Dr Patrick DAOUD et Dr. Claude MAILAENDER

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Aspects médicaux-légaux
de la maladie de l’épaule :
application à la Médecine Agréée
Aubagne le 22 juin 2013
Docteur Patrick DAOUD (Rhumatologue)
Docteur Claude MAILAENDER (Chirurgien orthopédiste)
L’épaule : Comment comprendre l’Etat
antérieur selon les situations ?
Invalidité
Accident de Service
Maladie Professionnelle
Qu’est ce qu’un
ETAT ANTERIEUR ?
On entend par état antérieur, toute affection
pathologique ou prédisposition, connue ou non
connue, congénitale ou acquise, dont est
atteint l’individu au moment ou survient un
accident ou une Maladie Professionnelle ou
d’une mise en invalidité.
Cette définition exclut les simples notions de
terrain, de facteur prédisposant.
LA PREDISPOSITION
Il s’agit du terme réservé à un état constitutionnel
n’entrainant pas de déséquilibre chez le sujet mais
qui peut basculer vers une rupture de son équilibre
suite à un événement quelconque.
La principale prédisposition est l’âge.
D’autres facteurs, comme les influences familiales,
le marquage génétique et certaines pathologies
constituent aussi une prédisposition.
Le rôle du médecin expert est de:
Caractériser avec autant de précision que
possible le dommage imputable au
traumatisme ou à la MP et donc de tenir
compte de l’état antérieur ou de la
prédisposition ayant pu influencer le
dommage.
Le dommage corporel est constitué par
l’ensemble : « lésion + gêne fonctionnelle »
Pour pouvoir bien évaluer ce dommage
corporel il faut connaître les capacités du
blessé avant l’accident (état antérieur).
Le dommage corporel doit être évalué en
tenant compte des capacités et des activités
particulières de la victime avant l’accident.
Cette prise de connaissance doit se faire
dans le respect de la déontologie relative
au secret médical tant pour la
communication des dossiers antérieurs
que pour la révélation des données
médicales dans le rapport.
Le critère de l’autonomie de la victime
avant l’accident (dans sa vie privée et/ou
dans sa vie professionnelle) est le plus
souvent pris en considération.
Le préjudice du fait d’un accident, d’une MP
ou lors d’une mise en invalidité, sera
apprécier à ces trois niveaux :
Lésion
Incapacité fonctionnelle
Répercussions du handicap
Notre Raisonnement
1°- Dans le cas d’un AS: L’EA peut être fixé sans
attendre la consolidation ou la guérison, à la veille
de l’AS.
2°- Dans le cas d’une MP, il en est de
même. Il faut le fixer avant l’exposition au
risque.
3°- Dans le cas d’une mise en invalidité, il faudra
reprendre les lésions et leurs gênes fonctionnelles
liées à un EA, ainsi que les différents préjudices liés
aux faits durant la carrière de l’agent.
l doit être apprécié à la veille de la mise en stage ou
de la titularisation.
Concernant la MP, on peut consulter
les tableaux établis par la SS:
La désignation des maladies.
Le délai de prise en charge.
La liste indicative des principaux
travaux susceptibles de provoquer ces
maladies.
Le principe de réparation des MP repose
sur la présomption d’origine : la victime n’a
pas à faire la preuve de la corrélation
causale Travail-Maladie
• D’où l’appréciation de la pise en charge, de
l’indemnisation du handicap, de l’EA, du
reclassement professionnel.
• Ceci aboutissant sur la notion d’épidémiologie
(santé publique) et des mesures préventives
(médecin de prévention).
ACCIDENT de SERVICE
OBLIGATION POUR LA VICTIME
Elle doit prouver l’existence d’un dommage et son
imputabilité à l’accident.
L’article 1315 du Code Civil prescrit: celui qui réclame
l’exécution d’une obligation doit la prouver.
CMI, examens complémentaires, motifs d’arrêts de travail
et de prolongation de soins, traitements et compte rendus
opératoires, rapport d’expertise en DC, CMF.
.
OBLIGATION POUR L’EXPERT
En présence d’un état antérieur il doit :
Reconstituer l’état de la victime à la
veille de l’accident.
Déterminer l’influence de l’accident sur
l’état antérieur.
La survenue d’un traumatisme sur un état antérieur
peut avoir deux effets aggravants :
(
a) une aggravation lésionnelle lorsque le
traumatisme touche directement à la structure
anatomique siège de l’état antérieur (une rupture
tendineuse transfixiante sur un tendon
dégénératif).
b) une aggravation fonctionnelle plus globale,
touchant la même fonction (rupture transfixiante
sur une arthropathie dégénérative).
Dans le cadre d’un examen technique médico légal il
conviendra de démontrer la réalité de l’état antérieur et de
ses conséquences et essayer de mette en évidence
l’intrication de cet état antérieur avec l’état séquellaire.
Il faudra définir les limites de cette intrication, en établissant
ce qui revient à l’un et à l’autre et en tentant de tracer ce
qu’aurait été l’histoire naturelle de la pathologie
préexistante, dans son pronostic, si l’accident ne s’était
pas produit.
Il faudra en fin d’examen chiffrer le taux du déficit imputable à
l’accident au moment de la consolidation et correspondant
à la différence entre la capacité antérieure et la capacité
actuelle.
Recherche de l’état antérieur
a) Par un interrogatoire complet et détaillé avec des
questions du type :
•
•
Avez-vous eu des antécédents traumatiques particuliers ?
Aviez vous déjà des problèmes sur la zone traumatisée
avant le fait accidentel ?
b) Par un examen clinique complet qui permettra
quelquefois de retrouver des signes évocateurs d’une
pathologie précise cicatrices, déformations
articulaires…).
c) Par l’analyse du bilan d’imagerie médicale antérieure à
l’accident, voire l’étude d’un rapport d’expertise de
droit commun.
Dans le Bulletin du Conseil National de l’Ordre de
mars 1996, le Professeur Hoerni écrivait « même
s’il est autorisé par le patient, le médecin n’a pas
à dévoiler ce qu’il sait, mais il peut lui remettre un
certificat dont il fera l’usage qu’il voudra ».
Le Conseil de l’Ordre a donc rejoint tardivement la
position des magistrats. La seule règle à respecter
est de faire transiter la demande et la réponse par
l’intermédiaire du patient et d’agir dans la plus
grande transparence.
Il est très difficile de mettre en doute le caractère
déclaré asymptomatique avant l’accident, d’une
omarthrose, d’une distension ligamentaire, d’une
Tendinopathie calcifiante.
D’où l’importance d’ obtenir le maximum de
documents médicaux antérieurs et rédigés dans un
contexte excluant toute arrière pensée de réparation
financière (compte rendu opératoire, compte rendu
de radiographies où figurent souvent des notions
cliniques).
Si l’état antérieur est révélé par un accident et que l’on
a la certitude qu’il était parfaitement
asymptomatique, on ne pourra pas invoquer cet état
antérieur pour diminuer la barre de responsabilité
de l’accident.
Si cet état antérieur était symptomatique on peut alors
évoquer deux cas de figure :
a) soit aggravation transitoire de l’état antérieur avec
poussée douloureuse ou poussée inflammatoire
avec ensuite retour à l’état antérieur.
b) soit aggravation nette et durable de la fonction
antérieure ; on sera alors dans la situation de
séquelles à indemniser par IPP (traumatisme de
l’épaule sur omarthrose avec oedème
cartilagineux à l’IRM et constatation rapide d’une
accélération du pincement articulaire sur les
clichés).
Au moment de la consolidation il faudra tenir
compte de l’aggravation fonctionnelle relevant
du traumatisme lui-même, mais aussi l’évolution
aggravante attendue, prévisible de l’état
antérieur, c’est à dire de son histoire naturelle.
Le rapport d’expertise devra éclairer la Commission
de Réforme sur la différence entre l’état physiologique
avant l’accident et l’état après celui-ci, ainsi que sur
l’étendue des préjudices physiologiques.
La Commission de Réforme devra se poser
deux questions :
a) qu’elle aurait été l’évolution de l’état antérieur en
l’absence du traumatisme ?
b) qu’elle aurait été l’évolution du traumatisme en
l’absence de l’état antérieur ?
En cas d’aggravation d’une pathologie
préexistante, l’IPP ne devra tenir compte que
de l’aggravation imputable au service.
D’où la nécessité pour la Commission de
Réforme de connaître les deux taux attribués
par le médecin agréé :
celui de l’infirmité préexistante (non
imputable au service et non indemnisable).
celui résultant de l’aggravation par rapport à
l’infirmité restante.
Dans sa conclusion, le médecin agréé :
Déterminer une date de consolidation ou
de guérison.
Chiffrer un taux d’IPP consécutif et préexistant à
l’ADS (différence entre la capacité antérieure et la
capacité actuelle), selon le barème annexé au code
des pensions civiles et militaires.
Ce taux deviendra un EA en cas de deuxième
accident sur la même région.
INVALIDITE
Peut-on tenir compte de cet état antérieur
dans le calcul du taux d’invalidité ?
L’accident a décompensé un état antérieur
qui était apparemment totalement
asymptomatique avant le fait accidentel
L’accident doit-il supporter la réparation
intégrale du dommage ?
L’accident a réactivé un état antérieur connu,
redevenu latent au moment du fait accidentel
L’accident doit-il tout supporter ?
COMMENT RAISONNER DEVANT UN
TRAUMATISME DE L’EPAULE
On ne devrait pas tenir compte de l’état antérieur au
moment du fait accidentel sauf si l’accident a
décompensé un état antérieur avec capacités
antérieures réduites: le préjudice complémentaire qui lui
est imputable sera alors réparé en accident de service.
Si la symptomatologie survient sur une épaule
antérieurement asymptomatique certains ont tendance à
prendre en charge toute la symptomatologie séquellaire.
Il faut toutefois, devant des images témoignant de l’état
antérieur, se demander si cet état déclaré non
douloureux avant l’accident n’était pas responsable
d’une gêne douloureuse et fonctionnelle.
La Cour de Cassation a jugé que : «le droit de la
victime à obtenir l’indemnisation de son préjudice
corporel ne saurait être réduit en raison d’une
prédisposition pathologique lorsque l’affection qui
en est issue n’a été provoquée ou révélées que
par le fait dommageable»
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