
qui a consacré le principe de « l’hospitalisation libre »
comme régime général de la prise en charge du patient
nécessitant des soins psychiatriques. Il était donc bien
établi que ces patients bénéficiaient dans ce texte, des
mêmes droits que tous les autres patients pris en charge
pour une autre pathologie quelle qu’elle soit.
Par ailleurs, la loi Évin, tout en modernisant la notion
d’hospitalisation en psychiatrie et en posant le principe de
l’hospitalisation libre, fait demeurer deux modes d’hospi-
talisation sans consentement, l’hospitalisation sur
demande d’un tiers (HDT) et l’hospitalisation d’office
(HO). Or, la question de laisser en place le représentant
de l’État dans le cadre des soins était d’emblée probléma-
tique.
Enfin, ce texte portait en lui l’obligation d’être réévalué
dès 1995, soit cinq ans après. Or, quelle que soit la qualité
du rapport d’évaluation effectué par Martine Stroll (3),
aucune recommandation ne fut reprise pour modifier la
loi Évin. Il aura fallu attendre la loi du 4 mars 2002
relative aux droits des malades et à la qualité du système
de santé pour que la loi de 1990 soit quelque peu retou-
chée (4).
L’évaluation prévue n’ayant pas donné les effets escomp-
tés, il devenait urgent de réformer ce texte dont le temps
semblait passé, afin de rectifier de nombreuses faiblesses
du dispositif. Faiblesses largement décrites dans le rapport
de l’Inspection générale des affaires sociales et de celle
des affaires juridiques en date de mai 2005 (5).
Ce rapport commun abordait les points suivants : l’absence
récurrente du tiers, un régime juridictionnel flou rendant
très aléatoire le recours au juge des libertés et de la
détention (JLD), celui-ci apparaissant peu impliqué dans
son rôle de contrôleur, la nécessité de moderniser les
procédures tout en conservant les deux modes de prise en
charge (HDT, HO), le développement de modes de prise
en charge autres que la seule hospitalisation. Le rapport
pointait par ailleurs l’utilisation abusive des modes d’hos-
pitalisation sous contrainte du seul fait d’absence de place
pour imposer un patient en hospitalisation libre.
Entre temps, la jurisprudence nationale comme interna-
tionale, s’était prononcée sur divers points tels que la
qualité du tiers intervenant dans les conditions de la prise
en charge du patient en HDT. Le Conseil d’État a en effet,
en 2003, précisé la nécessité pour le tiers de démonter un
lien d’antériorité lui donnant qualité (et légitimité) pour
prendre une telle décision en sauvegardant l’intérêt du
patient concerné par la mesure (6).
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a
condamné la France notamment pour le préjudice moral
causé au patient de fait du retard du JLD à statuer sur les
demandes de mainlevée d’une décision préfectorale
d’HO (7).
Les prémices de l’évolution de la loi devenue nécessaire
étaient posés depuis plusieurs années et confirmés
récemment. Encore sur ce point, la CEDH pointe les
dysfonctionnements qu’a pu entraîner la difficulté d’arti-
culation dans le droit français des décisions relevant de la
compétence du juge administratif ou du juge judiciaire,
notamment quand elles ont pour conséquence d’empê-
cher un justiciable de faire valoir ses droits (8).
Un travail de refonte du texte de 1990 était engagé quand
d’autres décisions sont venues en modifier l’économie
générale. Complexes ou simples, peu importe, elles
venaient renforcer d’autant le droit des gens pris en
charge sans leur consentement, et cette seule idée légiti-
mait la modification du projet de loi en chantier.
C’est donc dans un premier temps, le 26 novembre
2010 (9) que le Conseil constitutionnel, à l’occasion d’une
Petit historique de la loi pour les néophytes : histoire de comprendre
Isabelle Génot-Pok,
Juriste, Consultante au Centre
de droit JuriSanté
(1) Loi 90-527 du 27 juin 1990 codifiée pour sa partie prise en charge des patients aux articles L. 3211-1s. CSP.
(2) Jean-Étienne Dominique Esquirol (Toulouse 4 janvier 1772 [1] – Paris 12 décembre 1840) est un psychiatre français, considéré comme le père de l'hôpital
psychiatrique français. Il fit en effet voter la loi de 1838 obligeant chaque département à se doter d'un hôpital spécialisé.
(3) Hélène STROLL, IGAS, Présidente Martine CLÉMENTE, DGS, Rapporteur général et auteur du Rapport n° 97081 Septembre 1997.
(4) Ajouts de la loi du 4 mars 2002 : Art. L. 3211-2-1 sorties accompagnées, Art. L. 3222-1 accès de la CDHP au dossier médical pour répondre aux demandes
d’accès formulées par des patients pris en charge en HDT/HO en cas de situation d’une particulière gravité, composition de la CDHP.
(5) « Propositions de réforme de la loi du 27 juin 1990 » rapport IGAS/IGSJ de mai 2005 commandé par les ministres de la santé et de la justice rendu public en
février 2006.
(6) Arrêt du CE du 3 décembre 2003 n° 244867 : « la décision d’hospitalisation sans consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être
prise sur demande d’un tiers qui si celui-ci à défaut de pouvoir faire état d’un lien de parenté avec le malade, est en mesure de justifier de l’existence de
relations antérieures à la demande lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci ».
(7) CEDH 27 juin 2002 L. Rc/France n° 33395/96 (24 jours de délais) ; 27 octobre 2005 Mathieu c/ France n° 68673/01 (4 mois de délais) ; 14 avril 2011
n° 35079/06 (46 jours de délais).
(8) CEDH Baudouin c/ France n° 35935/03 : compétence administrative pour contrôler la légalité externe de la décision préfectorale, compétence judiciaire pour
contrôler le bien-fondé d’une hospitalisation disproportionnée au regard de l’état de santé du patient et en ordonner la mainlevée.
(9) Décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010, Mlle Danielle S. (cas de HDT).
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