BOLZMAN Claudio Migrations vers la Suisse hors des grands

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Migrations vers la Suisse en
dehors des grands centres
urbains
Claudio Bolzman
Université de Sherbrooke, le
2.6.2009
C. Bolzman, Sherbrooke, 2.6.09
Caractéristiques de la Suisse
Surface de la Suisse: 41’000 km 2
 Peu de régions isolées des centres urbains
(souvent moins d’une heure)
 Peu de « grands » centres urbains:
Zurich; Genève, Bâle, Berne, Lausanne
seraient ailleurs des agglomérations
moyennes
 Beaucoup de villes moyennes et petites:
10’000 habitants est déjà une ville

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Caractéristiques de la Suisse1
Du point de vue administratif, la Suisse
est divisée en 26 canton et près de 3’000
communes
 Il y a également 54 régions de montagne
(depuis 1976) qui reçoivent un soutien
particulier de la Confédération: faiblesse
démographique (1’500 à 114’000
habitants)
 30 zones économiques de redéploiement
(problèmes économiques, chômage) (30 à
48’000 habitants)

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Situation des étrangers en Suisse
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Fin 2007, les étrangers sont 1‘700'000 et
représentent le 22% de la population résidante,
ce qui constitue la proportion la plus élevée en
Europe après le Luxembourg.
Les principales nationalités représentées sont:
Ex-Yougoslavie, Italie, Allemagne, Portugal,
France, Turquie, Espagne, Sri Lanka.
On voit: la majorité des étrangers sont
Européens. Mais la proportion d’étrangers
provenant des Etats limitrophes passe de 87% en
1960 à 33% en 2007.
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Localisation des étrangers
La majorité des ex-Yougoslaves,
Allemands, Turques, Sri Lankais résident
en Suisse Allemande
 La majorité des Portugais, Français,
Espagnols résident en Suisse romande
 Les Italiens sont bien repartis entre les
trois régions linguistiques. Ils composent
le premier et le plus important flux
migratoire de l’après-guerre.
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Un peu d’histoire
La Suisse est ainsi un pays d'immigration
depuis longue date. Déjà vers la fin de la
première guerre mondiale, la proportion
d'étrangers a atteint 11% de la
population résidante.
 Cette proportion a diminué entre les deux
guerres, pour atteindre 5% en 1941. Lors
des "trente glorieuses", le nombre
d'étrangers et leur pourcentage dans la
population ont cependant à nouveau
fortement augmenté (11% en 1960).
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L’importance de l’immigration
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Des estimations montrent que depuis 1945, 2
millions d'individus sont venus en Suisse comme
immigrés (et sont restés) ou sont des enfants
d'immigrés. Sans les migrations, la population
suisse n'atteindrait que 5,2 millions de personnes
au lieu des 7,5 millions actuels (Wanner, 2001).
En fait, la contribution de l'immigration à la
croissance démographique ces cinquante
dernières années en Suisse a été plus forte que
dans les pays d'immigration classiques tels que
les Etats-Unis, le Canada, l'Australie (Haug,
2001).
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Trois moments
Prédominance des facteurs de demande
propres à la Suisse
 Importance des facteurs liées aux pays
d’origine et dissociation de la migration de
la conjoncture économique
 Changements liés à la globalisation
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Raisons de la migration de l’aprèsguerre:
La Suisse a besoin de main d’œuvre pour
faire démarrer son appareil de production,
qui n’a pas été touché par la guerre,
contrairement aux pays voisins
 On cherche surtout des travailleurs
manuels, qualifiés ou non, pour l’industrie,
la construction, l’agriculture, le tourisme,
la restauration.
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Espace de recrutement
La Suisse n’ayant pas de colonies, elle va
chercher à recruter ces travailleurs dans
les pays voisins, notamment en Italie.
 Elle signe en 1948, un accord de
recrutement avec ce dernier pays
 Ainsi, en 1950, 49% de tous les étrangers
résidants en Suisse (140’280) viennent de
ce pays et 84% des pays limitrophes.
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Demande et politique d’immigration
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Entre 1946 et 1964, la Suisse met en place une
politique de rotation.
Il s’agit d’une politique de la main d’œuvre
fortement liée à la conjoncture économique. On
perçoit les immigrés avant tout comme des
travailleurs de passage et non pas comme des
gens venant s'installer de manière durable en
Suisse. Il est très facile d’y entrer, mais aussi de
sortir
Le nombre de travailleurs immigrés fluctue selon
les besoins de l’économie
L’immigration est considérée comme un
instrument d’une politique conjoncturelle d’une
grande souplesse.
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Cadre légal
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On va créer des permis permettant de moduler
le séjour en fonction de la conjoncture
Ainsi, en 1949 la législation permet le nonrenouvellement ou même le retrait du permis de
séjour en cas de ralentissement conjoncturel
Pas de transformation du permis saisonnier en
permis annuel
10 ans pour passer du permis annuel au permis
d’établissement
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Prédominance du modèle de demande
jusqu’aux années 1980
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Introduction d’une politique de plafonnement de
la main d’œuvre à partir de 1964, suite aux
pressions xénophobes et à des constats de
dysfonctionnement
Mais la politique de permis (ABC) permet d’avoir
un contrôle important sur la canalisation de la
main d’œuvre et son utilisation conjoncturelle. On
peut maintenir la main d’œuvre dans certaines
régions périphériques.
Ex. de la crise des années 1975-1976, non
renouvellement de 250’000-300’000 permis,
exportation du chômage, idem 1982-83.
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Remplacement des travailleurs italiens
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
Entre 1946 et 1974, la demande du marché du
travail de la Suisse a constitué le principal facteur
déterminant de la migration, mais pour autant
qu’un taux de chômage élevé ait existé au pays
d’origine.
Ainsi, lorsque le développement économique de
l’Italie a tari cette source de main d’œuvre, la
Confédération s’est tournée vers d’autres pays:
d’abord l’Espagne, ensuite la Yougoslavie et le
Portugal.
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Deuxième période
Deux facteurs importants:
 Toute migration de travail finit par devenir
une migration de peuplement (Sayad)
 Poids croissant des problématiques liées à
la violence politique et à la précarisation
dans divers pays de départ
 Loi sur l’asile entrée en vigueur en 1981
reconnaît la persécution n’importe où dans
le monde comme motif pour l’asile

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D’une migration de travail à une
migration familiale
La théorie des réseaux montre bien qu’à
partir du moment un certain nombre des
migrants travaillent dans un pays, une
partie d’entre eux font venir leur famille,
leurs proches.
 En Suisse, nombre de travailleurs ont fait
venir, parfois avec beaucoup de difficultés
(liées aux obstacles légaux) leurs familles

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Le regroupement familial
Dans les années 1990, le regroupement
familial devient le principal motif d’entrée
en Suisse, devant les entrées avec un
contrat de travail (plus de 40% de
entrées).
 Il s’agit principalement des conjoints et
des enfants des migrants établis en
Suisse.
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Violence politique et asile
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A partir du milieu des années 80 on observe une
augmentation des demandes d’asile liées à des
situations de violence politique dans différents
endroits du monde.
Trois cas de figure:
transformation d’une migration de travail à la fois
en migration familiale et liée à la violence
politique (ex-Yougoslavie)
Transformation d’une migration de travail, plus
ou moins reconnue, en migration politique
(Turquie)
Nouvelle migration liée à la violence politique (Sri
Lanka)
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L’exemple des ex-Yougoslaves
La Yougoslavie était un pays de
recrutement officiel de travailleurs à
l’époque de Tito
 La migration de Yougoslavie se transforme
de migration essentiellement saisonnière
des hommes seuls en migration familiale
suite à la crise économique et à la montée
du nationalisme dans ce pays vers la fin
des années 1980
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Quelques chiffres
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En 1988, 10% des enfants scolarisés en Suisse
ont un passeport ex-Yougoslave, ce chiffre passe
à 37% en 1998 => regroupement familial
précipité lié à la guerre.
En 1980, 50’000 Yougoslaves en Suisse
En 1988, ils sont 140’000
En 1998, ils sont 320’000
C’est surtout entre 1990-1992 que la croissance
est la plus forte: 20% par an. Stabilisation vers
1998, avec 2,4% par an.
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La migration turque
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A la différence de la Yougoslavie, la Suisse n’avait
pas d’accords de recrutement avec la Turquie,
mais une certaine nombre de travailleurs et de
leurs familles se sont installés en Suisse via
l’Allemagne ou ont était recrutés en tant que
spécialistes (p.ex. à Moudon).
Il y avait 38’000 ressortissant turcs en 1980.
Le coup d’état militaire de 1981 et le conflit avec
les Kurdes va provoquer un accroissement de la
pop. de Turquie qui demande l’asile en Suisse en
particulier à partir de 1984.
En 1990, on passe à 81’000 Turcs
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L’exemple de la Turquie
Nombre de demandes d'asile déposées par des ressortissants
de nationalité turque, depuis 1980
12'000
10'000
8'000
6'000
4'000
2'000
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20
08
20
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20
04
20
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20
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98
19
96
19
94
19
92
19
90
19
88
19
86
19
84
19
82
19
80
0
La migration de Sri Lanka
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Au début des années 1980, il n’y avait
pratiquement pas des Sri Lankais en Suisse.
Actuellement il y en a environ 42’000 personnes
d’origine sri lankaise, la majorité tamoule.
La plupart sont venus par le biais de l’asile
surtout à partir de 1985. Le pic de demandes
ayant atteint son maximum en 1992, avec près
de 9’000 demandes, liées à la situation au PO et
à une politique un peu moins restrictive de la
Suisse en comparaison européenne.
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Synthèse deuxième moment
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On observe ainsi, à partir du milieu des années
1980:
Une diminution des migrations liées à une
demande du marché du travail suisse
Une augmentation des migration liées à des
problématiques de violence politique
Une diversification des origines des migrants
Un contrôle accru des migrants venant par le
biais de l’asile qui sont retenus dans les zones
périphériques
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Troisième moment: la globalisation
Intensification des échanges, globalisation
de la précarité, des destinations
 Concurrence pour les compétences,
augmentation des High Skilled
 Délocalisation sur place et globalisation
des marchés du travail (latino)
 Communautés transnationales
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Migrations et globalisation
A partir des années 1990, mais surtout
2000, la diversification des origines des
migrants va s’accentuer
 Cette tendance est liée à une plus forte
mondialisation du marché du travail
 La Suisse va s’adapter à cette
mondialisation en essayant d’attirer chez
elle des personnes « hautement
qualifiées », susceptibles d’apporter une
valeur ajoutée importante à une économie
en concurrence accrue avec les autres
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Deux instruments
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Elle va le faire par deux voies:
Les accords de libre circulation avec l’UE
Le recrutement de personnes hautement qualifiées hors UE
(Letr de 2008, mais pratique déjà avant)
La proportion de primo-migrants hautement qualifiés n'a
cessé de progresser depuis la cohorte arrivée en 1992
(36%), pour dépasser 50% pour les cohortes arrivées à
partir de 1998. Parmi les mêmes cohortes, la proportion de
primo-migrants peu qualifiés est passée de 72,2% (1992) à
41,3% (2000), mettant en évidence la forte réorientation
des flux migratoires en faveur des catégories de personnel
plus qualifié.
Les régions essayent de les attirer en leur proposant
différentes avantages
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Globalisation et précarisation
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On continue aussi à recruter des travailleurs peu
qualifiés, notamment en provenance de l’UE (par
exemple Portugal) pour certains secteurs de
l’économie (industrie, construction, tourisme,
etc.).
En revanche, il apparaît un phénomène nouveau:
un recrutement mondialisé dans certains secteurs
particulièrement précaires, avec une féminisation
de la migration et l’augmentation des « sans
papiers »
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Les sans papiers
Du côté Suisse, il y a un grand besoin de main d’œuvre dans le
secteur du « care » (garde des enfants, des personnes âgées) et
de l’économie domestique, pour permettre aux deux conjoints
des familles résidantes en suisse (Suisses et étrangers établis), de
pouvoir travailler à l’extérieur et d’avoir deux salaires, en
l’absence de structures sociales de prise en charge.
 Cela implique un fort appel à une main d’œuvre féminine (latinoaméricaine, philippine) , souvent instruite, perçue comme plus
efficace dans ce domaine, et qu’on peut payer modestement
 Il y a une internationalisation du marché du « care ».
 Selon une enquête du SIT à Genève, 70% des « sans papiers »
recensé-e-s travaillent comme femmes de ménage, dans la garde
d’enfants et dans le nettoyage.
Mais il y a également des « sans papiers » dans d’autres secteurs, du
fait de la politique migratoire restrictive de la Suisse: hôtellerierestauration, nettoyage, bâtiment, agriculture…
Ils résident dans leur majorité dans les zones urbaines où l’anonymat
est plus facile à préserver
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Bilan du point de vue des cantons
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Les cantons les plus répulsifs à l’égard des
étrangers sont les cantons périphériques, avec
une dimension rurale importante.
En Suisse alémanique ceux de Suisse centrale:
Appenzell, Glaris, Obwald et Uri, ainsi que les
Grisons. Bâle-Ville l’est aussi pour des raisons
d’espace. Des habitants y vont à Bâle-Campagne.
En Suisse romande, il s’agit du Valais et du Jura
(Zarin-Nejadan et Murier, 2000).
Portugais et ex-Yougoslaves tendent à quitter le
Valais et les Grisons
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Raisons
Il reste à expliquer les raisons de cette
répulsion:
 Probablement les raisons principales
concernent l’emploi. Ces cantons offrent
les moins de possibilités dans ce domaine
(à l’exception de Bâle)
 Les cantons de Suisse centrale sont aussi
les plus fermés et hostiles aux étrangers,
ce qui s’exprime régulièrement lors des
votations concernant cette population.
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Migrations internes
Les étrangers avec un permis B sont plus
mobiles à l’intérieur de la Suisse que les
étrangers établis et les Suisses.
Probablement car l’obtention d’un permis
B leur donne plus facilités de mobilité que
des statuts juridiques plus précaires.
 Ce sont les segments jeunes de la
population active qui migrent le plus
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Migrations internes
L’acte migratoire est fortement lié à
l’activité professionnelle. Les principaux
secteurs concernés sont: hôtellerierestauration, industrie et bâtiment, et
administration et commerce.
 Les Italiens constituent la nationalité qui
migre le plus en réseau, mais si l’on tient
compte de la taille de la population, ce
sont les Portugais qui viennent en tête
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