Professeur Isabelle Fourasté Faculté des Sciences Pharmaceutiques de Toulouse Le Bleuet Centaurea cyanus L. Asteraceae Pierre Fabre Pierre Fabre - Le Bleuet Centaurea cyanus L. (Asteraceae) des affections des yeux, des rhumatismes, de la rétention d'urine et des aphtes. Son utilisation est une pratique remontant, en réalité, aux temps où la théorie des « signatures » jouait régulièrement. Dans le passé et jusqu'au XIXème, on utilisait, pour les soins des yeux, le Bleuet, la Chicorée et la Bourrache, plantes dont les fleurs bleues étaient symbole de vue transparente comme un ciel sans nuage. Ainsi, en France, le Bleuet est parfois appelé « casse-lunette » (4, 5, 7, 8). •Aujourd'hui, le Bleuet est beaucoup moins utilisé pour ses principes actifs mais plutôt comme un élément d'attrait, en raison de la note colorée qu'il apporte aux infusions. Les capitules du Bleuet sont l'objet d'une monographie dans la Xème édition de la Pharmacopée Française (9). L e Bleuet est une plante herbacée annuelle à tige grêle et rameuse de 25 à 80 cm de hauteur, à feuilles un peu cotonneuses, linéaires ou à lobes aigus. Les capitules, longuement pédonculés, ont des bractées imbriquées à bords membraneux ciliés et des fleurs tubuleuses bleues. Le fruit est un akène blanchâtre, comprimé, pourvu d'une aigrette fauve (1, 4, 5, 6). • Originaire de l'orient méditerranéen, le Bleuet pousse dans les champs cultivés de toutes les régions tempérées, l'espèce s'étant répandue dans le monde entier avec les cultures céréalières. Très commun au début du siècle, le Bleuet a pratiquement disparu dans certaines régions de grande culture, en compagnie de la flore messicole (Matricaire, Coquelicot, Marguerite). • Le Bleuet, Centaurea cyanus, était classé dans l'ancienne famille des Centaurées, famille connue depuis la mythologie Grecque : le dieu Saturne et Phylire, nymphe de l'océan, eurent un fils qui naquit avec la tête, les bras et le buste d'un homme mais avec le torse d'un cheval. Ce fut le centaure Chiron. Phylire, atterrée, chassa son enfant qui vécut reclus. Il devint médecin grâce à sa connaissance des plantes. Chiron fut le premier à découvrir les propriétés de cette belle Centaurée, le Bleuet, dont la fleur le sauva des terribles douleurs dont il était l'objet après qu'une flèche empoisonnée se fut plantée dans son genou. L es vertus médicinales du Bleuet furent mentionnées pour la première fois au XIIème siècle par sainte Hildegarde. étaient traditionnellement uti- Les capitules du Bleuet lisés dans le traitement - composition chimique - 4 - Polyines Ce sont des dérivés poly-acétyléniques amers caractéristiques de la famille des Asteraceae. OH 1, 7, 9-heptadécatriène-11, 13; 15-triyne HO OH OH HO OH 5, 7, 9, 11-tetradécatétraèn-1-ol (5E, 7E, 9Z, 11E) + HO + OH O-β-D-Glu O-β-D-Glu OH OH ■ Principaux constituants chimiques de la fleur de Centaurea cyanus L. (1,4,7,10) 1 - Mucilages 2 - Tanins 3 - Pigments polyphénoliques A - Flavonoïdes Il s’agit de dérives glycosylés de l’apigénine Apigénine OH B - Anthocyanes Cyanine Pélargonidine - Données pharmacologiques - ■ ACTIVITES ANTI-INFLAMMATOIRE ET ASTRINGENTE (1, 4, 11) L'effet anti-inflammatoire d'un extrait de Bleuet, doublé d'une légère astringence, mis à profit en ophtalmologie, pourrait être rapporté aux polyines ainsi qu'aux polyphénols. L'effet anti-inflammatoire serait une conséquence des propriétés antiseptiques de l'extrait. ■ ACTION DIURÈTIQUE (1, 4) Le Bleuet possède des propriétés diurétiques, vérifiées expérimentalement, qui seraient dues aux flavondides. - USAGES TRADITIONNELS ET COURANTS - ■ USAGES TRADITIONNELS (4,6,7,8) Les fleurs du Bleuet étaient utilisées en usage externe (compresses imbibées de l'infusion) dans le traitement des blépharites (inflammation du bord libre de la paupière due généralement à une infection par des Staphylocoques) et des conjonctivites. Les capitules étaient également employés comme diurétiques et stimulants du métabolisme; ils entraient dans la composition de tisanes employées pour régler la digestion et traiter les troubles gastriques. Les graines, mélangées à du miel, sont un excellent purgatif. Enfin, le Bleuet était utilisé contre la toux comme tonifiant et apéritif. ■ INDICATIONS THERAPEUTIQUES (2,3) Le Bleuet est utilisé en usage local dans le traitement d'affections dermatologiques (petites plaies, écorchures, crevasses, gerçures et piqûres d'insectes ... ). Il est également utilisé en cas d'irritation ou de gêne du globe oculaire dues à une atmosphère enfumée, un effort visuel soutenu, des bains de mer ou de piscine,... Les pigments bleu, une fois isolés, sont également très utilisés par l'industrie cosmétique. ■ EFFETS INDESIRABLES, CONTRE-INDICATIONS (10) La littérature ne signale pas d'effets secondaires toxiques. - identification (9) - L a partie utilisée du Bleuet est constituée par le capitule séché de Centaurea cyanus L. Le capitule présente un involucre jaunâtre, formé de bractées membraneuses imbriquées, légèrement pubescentes sur la face externe, glabres et luisantes sur la face interne, bordées au sommet de dents scarieuses brunes. Les fleurs ont un calice réduit à quelques soies blanches, une corolle bleue constituée par 5 pétales soudés à la base en un tube étroit, évasé et denté au sommet; les fleurs du pourtour, plus grandes, ont de 5 à 10 dents de longueur inégale; les fleurs du centre, plus nombreuses et beaucoup plus petites, sont régulières avec une corolle tubulaire évasée au sommet en 5 dents égales. • L'examen en Chromatographie sur Couche Mince (C.C.M.) permet d'identifier certains pigments. Centaurea Cyanus L. Capitules et fleurons séchés. - bibliographie - 1 - BEZANGER L., BEAUQUESNE L. et al. 6 - GIRRE L. Traditions et propriétés des plantes Plantes médicinales des régions tempémédicinales. Ed. Privat, 1997, p. 144. rées. Ed. Maloine (Paris), 1990, p. 345. 7 - LAROUSSE Encyclopédie des plantes médicinales. 2 - BRUNETON J. Ed. Larousse-Bordas, 1997, p. 183. Pharmacognosie - phytochimie plantes médicinales. Ed. Lavoisier, 8 - LHOSTE J. 2ème édition, 1993, p. 311. Le grand livre de la phytothérapie. Ed. Michel Lafont Conseil +, 1989, 3 - CORNILLOT P., ANTOINE P., p. 145. BALANSARD G. et al. Encyclopédie des médecines natu9 - PHARMACOPEE FRANÇAISE, relles. Editions Techniques, 1993, Xème édition Ed. Maisonneuve, 1995. Sections D1 p. 4. 4 - DELAVEAU P. Les actualités pharmaceutiques. Mars 1981, n° 175. 5 - FOURNIER P. Le livre des plantes médicinales et vénéneuses de France. Encyclopédie Biologique, Ed. Lechevalier, 1948, Tome 1, p. 321. 10 - VAN HELLEMONT J. Compendium de phytothérapie. Ed. Service Scientifique de l'APB, 1986, p. 90. 11 - VIGNEAU C. Plantes médicinales, thérapeutique, toxicité. Ed. Masson, 1985, p. 111, 152. Pierre Fabre Pierre Fabre