Cinquième cours

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Histoire de la
France
révolutionnaire
Cinquième cours :
La Réaction
(1794-1804)
Cinquième cours :
1 – Évolution politique
2 – opposition intérieure
3 – Économie et société
4 – Politique étrangère
1 – Évolution politique
1.1 - La Convention thermidorienne
• La Convention thermidorienne s’étend de juillet 1794,
jusqu’à la mise en place du Directoire, le 26 octobre
1795.
• Elle est associée au rétablissement de la légalité ou
au triomphe de la contre-révolution. Ou les deux.
• Le jugement sur la terreur a fluctué, mais en juillet 1794,
il est univoque. Même les collaborateurs des triumvirs
déchus s’emploient à tourner la page, condamnant les
excès de 1793-1794 et présentant Robespierre comme
un tyran.
• Mais ils ne remettent pas en question l’organisation
et la structure du pouvoir, qui ne sont pas responsables.
• Position compréhensible, car ils demeurent les maîtres
du Comité… Ce groupe est favorable au maintien de
l’ensemble de la politique intérieure, sécuritaire et
économique : la Terreur, mais sans Robespierre.
• Cette opinion n’est pas partagée par tous et avec la
fin de la Terreur de nombreux députés commencent à
donner de la voix.
• Cette tendance se manifeste autour des dantonistes,
mais ils n’auraient pas pu s’imposer sans le soutien de
la majorité des députés de la Plaine, qui se montrent
favorables à une stabilisation de la situation.
• Pour la première fois depuis 1789, le cours de la vie
politique s’oriente vers la droite, la Terreur ayant
marqué la limite du radicalisme révolutionnaire.
• En remettant en question les idéaux libéraux, l’évolution
politique menaçait les gains de la bourgeoisie et les
motivations à l’origine de sa révolution.
• Le 11 thermidor Barrère propose trois noms pour
remplacer les triumvirs au Comité, mais la Plaine exige
de discuter de ces nominations pour la première fois
et réclame un renouvellement plus fréquent des
membres.
• Avec les décrets du 24 août, le Comité perd plusieurs
de ses attributions, distribuées à d’autres instances. Il
sera aboli en 1795.
• Puis vint le démantèlement de la Commune de Paris
et son remplacement par deux comités subordonnés à la
Convention. Des processus similaires surviendront
graduellement en province.
• Se pose la question de la réhabilitation des victimes
de la Terreur : royalistes, fédéralistes, « accapareurs »
sont élargis et réclament justice. Ils se déchaînent contre
les jacobins et alimentent la colère de la population.
• En décembre 1794, les députés de la Gironde
survivants sont réintégrés à la Convention.
• Avec l’élargissement et le retour des 73 députés arrêtés
pour s’être porté à la défense des girondins, l’équilibre
du pouvoir penche du côté de la droite.
• Au cours de l’automne 1794, des bagarres opposent
contre-révolutionnaires et Jacobins. La Convention
ordonne alors la fermeture de leurs clubs.
• Les Jacobins disposent encore d’un appui populaire,
la population pauvre des villes n’ayant plus guère de
représentation politique.
• Les difficultés économiques donnent un regain de force
aux Jacobins, qui provoquent des émeutes à Paris en
avril et mai 1795. Avec le désarmement des milices
consécutivement à ces insurrections, une page de la
révolution est définitivement tournée.
• Le libéralisme remporte ainsi une victoire sur les
revendications égalitaires. Sans pression de la gauche,
le gouvernement se centralisera, d’autant plus que la
menace d’une restauration monarchiste se précise.
1.2 – Le Directoire
• À l’été 1795, la Convention entreprend l’élaboration
d’une nouvelle constitution, afin de consolider les
gains de la bourgeoisie, de stabiliser la situation
politique et de trouver une «voie mitoyenne entre la
royauté et la démagogie ».
• Une commission de 11 membres est établie à cet effet et
le 25 juin, elle rend compte du résultat de ses travaux,
ce qui conduira le 22 août 1795 à l’adoption d’une
nouvelle constitution, dite de l’An III, qui consacre
légalement la victoire de la bourgeoisie.
• La constitution est précédée d’une déclaration des
Droits et des Devoirs du citoyen, rejette l’idée de droit
naturel et le principe selon lequel « les hommes
naissent libres et égaux en droits », élément
fondamental de la Déclaration adoptée six années
auparavant.
• Le suffrage universel fait place à un suffrage censitaire
limitant aux propriétaires le droit de participer à l’élection
des députés et de devenir députés
• L’imposition d’un cens élevé limite le nombre
d’électeurs du 2e niveau à environ 30 000 personnes.
Le droit de l’argent supplante le droit du sang,
consacrant le transfert du pouvoir de l’aristocratie à la
bourgeoisie, tout en restaurant le caractère élitiste de
l’ancien régime.
• Le système parlementaire est revu : établissement de
deux chambres, (Conseil des Cinq-cents et Conseil
des Anciens). La première fait office de parlement, la
seconde, de Sénat, qui a la tâche de sanctionner les lois
votées par le Conseil des Cinq-cents.
• Ce n’est pas un système bicaméral, les députés des
deux chambres étant élus au cours de la même
procédure : 500 députés à la chambre basse, 250 à la
chambre haute, désignés par un tirage au sort.
• Ces 250 membres doivent avoir au moins 40 ans et être
mariés (ou veufs) depuis 15 ans. Ce système répond
aux demandes des monarchiens de 1789.
• Les pouvoirs exécutifs sont entre les mains de cinq
directeurs, choisis par le Conseil des Anciens sur une
liste établie par le Conseil des Cinq-cents.
• Le Directoire est renouvelé par cinquième à chaque
année, les anciens directeurs n’étant pas éligibles pour
cinq ans.
• Les directeurs nomment les ministres et chaque trois
mois, le pouvoir passe d’un directeur à l’autre. Ce ne
sont pas des dictateurs élus, car ils doivent suivre la
politique des Conseils, qui demeurent responsables
des affaires étrangères, des finances et de la justice.
• Le projet est soumis à un référendum de la population,
qui l’adopte à une large majorité. Mécontents, le 13
vendémiaire, 25 000 monarchistes marchent sur les
Tuileries et sont écrasés par Bonaparte.
• Des élections se déroulent en octobre 1795. La
participation est faible et les résultats décevants pour les
conventionnels, qui avaient réussi à imposer un décret
pour que deux tiers des députés de la Convention
soient élus au nouveau parlement.
• Mais seuls 395 conventionnels sont élus députés et
une commission nomme les 105 députés manquants…
• Les résultats témoignent de l’affaiblissement des
républicains : la Montagne perd de nombreux sièges
aux mains des monarchistes. Sans le décret des deux
tiers, la chambre serait passée du côté monarchiste.
Barras prend la tête des conventionnels pour éviter tout
retour vers la monarchie et est nommé directeur.
• Les Anciens ont nommé au Directoire cinq régicides et
le pouvoir réel reste entre les mains de républicains.
Le coup de barre à droite est bien illustré par l’adoption
de la nouvelle devise : liberté, égalité, propriété.
• Des élections renouvelant le tiers des députés doivent
se tenir chaque deux ans et la première échéance
survient à l’automne 1797.
• Les oppositions républicaines et royalistes suscitent la
crainte des directeurs et les différents courants
monarchistes se préparent aux élections en faisant
taire leurs différends, afin de présenter un front uni.
• Le parti monarchiste sort vainqueur : seuls 11 des
députés sont réélus, les monarchistes gagnent 70
sièges. Un royaliste devient président du Conseil des
Cinq-cents, où siège un ancien ministre de Louis XVI.
• Craignant la consolidation des royalistes, les directeurs
décident le 4 septembre 1797 de faire arrêter des
députés et journalistes royalistes, consolidant leur
pouvoir, mais affaiblissant les institutions politiques.
• S’ensuit la Terreur fructidorienne : annulation des
élections dans 49 départements, chasse aux
fonctionnaires royalistes et censure de leurs journaux.
• Afin de consolider leur pouvoir, les directeurs
favorisent le retour en grâce des jacobins.
• Les élections de l’An VI voient une victoire
convaincante de la gauche, qui pousse le
gouvernement à enfreindre encore une fois la légalité en
invalidant une centaine de mandats en mai 1798.
• Le système est alors discrédité. S’ensuit une période
chaotique, qui voit de nouveau la gauche s’imposer et
les Conseils limiter les pouvoirs du Directoire avec le
coup d’État constitutionnel de 1799.
• Cette revanche des Jacobins provoque la résurgence du
mouvement royaliste et l’alliance des centristes pour
contrer la menace d’une nouvelle domination des
radicaux de gauche. C’est ce qui incitera le centre à
chercher une façon de modifier le système politique.
• Bonaparte est approché par les centristes afin de
tester ses ambitions et il laisse entendre que la situation
nécessite des mesures musclées.
• Le 8 novembre 1799 (18 brumaire), de nombreux
officiers se rendent au domicile de Bonaparte, où celuici leur fait part de la nécessité de ces mesures.
• Le 19 brumaire, alors que le Conseil des Cinq-cents,
avec son président Lucien Bonaparte, est réuni à SaintCloud, Bonaparte parvient, grâce à la pression
militaire, à faire voter par le Conseil le renvoi du
Directoire et la mise en place d’une commission
consulaire, composée de Roger-Ducos, Sieyès et
Napoléon Bonaparte, qui recevait le titre de premier
consul.
• Lorsque les consuls prêtèrent serment aux deux
conseils, jurant de défendre la nation, la liberté, l’égalité
et la république, Bonaparte déclara : citoyens, la
Révolution est fixée aux principes qui l’ont
commencée, elle est finie.
1.3 – Le Consulat (1799-1804)
• Quatrième fils d’une nombreuse famille de la petite
noblesse, Napoléon Bonaparte est né à Ajaccio, le 15
août 1769. Son père avait auparavant combattu pour
l’indépendance de l’île contre les forces françaises.
• Il fit ses études à l’école royale militaire de Brienne, où il
démontra de remarquables aptitudes. Ayant peu d’amis,
il devient un lecteur boulimique. Il est admis à l’école
militaire de Paris en octobre 1784, où il reçoit son brevet
de lieutenant en second l’année suivante.
• Aimant l’ordre, mais détestant la monarchie, il
abandonne ses rêves d’indépendance pour la Corse,
alors qu’il rentre servir quelques années sur l’île.
• La Corse n’accepte pas facilement le nouveau régime et
les Bonaparte sont contraints de quitter l’île et de se
réfugier sur le continent en 1793.
• Il commence à se distinguer par ses talents militaires
et son caractère résolu, qui en fit peu à peu un homme
très populaire, surtout après ses victoires en Italie.
• Sa popularité et son engagement font en sorte que les
meneurs centristes s’intéressent à lui pour prendre la
tête de l’État et écarter royalistes et radicaux.
• Après le 19 Brumaire, une nouvelle constitution devint
nécessaire, laquelle rompt avec les précédents
textes : les droits de l’homme et les libertés individuelles
ne sont plus mentionnés, mais le droit de propriété y est
garanti.
• Trois consuls se partagent le pouvoir, mais Bonaparte,
Premier consul, domine ses confrères. La constitution
mentionne explicitement son nom, ce qui témoigne
d’un retour à un pouvoir personnifié.
• Chefs de l’exécutif, les consuls s’appuyaient sur un
Conseil d’État chargé de préparer les lois et de les
présenter devant les assemblées pour approbation.
• Les conseils furent dissous et remplacés par de
nouvelles institutions : le Tribunat, (100 membres ayant
pour mandat de discuter des projets de loi, mais pas de
les voter) et le Conseil législatif, (300 membres, qui
vote les lois sans les discuter).
• Une troisième assemblée, le Sénat, composé de 80
membres (60 nommés par Bonaparte et 20 choisis par
les assemblées) chargé de s’assurer de la concordance
des lois adoptées avec la constitution.
• Le système électif était composé de plusieurs niveaux :
les électeurs de chaque niveau élisait 10% d’entre
eux au niveau supérieur (canton, arrondissement,
département et liste nationale).
• La constitution fut soumise à un référendum : sur plus de
3 millions de votants, il n’y eut que 1 562 « non »,
résultats « remarquables », même si plus de 4 millions
d’électeurs choisirent de s’abstenir.
• Le Consulat fut inauguré en janvier 1800. Les listes
n’ayant pas été élaborées, les députés furent choisis
par le Sénat, qui privilégia d’anciens révolutionnaires
pour pénaliser les royalistes.
• La restauration d’un régime personnalisé permit d’opérer
des réformes de grande importance.
• Le nouveau pouvoir s’attela à une réforme
administrative visant à accroître le centralisme. Les
départements furent conservés, mais subordonnés à des
préfets nommés par le premier consul.
• Chacun de ces préfets (et son sous-préfet) s’appuyait
sur un conseil de préfecture, chargé de veiller au bon
fonctionnement de l’administration. Les conseils
régionaux n’étaient plus élus, mais nommés.
• À l’échelon inférieur, on retrouvait les 36 000
communes. Les maires s’occupaient de l’administration,
de la police locale, ainsi que de la répartition de l'impôt.
• Mais la pièce de résistance de la restructuration
administrative, c’est le code civil, dont une première
ébauche avait été rejetée en 1801, avant d’être adoptée,
après de longs travaux, le 21 mars 1804.
• L’objectif était de fusionner les acquis de la révolution
et l’héritage de l’Ancien régime, unifiant le droit civil de
la France. Favorable à la bourgeoisie, ce texte, qui a
grandement évolué depuis le XIXe siècle, reste encore
aujourd’hui le fondement du droit français et inspira de
nombreux codes civils à travers le monde.
• La création en 1802 de l’ordre de la Légion d’honneur
est un bon exemple du triomphe d’une conception
élitiste de la société. Même si cette décision souleva
de nombreuses critiques, il ne remet pas en question le
triomphe du mérite sur la naissance.
• En 1802, Bonaparte demanda une révision de la
constitution en sa faveur. Le 8 mai 1802, le sénat lui
accorda à dix années de mandat supplémentaires.
• Puis le 4 août 1802, le sénat promulgua la constitution
de l’an X qui augmentait le pouvoir du premier consul.
• Bonaparte était désormais consul à vie, avait le droit de
grâce, pouvait signer seul les traités, et avait un droit de
regard sur son successeur.
• Le Sénat voyait ses pouvoirs accrus, au détriment de
ceux du Tribunat et du Corps législatif. Le texte, adopté
par plébiscite, constitue une étape supplémentaire vers
la restauration d’un pouvoir de type monarchique.
• Cela est encore plus évident avec la restauration de
pratiques disparues dans la foulée de la révolution : une
cour réapparait aux Tuileries et suite au Concordat, le
premier consul se mit à assister à la messe tous les
dimanches. Il tentait ainsi de fusionner le prestige de
l’État et les acquis de la révolution.
• La personnalisation du régime franchit une étape
supplémentaire quand en 1802, le 15 août, anniversaire
du premier consul, devint la journée de la fête nationale.
2 – Opposition intérieure
2.1 – Les royalistes
• Les thermidoriens accordèrent l’amnistie aux rebelles
vendéen et en février 1795, un traité mit fin à la guerre
de Vendée, octroyant la liberté de culte aux
réfractaires et une certaine indemnisation des victimes,
en échange de la reddition des Vendéens.
• Le 20 avril 1795, c’est au tour de certains chouans de
faire la paix à des conditions semblables. Ceux qui
refusèrent de signer s’engagèrent à abandonner la lutte.
L’incendie de l’ouest était pour le moment éteint.
• Mais avec la fin de la Terreur, de nombreux royalistes
réapparurent, reprochant à la révolution son incapacité
à sortir le pays de la crise dans laquelle il se trouvait.
• Ces critiques conduisirent à une revanche monarchiste
qui prit le nom de Terreur blanche en province.
• En mai 1795, à Lyon des royalistes éliminèrent sans
distinctions prêtres jureurs, jacobins et protestants. Cette
terreur se manifesta inégalement sur le territoire,
violente dans le midi, totalement absente de Normandie.
• Le sommet de la crise fut atteint à l’été 1795, mais la
réplique de la Convention ne survint qu’à la fin de
l’année, la mort en captivité de Louis XVII le 8 juin 1795
déchainant la colère des royalistes.
• Les royalistes comptaient sur l’Angleterre, isolée par
les défaites de ses alliés et désireuse de maintenir la
pression sur la France.
• Charles, comte d’Artois (frère cadet de Louis XVI), était
parvenu à recruter une armée d’émigrés au cours des
mois précédents. Les Britanniques s’étaient engagés à
fournir les armes, l’argent et les navires.
• En juin 1795, après que la flotte anglaise soit parvenue
à débarquer des forces armées issues de l’émigration,
les Vendéens se soulevèrent, suivis par les chouans.
• Mais l’aile militaire des royalistes était aussi désunie
que son aile parlementaire et les forces locales,
pauvres et affamées toléraient mal la collaboration
avec l’armée d’émigrés, vêtus d’uniformes anglais.
• Cette situation favorisa l’armée républicaine et en
juillet 1795, à Quiberon, les royalistes furent attaqués
et défaits. Certains regagnèrent les navires anglais qui
se gardèrent d’intervenir. Quelques chouans parvinrent à
s’enfuir, mais le gros des forces royalistes fut capturé
et 750 personnes furent condamnées à mort.
• Les royalistes lancèrent un appel aux armes le 4
octobre et marchèrent sur la Convention, ce qui
provoqua une répression qui fit environ 300 morts, en
plus de ceux condamnés à la guillotine. Un décret fut
voté, excluant de l’administration séditieux et émigrés.
• Avant de se séparer la Convention vota une amnistie
pour les Montagnards condamnés depuis thermidor et
de nombreux généraux jacobins furent réintégrés
dans l’armée. Plusieurs milliers de soldats furent
envoyés en province pour réprimer la Terreur blanche.
• Les principaux meneurs royalistes furent capturés au
début de 1796 puis exécutés à la fin de l’hiver.
Décapité, le mouvement ne parvint plus à s’opposer de
front aux forces armées.
• Des mesures d’apaisement furent prises à l’endroit de
la Vendée, dont le rétablissement du culte catholique et
l’amnistie pour les insurgés qui déposaient les armes.
• Tout cela permit la fin de cette 2e guerre de Vendée à
l’été 1796, même si la paix demeura précaire comme en
témoignent les soulèvements de 1799, 1815 et 1832.
• Les forces républicaines purent ainsi se tourner contre
les chouans, qui avaient de même repris les armes
suite au débarquement manqué de Quiberon.
• Ils furent vaincus, mais ici aussi, la paix demeura
fragile et on vit par la suite d’autres soulèvements (en
1799, 1832 et 1845).
• 300 000 insurgés vendéens et chouans ont été
victimes de la guerre, les forces républicaines ayant à
déplorer la perte d’environ 30 000 soldats.
• Brumaire fit taire une partie des monarchistes, mais pas
tous. Les royalistes légitimistes voyaient d’un très
mauvais œil l’usurpateur corse, surtout que le retour
d’un pouvoir de type monarchiste leur enlevait de
nombreux appuis et les privait d’un important argument.
• Le futur Louis XVIII, constatant les mesures mises en
place par Bonaparte, invita le premier consul à le
restaurer sur le trône, sans succès.
• Les royalistes multiplieront les tentatives d’assassinat
contre le premier consul. La conspiration des poignards
et l’attentat de la rue Saint-Nicaise le 24 décembre
1800 figurent parmi ces nombreuses tentatives.
• Dans les deux cas, la répression s’abattra sur les
royalistes, leurs meneurs étant condamnés à mort.
• Le complot de 1804 eut des conséquences plus
importantes, alors qu’anciens chefs des guerres de
l’ouest et militaires déchus font front commun pour
assassiner Bonaparte.
• Grâce à la police de Fouché, les conjurés furent arrêtés
et soumis à des interrogatoires, où le nom de Louis
Antoine de Bourbon-Condé, duc d’Enghien, fut
mentionné. Bonaparte en vint rapidement à le considérer
comme la tête pensante de la conspiration.
• Le premier consul ordonna à ses soldats de franchir le
Rhin, afin d’enlever le duc d’Enghien. L’opération (17
mars 1804) fut un succès et le duc amené à Paris.
• Rien ne permettait d’établir sa culpabilité, même si
l’enquête révéla que le duc était à la tête d’un réseau
royaliste. Mais Napoléon avait besoin d’un coupable.
• Le 20 mars 1804, à l’issue d’un procès sommaire, le duc
fut jugé et vers deux heures du matin, il fut fusillé dans
les fosses de Vincennes.
• L’exécution peut être vue comme un signal fort envoyé
aux républicains pour cimenter les fondations de
l’Empire français qui naîtra sous peu. Les meneurs de la
conjuration furent soit exécutés, soit condamnés à l’exil.
2.2 – Les radicaux et libéraux
• Le gouvernement doit constamment recourir à l’un des
deux extrêmes du spectre politique pour vaincre
l’autre. Comme ce mouvement renforce cet allié
temporaire, il faut à nouveau lancer une offensive.
• À la fin de 1795, diverses mesures sont prises pour
réhabiliter de nombreux personnages associés à la
terreur ou au radicalisme.
• C’est le cas de François « Gracchus » Babeuf (17601797), membre important de l’organisation des sansculottes, qui défend des thèses égalitaristes radicales,
qui pour une fois incluent le droit des femmes.
• Après Thermidor, Babeuf s’était lancé dans une
surenchère, mettant sur pied un journal particulièrement
radical, Le tribun du peuple. Accusé d’outrage envers
les institutions, il est arrêté en février 1795.
• Par la loi d’amnistie de 1795, il reprend ses activités,
attirant l’attention des autorités. En février 1796, le club
du Panthéon, où les partisans de Babeuf rencontraient
les jacobins réhabilités, fut fermé : l’armée arrêta
quelques membres, mais Babeuf s’enfuit et poursuivit
la lutte clandestinement.
• Babeuf et diverses personnalités de la gauche radicale
mirent sur pieds une organisation, la Conjuration des
Égaux, dont le programme préfigure le communisme.
• Ils proposent l’établissement d’une égalité complète,
politique et économique, entre autres par le biais de la
collectivisation des terres et des moyens de production.
• Le 16 avril 1796, le Directoire décida de punir de mort
ceux qui s’en prenaient à la légitimité des chambres,
réclamaient le retour de la royauté, l’application de la
constitution de 1793, ou la mise en place d’un régime de
partage des biens. Les légions de police, peuplées de
nombreux babouvistes, furent dissoutes.
• L’offensive contre le mouvement eut lieu le 10 mai 1796,
alors que Babeuf et ses partisans furent arrêtés. À deux
reprises, la population tenta de faire évader.
• En février 1797, les conjurés sont déférés devant un
tribunal qui les accusent d’avoir voulu renverser le
gouvernement.
• Babeuf et Darthé sont condamnés à mort et
guillotinés le 27 mai. Six autres accusés sont
condamnés à la déportation et 56 autres acquittés.
• Babeuf meurt, mais ses idées auront par la suite maintes
occasions de se manifester, en 1830 par exemple.
• Les Jacobins ne meurent pas pour autant et les
élections du printemps 1799 verront l’élection de
plusieurs d’entre eux.
• Mais après le coup d’État de brumaire, ils sont
évincés de l’appareil d’État et n’ont pas de raisons
particulières d’apprécier le premier consul.
• S’appuyant sur Fouché, Bonaparte décida de poursuivre
certains de ces anciens députés. Les plus virulents
furent condamnés au bagne, les autres furent
emprisonnés.
• Fouché en profita pour régler des comptes et se
débarrasser de témoins gênants, faisant porter sur les
jacobins la responsabilité de l’attentant du 24 décembre
1800. La résistance jacobine sera réduite à néant
entre 1801 et 1802.
• En ce qui concerne les forces libérales, d’abord
favorables au coup d’État, l’orientation du premier
consul vers la reconstitution d’un État autoritaire favorise
la montée du mécontentement.
• Une part de ces modérés, demeurés fidèles aux idéaux
de 1789, tenta d’infléchir ce tournant autoritaire, mais
sans parvenir à se faire entendre.
• La mise en place de la Légion d’honneur cristallisa
les critiques, de même que la signature du
Concordat, qui portait atteinte à la constitution civile du
clergé, ainsi que le premier projet de code civil, jugé
trop conservateur et rejeté en 1801.
• Mais l’opposition étant légaliste et parlementaire,
Bonaparte n’eut pas à recourir à la violence contre
elle, se limitant à utiliser les ressources légales et
constitutionnelles.
• Ainsi, en 1802, Bonaparte supprima 20 % des sièges
du Tribunat et les députés les plus hostiles au premier
consul furent congédiés, pour être éventuellement
remplacés par des proches de Bonaparte. De même,
le Tribunat fut divisé en trois sections et interdiction fut
faite de réunir l’ensemble des députés lors d’une
session.
3 – Économie et société
3.1 – Économie
• Thermidor ne change rien à la situation économique et à
la fin de l'année 1794, la crise économique sévit
toujours. À cette date, l’État avait imprimé des
assignats pour une valeur de 45 milliards de livres, alors
que la valeur des biens du clergé ne s’élevait qu’à 3
milliards.
• Avec un retour au libéralisme politique, le libéralisme
économique devait revenir : le 24 décembre, la loi sur
le maximum des salaires fut supprimée, et la bourse
de Paris rouvrit en octobre 1795.
• Cela n’empêcha pas la disette de l’hiver 1794-1795, les
problèmes provenant de facteurs objectifs, comme la
faiblesse des récoltes et les difficultés de transport.
• L’assignat fut supprimé en février 1796 et les
planches à billets furent brûlées.
• Venu remplacer l’assignat, (le gouvernement craignant
un retour à la monnaie métallique alors que celle-ci
restait rare), le mandat territorial connut en quelques
mois le même sort que son prédécesseur.
• À la fin avril, le mandat avait perdu 90 % de sa valeur
et fut abandonné en 1797. On revint à la monnaie
métallique, jusqu’à ce que la Banque de France
reprenne à partir de 1803 l’émission de papier-monnaie.
• Afin d’améliorer l’état des finances qui demeurent
précaires, le gouvernement tente un emprunt
obligatoire de 600 millions sur le quart le plus riche
des contribuables. Six mois après la date fixée, seuls
150 millions avaient été réunis.
• Des mesures radicales durent donc être prises pour
améliorer la situation financière de l’État.
• La loi du Tiers consolidé de 1797 déguisa un défaut
de paiement sur sa dette, abandonnant les garanties
qu’il offrait sur les deux tiers de celle-ci. Cette mesure
attira bien sûr de nombreux reproches au régime.
• Le système d’imposition est modifié, les impôts
directs abaissés et on s’emploie à améliorer le système
de perception. En 1798, un quatrième impôt direct, dit
des portes et fenêtres fut ajouté.
• La baisse des impôts directs est compensée par la
multiplication des impôts indirects. Les sommes
prélevées s'accroissent, mais elles ne parviennent pas à
compenser les dépenses de l’État, qui continue à piller
les pays conquis pour le quart de son budget.
• Le Directoire dote le pays d'institutions financières
semi-publiques efficaces et s’emploie à poser les bases
du développement économique : des banques privées
font leur apparition, qui permettront le développement
d’un tissu industriel, commercial et entrepreneurial.
• La période du Consulat voit les résultats des efforts
du directoire et Bonaparte n’aura pas grand-chose à
modifier ou à ajouter.
• Mais il s’emploie à rationaliser les dépenses de l’État
et le système de taxation, pour le rendre plus juste, afin
de rétablir la confiance des Français dans l’État.
• La manifestation la plus évidente de cette politique de
confiance sera la création en février 1800 de la
banque de France, qui avait comme objectif de fournir
des avances à l’État, en attente de la rentrée des impôts.
Fut alors créé le franc germinal le 7 avril 1803.
• On assiste à une rationalisation de l’implication
économique de l’État, alors que le gouvernement se
dote d'outils pour étudier la population et l'économie.
• Afin de stimuler l'économie, le régime a recours à des
entreprises mettant en valeur les initiatives
intéressantes dans les domaines agricoles et
industriels.
• La presse est utilisée afin de diffuser les
innovations, ce qui favorise l’accroissement de la
production, par l'adoption progressive de nouvelles
techniques d'irrigation, d'outillages, et de cultures, dont
celle de la pomme de terre qui se popularise et a un
impact majeur sur la sécurité alimentaire.
• Bien sûr, une partie de la population paysanne reste
réticente aux changements et les innovations ne
s'implantent pas uniformément sur le territoire.
• Au plan industriel, ion assiste a un accroissement du
nombre d’usines et de la classe ouvrière. Le
processus de mécanisation se développe, mais la
modernisation est ralenti par le manque de capitaux
disponibles,
• Le commerce intérieur est gangréné par l'insécurité,
le brigandage et le mauvais état des routes, même si
à l’inverse, les conquêtes favorisent le grand
commerce international.
3.2 — Société
• En 1795, la République compte 32 millions d'habitants,
dont 28 millions sur le territoire de l'ancien royaume. Le
bilan démographique depuis la révolution est positif,
avec un taux de natalité supérieure à la mortalité.
• La population est jeune et en grande majorité rurale :
on compte alors 5 millions d’urbains, répartis dans trois
grandes agglomérations de plus de 100 000 âmes, dans
quelques centres d'importance moyenne et dans de
nombreuses petites villes.
• La principale différence entre la société française de
1795 et celle d’avant la révolution, c’est la disparition
des ordres privilégiés.
• Le clergé existe, mais son pouvoir a disparu en
même temps que le régime qui s’appuyait sur lui.
• Quant à la noblesse, une part importante de ses
membres sont partis ou morts au cours du processus
révolutionnaire.
• Les nobles qui sont toujours présents ont conservé
leurs propriétés foncières sur lesquelles ils ne perçoivent
plus de droits seigneuriaux, mais touchent les fermages.
Par leurs revenus et leur genre de vie, ils se
rapprochent de la classe dominante, la bourgeoisie.
• Cette dernière est la grande gagnante de la révolution,
mais elle demeure hétérogène : certains ont souffert de
la Révolution, alors que d’autres en ont profité.
• Parmi les premiers, on compte ceux qui ont émigré et
dont les biens ont été confisqués : officiers et hommes
de loi d’ancien régime, rentiers ruinés par l'inflation.
• Ceux qui possèdent des terres ou des biens immobiliers,
qui ont placé leurs capitaux dans des banques
étrangères et se consacrent à l'industrie, au commerce
ou aux activités bancaires, ont pu profiter de la situation.
• La période du Directoire voit l'ascension d'une
bourgeoisie entrepreneuriale qui va donner à ses
enfants une éducation leur permettant de devenir
fonctionnaires ou membres des professions libérales.
• On voit aussi l'apparition de nouveaux riches qui ont
fait fortune rapidement par des moyens plus ou moins
honnêtes, comme les fournisseurs aux armées.
• C’est à ce groupe, à qui la population reproche son
immoralité, sa vénalité et sa corruption, que se
rattachent des opportunistes comme Barras, Tallien ou
Talleyrand.
• Les merveilleuses et les incroyables, jeunes gens
excentriques et oisifs, qui vouent une haine mortelle à la
révolution à qui ils doivent tout, sont issus de ce milieu.
Malgré la disgrâce qui frappera certains de ces
bourgeois sous le consulat, leur fortune est déjà faite.
• Ils sont cependant peu nombreux et à Paris comme en
province, la bourgeoisie est surtout constituée de
familles honnêtes et dont les enfants formeront les
cadres de la nation pendant tout le XIXe siècle.
• Bien qu’en croissance, la classe ouvrière demeure
faible numériquement. Elle est constituée de deux
sous catégories, artisans libres et ouvriers des
manufactures, encore peu nombreuses.
• Leurs conditions de vie ont peu changé, car si les
salaires sont plus élevés qu'en 1789, ils demeurent
faibles et le chômage continue de faire peser sur eux
une menace permanente et qui se matérialise en cas de
mauvaise récolte.
• Ce sera le cas au printemps de 1796, alors que des
émeutes éclatent dans les villes moyennes. Les
pouvoirs publics essayent d'y remédier en créant des
bureaux de bienfaisance et en distribuant des vivres.
• Les paysans continuent de représenter la grande
majorité de la population française.
• Le nombre de propriétaires est plus grand qu'en
1789, mais il y a plus de paysans riches qui se sont
enrichis, que de simples paysans qui sont devenus
riches, surtout que les administrations favorisent la vente
des lots étendus, afin d'éviter le morcellement excessif
de la terre.
3.3 – Liberté d’expression
• La liberté d’expression fait partie des principaux
gains obtenus par la bourgeoisie libérale dans sa lutte
contre la monarchie, mais les pressions politiques et le
contexte tendu des années qui suivent le renversement
de la monarchie ont mis à mal cette liberté.
• L’évolution des pressions sur la presse et l’opinion
suit l’évolution politique. En 1790, les courants
monarchistes, sans être ouvertement brimés, préfèrent
garder un profil bas, et le mouvement s’accentue au fur
et à mesure de l’établissement de la Terreur.
• Même si la liberté de presse n’a pas été suspendue
totalement en 1793-1794, la « censure de l’échafaud »
suffit à faire taire les courants antiterroristes. À l’Ouest
ou dans les villes « fédéralistes », on constate le
phénomène inverse, alors que les jacobins préfèrent se
faire discrets.
• Paris avait plus de moyens pour contraindre l’opposition.
Après les procès contre les cordeliers, l’arme
économique est utilisée par le gouvernement, qui limite
les subventions de l’État aux journaux favorables au
gouvernement, qui sont alors plus diffusés et plus lus.
• Après thermidor, des voix à droite et à gauche s’élèvent
pour que soient mises en place les conditions d’une
réelle liberté d’expression. Sans attendre les décisions
de la Convention, une grande liberté d’opinion apparaît à
nouveau.
• Cela ne durera pas très longtemps, car la montée d’un
courant antijacobin et revanchard entraîne une
pression sur la presse de gauche : en 1795, c’est au tour
des jacobins de se cacher et de faire profil bas.
• La chose est encore plus évidente si on tient compte
d’autres phénomènes, comme les attaques physiques
ou encore les pièces de théâtre dans lesquelles on
fustige les anciens dirigeants.
Les Jacobins aux Enfers.
Jean Touze (1795)
• Et les positions des uns et des autres n’ont de cesse de
se télescoper en fonction des purges politiques et des
luttes institutionnelles : en 1795, de nombreux jacobins
sont réhabilités et se joignent au Club du Panthéon,
qui est fermé l’année suivante lorsqu’une nouvelle
purge s’abat sur la mouvance radicale.
• Tous les mouvements d’opinion sont pris dans ce cycle
tolérance-purge-tolérance, déterminé par le contexte.
• Bonaparte rétablit l’ordre et la cohérence, à défaut de
la liberté d’expression. Dès sa première année à la
tête de l’État, il interdit la publication d’une centaine de
journaux. La presse, instrumentalisée, doit simplement
soutenir le pouvoir et taire ses critiques.
• On retrouve une politique semblable dans le domaine
artistique, Napoléon comprenant l’utilité d’un art de
propagande pour asseoir son pouvoir. Sa relation
étroite avec le peintre David en constitue une
remarquable illustration.
Le sacre de Napoléon.
Jean-Louis David (1807)
3.4 – Religion et mentalités
• Malgré la déchristianisation, le catholicisme demeure
la religion de la majorité. Ainsi, 1795 est marqué par
un renouveau religieux : réouverture des églises,
reprise du culte réfractaire.
• Mais les catholiques sont divisés, entre le nouveau
clergé, qui souffre du développement d’un courant
réactionnaire et l’Église des réfractaires qui voit sa
position renforcée par le retour des prêtres émigrés.
• Après Fructidor, on assiste à une reprise de la
persécution religieuse qui provoque un désarroi chez
les catholiques, d'autant que la destruction de l'État
pontifical en 1798 par Napoléon et la mort de Pie VI en
1799 semblent annoncer la disparition du catholicisme.
• Mais le Consulat et le rétablissement d’un régime
absolutiste porte en lui le retour du catholicisme.
• Dès décembre 1799, la liberté de culte est garantie et
le clergé réfractaire est invité à rentrer en France,
Bonaparte souhaitant mettre un terme à la division du
clergé français, d’où les négociations avec le pape.
• Ces négociations aboutirent à la signature d’un
concordat entre la France et Rome : le culte réfractaire
pouvait de nouveau être célébré en France et il fut
décidé qu’évêques et prêtres des deux camps
démissionneraient pour faire place à un nouveau clergé.
• L’Église abandonnait ses prétentions sur les biens
confisqués pendant Révolution, les prêtres demeuraient
des salariés de l’État, devaient prêter serment de fidélité
au gouvernement et dire une prière pour la république à
la fin de chaque messe. Les évêques étaient nommés
par Paris, mais ils recevaient l’investiture de Rome.
• Le Concordat ne faisait pas du catholicisme la
religion officielle. La laïcité de l’État demeurait une
conquête de la révolution.
• Des articles furent promulgués en 1802 et 1808, afin de
réglementer le culte protestant et israélite.
• Les institutions ont changé au cours de la période 17891804, mais qu’en est-il de l’opinion de la population
envers la monarchie et la république?
• Un fort courant monarchiste demeure vivace en France,
d’autant qu’il se trouve confondu avec le catholicisme.
• La grande erreur des émigrés est d’avoir cru que le
pays souhaitait un retour à l’ordre ancien, conspué par
la population, y compris par une majorité de
monarchistes, qui souhaitaient une monarchie
constitutionnelle. Louis XVIII refusant une telle solution,
la monarchie était à ce moment condamné.
• D’autant que si l’idée républicaine était inexistante en
France en 1789, les quelques années de la république
ont fait en sorte qu’une majorité de la population en
1795 se reconnaît dans le régime républicain.
• Mais de quelle république s’agit-il? Le souvenir des
années 1793-1794 est certainement une donnée
incontournable. On désire une république modérée qui
puisse garantir la liberté et la propriété, bref une
république bourgeoise libertaire.
• C’est l’opinion de la majorité, mais il existe une
opposition de gauche : anarchistes, jacobins, et
babouvistes, nostalgiques de l'an II, pour qui tout n'était
pas mauvais dans le gouvernement révolutionnaire.
• C’est à ce schisme que tente de répondre le Consulat,
qui cherche à créer un consensus national.
L’abrogation de la loi des otages et l’amnistie accordée
aux émigrés et aux proscrits en 1802 s’inscrivent dans
cette logique de réconciliation nationale.
• Rien n’illustre mieux cette volonté que la suppression
des fêtes du 21 janvier, du 31 mai et du 27 juillet. La
seule fête qui reste célébrée est le 14 juillet, jour de la
prise de la Bastille.
4 – Politique étrangère
4.1 – La fin de la première coalition
• 1794 voit les armées françaises remporter de grandes
victoires et étendre leur domination sur des zones
importantes, surtout au nord.
• Après la conquête de la Belgique, les Français
s’attaquent aux Provinces-Unies. Amsterdam tombe en
janvier 1795. Une fois la flotte hollandaise entre leurs
mains, les Français occupent tout le territoire dès février.
• En mai, Français et Néerlandais signent le traité de La
Haye : les Provinces-Unies abandonnent la Flandre
hollandaise, Maëstricht et Venlo. Puis les Néerlandais
proclament la république batave, république sœur,
abandonnant de fait la première coalition.
• Octobre 1795 : la Belgique est rattachée à la France.
Cette expansion territoriale marque la transformation
d’une guerre défensive en guerre de conquête.
• À l’est, à l’automne 1794, les armées françaises
franchissent le Rhin, s’emparant de la rive gauche et
de Mayence. Au printemps, le roi de Prusse fait la paix
par le traité de Bâle : la France conserve les territoires à
l’ouest du Rhin, ceux à l’est sont rendus à la Prusse.
• De sorte qu’en 1795, les armées françaises ont imposé
la paix à de nombreux membres de la 1ère coalition,
d’autant qu’au sud, un traité de paix met fin à
l’engagement contre l’Espagne en juillet.
• La guerre se poursuit contre l’Autriche, l’Angleterre,
le royaume de Piémont-Sardaigne et plusieurs
territoires italiens.
• Le dernier grand conflit de cette 1ère coalition va s’étirer
jusqu’en 1797 et porte le nom de guerres d’Italie,
territoire complexe politiquement.
• L’Autriche avait offert la paix à l’été 1795, mais les
conditions
autrichiennes
ayant
étant
jugées
insuffisantes, les Français l’avaient rejetée. L’Autriche
attaqua l’Armée du Rhin, bloquant l’avance de celle-ci.
• Au sud-est, l’Armée d’Italie lança une offensive contre
les Autrichiens et les Piémontais, qui fut couronnée de
succès par la bataille de Loano en novembre 1795, qui
ouvrit aux Français les portes de l’Italie.
• Un armistice fut signé le 21 décembre, mais le
processus de paix se heurta au refus des Autrichiens de
reconnaître à la France ses gains territoriaux sur le Rhin
et la guerre se poursuivit.
• Le 5 mars 1796, Bonaparte fut nommé commandant en
chef de l’armée d’Italie.
• L’armée d’Italie était en piteux état : affectée par les
désertions et mal équipée, elle ne comptait plus que
30 000 hommes. D’où la nécessité de frapper vite et fort
les Piémontais.
• À Montenotte, Millesimo et Dego, les forces françaises
culbutèrent les Piémontais, les isolants des armées
autrichiennes (50 000 hommes), contraignant le roi de
Piémont à la paix le 28 avril. Confirmé en mai 1797, le
traité permettait à la France d’annexer Nice et la Savoie.
• Le génie militaire de Bonaparte commence à se
manifester. Perdant peu d’hommes et capturant
l’artillerie de l’ennemi, l’Armée d’Italie se consolide.
• L’Autriche s’est repliée sur le Pô et Napoléon se lance à
sa poursuite. Après sa victoire au pont de Lodi (10 mai
1796), il s’empare de la Lombardie, entrant dans la cité
de Milan quelques jours après l’affrontement.
• Puis en mai et juin, Bonaparte contraint Parme, Modène
et Naples à la paix, les obligeant à verser d’importantes
réparations à la France, tout en pillant le territoire.
• Les Autrichiens lancèrent une contre-offensive à la fin
juillet 1796 et Bonaparte remporta deux autres victoires
à Lonato et Castiglione, lui permettant de dominer le Pô.
• Pendant que l’Armée du Rhin essuyait plusieurs
défaites, à l’automne, Bonaparte remonta en territoire
autrichien et s’empara de Trente, avant d’assiéger
Mantou, d’où les troupes autrichiennes s’enfuirent en
direction d’Arcole, où naquit la légende de Bonaparte.
• Après un long siège et une autre défaite à Rivoli, Mantou
céda en février 1797 et Pie VI accepta de signer la
paix, abandonnant Bologne, Ferrare et la Romagne, tout
en s’engageant à fermer les ports aux navires anglais et
à verser une indemnité de 31 millions à la France.
• Arrivée à trente lieues de Vienne en avril 1797, l’Armée
française contraignit l’Autriche à la paix et le traité de
Campo-Formio mit un terme à la guerre.
• L’Autriche reconnaissait l’indépendance de Milan et
Gênes, qui devinrent des républiques sœurs,
garantissait la libre circulation des navires français
sur le Rhin, reconnaissait les possessions françaises
sur le Rhin et aux Pays-Bas.
• Elle cédait à la France les îles Ioniennes et libérait le
général La Fayette. En contrepartie, l’Autriche recevait
Venise, l’Istrie et la Dalmatie.
• Napoléon négocia lui-même ce traité, par-dessus la
tête du gouvernement, et s’il fut accueilli en héros par
la population, le Directoire regarda d’un mauvais œil cet
ambitieux général qui signait des traités sans recevoir
son aval.
4.2 – L’expédition d’Égypte et la seconde coalition
(1798-1802)
• L’Angleterre restait seule en guerre contre la France
et à partir de septembre 1798, se rapprocha de
l’Autriche, de la Russie, de la Turquie, de la Suède et de
quelques principautés allemandes. C’est ainsi que se
forma la seconde coalition.
• En février 1798, Bonaparte soumit son projet d’invasion
de l’Égypte au Directoire, lequel approuva l’idée autant
pour ses avantages politiques que militaires.
L’expédition revêtait aussi des intérêts scientifiques et
culturels.
• L’armée française débarqua d’abord à Malte le 11 juin
et s’empara de La Valette, d’où les chevaliers de l’ordre
furent chassés et où Napoléon laissa en garnison 3 000
hommes, avant de reprendre la mer.
• Après s’être emparé d’Alexandrie, Bonaparte partit en
direction du Caire, où il dut lutter contre une armée
supérieure en nombre qu’il parvint à vaincre facilement.
• Il entre au Caire le 24 juillet 1798 et décide la création
de l’Institut français du Caire. Napoléon se présente
comme le défenseur de l’Islam, tout en modernisant les
structures administratives de la région qu’il contrôle sur
le modèle français.
• Les choses se gâtèrent après la bataille d’Aboukir du 2
août 1798, qui vit la flotte française être presque
totalement détruite, ce qui laissait les forces de
Napoléon sans ravitaillement ni renfort, le contraignant
à enrôler des soldats dans la population locale.
• Cette mesure et la mise en place d’un impôt foncier
provoquèrent la révolte des habitants du Caire.
• Ragaillardies par la victoire anglaise d’Aboukir, les
puissances européennes redeviennent menaçantes
et les populations s’agitent au Piémont et en Belgique.
• La menace française incite l’Empire ottoman à se
rapprocher des Anglais avec lesquels il signe un
traité en décembre 1798, auquel se joint la Russie.
• Bonaparte, après avoir maté la révolte cairote, marche
vers Suez, incitant les forces syriennes à attaquer
l’Égypte et élargissant le conflit au territoire syrien.
• Les forces locales ne sont pas de taille et les Français
s’imposent facilement. Gaza tombe le 24 février 1799,
puis Jaffa le 6 mars, après un long siège. Puis vint le
tour de Nazareth et Tyr, avant que le siège soit mis
devant Saint-Jean-D’acre.
• Ces victoires, faciles, épuisent une armée en manque
de ravitaillement qui ne put s’emparer de la ville, d’autant
que la peste se déclara parmi les français. Napoléon
fut donc contraint de se replier vers Le Caire.
• En Europe, la guerre reprenait et la France partait à
l’offensive sur le Rhin pour devancer l’attaque ennemie.
• En Hollande les Français parviennent à contenir les
Russes, mais l’armée d’Italie est vaincue par les troupes
austro-russes et abandonne Milan, la plaine du Pô et le
Piémont. Pour compliquer le tout, la Vendée entre à
nouveau en insurrection.
• Après une contre-offensive des ottomans à Alexandrie,
Napoléon se porte à l’offensive en juillet 1799 pour
dégager ses hommes, à la tête d’une armée affaiblie,
mais parvient à s’imposer dans cette deuxième bataille
d’Aboukir, qui donne un répit aux Français.
• À la fin d’août 1799, Bonaparte apprit la situation en
Europe et décida de rentrer en France, laissant une
garnison sur place.
• Il est accueilli en sauveur et devient premier consul.
La situation étant critique, il tente de faire la paix avec
l’Angleterre et l’Autriche, qui exigent le rétablissement
des Bourbons comme préalable.
• Profitant de la mésentente entre Russes et Autrichiens, il
fait la paix avec Paul et contre-attaque. Traversant les
Alpes en mai, il s’empare de plusieurs villes au nordouest de l’Italie, dont Milan le 2 juin 1800, alors que
Gênes est capturée par l’Autriche.
• C’est ce même mois de juin que Bonaparte remporta
une de ses grandes victoires, à Marengo, contre les
Autrichiens, qui s‘étaient portés à l’offensive contre lui.
• D’abord commencée sous de mauvais auspices, avec
une situation peu confortable et une légère infériorité
numérique, l’arrivée de 10 000 hommes en renfort permit
aux Français de sauver la situation.
• Le même jour, en Égypte, le général Kleber, que
Napoléon avait laissé en garnison, est assassiné.
Son successeur parvint à tenir quelques mois, mais en
juin 1801, il dut s’avouer vaincu et se soumettre aux
Anglais, mettant un point final à l’aventure égyptienne.
• Après Marengo, Napoléon reprend tous les territoires
perdus en 1799, à l’exception de Mantoue, et rentre à
Paris, d’autres généraux poursuivant la conquête.
• En décembre 1800, Moreau inflige une grave défaite aux
Autrichiens à Hohenlinden, contraignant ainsi ces
derniers à négocier.
• Le 9 février 1801 est signé le traité de Lunéville, qui
confirme les dispositions du traité de Campo-Formio de
1797 et oblige l’Autriche à céder la Toscane et à
reconnaître la république helvétique.
• La Toscane fut rétrocédée à l’Espagne par le traité
d’Aranjuez, en échange du duché de Parme, de la rive
Ouest du Mississippi et de l’île d’Elbe.
• Les Anglais sont isolés, d’autant que le sultan ottoman
fait la paix avec la France. L’Angleterre étant disposée à
négocier, Napoléon entame des pourparlers conduisant
à la signature de la paix d’Amiens en mars 1802.
• L’Angleterre restituait le Cap de Bonne-Espérance
aux Hollandais, confirmait les droits de pêche des
Français à Terre neuve et rendait son indépendance à
Malte, tombé aux mains des Anglais en 1800.
• La France devait évacuer Naples et Rome, rendre
l’Égypte à l’Empire ottoman et dédommager Guillaume V
d’Orange-Nassau, renversé lors de la proclamation de la
république batave.
• Ayant maintenant les mains libres, Bonaparte envoie
une armée reprendre Saint-Domingue en révolte.
Arrivés le 1er février 1802, les Français rencontrèrent de
graves difficultés, malgré la capture de François
Dominique Toussaint, le chef des insurgés de SaintDomingue.
• Décimée par la maladie, l’armée française ne put
empêcher
Saint-Domingue
de
déclarer
son
indépendance le 1er juillet 1804, sous le nom d’Haïti.
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