La place de l’hypnose pour soulager la douleur morale : la reconnaître, la prendre en charge Dr. Thierry Servillat, Dr. Isabelle Stimec Introduction La douleur morale : Dimension rarement abordée lorsqu’on évoque la douleur Notion importante en psychiatrie « De ce point de vue, elle s’oppose directement au caractère expansif de l’élan personnel. Dans la douleur, nous ne nous extériorisons pas, nous ne laissons pas de marques sur le monde extérieur, tout au contraire, nous la supportons, nous la laissons venir avec toute sa fougue qui nous fait souffrir. La douleur sensorielle est donc une attitude par rapport au milieu ambiant. Passagère, instantanée même, par sa nature, elle s’installe et devient durable là où elle n’est pas contrebalancée par l’élément antagonique, l’élan personnel » Eugène Minkowski Dimensions de la douleur Les frontières entre le corps et l’esprit sont aujourd’hui perméables Il est désormais courant de prendre en compte la dimension psychique, émotionnelle d’une douleur La douleur morale Psychiatrie et douleur morale : - mélancolie - dépression - perte du plaisir - anhédonie La reconnaître - parfois exprimée - l’anesthésie affective est l’élément central anesthésie affective a Emil Kraepelin La douleur morale Parfois visible sous la forme d’une irritabilité La colère peut masquer la douleur dépression masquée autres douleurs morales La déception : - peut tuer - D’où l’importance d’objectifs réalistes dans les thérapies - S’excuser en cas d’échec thérapeutique autres douleurs morales La trahison : - Très fréquente en douleur chronique - peut être aiguë - “coup de poignard dans le dos” - La traiter comme un trauma Douleur morale / physique Quels points communs? - circuits neurologiques commun - dépression dans la douleur chronique - douleurs physiques dans la dépression La douleur est un tout Au cours de l’évolution - nociception => évitement des stimulus - douleur => composante émotionnelle - souffrance => vécu cognitif complexité Dans la douleur morale il existe une anesthésie affective, avec douleur de ce sentiment d’anesthésie Il y a donc co existence de l'anesthésie et de la souffrance Attention aux apparences Parfois la douleur est la seule plainte au premier plan. C’est elle qui permet de se sentir encore vivant d’avoir encore des sensations. Évaluer la douleur Nombreux outils pour la douleur physique Difficile d’évaluer la douleur morale Les échelles de dépression ne prennent pas en compte cette dimension d'anesthésie La prendre en charge - Médicaments : très limités - Hypnose : apports très intéressant Place de l ‘hypnose Efficacité dans la prise en charge de la douleur physique qu’elle soit aiguë ou chronique. Modification du vécu douloureux, des perceptions, de la représentation de la douleur Augmentation des capacités de choix Place de l’hypnose Dans la douleur morale 1) Réintroduire de la sensorialité, levier pour lever l'anesthésie 2) Action sur la composante traumatique, levier pour faire reprendre le cours du temps. Place de l’hypnose Ces deux actions sont très voisines : - lever une dissociation - remettre le patient en mouvement pour communiquer et se connecter au monde Place de l’hypnose - Importance de réintroduire du plaisir et des sensations nouvelles et excitantes. - Certains patients dont la douleur était la seule expression de leur émotion possible ont eu des gestes suicidaires ou attaques de panique à la disparition de la douleur : attention ! Apports utiles - Rejoindre le patient là ou il est dans son vécu douloureux, qu’il soit physique ou psychique - Parfois accepter le maintien d’un minimum de douleur morale ou physique - Éviter de ce fait la surenchère (fureur TT) Principe : Réintroduire des sensations En utilisant ce qu’on peut utiliser ! Techniques hypnotiques - Reconnaître : l’importance du lien (« Tu n’es pas seul » Jef, Jacques Brel. Fondamental. - Alliance : le « côté pas sympa de la vie » (Erickson) - Si trauma majeur : le silence - Compliment sur le fait d’avoir survécu (résilience) Techniques hypnotiques - Lieu sûr et si possible agréable : y aller très parcimonieusement, et plus si possible ! - Techniques d’analgésie - Si forte hypnose négative : métaphorisation (voire portrait chinois): « Quelle sorte de blues ? » - Si échec : travail avec la colère Techniques hypnotiques Au besoin par la surprise, voire par une approche provocative (cas du patient prussien d’Erickson) Hypnose provocative