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© Université de Liège - http://reflexions.ulg.ac.be/ - 19 April 2017
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Exploration Agency (Jaxa). Les analyses, publiées aujourd'hui dans le Geophysical Research Letters(1),
ont permis d'identifier les phénomènes d'une zone précise des aurores joviennes. « Les observations ont été
menées de front à l'aide des télescopes de deux satellites différents, explique-t-il. Nous étions aux commandes
d'Hubble, et l'équipe japonaise, du nouveau satellite Hisaki ».
Hubble (HST), télescope spatial développé par la NASA et l'ESA, est l'un des outils majeurs de notre quête
du cosmos. En orbite autour de la Terre depuis 25 ans, il a notamment contribué à mieux évaluer l'expansion
de l'univers, à confirmer la présence de trous noirs supermassifs au centre de certaines galaxies ou encore
l'existence de la matière noire. Il permet également d'observer avec une très belle définition les planètes
de notre système solaire. Mais il est fortement sollicité, et ne peut consacrer aux aurores joviennes que
quelques orbites de 90 minutes par an (ou plutôt 45 minutes car le reste du temps, la terre se trouve entre
Hubble et Jupiter !). Hisaki est bien plus petit, et ne peut observer que dans l'ultraviolet extrême (là où Hubble
peut observer à des longueurs d'ondes allant de l'infrarouge à l'ultraviolet), avec une résolution spatiale
plus limitée. « Mais il est dédié à l'observation de l'interaction entre le vent solaire, et les atmosphères et
magnétosphères des planètes du système solaire. En fonction de sa position et de l'alignement de la Terre
et de Jupiter, il peut observer les aurores joviennes en continu pendant de longues périodes. Pour cette
campagne, Hisaki a pu récolter des données sur les deux premiers mois de 2014. » Une période au cours de
laquelle, pendant deux semaines, les chercheurs européens ont pu observer Jupiter pendant 45 minutes tous
les jours à l'aide d'Hubble. Une période assez longue pour un télescope aussi prisé.
Le télescope japonais observait donc Jupiter quasiment en continu. Mais sa résolution ne permettait pas
une grande précision d'analyse. L'aurore étudiée était intégrée sur un seul pixel. Il était possible de détecter
les variations de la brillance aurorale, mais pas de déterminer les régions les plus touchées. Une nuance
qu'Hubble était capable d'apporter, mais sur des temps d'observation plus courts. Combiner les données
récoltées par les deux outils allait permettre la compréhension de ces phénomènes hétérogènes.
Le vent solaire écarté
Jusqu'alors, l'origine des aurores situées à l'extérieur de l'ovale principal n'était pas connue. « Nous avions
déjà observé des variations de leur brillance, et j'avais proposé l'hypothèse d'une origine interne, à savoir
une intensification de l'activité volcanique d'Io, qui augmentait la quantité de gaz émis, se souvient Bertrand
Bonfond. Ce qui devait créer plus d'événements de redistribution du plasma dans le système jovien. Mais ce
n'était qu'une interprétation. Nous manquions de données permettant de vérifier cette théorie. » Lors des deux
semaines d'observation du début de l'année 2014, la Terre et Jupiter étaient alignées par rapport au soleil.
Situation optimale pour extrapoler l'intensité du vent solaire sur Jupiter en fonction de sa force perçue sur Terre.
« Pendant toute une semaine, le vent solaire a été très constant sur Terre. Une véritable aubaine. Autant les
variations sont difficiles à extrapoler avec précision, autant s'il ne s'est rien passé sur Terre, on peut conclure
qu'il ne s'est rien passé sur Jupiter non plus.» Au cours de cette période, les chercheurs ont localisé des pics
de brillance aussi intenses que soudains. « On en a donc conclu que pour ces intensifications aurorales, le
vent solaire n'y était effectivement pour rien. Le processus était bien interne. Des analyses approfondies nous
ont permis de confirmer une redistribution du plasma. »