Inflammation : nouvelles pistes 617
tration peut atteindre 1 000 fois la valeur basale en 48 heures. Cette molécule n’est pas
dialysée et sa concentration ne diminue pas en cas de syndrome néphrotique. Par con-
tre, sa synthèse est diminuée en cas d’insuffisance hépato-cellulaire, et la CRP n’est
plus fiable chez un patient cirrhotique sévère par exemple. Les glucocorticoïdes inhi-
bent également sa synthèse. Une augmentation modérée de sa concentration basale
peut être observée au cours de la grossesse ou en cas de contraception mais reste infé-
rieure à 15 mg.L-1. Une ascension plus importante autour de 30 mg.L-1peut être due à
l’hémodialyse chronique.
Les mécanismes d’action de la CRP ne sont pas totalement élucidés. Cette protéine
jouerait un rôle protecteur au cours de la réaction inflammatoire [4]. Sa capacité à lier
le pneumocoque protègerait l’organisme contre cet agent infectieux. Par ailleurs, la
CRP stimule la sécrétion de cytokines anti-inflammatoires par le macrophage, et est
capable d’activer le complément par la voie classique. Cette activation se produit lors-
que la CRP se fixe aux membranes cellulaires grâce à son affinité pour certains
phospholipides (PhL) et notamment les lysophosphatidylcholines (lysoPC). Or ces
lysoPC ne sont pas présents sur le feuillet externe des membranes de cellules intactes.
Leur présence pourrait être favorisée par l’action de la phospholipase A2 sécrétée de
type IIA (sPLA2) qui est capable d’hydrolyser les PhL membranaires, si leur répartition
est modifiée [5]. Schématiquement, alors que la membrane cellulaire normale est com-
posée d’un double feuillet au sein desquels les différents PhL sont répartis de façon
asymétrique par un phénomène enzymatique [6], l’action de certains médiateurs in-
flammatoires entraîne une perte de cette asymétrie de répartition [7]. Parmi ces
médiateurs, citons le TNFα, l’IL1ß, la fraction C5b9 du complément. Les PhL du feuillet
interne ne sont plus maintenus et sont extériorisés (flip-flop). Ce phénomène s’accom-
pagne de l’émission de microvésicules cellulaires (ectocytose) et d’une hydrolyse des
PhL par la sPLA2 qui génère des lysoPC [5]. La CRP peut alors se fixer à la surface de
ces membranes modifiées et agirait comme une opsonine, en activant le complément,
et en favorisant la phagocytose de ces cellules modifiées ou des microvésicules [8].
Rappelons que les cellules apoptotiques subissent ce flip-flop. La CRP agirait donc en
favorisant l’élimination de cellules en apoptose, de débris cellulaires ou de microvési-
cules.
En pratique, la CRP est un excellent marqueur diagnostic. Sa sensibilité pour con-
forter le diagnostic d’inflammation aiguë est élevée sans être fonction de l’étiologie.
Son augmentation est observée lors de réactions inflammatoires de faible intensité, et
n’est pas fonction du site de l’inflammation. Toutes les infections nosocomiales s’asso-
cient à une ascension de sa concentration, qu’il s’agisse d’infections sévères
(pneumopathie, bactériémie), ou d’infections moins symptomatiques (infection uri-
naire sur sonde, sinusite).
La CRP n’est pourtant pas un marqueur idéal en réanimation. Tout d’abord, la sen-
sibilité de ce marqueur est telle, qu’un traumatisme ou une intervention chirurgicale
entraînent son augmentation dès la 48e heure (Figure 1). Sa spécificité pour le diagnos-
tic d’infection n’est donc pas bonne, et des concentrations importantes
(> 200 mg.L-1) sont nécessaires pour que la CRP ait une valeur prédictive positive de
sepsis correcte (Tableau I).
Enfin, sa décroissance est lente (plusieurs jours) ; sa cinétique ne permet donc pas
de suivre l’évolution de la réaction inflammatoire au cours d’un état de choc septique
ou d’un SDRA par exemple. Les dosages plasmatiques peuvent donc être espacés de
3 à 5 jours, d’autant qu’ils sont coûteux.
D’autres marqueurs sont préférables s’il existe plusieurs stimuli de la réponse in-
flammatoire, ou si l’on souhaite suivre l’évolution quotidienne d’un SIRS.