Effet des agrégats d`ions néodyme sur l`émission laser

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Amplificateurs et Lasers à fibre
A1.10
EFFET DES AGREGATS D’IONS NEODYME SUR L’EMISSION LASER A 930 ET
1050NM DANS UNE FIBRE OPTIQUE A PROFIL D’INDICE EN W
C. Bartolacci1, M. Laroche1, H. Gilles1, S. Girard1, T. Robin2 et B. Cadier2
1
Equipe Lasers, Instrumentation Optique et Applications (LIOA)-Centre de recherche sur les Ions,
les Matériaux et la Photonique (CIMAP), UMR 6252 CEA-CNRS-ENSICAEN, Université de Caen,
6 BLVD Maréchal Juin, 14050 Caen cedex
2
iX Fiber, rue Paul Sabatier, 22300 Lannion
[email protected]
RESUME
Nous présentons une étude réalisée sur des fibres double gaine dopées Néodyme avec un
coeur à profil d’indice en W. Les objectifs sont de déterminer le taux d’ions néodyme formant des
agrégats et d’étudier l’influence de ces agrégats sur les transitions laser autour de 930 nm et 1050
nm.
MOTS-CLEFS : Laser à fibre ; agrégats d’ions ; profil d’indice en W .
1. INTRODUCTION
Les verres dopés néodyme utilisés comme milieu amplificateur dans un laser solide ont fait
l’objet de nombreuses études depuis la démonstration du premier effet laser par Maiman en 1960.
Le plus souvent l’ion néodyme est utilisé sur la transition optique 4F3/2 vers 4I11/2 à 1.05 ȝm.
Toutefois cet ion possède également une transition optique 4F3/2 vers 4I9/2 à 930 nm unique qui
permet d’atteindre après doublage une longueur d’onde dans le domaine bleu intéressante pour de
nombreuses applications en biophotonique. Cette transition laser à 930 nm est en compétition avec
la transition du néodyme à 1.05 μm qui présente une efficacité plus importante. Il est donc
nécessaire d’introduire de fortes pertes à 1050 nm afin de bloquer l’Emission Spontanée Amplifiée
(ASE) à cette longueur d’onde et d’atteindre l’inversion de population nécessaire pour une
l’émission laser autour de 930 nm. Pour cela, une solution possible est d’utiliser une structure de
fibre dopée Néodyme avec un cœur présentant un profil d’indice en W. Ce type de profil présente
l’intérêt de se comporter comme un filtre passe bas en longueur d’onde c'est-à-dire qu’il supprime la
propagation du mode LP01 au-delà d’une certaine longueur d’onde de coupure. Il est cependant
intéressant de noter que les études précédentes [1]-[2]-[3] ont montré de façon inexpliquée des
rendements laser variant largement (entre 12% et 41%). Aujourd’hui encore, il semble très difficile
de prévoir l’efficacité laser d’une fibre néodyme.
Dans cette contribution, nous proposons de déterminer expérimentalement le taux d’agrégats
d’ions néodyme présent dans plusieurs fibres de concentrations différentes ainsi que l’effet de ces
agrégats sur l’émission laser à 930 nm et à 1050 nm à titre de comparaison. Les résultats
expérimentaux seront comparés à une étude théorique basée sur la modélisation numérique de la
configuration laser.
2. MISE EN EVIDENCE EXPERIMENTALE ET MESURE DU TAUX D’AGREGATS
Un agrégat d'ions est un amas de plus de deux ions dopants. Les ions concernés sont ainsi très
proches les uns des autres et les transferts d'énergie entre ions sont beaucoup plus probables que
dans le cas d'ions isolés. Par conséquent, ces ions se désexcitent très rapidement par une succession
de transferts non radiatifs et l'énergie est alors perdue.
Afin d’envisager une utilisation dans une configuration entièrement fibrée, nous avons
privilégié une structure de fibre avec un diamètre externe de 125 ȝm et à cœur monomode (5 ȝm),
donc compatible avec la plupart des composants commerciaux disponibles à 1 Pm. Cependant, le
faible recouvrement entre les modes de gaine et de cœur implique un dopage important en ions
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néodyme afin de réduire les longueurs d’absorption. La présence d’agrégats d’ions néodyme est
alors très probable. Dans l’intérêt de réduire la formation de tels agrégats un codopage à
l’aluminium est notamment nécessaire dans ces fibres [4].
Les fibres fabriquées pour cette étude présentent un profil d’indice en W calculé pour obtenir
une longueur d’onde de coupure autour de 1100 nm lorsque la fibre est très peu courbée (TAB. 1 ).
Les fibres 1 et 2 sont issues de la même préforme. Pour obtenir la fibre 2, la préforme a été étirée à
un diamètre plus faible afin de modifier la longueur d’onde de coupure. En effet, une réduction
homothétique du profil d’indice en W déplace la longueur d’onde de coupure vers de plus faibles
longueurs d’ondes [2]. Ainsi, la fibre 1 est optimisée pour fonctionner à 1050 nm tandis que la fibre
2 présente une longueur d’onde de coupure telle que des pertes suffisantes soient introduites sur
cette transition afin de favoriser son fonctionnement à 930 nm. La fibre 3 est moins dopée en ions
néodyme de sorte à réduire le taux d’agrégats. Afin de décaler d’avantage la longueur d’onde de
coupure vers les courtes longueurs d’onde et d’introduire suffisamment de pertes sur la transition à
1050 nm, la fibre est enroulée autour d’un cylindre de diamètre 5 cm environ [2]. Les
concentrations en ions néodyme correspondant à chaque fibre sont mesurées expérimentalement par
spectroscopie d’absorption. Les concentrations obtenues sont reportées dans le tableau 1.
TAB. 1 : Paramètres importants des fibres utilisées
Fibre n°1
Fibre n°2
Diamètre du cœur/gaine de la fibre
5 /130 ȝm
4,6/120 ȝm
Longueur d’onde de coupure
1125 nm
1060 nm
Diamètre d’enroulement optimisé pour une
5cm
émission laser à 930 nm
Concentration en ion néodyme (cm-3)
9.065.1019
9.065.1019
Fibre n°3
5/120 ȝm
1106 nm
4.5 cm
7.1.1019
Pour déterminer la présence et les proportions d’ions néodyme en agrégats, nous étudions la
transmission du signal de pompe dans une portion de fibre dopée néodyme. La pompe est injectée
dans la fibre via un combineur 6 vers 1 connecté à deux diodes multimodes délivrant 6W à 808 nm.
Nous avons vérifié que les ions néodyme en agrégats ne possèdent aucune signature radiative
mesurable, ils se comportent donc comme des centres absorbants non saturables.
Expérimentalement, leur présence peut être mise en évidence par une diminution de l’effet de
saturation de l'absorption à la longueur d’onde de pompage. Le taux d'ions en agrégats est déduit
par ajustement des mesures expérimentales de la transmission à 808 nm en fonction de la puissance
avec les résultats provenant d’une modélisation numérique.
0,90
transmission de la pompe
transmission de la pompe
0,72
0,69
0,66
exp, Fibre n°2, 184 cm
simulation :
50 % d'agrégats
60 % d'agrégats
55 % d'agrégats
0,63
0,60
0
2
4
6
8
0,88
exp, fibre n°3, 91 cm
simulation :
50 % d'agrégats
40 % d'agrégats
30 % d'agrégats
0,86
0,84
0,82
10
0
2
4
6
8
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Puissance injectée (W)
Puissance injectée (W)
FIG. 1 : Comparaison de la transmission de la pompe simulée et expérimentale.
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La figure 1 représente l’évolution du coefficient de transmission des fibres 2 et 3 en fonction
de la puissance injectée. Le modèle théorique prévoit une forte dépendance de l’effet de saturation
en fonction du taux d’agrégats d’ions néodyme. La comparaison entre notre expérience et le modèle
numérique, permet d’identifier le taux d’agrégats présent dans les deux fibres (55% dans la fibre 2
et 40% dans la fibre 3). La diminution de la concentration en ion néodyme réduit la proportion
d’ions en agrégats, cependant l’absorption diminue elle aussi. Un compromis est donc nécessaire.
3. EFFET SUR LE RENDEMENT LASER
Il est également possible de valider les estimations du taux d’agrégats en comparant le
rendement laser obtenu expérimentalement et les résultats donnés par une simulation numérique. La
fibre 1 permet une émission laser à 1050 nm tandis que la fibre 2 est utilisée pour une émission laser
à 930 nm lorsque le diamètre d’enroulement est optimisé (tableau 1).
Puissance de sortie (W)
0.6
Expérimental :
Fibre 1, L=811 cm O=1050 nm
Fibre 2, L=911 cm O=933 nm
0.5
0.4
Modèlisation :
Fibre 2, L=911 cm
O=933 nm
+55% d'ion Nd
en agrégats
0.3
0.2
0.1
0.0
0
1
2
3
4
5
Puissance de pompage (W)
FIG. 2 : Comparaison des Rendements laser à 1050 nm et 930 nm pour les fibres 1 et 2
La figure 2 montre que l’efficacité laser à 930 nm est beaucoup plus affectée par la
présence de clusters que celle à 1050 nm. En effet, dans une configuration laser à 3 niveaux
d’énergie, les pertes liées à la réabsorption du signal laser par les centres absorbants s’ajoutent aux
pertes inévitablement engendrées par les agrégats lors du pompage. La figure 2 présente également
des résultats préliminaires donnés par une modélisation numérique basée sur la méthode des
différences finies et simulant le système laser à 930 nm. Ce modèle permet de calculer le rendement
laser avec une précision correcte et sans paramètres ajustables. Ces résultats confirment donc la
présence d’environ 55% d’agrégats dans les fibres fabriquées et une diminution sensible du
rendement laser est prévue pour des taux d’agrégats de seulement quelques pourcents.
CONCLUSION
Nous avons mis en œuvre une méthode d’estimation du taux d’ion néodyme en agrégats par
une mesure de la transmission du signal de pompe comparée à une simulation numérique,
complétée par une étude du rendement laser à 930 nm. Le taux le plus faible d’ions néodyme en
agrégats mesuré est de 40 % pour la fibre la moins dopée. Afin d’augmenter le rendement laser à
930 nm, une concentration adaptée est donc primordiale. Une amélioration des performances laser
de nos fibres basée sur l’étude de l’influence du codopage à l’aluminium est en cours.
REFERENCES
[1] I. A Bufetov et al., Quantum Elec. 33, 1035 (2003).
[2] S. Yoo, D.B.S Soh, J. Kim, Y. Jung, J. Nielson, JK. Sahu, J.W. Lee, K-Oh, Opt. Comm. 247, 153 (2005).
[3] D. B. S. Soh, S. Yoo, J. Nielson, JK. Sahu, S. Baek,Y. Jeong, C. Codemard, P. Dupriez, J. Kim, V.
Philippov, IEEE J. Quantum Electron. 40, 1275 (2004).
[4] K. Arai, H.Namikawa, K. Kumata, T.Honda, J. Appl. Phys. 59, 343 (1986).
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