N° d'ordre : 3812 THÈSE présentée à L'UNIVERSITÉ BORDEAUX I ÉCOLE DOCTORALE DES SCIENCES CHIMIQUES Par Nicolas MARQUESTAUT POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR SPÉCIALITÉ : Chimie - Physique ********************* Effets d'exaltations par des nanostructures métalliques : Application à la microscopie Raman en Champ Proche ********************* Soutenance le : 1er Juillet 2009 Après avis de : MM. FELIDJ Nordin, Professeur, Université Paris VII Rapporteur VALMALETTE Jean-Christophe, Professeur, Université du Sud Toulon Var Rapporteur Devant la commission d'examen formée de : MM. GUILLAUME François, Directeur de Recherche C.N.R.S., Université Bordeaux 1 Président FELIDJ Nordin, Professeur, Université Paris VII Examinateurs VALMALETTE Jean-Christophe, Professeur, Université du Sud Toulon Var RAVAINE Serge, Professeur, Université Bordeaux 1 SZUNERITS Sabine, Professeur, Université de Grenoble SERVANT Laurent, Professeur, Université Bordeaux 1 LAGUGNE-LABARTHET François, Assistant Professor, University Western Ontario, Canada - 2009 - A mes parents A Bérangère A tous mes proches Remerciements Ces travaux de thèse s’inscrivent dans le cadre de recherches au sein du Groupe de Spectroscopie Moléculaire (Institut des Sciences Moléculaires, UMR 5255, Université Bordeaux I) dirigé par Monsieur François Guillaume, Directeur de Recherche au C.N.R.S. Qu’il trouve en ces mots mes sincères remerciements. Je lui suis très reconnaissant de m’avoir accueilli au sein du groupe ainsi que d’avoir accepté de présider le jury de cette thèse. Mes remerciements s’adressent également à Messieurs Nordin Félidj, Professeur à l’Université Paris VII Denis Diderot, et Jean-Christophe Valmalette, Professeur à l’université du Sud Toulon Var, pour m’avoir fait l’honneur de juger de manière approfondie mon travail en tant que rapporteurs et membres du jury. Mes remerciements vont également vers Madame Sabine Szunerits, Professeur à l’Université de Grenoble et Monsieur Serge Ravaine, Professeur à l’Université Bordeaux I, pour avoir accepté de participer au jury de cette thèse. Ces travaux n’auraient pas lieu d’être sans le soutien sans faille apporté au cours de ces trois années par David Talaga, Ingénieur d’Etudes au Laboratoire, pour qui j’exprime la plus profonde gratitude. Il a su par sa patience et ses compétences m’initier à la spectroscopie Raman et aux techniques Champ Proche. Je suis heureux de le remercier aujourd’hui pour ses conseils, ses critiques bienveillantes dont il m’a fait bénéficier ainsi que des encouragements, du soutien qu’il n’a cessé de me témoigner afin d’assurer le bon déroulement de cette thèse. Mes remerciements s’adressent à l’homme et au scientifique. Je remercie tout particulièrement mon Directeur de thèse, François Lagugné-Labarthet, d’avoir su me conseiller, et m’aider de manière efficace dans de nombreux domaines, non nécessairement scientifiques, afin de faire aboutir cette thèse et de préparer l’après thèse. Je lui suis très reconnaissant de m’avoir laissé une grande liberté dans l’orientation de mes travaux de thèse ainsi que pour la forte contribution apportée tant dans la compréhension des enjeux scientifiques que la rédaction et la présentation des résultats. Je le remercie également pour la collaboration mise en place avec l’Université de Western Ontario au Canada me permettant de côtoyer pour quelques temps le travail de recherche effectué Outre-Atlantique. Je ne saurais oublier mon autre Directeur de thèse, Laurent Servant, pour les fructueuses discussions au cours desquelles il a su me faire bénéficier de son expérience tant sur le plan scientifique qu’humain. Je le remercie particulièrement « d’avoir souffert jusqu’au bout avec moi » lors de la préparation des oraux. Je suis très reconnaissant envers l’équipe du Centre de Recherche Paul Pascal à l’Université Bordeaux I dirigée par Serge Ravaine, notamment Béatrice Agricole, Stéphane Réculusa et Pascal Massé pour la fabrication des échantillons LB ainsi que les nombreuses explications propres à la chimie de dépôt de cristaux colloïdaux. Je me souviendrai des moments passés avec les étudiants de Western Ontario, je pense tout particulièrement à Betty Galarreta que je tiens à remercier pour nos échanges constructifs, ainsi que la minutie dont elle a fait preuve lors de la préparation des échantillons en salle blanche malgré les difficultés expérimentales inhérentes. Je garde une pensée pour Christine Séguin et Sarvesh Varma qui m’ont réservé un accueil très chaleureux tout au long de mon séjour au Canada. Je voudrais de même exprimer mes pensées les plus sincères envers les enseignantschercheurs du Laboratoire. Je pense notamment à Arnaud Desmedt, Vincent Rodriguez, Michel Couzi, Thierry Buffetteau et Marc Dussauze que je remercie pour les explications et nombreux conseils prodigués. Merci à Valérie Guieu et Caroline Delhaye pour les moments partagés dans le bureau du 4ie étage et cette touche de féminité apportée dans « ce monde de brutes ». Une pensée particulière pour Caro avec qui l’on s’est serré les coudes durant ces trois années… Mes remerciements les plus sincères à tous ceux qui m’ont entouré de leur sympathie au cours de ma thèse. Ceux-ci s’adressent à Jean-Luc Bruneel pour sa disponibilité, son aide et son humour typiquement ch’ti, à Fred Adamietz pour sa bonne humeur perpétuelle et l’organisation d’activités extérieures. Merci à Julien Sanchez pour son fameux et fabuleux « Candle » !!, Stéphane Rullier pour ses pièces mécaniques en tout genre et Eric Naillou pour la préparation des verres. Je remercie bien évidemment toute ma famille pour son soutien permanent durant toutes ses années. Plus particulièrement, je remercie mes parents d’avoir toujours été là à mes côtés, de m’avoir encouragé tout au long de mes études. Mon parcours étudiant n’aurait pas été possible sans eux. Merci à tous mes amis bordelais, palois et de l’école d’ingénieur de m’avoir tant apporté en dehors du laboratoire. Le meilleur pour la fin, comment ne pas remercier Bérangère pour ces 5 ans de vie commune. Merci d’avoir supporté mes sautes d’humeur, d’avoir été là dans les moments difficiles, d’avoir su m’écouter, me conseiller, me guider et bien entendu merci pour tous ces moments de bonheur partagés ensemble et pour tous ceux à venir…. Merci tout le monde…. Sommaire Introduction générale .......................................................................................... 17 Chapitre I La spectroscopie de Diffusion Raman Exaltée de Surface : Rappels et Développements ...................................................... 21 1 La diffusion Raman......................................................................................................... 23 1.1 Principes de la spectroscopie Raman : quelques éléments ................................... 25 1.2 Effets Raman exaltés ................................................................................................ 28 1.3 Principe de l’effet Raman résonant ........................................................................ 29 1.4 Effet SERS ................................................................................................................ 31 1.5 Origines de l’effet SERS .......................................................................................... 31 1.5.1 Origine chimique ............................................................................................... 32 1.5.2 Origine électromagnétique ............................................................................... 34 1.6 Plasmons de surface ................................................................................................. 35 1.6.1 Plasmons de surface localisés ........................................................................... 38 1.6.2 Résonance plasmon de surface localisée.......................................................... 40 2 Optimisation et fabrication de substrats SERS ............................................................ 42 2.1 Quelques techniques de fabrication de plateformes SERS : Méthodes lithographiques. .............................................................................................................. 43 2.2 Quelques techniques de fabrication de plateformes SERS : la lithographie de type « nanosphère »........................................................................................................ 44 2.2.1 Influence de la taille et de la forme sur le LSPR ............................................ 49 2.2.2 Relation entre bande plasmon et longueur d’onde excitatrice en SERS...... 50 Conclusion du Chapitre I .................................................................................................. 52 Références bibliographiques ............................................................................................. 53 Chapitre II Résultats expérimentaux SERS ....................................... 57 1 Introduction générale...................................................................................................... 59 2 Méthodes expérimentales ............................................................................................... 61 2.1 Préparation des particules de silice et fonctionnalisation..................................... 61 2.2 Préparation des plateformes SERS de Langmuir-Blodgett ................................. 61 2.3 Préparation des plateformes SERS par lithographie à faisceau d’électrons ...... 66 2.4 Fonctionnalisation des plateformes SERS ............................................................. 68 2.5 Techniques de caractérisation des plateformes SERS .......................................... 70 2.6 Résultats .................................................................................................................... 72 2.6.1 Caractérisation spectroscopique...................................................................... 72 2.6.2 Estimation du coefficient d’amplification Raman.......................................... 74 2.6.3 Conclusion préliminaire sur les substrats SERS de type Fischer ................. 78 2.7 Etude approfondie de la correspondance résonance plasmon - excitation Raman .......................................................................................................................................... 79 2.7.1 Réseau de Fischer .............................................................................................. 79 2.7.2 Réseau de lignes ................................................................................................. 86 2.7.2.1 Spectres d’extinction .................................................................................. 86 2.7.2.2 Calcul du coefficient d’exaltation Raman................................................ 90 2.7.2.3 Effet de l’espacement inter-linéaire sur les plasmons de surface et l’efficacité SERS ..................................................................................................... 92 Conclusion du Chapitre II................................................................................................. 94 Références Bibliographiques............................................................................................. 96 Chapitre III La microscopie Raman Champ Proche .................. 99 1 Introduction ................................................................................................................... 101 2 Microscopie Champ Proche ......................................................................................... 103 2.1 Limite de résolution d’un Microscope Optique................................................... 103 2.2 Ondes Evanescentes ............................................................................................... 104 2.3 Microscopie optique en champ proche avec ouverture ...................................... 108 2.4 Microscopie optique en champ proche sans ouverture....................................... 112 2.4.1 Amplification du champ à proximité de pointes métalliques ..................... 114 2.4.2 Approches Expérimentales basées sur la diffusion ...................................... 119 2.4.3 Approches basées sur l’excitation locale ....................................................... 122 Conclusion du Chapitre III ............................................................................................. 126 Références bibliographiques ........................................................................................... 128 Chapitre IV Résultats expérimentaux Microscopie Raman en Champ Proche ........................................................................................................... 131 1 Introduction ................................................................................................................... 133 2 Dispositif expérimental ................................................................................................. 135 2.1 Polarisation longitudinale...................................................................................... 137 2.2 Validation du montage Doughnut......................................................................... 139 3 Etude de nanofils de silicium en imagerie Raman confocale .................................... 141 3.1 Effets thermiques.................................................................................................... 141 3.2 Cartographies Raman............................................................................................ 146 3.3 Conclusion préliminaire ........................................................................................ 147 3.4 Application de la configuration TERS à la caractérisation de nanomatériaux 148 4 Imagerie d’un nanofil de GaN...................................................................................... 150 5 Substrats SERS.............................................................................................................. 157 Conclusion du chapitre IV............................................................................................... 160 Références bibliographiques ........................................................................................... 161 Conclusion générale et perspectives ..................................................... 163 Introduction générale Introduction générale La spectroscopie Raman fondée sur la diffusion inélastique de la lumière doit son existence à son auteur éponyme à la fin des années 20. Les règles de sélection vibrationnelles impliquent que chaque molécule possède une signature spectrale unique faisant de cette technique un puissant outil analytique largement utilisé dans de nombreux domaines scientifiques tels que la recherche fondamentale en physique, chimie, biologie, géologie, ou encore dans des domaines analytiques plus appliqués (cosmétiques, pollution, œuvres d’art). Du fait des faibles sections efficaces de diffusion moléculaires (10-30 cm2/molécule/stéradian), le signal Raman reste toutefois très faible et difficilement détectable. L'effet SERS (Surface Enhanced Raman Spectroscopy) mis en évidence par Fleischmann puis par Jeanmaire et Van Duyne à la fin des années 70 détourna cette contrainte et suscita un nouvel essor de cette spectroscopie et des mécanismes fondamentaux de l’effet SERS. En effet, des expériences Raman menées sur des molécules greffées en surface d’un métal rugueux ont mis en évidence des intensifications allant de 6 jusqu’à 14 ordres de grandeur permettant d'atteindre des sections efficaces de diffusion proches de celles de la fluorescence. De ce fait, la spectroscopie Raman est devenue une technique plus accessible et de plus en plus répandue dans les laboratoires d’analyses. Afin de pallier les faibles sections efficaces de diffusion de cet effet, de nombreuses approches ont permis de fabriquer des surfaces, agrégats ou solutions colloïdales de matériaux métalliques (Ag, Au, Cu, Pt,…) afin d’amplifier le signal de monocouches adsorbées à la surface de ces structures. Les surfaces SERS sont fabriquées par de nombreuses approches qui peuvent être classifiées selon deux catégories : alors que les techniques "top-down" telles que la lithographie et la gravure sur couches minces sont souvent utilisées notamment pour la fabrication de surfaces nanostructurées, les approches "bottom-up", qui comprennent les assemblages de taille nanométrique réalisés à partir d'atomes, de molécules ou de nano-objets individuels, présentent une très grande flexibilité en terme de taille et de forme. L’effet SERS est appliqué à un large champ d'applications allant du domaine biologique à la science des matériaux en passant par l'analyse structurale. Les molécules étudiées sont principalement des composés tests tels que la pyridine, la porphyrine ou le thiophénol. Les colorants (cristal violet, Brilliant Cresyl Blue, rhodamine 6G, pigments pour la conservation d'œuvres d'arts et en géologie), drogues (nicotine, ecstasy), bactéries (anthrax), explosifs (TNT) ou protéines, cellules et tissus biologiques (brins d'ADN, acides aminés, membranes Nicolas Marquestaut 17 Institut des Sciences Moléculaires Introduction générale cytoplasmiques, cellules musculaires) sont les nombreuses applications recensées dans la littérature. Dans le cadre de cette thèse, nous nous sommes intéressés à un composé original, un dérivé d'azobenzène avec un groupe thiol (HS) qui s’adsorbe de façon covalente sur l’or via son groupe sulfure. Après une présentation générale des principes de la diffusion Raman, le premier chapitre décrit les effets Raman exaltés de résonance et de surface et plus particulièrement les mécanismes d'origine chimique et électromagnétique du SERS. Le second critère est prépondérant dans l'intensification du signal Raman et nécessite l’introduction au concept de plasmons de surface qui définit l'oscillation collective des électrons à la surface d’un matériau conducteur sous irradiation avec un champ électromagnétique. La fréquence de résonance plasmon de surface localisée (LSPR) lorsqu'elle est en accord avec la raie laser induit une forte amplification. Les diverses techniques de fabrication de surface SERS par voie chimique et les procédés lithographiques seront détaillés. Le chapitre deux porte sur les mesures spectroscopiques en transmission du domaine visible jusqu’au proche infrarouge afin de caractériser les modes LSPR nanostructurés. Des mesures en microscopie Raman confocale sur de tels substrats fonctionnalisés sont aussi conduites et corrélées avec les mesures plasmons des surfaces SERS. Les deux méthodes sélectionnées "top-down" de lithographie par faisceau d'électrons et "bottomup" de lithographie de type nanosphère y sont décrites. Pour la première fois, ces deux approches sont comparées et quantifiées en terme de facteur d'amplification du signal Raman pour des motifs de formes comparables. Ces surfaces nanostructurées sont formées par des assemblages de triangles d’or organisés en étoiles nommés motifs de Fischer. D'autres motifs, ont aussi été étudiés et permettent de mieux appréhender le comportement général de telles structures et leurs applications en SERS. L’amplification du signal Raman détaillée dans les deux premiers chapitres, trouve ses origines dans le confinement des électrons des surfaces d’or nanostructurées et le transfert d’énergie vers l’analyte. Une technique basée sur les avancées de la microscopie en champ proche consiste à utiliser une source extérieure comme unité amplificatrice du signal Raman. Dans le troisième chapitre seront abordés les concepts et développements fondamentaux de la microscopie optique en champ proche. Depuis 1928 et les travaux précurseurs de Synge d’utiliser une sonde locale Nicolas Marquestaut 18 Institut des Sciences Moléculaires Introduction générale avec ouverture afin de surpasser la limite de résolution, les techniques n’ont cessé d’évoluer. Depuis une dizaine d’années, des pointes métalliques (Au, Ag, Pt) dont la taille du sommet est limitée à quelques nanomètres, offrent la possibilité d’exalter localement le signal de diffusion et d’accroitre la résolution spatiale. Une amplification du champ électromagnétique est générée au sommet de la pointe lorsque (i) l’accord entre la longueur d’onde excitatrice et le plasmon de surface de la pointe et (ii) la polarisation du laser incident vis-à-vis de l’axe de la pointe métallique sont optimisés. Cet effet d’exaltation de l’effet Raman par une pointe métallique ou connu sous le nom d’effet « TERS » (Tip Enhanced Raman Spectroscopy) connaît actuellement un développement très vif du fait de ses possibilités dans la caractérisation de nanomatériaux avec une résolution spatiale de quelques dizaines de nanomètres. Cette approche TERS, menée par une dizaine groupes nationaux et internationaux a pour but ultime de surpasser la limite classique de la diffraction de la lumière définie par le critère de Rayleigh et limité à ∼λ/2, λ étant la longueur d’onde excitatrice. La résolution spatiale de cette approche permet dans le meilleur des cas d’obtenir une résolution proche de la taille du sommet de la pointe métallique utilisée (environ 20 nm). De plus la possibilité d’acquérir simultanément la topographie et le contraste optique vibrationnel d’objets nanostructurés offre l’avantage de pouvoir corréler des défauts structuraux et confinements électroniques à de très petites échelles. Enfin, dans le quatrième et dernier chapitre sera présenté le dispositif expérimental TERS développé au sein de notre Institut. Le couplage d’un microscope à force atomique et d’un microscope confocal Raman inversé est implémenté dans une géométrie de transmission. Des nanofils de silicium et de nitrure de gallium cristallins sont déposés sur des substrats transparents en verre. Les premiers résultats TERS avec ce dispositif sont obtenus, permettant d’améliorer conjointement le signal Raman et la résolution spatiale de la microscopie confocale classique. La combinaison d’effets de pointes avec des substrats nanolithographiés SERS montrent de forts facteurs d’exaltation Raman pour des systèmes moléculaires adsorbés sur l’or. Nicolas Marquestaut 19 Institut des Sciences Moléculaires Introduction générale Nicolas Marquestaut 20 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Chapitre I La spectroscopie de Diffusion Raman Exaltée de Surface : Rappels et Développements Nicolas Marquestaut 21 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Nicolas Marquestaut 22 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman 1 La diffusion Raman Le phénomène de diffusion inélastique de rayons X par des particules chargées (électrons) a été observé au début des années 20 par Arthur Compton1. C’est en 1928, que Chandrasekhara Venkata Raman met en évidence l’effet de diffusion inélastique des photons par des molécules en solution et sous forme gazeuse (éther, amylène) prouvant les prédictions de Smekal2. Dans l’article paru dans Nature3 en 1928, ces observations sont qualifiées de « feeble» en comparaison de la diffusion ordinaire de fluorescence puis de « New radiation ». C’est en 1930 que l’importance de ce phénomène est reconnue et vaut à C.V. Raman le prix Nobel de physique, d’où le nom « d’effet Raman » ou de « diffusion Raman ». Le changement de longueur d’onde observé quand un photon est diffusé avec une énergie inférieure (diffusion Stokes) ou supérieure (Anti-Stokes) est dès lors attribué aux niveaux énergétiques correspondant aux énergies de vibration d’une molécule. Différents groupes fonctionnels ayant différentes énergies vibrationnelles caractéristiques, chaque système moléculaire possède une signature spectrale unique dépendante de l’agencement des différents atomes formant une molécule. Du fait de cette spécificité, la spectroscopie de diffusion Raman fait partie des techniques de spectroscopies moléculaires tout comme la spectroscopie infrarouge bien que les processus physiques mis en jeu soient différents. Avant les années 60, le développement de la spectroscopie Raman reste confidentiel. En effet, d’importantes difficultés expérimentales dues notamment à la faible puissance des sources de lumière monochromatique impliquent une faible intensité du signal Raman ou des temps d’acquisition souvent rédhibitoires. L’apparition des lasers à gaz (He-Ne, argon ionisé, etc.), dans les années 60-70 fait suite aux travaux de Townes, Basov et Prokhorov (Prix Nobel 1964), ce qui procure alors un faisceau optique continu et monochromatique de forte puissance qui relance au début des années 70 l’intérêt pour la spectroscopie Raman. Parallèlement, les progrès de l’informatique, les nombreux développements théoriques et technologiques autour des réseaux holographiques (systèmes de diffraction), les évolutions des tubes photomultiplicateurs et des systèmes de comptage de photons, ont conduit au développement de spectromètres Raman commerciaux performants. Ainsi, au détecteur monocanal de type photomultiplicateur ont succédé les détecteurs multicanaux de type photodiodes de silicium, puis de type “puits quantiques” CCD (Charge Coupled Devices), avec à chaque fois un gain d'environ un ordre de grandeur en sensibilité. Une des évolutions majeures a été la possibilité de coupler un spectromètre Raman conventionnel avec un microscope optique, ce qui a été effectué pour la première fois dès 1975 par l’équipe du Nicolas Marquestaut 23 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman professeur Delhaye4. Le spectre Raman d’échantillons de quelques µm3 ou quelques picogrammes a ainsi pu être obtenu. Avec ce dispositif, le faisceau laser incident est réfléchi par une lame séparatrice sur un objectif de microscope puis focalisé sur la surface de l'échantillon. La diffusion (Rayleigh et Raman) est collecté par le même objectif selon un montage à 180° ou “rétro-diffusion”. La diffusion est refocalisée sur la fente d'entrée du spectromètre, puis dispersée par le réseau de diffraction et analysée par le détecteur. Ainsi, les résolutions temporelle (picoseconde) et spatiale (µm3 voire centaines de nm3) ont été largement améliorées permettant de réaliser des cartographies Raman avec des temps d’intégration courts et une résolution spatiale aux limites imposées par les lois de la diffraction (critère de Rayleigh-Abbe). Grâce à des progrès techniques considérables, la spectroscopie Raman a été appliquée notamment aux matériaux hétérogènes (inclusions, impuretés), systèmes polymères (lamellaires, fibreux, composites..) et milieux biologiques. De nombreuses applications deviennent ainsi possibles, notamment dans le domaine fondamental de l’étude structurale et dynamique de la matière, ainsi que dans de vastes champs d’applications analytiques (cosmétique, recherche de drogue,…), techniques (mesure de pollution, de process en ligne,…) ou artistiques (œuvres d’art, antiquités, archéologie…). De plus, on observe un intérêt important vers les applications biomédicales et dans les sciences des matériaux, principalement motivé par la possibilité de travailler en milieu aqueux ou à travers le verre (faible diffusion de l’eau et du verre) et au fait que cette technique soit non destructive. D’autres atouts tels que la possibilité d’utiliser une raie excitatrice allant de l’ultraviolet au proche infrarouge, la forte diffusion Raman des groupements non polaires ou des vibrations de basse fréquence, confèrent à cette méthode un intérêt complémentaire par rapport aux autres techniques spectroscopiques. A titre de comparaison, en spectroscopie Raman, l’utilisation de la lumière visible et les critères de diffraction permettent des résolutions proches de la longueur d’onde ce qui est en général supérieur d'au moins un ordre de grandeur à la résolution spatiale en microscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR). En effet, cette dernière permet de sonder des objets de plusieurs dizaines de microns, en relation directe avec les plus grandes longueurs d'onde du rayonnement moyen-infrarouge (2 à 25 µm). En outre, il n'est pas possible d'obtenir les spectres FTIR en dessous de 600 cm-1, alors qu'en micro-spectrométrie Raman on atteint facilement les fréquences de l’ordre de 100 cm-1 (système avec simple monochromateur et Nicolas Marquestaut 24 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman filtre notch) et, en prenant quelques précautions, il est possible d’atteindre les très basses fréquences (en général avec double ou triple monochromateur). 1.1 Principes de la spectroscopie Raman : quelques éléments r Dans le cadre de la théorie classique, même dans le cas où le rayonnement incident E n'est pas absorbé par une molécule, le champ crée un dipôle induit. La polarisabilité moléculaire, qui exprime la faculté du nuage électronique à acquérir un moment dipolaire électrique r r induit P , sous l’effet du champ électrique E s’écrit selon la relation : r rr r P = α.E (1.1) rr Avec α le tenseur de polarisabilité moléculaire qui décrit la faculté du nuage électronique d’une molécule à se déformer sous l’action d’un champ. Le rayonnement incident monochromatique de fréquence ν0 et d’amplitude E0 peut s’écrire sous la forme : r r E = E 0 . cos(2πν 0 t ) (1.2) Les modes de vibration d’une molécule diatomique peuvent se modéliser sous la forme d’une oscillation de fréquence ν selon la coordonnée normale de vibration q de la vibration considérée : q = q 0 . cos(2πνt ) (1.3) Si l'on se réfère aux axes XYZ d'un trièdre direct, il vient : α xx Py = α yx Pz α zx Px α xy α xz α yy α yz α zy α zz Ex Ey Ez (1.4) rr Le tenseur α est une propriété moléculaire qui dépend donc de la géométrie de la molécule et varie avec les coordonnés normales de vibration q. Dans l'hypothèse harmonique on écrit : rr rr rr ∂α α = α0 + .Q ∂Q Q = 0 (1.5) et Nicolas Marquestaut 25 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman rr r rr r ∂α r P = α 0 .E + .Q.E ∂Q Q = 0 (1.6) r Le moment dipolaire induit P est donc fonction de la coordonnée de vibration q. Le dipôle oscillant induit par une excitation monochromatique réémet un rayonnement électromagnétique selon : rr r r rr r ∂α P = α 0 .E 0 . cos(2πν 0 t ) + .Q 0 .E 0 [cos(2πν 0 .t ). cos(2πν.t )] ∂Q Q = 0 (1.7) cos(2πν 0 .t ) cos(2πν.t ) = 1 [cos(2π(ν 0 + ν).t ) + cos(2π(ν 0 − ν).t )] (1.8) or 2 d’où rr r r rr r ∂α 1 P = α 0 .E 0 . cos(2πν 0 t ) + .Q 0 .E 0 .[cos(2π(ν 0 + ν).t ) + cos(2π(ν 0 − ν).t )] 2 ∂Q Q=0 (1.9) On voit donc que pour un mode normal de vibration de fréquence ν, le dipôle induit donne naissance à trois raies situées à des fréquences différentes : • à ν0 la fréquence de l’excitation ; • à ν 0 ±ν la fréquence de l’excitation ± la fréquence L’équation (1.9) souligne aussi qu’un mode est actif en Raman s’il y a variation du tenseur de polarisabilité le long des coordonnées normales q. Cette règle de sélection implique donc qu’un mode Raman est actif si un seul des éléments du tenseur varie selon q. L’effet Raman peut être situé dans un diagramme énergétique issu de la théorie quantique qui fait appel à un niveau "virtuel" pour rappeler que le phénomène de diffusion est le résultat d'une interaction entre les photons et les molécules hors des conditions de résonance. Il importe en effet de bien différencier le mécanisme d'excitation moléculaire, tel qu'il apparait ici, de celui mis en jeu lors de l'absorption d'un photon car les deux phénomènes n'obéissent pas aux mêmes lois. Si la molécule ne peut pas se trouver dans un état énergétique stable, sous l'action d'un photon hν0, trois types de désexcitations sont possibles comme montré en Figure 1.1 : Nicolas Marquestaut 26 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Figure 1.1 : Schéma d’excitation et de désexcitation de l’énergie photonique en diffusion Rayleigh, Raman Stokes et Raman Anti-Stokes • retour au niveau initial par diffusion d'un photon hν0. C'est la diffusion sans changement de fréquence ou diffusion Rayleigh. • retour à un niveau d'énergie supérieur en émettant un photon hν1 < hν0. C'est la diffusion Raman Stokes. • retour à un niveau d'énergie inférieur en émettant un photon hν2 > hν0. C'est la diffusion Raman Anti-Stokes. On voit apparaître ici la symétrie en fréquence de la diffusion Raman par rapport à la fréquence de la raie excitatrice puisque le déplacement Raman ∆ν = ν0 - ν1 = ν2- ν0 = νvibration. Un spectre diffusé est symétrique en fréquence par rapport à la raie excitatrice, c'est-à-dire avec les raies -∆νi et +∆νi symétriques par rapport à ν0. En revanche la symétrie en intensité n'existe pas, les raies +∆νi (anti-Stokes) sont moins intenses que les raies -∆νi (Stokes). La dissymétrie en intensité ne peut être expliquée qu’à travers l’approche quantique, en faisant intervenir les niveaux de population de départ qui sont différents selon la statistique de Maxwell-Boltzmann. L'intensité de la transition du niveau initial i à l’état final f est proportionnelle à la population Ni du niveau de départ dont l'énergie est Ei et l'intensité de la transition de f vers i est proportionnelle à Nf. En faisant le rapport des intensités des bandes Stokes et Anti-Stokes il vient : Nicolas Marquestaut 27 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman E −E − i 0 kT IS N .e −( E − E ) = 0 E f − E0 = e i f I AS − kT N 0 .e (1.10) d’où I (ν 0 − ∆ν ) I (ν 0 + ∆ν ) =e h∆ν k .T (1.11) Si l’on tient compte de la loi sur les intensités diffusées en λ-4, avec λ la longueur d’onde du rayonnement, on obtient l’équation suivante qui donne le rapport des intensités diffusées des deux composantes émises par l’oscillateur correspondant à un mode de vibration dont le déplacement Raman est ∆ν : I S (ν 0 −∆ν ) I AS (ν 0 + ∆ν ) 4 h ∆ν ν − ∆ν k .T .e = 0 ν + ∆ ν 0 (1.12) Les raies Anti-Stokes sont donc toujours moins intenses que les raies Stokes correspondantes. Elles deviennent inobservables dès que ∆ν devient important et/ou que la température s’abaisse. On notera en outre que le rapport d’intensité des bandes Stokes et anti-Stokes permet de déterminer la température d’un échantillon. 1.2 Effets Raman exaltés Lors d’expériences de diffusion Raman, une partie des photons de la radiation excitatrice est réfléchie ou absorbée et seule une fraction très faible est diffusée avec changement de fréquence dans toutes les directions de l’espace. Parmi ces photons diffusés, l’effet Raman correspond aux photons pour lesquels un changement de fréquence est observé. La majeure partie de la lumière diffusée possède la même fréquence que la lumière incidente et seule une très faible quantité de rayonnement est diffusée à des fréquences différentes de ν0 (de l’ordre de 10-6 à 10-9 fois l’intensité incidente). Nicolas Marquestaut 28 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Un critère de choix pour comparer l’efficacité des phénomènes de diffusion est la section efficace de diffusion notée σ (fluorescence) ou la section efficace différentielle notée dσ/dΩ (Raman) qui représente le nombre de photons de diffusion par unité de surface (/cm2). Figure 1.2 : Diagramme des sections efficaces de diffusion de fluorescence, Raman et différents effets Raman exaltés5 Les sections efficaces de diffusion Raman ou Normal Raman Scattering (NRS) sont typiquement 1010 à 1015 plus faibles que celles de la fluorescence (cf Figure 1.2), le signal reste donc très faible et les temps d’acquisition peuvent être rédhibitoires pour certaines expériences. Afin de pallier cette faible efficacité, il existe deux effets susceptibles d’exalter l’intensité du signal Raman diffusé, l’effet Raman de Résonance (RRS), et l’effet SERS (Surface Enhanced Raman Spectroscopy) appelé aussi effet DRES (Diffusion Raman Exalté de Surface) permettant de se rapprocher de la sensibilité atteinte en fluorescence. Ces deux techniques peuvent être combinées en une troisième appelée SERRS (Surface Enhanced Resonance Raman Spectroscopy)6. 1.3 Principe de l’effet Raman résonant Nicolas Marquestaut 29 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Lorsque la longueur d’onde de la radiation excitatrice est voisine de celle d’une transition électronique électrique permise de la molécule étudiée (voir Figure 1.3 des niveaux énergétiques), un accroissement remarquable du signal de diffusion Raman est observé. Une exaltation très importante des intensités peut être ainsi obtenue jusqu’à un facteur 106 selon les systèmes moléculaires étudiés. On dit alors que l’on a un effet Raman résonant ou prérésonant si l’énergie incidente est proche de celle de la transition électronique permise. Figure 1.3 : Niveaux énergétiques virtuels (diffusion Rayleigh, Stokes et Anti-Stokes) et excités ou stables (diffusion Raman de pré-résonance ou résonance) d’une molécule. Ce phénomène peut être expliqué en considérant que dans le processus de diffusion Raman hors résonance, l’état intermédiaire dit virtuel est une superposition linéaire de tous les états électroniques de la molécule. Chaque état est représenté par un terme, pondéré par un facteur qui est d’autant plus grand que l’énergie de cet état est proche de l’énergie excitatrice. En diffusion Raman classique, les spectres ne renseignent en général que sur les propriétés de l’état électronique fondamental. En revanche, lorsque la fréquence de la radiation excitatrice est proche en résonance (ou en pré-résonance) d’une (ou plusieurs) transition(s) électronique(s) dipolaire(s) permise(s), le terme de pondération correspondant devient très important par rapport aux autres termes de la somme. L’état intermédiaire virtuel dans le processus de diffusion Raman peut alors être assimilé à l’état excité résonant, ce qui augmente la probabilité de transition dont résulte la diffusion Raman. Les spectres fournissent donc des renseignements précis, non seulement sur les propriétés de l’état fondamental, mais aussi sur celles de l’état excité mis en jeu. De plus, les spectres de diffusion Raman résonante sont Nicolas Marquestaut 30 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman parfois plus simples à analyser que les spectres Raman conventionnels, car seuls les modes de vibration couplés à une transition électronique sont amplifiés7. 1.4 Effet SERS L’effet SERS a été mis en évidence pour la première fois en 1974 par Fleischmann et al.8 en observant des intensités anormalement élevées sur le spectre Raman de molécules de pyridine adsorbées sur la surface rugueuse d’une cellule électrochimique en argent. Cette forte intensité est d’abord associée à une très forte concentration des molécules à l’endroit de la mesure du fait de l’accroissement de la rugosité. En 1977, Jeanmaire et Van Duyne9 puis Creighton et Albrecht10 découvrent qu’il existe en fait un effet d’amplification intrinsèque à la surface du métal, permettant d’intensifier d’un facteur ∼106 le signal Raman diffusé de molécules adsorbées sur une surface métallique rugueuse. Cette découverte entraîne immédiatement un regain d’intérêt pour la spectrométrie de diffusion Raman, comme le montre le nombre de publications toujours croissant parues sur le sujet depuis. En effet, l’utilisation de cette technique en analyse chimique de routine était freinée depuis de nombreuses années par son manque de sensibilité. Par ailleurs, une autre limitation de la méthode était liée au coût élevé des sources laser, des spectromètres et des détecteurs. La forte amplification générée par le SERS permet donc d’utiliser des lasers de faible puissance, et rend ainsi possible l’utilisation de spectromètres moins couteux. Les travaux remarquables de Nie et co-auteurs11 et Kneipp et al.12, 13 plus tard corroboré par le travail de Käll et co- auteurs14 a permis d’atteindre, sous des conditions de résonance appropriées, des exaltations de 1014. De tels facteurs d’exaltation sont reportés pour des molécules de type colorant tels que la rhodamine 6G et des brins d’ADN notamment. Ces travaux ont ouvert des perspectives sur l’utilisation du Raman en tant que technique de routine avec des sensibilités de détection proches de celles de la fluorescence. 1.5 Origines de l’effet SERS Dès la découverte de l’effet SERS, les premiers travaux ont tenté d’expliquer l’origine de l’exaltation élevée du signal Raman. Le facteur d’exaltation peut être compris comme le produit de deux contributions : le mécanisme d’amplification électromagnétique15, 17, 18 mécanisme d’amplification chimique 16 et le . Ces deux mécanismes apparaissent parce que l’intensité de diffusion Raman est directement proportionnelle au carré du moment dipolaire Nicolas Marquestaut 31 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman induit, µind, qui, à son tour, est le produit de la polarisabilité Raman (propriétés chimiques moléculaires), α, et de l’amplitude du champ électromagnétique incident, E. 1.5.1 Origine chimique Comme montré par les travaux d’Otto19, 20, l’effet chimique fait intervenir la modification de la polarisabilité de la molécule du fait de l’interaction des nuages électroniques de l’analyte et de la surface. Cette théorie chimique implique un transfert de charge (électrons ou trous) entre la molécule et la surface métallique. Ce transfert de charges se manifeste par une exaltation du fait de l’apparition de nouveaux états électroniques générés par l’adsorption de l’analyte sur la surface qui sont résonants avec l’énergie incidente. Une adsorption de la molécule sur le métal est impérative pour générer l’apparition de cette exaltation21. Prenons l’exemple illustré en Figure 1.4. Figure 1.4 : Molécule d’acide benzoïque adsorbée (a) sur le verre (b) sur l’argent (c) molécule adsorbée à la fois sur le verre et l’argent22 Si l’on compare les trois possibilités d’adsorption représentées ci-dessus, on constate que lorsqu’une molécule est adsorbée par son groupement fonctionnel (groupe O=C-O) sur la surface de verre (a), aucun effet SERS n’est observé. Par contre, si ce même groupe fonctionnel est adsorbé cette fois sur la surface d’argent (b), un effet SERS apparaît. Enfin, si la molécule analysée est capable de s’adsorber à la fois sur le verre et l’argent grâce à deux groupes fonctionnels à la différence du cas (a), il se produit alors une amplification SERS. L’adsorption n’explique donc pas complètement le phénomène observé, mais elle semble indispensable à son apparition. La présence de l’adsorption peut être mise en évidence par l’apparition de bandes vibrationnelles de basse fréquence (cf Figure 1.5 ci-après), absentes Nicolas Marquestaut 32 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman dans le produit en solution23. Les mécanismes de transfert de charge généralement proposés dans les modèles sont des processus photo-induits que l’on peut décomposer en plusieurs étapes : i. Un électron du métal, excité par un photon incident d’énergie hω0 , quitte son niveau d’énergie situé en dessous du niveau de Fermi pour passer à un niveau supérieur, créant ainsi un trou sur le niveau d’origine. ii. Un électron du métal est alors transféré vers un niveau électronique du composé adsorbé par un processus de transfert de charge. Celui-ci diffère selon que la molécule est physisorbée ou chimisorbée à la surface du métal. Le transfert de charge du métal vers le matériau adsorbé se produira par effet tunnel en cas de physisorption, et par hybridation s’il s’agit d’espèces chimisorbées. iii. Un électron est transféré en retour, du niveau excité du composé adsorbé vers le métal, quittant ainsi un niveau de vibration plus élevé sur le niveau d’énergie E0. iv. L’émission d’un photon d’énergie ω a lieu lorsque cet électron se recombine avec la place laissée vacante sous le niveau de Fermi. L’ion négatif qui résulte du transfert d’un électron du métal vers l’adsorbat possède une géométrie d’équilibre différente de celle de la molécule neutre d’origine. Par conséquent, ce processus de transfert de charge induit un phénomène de relaxation vibrationnelle avec une perte d’énergie égale à hω1. Une fois l’électron retourné sur le métal (iii), le photon ω émis (iv) a une fréquence égale à ν0- ν1, c'est-à-dire qu’il y a émission d’un photon Raman qui peut être décalé en nombre d’onde. L’apparition de ces nouveaux états excités, permet donc d’expliquer les différences parfois observées entre un spectre SERS et le spectre Raman classique correspondant. Nicolas Marquestaut 33 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Figure 1.5 : Spectre SERS24 de l’acide benzoïque greffé sur un film d’argent rugueux. Apparition de la bande Ag-Cl à 214 cm-1 Ces différences peuvent se manifester par l’apparition de nouveaux pics caractéristiques (cf Figure 1.5), des changements de fréquence des modes habituellement observés ou bien des modifications dans les intensités relatives des pics, avec amplification sélective de certaines vibrations. Il en résulte aussi une difficulté d’interprétation des spectres SERS due au fait des orientations moléculaires à la surface des substrats qui diffère des mesures sur matériau massique ou en solution homogène. 1.5.2 Origine électromagnétique On associe cet effet à l’interaction électromagnétique qui se crée entre les molécules à caractériser et la surface métallique, en présence d’un champ électrique. L’exaltation observée est principalement due à une résonance localisée des plasmons de surface, c'est-à-dire une amplification de l’oscillation collective des électrons de conduction à la surface du métal25. En effet, la surface du métal devient hautement polarisable lorsqu’elle est excitée à la fréquence plasmon, ce qui génère un moment dipolaire oscillant et un très fort champ local induit situé à la surface26. Il en résulte une amplification de l’intensité diffusée car l’intensité Raman est proportionnelle au carré du champ appliqué à la molécule. Dans le mécanisme d’amplification électromagnétique du SERS, le facteur d’amplification F à chaque molécule est (approximativement) donné par27, 28 : Nicolas Marquestaut 34 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman 2 E (ω ) Eloc (ω ' ) F = loc E0 (ω ) E0 (ω ' ) 2 (1.13) Où E(ω) est le champ électrique local à la fréquence incidente ω et E(ω') le champ correspondant à la fréquence Stokes décalée ω'. Eloc et E0 sont les amplitudes des champs électriques locaux et incidents, respectivement. En SERS conventionnel, F est moyenné sur l’aire de surface des particules où les molécules peuvent s’adsorber pour générer le facteur d’amplification observé F , tandis que pour le SERS où l’on considère une seule molécule, c’est le maximum d’exaltation Fmax qui est d’intérêt. Il est à noter que Fmax peut être plus grand de plusieurs ordres de grandeur que F , donc la distinction entre ces deux estimations d’amplification est importante. F est souvent approximé en considérant que E(ω) et E(ω') sont 4 E (ω ) proches, et donc F = loc . Cette approximation est basée sur le fait que la bande E0 (ω ) d’absorption des particules ou surfaces rugueuses métalliques (résonance plasmon détaillée ci-après) est souvent large comparée au décalage Stokes. Les importances relatives de la contribution d’origine chimique et de cette origine électromagnétique ne sont pas claires. En pratique, on conçoit que le mécanisme électromagnétique provoque une amplification de l’ordre de 104 à 106. Néanmoins, il semble évident que la polarisabilité Raman est aussi fortement amplifiée lorsque les fréquences de la lumière incidente sont en résonance avec l’excitation de transfert de charge du système molécule/surface métallique9, 29. 1.6 Plasmons de surface Au début du vingtième siècle, R. Wood30 observe des anomalies dans les efficacités des ordres de diffraction de réseaux métalliques. Ces anomalies sont dues, on le saura plus tard, au couplage d’une onde propagative incidente avec une onde de surface, conduisant à un phénomène d’absorption résonante. C’est en 1957 que Ritchie31 découvre les ondes de surface. Ces ondes sont liées à des résonances des électrons libres du matériau conducteur (métal) qui peuvent osciller de manière collective. Ces ondes de surface sont appelées plasmons. A la suite de leur découverte, l’étude de ceux-ci connaît alors un essor important32. Dans les années 90, l’intérêt porté aux plasmons de surface est considérablement renouvelé. Nicolas Marquestaut 35 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Cette recrudescence s’explique par l’introduction de la microscopie en champ proche (technique SNOM pour Scanning Near-Field Optical Microscopy) et l’évolution conjointe des dispositifs de fabrication permettant de réaliser des structures métalliques à l’échelle de quelques nanomètres. La microscopie champ proche ouvre en outre la possibilité de mesurer des ondes de surface dans les nanostructures avec une résolution spatiale de même échelle. La nano-structuration de l’interface permet d’exploiter les propriétés de ces ondes dans des domaines tels que l’émission de la lumière et les guides d’onde. Guider de telles ondes de surface sur de grandes distances ouvre de nombreuses possibilités en terme d’applications dans le domaine de la photonique, telle que l’optique guidée33, les cristaux photoniques34 et les coupleurs optiques35. On peut effectivement à l’aide de micro ou nanostructures coupler les ondes de surface à des ondes propagatives et inversement36. Il est ainsi possible de changer les propriétés radiatives des matériaux et de concevoir des dispositifs expérimentaux dans lesquels les plasmons de surface peuvent être contrôlés et guidés grâce aux méthodes de micro et nanofabrication modernes (lithographie électronique, focused ion beam (FIB)) L’exemple ci-dessous (Figure 1.6) montre un dispositif permettant de réfléchir une onde plasmon (λ0 = 800 nm) par un miroir de Bragg. La transduction de l’onde plasmon de surface (PS) en onde champ lointain est réalisée par des lignes d’or permettant la diffusion de l’onde PS. Figure 1.6 : Exemple d’application photonique d’un plasmon de surface37 (a) Image microscopie électronique à balayage d’un miroir de Bragg pour guider le plasmon de surface. Le miroir est réalisé par lithographie électronique et est constitué de 10 lignes parallèles en or obliques (75 nm de hauteur, 190 nm de large). Les lignes verticales ou horizontales sont également en or et permettent de diffuser en champ lointain le plasmon de surface (b) Images optiques en champ lointain du plasmon de surface réfléchi par le miroir et converti en onde progressive aux points (1-3) Plus généralement, on distingue les « plasmons de volume » et les « plasmons de surface » suivant la localisation des oscillations dans un métal. Le paramètre qui quantifie de telles Nicolas Marquestaut 36 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman oscillations est la fonction diélectrique ε~(ω ) = ε1 (ω ) + iε 2 (ω ) qui est fonction du matériau et de la radiation excitatrice de fréquence angulaire ω. La dépendance en fréquence de la constante diélectrique peut être obtenue simplement en utilisant le modèle de Drude38. Brièvement, le modèle de Drude décrit les variations des électrons à l’intérieur du métal. A l’instar du modèle cinétique des gaz, les électrons sont considérés comme des entités indépendantes et leur déplacement peut être modélisé en considérant la masse effective des électrons, leur vitesse, leur charge ainsi qu’un terme d’amortissement, Г, décrivant les interactions inhomogènes des électrons (couplage électrons-phonons, diffusion inélastique des électrons). La relation de dispersion de la constante diélectrique dans le domaine visible (ω>г) est donnée par : ω 2 ω 2 p p ~ ε (ω ) = ε1 (ω ) + iε 2 (ω ) = ε r − 2 + i 3 Γ ω ω Où ω p = (1.14) ne 2 est la fréquence du plasma métallique (n est le nombre d’électrons de charge ε 0 me e, ε0 la permittivité du vide, et me la masse d’un électron) Dans le cas de métaux, la partie réelle de la fonction diélectrique est négative comme montré sur la Figure 1.7 où sont portés les termes réels et imaginaires de la fonction diélectrique de l’or calculés en utilisant le modèle de Drude. Figure 1.7 : Indices réels et imaginaires de la fonction diélectrique de l’or entre λ = 200 nm et 3 µm, calculés avec le modèle de Drude. Nicolas Marquestaut 37 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman 1.6.1 Plasmons de surface localisés La bande de fréquence qui vérifie la relation ε(ω)<0 est le siège de modes électromagnétiques de surface confinés que l’on nomme plasmons de surface. Ils apparaissent donc à des fréquences différentes de celles des plasmons de volume qui eux doivent satisfaire à la condition ε(ω)=0. Ils ont pour origine une oscillation longitudinale de la densité des charges due aux électrons de la surface du métal. Ces oscillations résonantes de densité de charge sont couplées à une onde électromagnétique appelée plasmon polariton ou phonon polariton suivant l’origine microscopique de cette onde : si l’on est dans un métal ou dans un matériau polaire respectivement. Considérons l’interface entre un milieu métallique de constante εm et un milieu diélectrique de constante εd : Diélectrique E - - - - - - - - H E εd +++++++++ - - - - - - - - r K Z Champ local intense +++++++++ I Métal εm Figure 1.8 : Schéma illustratif de la propagation des plasmons polaritons de surface à l’interface d’un métal et d’un diélectrique Il existe des modes optiques longitudinaux dans ce plasma d’électrons libres qui sont des oscillations de la densité d’électrons et qui se propagent dans le métal avec un vecteur d’onde r K dirigé dans le même sens que les oscillations (modes longitudinaux). Physiquement un plasmon polariton de surface (PPS) correspond donc à une onde électromagnétique couplée aux oscillations collectives des électrons libres dans un conducteur, habituellement un métal, se propageant le long de l’interface métal-diélectrique39, comme représenté sur la Figure 1.8. Ce champ est maximum à l’interface et décroit exponentiellement dans les directions perpendiculaires. Comme tous les phénomènes résonants, le PPS champ proche est considérablement amplifié avec le champ lumineux incident. Nicolas Marquestaut 38 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Les relations de dispersion, qui relient la fréquence angulaire ω et le vecteur d’onde k0 = 2π λ , pour les modes PPS supportés par des films métalliques de couches minces ont été étudiées et sont maintenant bien établies. Ces relations découlent des équations de Maxwell dans les conditions aux limites appropriées. La dispersion des modes plasmons le long de l’interface est donné par la relation de dispersion40-43 : k pps = k0 ε dε m εd + εm (1.15) où εd et εm sont les permittivités relatives des régions diélectriques et métalliques, respectivement. εm étant un nombre complexe comme vu précédemment, il s’ensuit que kpps est aussi un nombre complexe. Pour la lumière dans un milieu diélectrique tel que l’air, la relation de dispersion est donnée par ωair = kc nair , où c est la célérité de la lumière et nair l’indice de réfraction optique de l’air. L’indice du métal étant supérieur, la relation de dispersion de la lumière dans celui-ci a une pente plus faible que dans l’air. Les modes PPS de propagation à l’interface or-air sont décrits par une courbe de dispersion32, 36 (Figure 1.9). Aux faibles fréquences angulaires, le tracé de Re(kpps) suit la droite de la lumière dans l’air : le plasmon de surface peut aisément se découpler de la surface. Néanmoins, pour des valeurs de kpps supérieures, la courbe s’écarte de la ligne de lumière : le plasmon devient localisé à l’interface métallique. La distance de propagation de kpps peut être aussi modélisée dans le cas de l’or (Figure 1.9). Cette distance de propagation est inversement proportionnelle à la partie imaginaire de kpps44. l pps = 1 2 Im(k pps ) (1.16) La Figure 1.9 montre que la longueur de propagation est maximale pour de faibles valeurs de kpps qui correspondent à des valeurs où le découplage de l’onde PPS est le plus facile. Au contraire, lorsque l’onde PPS est plus localisée à l’interface, la distance de propagation diminue de façon logarithmique. Cette observation montre la difficulté de concevoir des structures métalliques dans lesquelles le plasmon de surface peut se déplacer à l’interface sur de longues distances sans pour autant se découpler de cette même interface. Nicolas Marquestaut 39 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Figure 1.9 : Relations de dispersion de la lumière dans des régions homogènes pour l’air (ligne hachurée) ainsi que le mode PPS le long de l’interface or - air (courbe continue). Distance de propagation d’une onde PPS dans le cas d’une interface air-or (ligne semipointillée). Dans ce cadre, les méthodes de fabrication bi-dimensionnelles à l’échelle de quelques dizaines de nanomètres offrent de nombreux atouts pour concevoir et fabriquer des structures permettant de coupler et de guider des ondes PPS à la surface de matériaux nanostructurés comme évoqué dans l’exemple ci-dessus. De plus, lorsque les structures sont proprement définies, les PPS ne sont pas sujets à la limite de diffraction qui restreint la miniaturisation des éléments optiques conventionnels à approximativement la moitié de la longueur d’onde effective. Les PPS ont le potentiel pour surpasser cette limite et ainsi permettre la propagation et la manipulation de la lumière à l’échelle nanométrique. 1.6.2 Résonance plasmon de surface localisée Suivant le type de surface considéré (film continu ou non), on peut exciter différents types de résonances plasmons ; les films continus ne peuvent supporter que d’éventuelles résonances plasmons délocalisées alors que des surfaces rugueuses peuvent être le siège de résonances plasmons localisées et délocalisées. On parle de résonance plasmon de surface localisée (LSPR pour Localized Surface Plasmon Resonance) pour des nanoparticules métalliques de taille inférieure à la longueur d’onde incidente. Les plasmons localisés sont trouvés dans les Nicolas Marquestaut 40 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman surfaces rugueuses 8, 16, 45 , les nanostructures lithographiées46, 47 aussi bien que dans les clusters et agrégats de nanoparticules48. Dans les points ou les champs locaux sont concentrés, les réponses optiques linéaires et non-linéaires des molécules et des atomes sont largement amplifiées. Cela mène à un nombre important d’applications, la plus aboutie d’entre elles étant le SERS notamment pour la détection de molécules uniques49. Un métal peut être considéré comme étant composé d’ions positifs formant un réseau régulier et d’électrons de conduction se déplaçant librement à travers le réseau ionique. Ces électrons sont assimilés à un gaz dont la densité est à même d’osciller en réponse à des excitations extérieures, en l’occurrence un champ électromagnétique. Si la densité d’électrons est réduite localement, le réseau d’ions positifs n’est plus écranté par les charges électroniques négatives, produisant ainsi une force attractive sur les électrons voisins. Ces électrons se déplacent vers la région positive et s’accumulent avec une densité plus grande que la quantité nécessaire à la neutralité des charges. La répulsion coulombienne entre les électrons produit alors un mouvement dans l’autre direction. Ce processus se poursuit, générant ainsi des oscillations longitudinales du gaz d’électrons c'est-à-dire des oscillations « plasma » dont le quantum est nommé plasmon. Figure 1.10 : Illustration de l’excitation des résonances plasmons de surface localisées d’une nanoparticule sphérique par une radiation incidente électromagnétique50 Un plasmon de surface localisé est conduit par une onde électromagnétique externe, dont la fréquence de résonance est la fréquence plasma principalement ajustée par la taille, la forme, le type de matériau, et l’espacement inter-particulaire aussi bien que l’environnement diélectrique des particules métalliques. Quand une radiation électromagnétique de même fréquence est incidente sur la nanoparticule métallique, le champ électrique de la radiation provoque la conduction des électrons qui se mettent à osciller collectivement (voir Figure 1.10). L’excitation du LSPR a deux conséquences : une absorption et une diffusion sélectives de la radiation électromagnétique résonante, et une génération de champs électromagnétiques Nicolas Marquestaut 41 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman intenses à la surface du matériau rugueux. Le champ a une influence normale à la direction de propagation comprise entre 10 et 50 nm Par conséquent, l’excitation du LSPR d’une nanostructure induit une amplification du champ électromagnétique local d’un facteur 10 dans la plupart des cas. La diffusion Raman SERS s’approximant en E4 (Equation 1.13), le facteur d’amplification électromagnétique est de l’ordre de 104. Un facteur chimique d’amplification de 102 a été interprété comme provenant de l’excitation des résonances électroniques localisées de l’adsorbat ou des résonances de transfert de charge du métal vers l’adsorbat (par exemple la diffusion Raman résonante). La combinaison de la diffusion Raman de résonance avec le SERS peut aboutir à des facteurs de l’ordre de 108-109. Les mécanismes électromagnétiques dans l’effet SERS dépendent fortement de la structure électronique et de la rugosité du substrat métallique, le choix d’un substrat de nature et de structure optimisées est donc essentiel. 2 Optimisation et fabrication de substrats SERS Les développements en nanotechnologie reposent sur la conception et la fabrication de nanostructures de taille inférieure à 100 nm. Des réseaux de nanoparticules et nanopores en dessous de cette taille sont largement utilisés dans des applications tels que la catalyse51, la détection52, l’optique53, la détection de molécules uniques54, et l’électronique55. Par conséquent, on assiste à une demande croissante de stratégies de fabrication de nanostructures qui sont à la fois rapides, et massivement parallèles. La technique idéale de nanofabrication serait l’élaboration simultanée de matériaux et substrats peu couteux, modifiables en taille, forme et paramètres d’espacement. De récentes avancées en chimie et dans les techniques lithographiques ont rendu possible la synthèse de nanoparticules dans une large gamme de tailles et géométries56. Les synthèses par voie chimique peuvent produire des colloïdes de tailles nanométriques de différentes formes. Les formes les plus communément rencontrées sont des sphères57, des triangles58, des lignes finies59 ou des cubes60. Des nanoparticules avec un grand rapport de forme (rapport longueur sur largeur) peuvent être synthétisées par la réduction électrochimique de sels métalliques en présence d’un surfactant61. En ce qui concerne l’effet SERS deux approches sont menées basées sur l’utilisation (i) de nanoparticules en solution et (ii) sur le développement de surfaces nanostructurées. Dans le premier cas, des colloïdes métalliques de taille inférieure à la centaine de nanomètres ont été utilisés afin d’amplifier le signal de diffusion Raman de solutions diluées. Ces derniers ont été Nicolas Marquestaut 42 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman largement employés dans le traçage et la détection biologique62, depuis qu’ils peuvent être dispersés à travers l’objet d’étude, tels que des cellules ou des tissus. Dans le deuxième cas, des réseaux métalliques rugueux ont été utilisés afin d’amplifier localement le signal Raman de monocouches greffés en surface. Dans ce travail de thèse, nous nous sommes principalement attachés aux surfaces nanostructurées qui feront l’objet du deuxième chapitre. 2.1 Quelques techniques de fabrication de plateformes SERS : Méthodes lithographiques. Au-delà des solutions colloïdales évoquées ci-dessus, les techniques lithographiques telles que la photolithographie63, la lithographie à faisceau d’électrons (EBL pour Electron Beam Lithography)64, 65 et la lithographie par faisceau d’ions focalisés (FIB pour Focused Ion Beam)66 servent à fabriquer des nanostructures de taille, forme et espacement contrôlés mais sur de petites surfaces. La photolithographie est la plus utilisée parce que c’est une technique massivement parallèle. Toutefois, sa résolution est souvent limitée par la diffraction en λ/2. L’utilisation de lasers ultraviolets67, de l’interférométrie holographique68 ainsi que d’objectifs à forte ouverture numérique a étendu de façon significative sa longévité et son application pour des structures de taille inférieure à 300 nm. L’EBL et le FIB sont capables de produire des nanoparticules et nanopores de formes arbitraires avec une résolution extrêmement élevée pouvant atteindre 40 nm et 6 nm pour l’EBL69 et le FIB70, respectivement. La technique EBL que nous développerons dans le Chapitre II a largement été utilisée et affinée en France par le groupe de N.Félidj et collaborateurs (Université Paris 7) ainsi que par le laboratoire de Nanotechnologie et d’Instrumentation Optique de Troyes (P.Royer et al.) pour la réalisation de substrats SERS (cf Figure 1.11). Cette approche a montré de nombreux avantages grâce à la possibilité de fabriquer des structures bi-dimensionnelles de façon très contrôlée et reproductible afin de pouvoir caractériser les propriétés optiques et effets de polarisation de ces structures précisément. Nicolas Marquestaut 43 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Figure 1.11 : (a) Lithographie électronique de nano-triangles d’or sur un substrat d’oxyde étain indium (ITO). Le pas du réseau, le côté et la hauteur sont égaux à 350, 260 et 40 nm, respectivement71 (b) Lithographie électronique de réseaux de nano-lignes d’or de longueur, largeur et espacements inter-lignes 720, 60 et 150 nm, respectivement72. Néanmoins, le coût élevé et la production en série de l’EBL et du FIB restent de sérieux défis pour de gros volumes industriels. Le récent développement de la microscopie à effet tunnel, de la microscopie à force atomique, microscopie optique en champ proche ou dip-pen lithography™ sont des méthodes alternatives mais qui restent confidentielles car les surfaces lithographiées sont généralement limitées en surface. Le défi pour la lithographie à sonde microscopique est de surpasser son désavantage inhérent d’être un processus en série. Par conséquent, des techniques nano-lithographiques parallèles ont été explorées comme alternatives, incluant l’agrégation par diffusion contrôlée sur une surface73, le dépôt atomique par laser74, et la « lithographie naturelle75, 76 ». 2.2 Quelques techniques de fabrication de plateformes SERS : la lithographie de type « nanosphère » L’avènement de la « lithographie naturelle » date du travail séminal de Fischer et Zingsheim75 avec l’introduction de nanosphères de polystyrène assemblées « naturellement » en tant que masque pour l’imagerie contact en lumière visible en 1981. Peu après, Deckman et ses Nicolas Marquestaut 44 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman associés76 ont étendu la portée de l’approche de Fischer en démontrant qu’une monocouche de nanosphères auto-assemblées pouvait être utilisée à la fois comme matériel de dépôt et masque de gravure. Le terme « lithographie naturelle » a été inventé pour décrire ce procédé. L’évolution de cette technique renommée lithographie de type « nanosphère » (NSL pour Nanosphere Lithography) afin d’être plus opérationnellement descriptive, est représentée par le travail de Van Duyne et al.77, qui ont étendu la méthodologie simple couche au développement d’une deuxième couche comme masque lithographique. Elle est maintenant employée dans les laboratoires partout dans le monde comme technique de nanofabrication peu couteuse, parallèle, produisant en grande quantité tous types de matériaux77, pour étudier les propriétés optiques, magnétiques, électrochimiques, thermodynamiques et catalytiques des matériaux. Le processus NSL repose sur l’auto-assemblage de nanosphères (tailles de 20 nm à quelques microns) à la surface d’un substrat. Le besoin en nanoparticules monodisperses et reproductibles a conduit au développement ainsi qu’au raffinement de l’architecture NSL la plus simple. Le procédé NSL est basé sur l’auto-assemblage de nanosphères monodisperses en taille de diamètre D pour former un masque cristallin colloïdal de dépôt bi-dimensionnel. Les méthodes de dépôt d’une solution de nanosphères sur un substrat incluent le spin coating78, le drop coating79, le dip coating80, le dépôt angulaire81 et la technique LangmuirBlodgett qui sera étudiée dans le chapitre deux de ce manuscript82-84. La méthode par drop coating consiste à déposer une quantité de solution, dépendante d’une concentration colloïdale (billes de polystyrène par exemple), directement sur un substrat. Les billes dispersées en solution sont déposées sur un substrat incliné d’un angle très faible, afin d’initialiser l’ordonnancement sur un bord en particulier (Figure 1.12). Lors de la formation, la dynamique des nanosphères dépend fortement du taux d’évaporation et est radicalement altérée par la présence de l’interface. La courbure du ménisque est réduite sur le bord ce qui a pour effet de réduire le flux des particules. Au centre du substrat en l’absence d’interface, la concentration est suffisamment faible pour prévenir la formation de larges domaines multicouches. Nicolas Marquestaut 45 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman (b) (a) Figure 1.12 : Schéma du processus expérimental de préparation de réseaux périodiques de nanosphères (a) drop-coating (b) formation d’un réseau cristallin de billes nanométriques79 La méthode par étirage (dip coating) consiste à assembler une monocouche de nanoparticules sur un substrat immergé verticalement dans une cuve contenant une solution aqueuse diluée de nanoparticules. Le substrat est immergé rapidement dans la cuve puis retiré lentement avec une vitesse linéaire afin de permettre l’ordonnancement des nanoparticules lors de la remontée (cf Figure 1.13). La qualité de la monocouche dépend de la concentration colloïdale, de la vitesse de remontée ainsi que du taux d’évaporation de la solution. Figure 1.13 : Schéma de montage de la méthode d’étirage. La monocouche de billes se forme à la surface de la lamelle lors de la remontée à faible vitesse. Contrairement à la méthode d’étirage, la méthode Langmuir-Blodgett permet de contrôler efficacement tous les paramètres de transfert. En effet, une suspension de billes de silices fonctionnalisées est déposée à l’interface air-eau dans une cuve de Langmuir. Pour former un film bi-dimensionnel compact, une compression pas à pas des particules est effectuée à l’aide d’une barrière mobile jusqu’à une pression de surface seuil déterminée par l’expérimentateur. Après compression, le film de Langmuir est transféré sur un substrat, typiquement une lame de verre ayant un caractère hydrophile. Dans ces conditions optimisées, le dépôt sur le substrat a lieu uniquement lors de la remontée avec un taux de transfert proche de l’unité, ce qui permet un transfert de monocouches lors de chaque cycle. La technique Langmuir- Nicolas Marquestaut 46 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Blodgett présente en outre l’avantage d’obtenir des réseaux hexagonaux compacts sur de très grandes surfaces (cm2) compte tenu du fait que les deux paramètres de transfert essentiels (la pression de surface et la vitesse de transfert) sont contrôlables, à condition que la solution colloïdale soit bien monodisperse. Les substrats supportant les nanosphères incluent le verre85, le mica86, le cuivre87 et l’oxyde d’étain indium (ITO)88. Toutes ces techniques de dépôt requièrent des nanosphères capables de diffuser librement sur le substrat, cherchant leur plus basse énergie de configuration. Cela est accompli en modifiant chimiquement la surface de la nanosphère avec un groupe fonctionnel chargé négativement qui est électrostatiquement repoussé par la surface également chargée négativement d’un substrat comme le mica ou le verre. Comme le solvant (eau, chloroforme) s’évapore, les forces capillaires regroupent les nanosphères, qui cristallisent en un réseau hexagonal serré sur le substrat. Comme dans toute cristallisation naturelle, les masques de nanosphères comprennent une variété de défauts provenant de la polydispersité des nanosphères : hasard des sites, défaut en un point (sphère vacante), défauts de lignes (dislocations), et domaines polycristallins. La taille des régions typiques sans défaut est comprise entre 10 et 100 µm2. Suivant l’auto-assemblage du masque de nanosphères, un métal ou autre matériau est ensuite déposé par évaporation thermique, faisceau d’électrons (Electron Beam Deposition, EBD), laser pulsé (Pulsed Laser Deposition, PLD) ou pulvérisation cathodique à partir d’une source normale au substrat à travers le masque de nanosphères avec une épaisseur massique contrôlée dm. La pulvérisation cathodique (ou sputtering) est une technique qui autorise la synthèse de plusieurs matériaux à partir de la condensation d’une vapeur métallique issue d’une source solide (cible) sur un substrat. L’application d’une différence de potentiel entre la cible et les parois du réacteur au sein d’une atmosphère raréfiée permet la création d’un plasma froid, composé d’électrons, d’ions, de photons et neutres dans un état fondamental ou excité. Sous l’effet du champ électrique, les espèces positives du plasma se trouvent attirées par la cathode (cible) et entrent en collision avec cette dernière. Elles communiquent alors leur quantité de mouvement, provoquant ainsi la pulvérisation des atomes sous forme de particules neutres qui se condensent sur le substrat. La formation du film s’effectue selon plusieurs mécanismes qui dépendent des forces d'interactions entre le substrat et le film. La décharge est auto-entretenue par les électrons secondaires émis de la cible. En effet, ceux-ci, lors de collisions inélastiques, Nicolas Marquestaut 47 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman transfèrent une partie de leur énergie cinétique en énergie potentielle aux atomes d’argon qui peuvent s’ioniser. Apres dépôt métallique à incidence normale ou oblique90, le masque de nanosphères est retiré par sonication de l’échantillon entier dans un solvant, laissant le matériau déposé à travers le masque de nanosphères sur le substrat (Figure 1.14b). (a) (c) (b) Figure 1.14 : Diagrammes schématiques d’une monocouche d’un masque de nanosphères et du réseau périodique de particules correspondant. (a) Réseau d’une monocouche de nanosphères (ligne pointillé = maille d’une cellule) (b) Réseau de nano-plots (2 particules par unité cellulaire) (c) Image AFM de hauteur du réseau d’or90 Les nanosphères utilisées comme masque de dépôt sont habituellement le polystyrène ou la silice, disponibles dans une large gamme de tailles (100-2000 nm). Récemment, du polystyrène modifié, tel que le poly-(diallyldimethylammonium chloride)/poly(sodium4styrenesulfonate) a été utilisé comme motif NSL91. Une large variété d’adsorbats moléculaires allant des molécules diatomiques aux enzymes a été étudiée en SERS analytique. Bien qu’il soit difficile de déterminer l’étendue des champs amplifiés provenant de la surface nanostructurée, des calculs théoriques pour des nanoparticules bien caractérisées suggèrent que ces champs se dégradent exponentiellement avec une longueur de déclin caractéristique ~ 2 nm92. Les trois stratégies majeures pour confiner un analyte SERS dans les champs électromagnétiques sont la physisorption, la chimisorption, et la répartition en monocouches auto-assemblées. La chimisorption et physisorption reposent sur les forces adhésives naturelles entre l’analyte et la surface de métal noble. Les couches auto-réparties (SAMs pour Self-Assembled Monolayers) ont récemment été exploitées pour la détection quantitative du glucose dans des conditions physiologiques93, 94 . Nous nous sommes exclusivement intéressés à des monocouches auto-assemblées greffées sur des substrats SERS. Nicolas Marquestaut 48 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman 2.2.1 Influence de la taille et de la forme sur le LSPR La réponse spectrale d’un plasmon de surface est directement influencée par les effets de taille et de forme d’une nanoparticule métallique. Etudier les effets de ces modifications sur le LSPR est un important challenge expérimental. La méthode par oxydation électrochimique a été employée pour modifier la structure de surface de manière bien contrôlée95. Dans ce cas, des triangles d’argent ont été préparés sur des substrats d’ITO puis soumis à oxydation électrochimique. La particularité de cette approche vient des triangles sélectivement oxydés (en premier les flancs sur les fronts du bas, puis sur les pointes triangulaires, et finalement sur la face du haut), permettant de corréler directement la réponse du LSPR aux changements morphologiques. La hauteur des plots demeurant constante durant l’oxydation, il est ainsi possible d’étudier la relation entre la largeur dans le plan et le LSPR. Les spectres LSPR et les images de microscopie à force atomique (AFM) de nanoparticules d’argent de différentes formes sur des substrats d’oxyde d’indium étain sont représentés en Figure 1.15 ci-dessous. (a) (b) (c) (d) Figure 1.15 : (a) En haut au centre figurent les 3 spectres d’extinction correspondants aux 3 différentes formes de plots d’argent. En bas, de gauche à droite sont représentées les images AFM et leur profil en hauteur correspondant (b) suivant deux oxydations successives, (c) suivant une première oxydation, (d) avant toute oxydation électrochimique95 Sur le graphe, la longueur d’onde maximale LSPR des nanoparticules d’argent se décale vers les longueurs d’onde les plus courtes après oxydation, pour des mesures d’extinction dans la gamme du visible. Avant oxydation électrochimique, les nanoparticules fabriquées par lithographie de type « nanosphère » ont leur forme triangulaire caractéristique et le spectre Nicolas Marquestaut 49 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman LSPR montré en rouge. Après oxydation successive, les nanoparticules s’arrondissent et le spectre LSPR se décale vers les plus hautes énergies (courbes verte et bleue). Le profil sur les images AFM illustre le changement de géométrie dans le plan des nanoparticules après oxydation. 2.2.2 Relation entre bande plasmon et longueur d’onde excitatrice en SERS De récents travaux ont mis en avant la relation unissant le facteur d’exaltation Raman à soit le LSPR soit la longueur d’onde excitatrice96, 97. Dans une première approche, une source laser constante a été utilisée afin de mesurer le facteur d’exaltation SERS comme une fonction de la position spectrale du LSPR pour une même bande à 1081 cm-1 du benzènethiol adsorbé sur des nanostructures métalliques (Figure 1.16a). (b) (a) (c) Figure 1.16 : (a) Facteur d’exaltation Raman du pic à 1081 cm-1 du benzènethiol adsorbé sur des réseaux de nanoparticules fabriqués par NSL à plusieurs fréquences LSPR (b) Facteur d’exaltation Raman du même pic et extinction plasmon à plusieurs sources d’excitation laser (c) Facteur d’exaltation Raman du pic à 1575 cm-1 et extinction LSPR à plusieurs sources d’excitation laser. Le maximum d’exaltation a lieu lorsque la résonance plasmon est décalée dans le rouge (plus faible énergie) de la longueur d‘onde d’excitation fixée (λexc = 632.8 nm) et dans le bleu de la bande Raman Stokes décalée (décalée 1081 cm-1 à partir de λexc). Autrement dit, selon Félidj et al.27 l’efficacité SERS doit être maximale pour un maximum d’extinction λmax situé à : Nicolas Marquestaut 50 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman λ max = λ RS + λexc (1.17) 2 Avec λexc et λRS, les longueurs d’onde d’excitation et Raman Stokes, respectivement. Des expériences supplémentaires de ce type démontrent que le plus grand facteur d’exaltation SERS est observé quand le LSPR tombe dans une fenêtre de 120 nm (2500 cm-1 en terme de décalage Raman) qui inclue à la fois la longueur d’onde excitatrice et la longueur d’onde Raman décalée. Sommairement la longueur d’onde plasmon doit se situer entre la raie excitatrice et le mode Raman d’intérêt. Après cela, un réseau de nanoparticules fabriqué par NSL avec une longueur d’onde LSPR constante a été scanné avec une longueur d’onde excitatrice variable à l’aide d’un laser accordable. La Figure 1.16b montre les données d’une telle expérience lors de laquelle le facteur d’exaltation du même pic à 1081 cm-1 du benzenethiol est analysé, en faisant varier la longueur d’onde excitatrice entre 475 et 800 nm. Le spectre d’excitation montre le plus grand facteur d’exaltation SERS lorsque la raie excitatrice est dans le bleu de la longueur d’onde LSPR, ce qui est en accord avec les résultats du paragraphe précédent (les axes de ce graphe sont en unité croissante pour les nombres d’onde et donc décroissantes pour les longueurs d’onde). Basé sur un fit gaussien des spectres, l’étude du décalage entre le maximum d’énergie du profil d’excitation et le spectre LSPR est 613 cm-1, ce qui le place grossièrement au milieu du décalage entre l’excitation et les énergies de diffusion Raman Stokes (i.e., 1081 cm-1). Le pic à 1575 cm-1 du benzenethiol montré en Figure 14c démontre également cette relation. Encore une fois, le décalage entre la longueur d’onde excitatrice produisant le maximum d’exaltation et le pic dans du spectre d’extinction est 726 cm-1, c’est à dire plus ou moins la moitié du décalage entre l’excitation et la diffusion Raman décalée. Ces expériences illustrent l’importance d’optimiser la résonance plasmon et les longueurs d’onde d’excitation pour obtenir le maximum d’exaltation SERS ; des facteurs allant jusqu'à 108 peuvent être obtenus lorsque les conditions expérimentales sont optimisées comme montré en Figure 1.16c. Nicolas Marquestaut 51 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Conclusion du Chapitre I Les études spectroscopiques fondamentales sur les matériaux plasmoniques fournissent une compréhension des propriétés qui gouvernent à la fois la longueur d’onde de la résonance du plasmon de surface localisée et le facteur d’exaltation de surface de ces substrats. Cet aspect est critique dans la conception de nouvelles plateformes pour des applications de détection d’analytes via effet SERS. Il est également important de considérer les caractéristiques spectroscopiques de l’analyte SERS, parce que les bandes d’absorption électronique avec des fréquences proches de l’excitation laser vont influencer une telle expérience. Le SERS de résonance (SERRS) a lieu quand la longueur d’excitation laser chevauche la bande d’absorption électronique, amplifiant ainsi les intensités de diffusion Raman des modes symétriques vibrationnels de la molécule. Cela peut être avantageux lorsqu’on interroge des composés chimiques spécifiques d’un analyte SERS, tel que la porphyrine dans l’hémoglobine. Cependant, le spectre SERRS va être dominé par les modes exaltés résonants. De ce fait, une étude des régions exaltées non-résonantes d’un analyte requièrent une excitation laser en dehors de la bande d’absorption électronique. De plus, des effets d’exaltation de 1014 ont été étudiés lorsque l’effet SERS est combiné à des effets de résonances électroniques en des points particuliers appelés « hot spots »11-13. Néanmoins, ce type de résultat reste à confirmer sur d’autres molécules pour lesquelles des effets de résonance électroniques n’entrent pas en ligne de compte afin de confirmer la réalité de spectroscopies vibrationnelles de molécules uniques98-100. Une analyse quantitative est donc délicate car on ne peut comparer directement un spectre SERS à un spectre Raman normal (matériau massif). En revanche, une analyse quantitative de faibles quantités de matière (monocouches) déposées sur des substrats métalliques ad-hoc est réalisable en des temps d’acquisition très courts. Nicolas Marquestaut 52 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Références bibliographiques (1) Compton, A., Phys. Rev. 1923, 21, 483. (2) Smekal, A., Naturwissenschaften 1923, 11, 873. (3) Raman, C. V.; Krishnan, K. S., Nature 1928, 122, 169. (4) Delhaye, M.; Dhamelincourt, P., J. Raman Spectrosc. 1975, 3, 33. (5) Pettinger, B.; Picardi, G.; Schuster, R.; Ertl, G., Single Mol. 2002, 5, 285. (6) Taylor, G. T.; Sharma, S. K.; Mohanan, K., Appl. Spectrosc. 1990, 44, 635. (7) Sourisseau, C., J. Chim. Phys. 1993, 90, 1557. (8) Fleischmann, M.; Hendra, P.; McQuillan, A., Chem. Phys. Lett. 1974, 26, 123. (9) Jeanmaire, D. L.; Duyne, R. P. V., J. Electroanal. Chem. 1977, 84, 1. (10) Albrecht, M. G.; Creighton, J. A., J. Am. Chem. Soc 1977, 99, 5215. (11) Nie, S.; Emory, S. R., Science 1997, 275, 1102. (12) Kneipp, K.; Kneipp, H.; Kartha, V. B.; Manoharan, R.; Deinum, G.; Itzkan, I.; Dasari, R. R.; Feld, M. S., Phys. Rev. E 1998, 6, 6281. (13) Kneipp, K.; Kneipp, H.; Itzkan, I.; Dasari, R. R.; Feld, M. S., Chem. Rev. 1999, 99, 2957. (14) Gunnarson, L.; Petronis, S.; Kasemo, B.; Xu, H.; Bjerneld, J.; Käll, M., Nanostruct. Mater. 1999, 12, 783. (15) Campion, A.; Kambhampati, P., Chem. Soc. Rev. 1998, 27, 241. (16) Moscovits, M., Rev. Mod. Phys 1985, 57, 783. (17) Garell, R. L., Anal. Chem. 1989, 61, 401. (18) Moskovits, M., Rev. Mod. Phys. 1985, 57, 783. (19) Otto, A., Phys. Stat. Sol. 2001, 188, 1455 (20) Otto, A.; Mrozek, I.; Grabhorn, H.; Akemann, W., J. Phys. : Condens. Matter. 1992, 4, 1143 (21) Feng-Qi, Y.; Chun-Ping, Z.; Guang-Yin, Z., Appl. Spect. 1989, 43, 1490. (22) Willis, R. F.; Lucas, A. A.; Mahan, G. D., The Chemical Physics of Solid Surfaces and Heterogeneous Catalysis, Elsevier Amsterdam-Oxford-New-York Ltd. 1983, 2, 59. (23) Loo, B. H., J. Electroanal. Chem. 1982, 131, 381. (24) Imai, Y.; Tamai, Y.; Kurokawa, Y., J. Sol-Gel Sci. Tech. 1998, 11, 273. (25) Zayats, A. V.; Smolyaninov, I. I.; Maradudin, A. A., Phys. Rep. 2005, 408, 131 (26) Garcia-Vidai, F. J.; Pendry, J. B., Progress in Surface Science. Elsevier Science Ltd. 1995, 50, 55 (27) Félidj, N.; Aubard, J.; Lévi, G.; Krenn, J. R.; Hohenau, A.; Schider, G.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R., Appl. Phys. Lett. 2003, 82, 3095 (28) Schatz, G. C.; Young, M. A.; Duyne, R. P. V., Surface Enhanced Raman Scattering, Springer berlin Ed. 2006, 103, 19 (29) Tran, C. D., Anal. Chem. 1984, 56, 824. (30) Wood, R. W., Phil. Mag. 1902, 4, 396. (31) Ritchie, R. H., Phys. Rev. E 1957, 106, 874. (32) Raether, H., Springer-Verlag, New-York 1988. (33) Weeber, J. C.; Lacroute, Y.; Dereux, A., Phys. Rev. B 2003, 68, 115401. (34) Bozhevolnyi, S. I.; Erland, J.; Leosson, K.; Skovgaard, P. M. W.; Hvam, J. M., Phys. Rev. Lett. 2001, 86, 3008. (35) Devaux, E.; Ebbesen, T. W.; Weeber, J. C.; Dereux, A., Appl. Phys. Lett. 2003, 83, 4936. (36) Genet, C.; Ebbesen, T. W., Nature 2007, 445, 39 Nicolas Marquestaut 53 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman (37) González, M. U.; Weeber, J. C.; Baudrion, A. L.; Dereux, A.; Stepanov, A. L.; Krenn, J. R.; Devaux, E.; Ebbesen, T. W., Phys. Rev. B 2006, 73, 155416. (38) Drude, P., Annalen der Physik 1900, 306, 566. (39) Raether, H., Springer-Verlag, Berlin, Heidelberg 1988. (40) Economou, E. N., Phys. Rev 1969, 182, 539. (41) Burke, J. J.; Stegeman, G. I.; Tamir, T., Phys. Rev. B : Condens Matter 1986, 33, 5186. (42) Prade, B.; Vinet, J. Y.; Mysyrowicz, A., Phys. Rev. B Condens Matter 1991, 44, 13556. (43) Lamprecht, B.; Krenn, J. R.; Schider, G.; Dibatcher, G.; Salerno, M.; Felidj, N.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R.; Weeber, J. C., Appl. Phys. Lett. 2001, 79, 51. (44) Ebbesen, T.; Genet, C.; Bozhevolnyi, S. I., Physics Today May 2008, 44. (45) Ritchie, R. H., Surface Sci 1973, 34, (1). (46) Quinten, M.; Leitner, A.; Krenn, J. R.; Aussenegg, F. R., Opt. Lett. 1998, 23, 1331. (47) Brongersma, M. L.; Hartman, J. W.; Atwater, H. A., Phys. Rev. B 2000, 62, 16356 (48) Kreibig, U.; Vollmer, M., Springer Verlag Berlin Heidelberg New York 1995. (49) Kneipp, K.; Kneipp, H., Appl. Spec. 2006, 60, 322. (50) Stiles, P.; Dieringer, J.; Shah, N. C.; Duyne, R. P. V., Ann. Rev. Anal. Chem. 2008, 1, 601. (51) Kempa, K.; Kimball, B.; Rybczynski, J.; Huang, Z. P.; u, P. F. W.; Steeves, D.; Sennett, M.; Giersig, M.; Rao, D. V. G. L. N.; Carnahan, D. L.; Wang, D. Z.; Lao, J. Y.; Li, W. Z.; Ren, Z. F., Nano Lett. 2003, 3, 13. (52) Haes, A. J.; Duyne, R. P. V., J. Am. Chem. Soc. 2002, 124, 10596. (53) Haynes, C. L.; Duyne, R. P. V., Nano Lett. 2003, 3, 939. (54) Howorka, S.; Cheley, S.; Bayley, H., Nat. Biotechnol. 2001, 19, 636. (55) Landskron, K.; Hatton, B. D.; Perovic, D. D.; Ozin, G. A., Science 203, 302, 266. (56) Xia, Y.; Halas, N. J., MRS Bull 2005, 30, 338. (57) Frens, G., Nat. Phys. Sci. 1973, 241, 20. (58) Jin, R.; Cao, Y. C.; Hao, E.; Metraux, G. S.; Schatz, G. C.; Mirkin, C. A., Nature 2003, 425, 487. (59) Song, J. H.; Kim, F.; Kim, D.; Yang, P. D., J. Chem. Eur. 2005, 11, 910 (60) Sun, Y. G.; Xia, Y. N., Science 2002, 298, 2176. (61) Brumlik, C. J.; Martin, C. R., J. Am. Chem. Soc. 1991, 113, 3174. (62) Cialla, D.; Rösch, P.; Möller, R.; Popp, J., Proc. SPIE 2007, 6633, 66331U. (63) Martin, O. J. F., Microelectron. Eng. 2003, 24, 67. (64) Haynes, C. L.; Mcfarland, A. D.; Zhao, L. L.; Duyne, R. P. V.; Schatz, G. C.; Gunnarsson, L.; Prikulis, J.; Kasemo, B.; Kall, M., J. Phys. Chem. B 2003, 107, 7337. (65) Le Ru, E.; Grand, J.; Felidj, N.; Aubard, J.; Levi, G.; Hohenau, A.; Krenn, J. R.; Blackie, E.; Etchegoin, P., J.Phys.Chem. 2008, 112, 8117. (66) Tong, H. D.; Jansen, H. V.; Gadgil, V. J.; Bostan, C. G.; Berenschot, E.; Rijn, C. J. M. V.; Elwenspoek, M., Nano Lett. 2004, 4, 283. (67) Bloomstein, T. M.; Hom, M. W.; Rothschild, M.; Kunz, R. R.; Palmacol, S. T.; Goodman, R. B., J. Vac. Sci. Technol. B 1997, 15, 2112. (68) Kitson, S. C.; Barnes, W. L.; Sambles, J. R., IEEE Photonics Technol. Lett. 1996, 8, 1662. (69) Marshall, M. T.; Mcdonald, M. L.; Tong, X.; Yeadon, M.; Gibson, J. M., Rev. Sci. Instrum. 1998, 69, 440. (70) Brambley, D.; Martin, B.; Prewett, P. D., Adv. Mater. Opt. Electron. 1994, 4, 55. (71) Félidj, N.; Grand, J.; Laurent, G.; Aubard, J.; Lévi, G.; Hohenau, A.; Galler, N.; Aussenegg, F. R.; Krenn, J. R., J. Chem. Phys. 2008, 128, 094702. Nicolas Marquestaut 54 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman (72) Billot, L.; Chapelle, M. L. d. l.; Grimault, A. S.; Vial, A.; Barchiesi, D.; Bigeon, J. L.; Adam, P. M.; Royer, P., Chem. Phys. Lett. 2006, 422, 303. (73) Roder, H.; Hahn, E.; Brune, H.; Bucher, J. P.; Kern, K., Nature 1993, 366, 141. (74) McClelland, J. J.; Scholten, R. E.; Palm, E. C.; Celotta, R. J., Science 1993, 262, 877. (75) Fischer, U. C.; Zingsheim, H. P., J. Vac. Sci. Technol. 1981, 19, 881. (76) Deckman, H. W.; Dunsmuir, J. H., Appl. Phys. Lett. 1982, 41, 377. (77) Hulteen, J. C.; Duyne, R. P. V., J. Vac. Sci. Technol. A 1995, 13, 1553. (78) Ma, W.; Hesse, D.; Gösele, U., Small 2005, 1, 837. (79) Astilean, S., Rom. Rep. in Physics 2004, 56, 340. (80) Ye, Y. H.; LeBlanc, F.; Haché, A.; Truong, V. V., Appl. Phys. Lett. 2001, 78, 52. (81) Micheletto, R.; Fukuda, H.; M. Ohtsu , 3333-; 3336., Langmuir 1995, 11, 3333. (82) Reculusa, S.; Ravaine, S., Appl. Surf. Science 2005, 246, 409. (83) Reculusa, S.; Ravaine, S., Chem. Mater. 2003, 15, 598. (84) Massé, P.; Reculusa, S.; Ravaine, S., Colloids and Surfaces A : Physicochem. Eng. Aspects 2006, 284-285, 229. (85) Zhang, X.; Young, M. A.; Lyandres, O. L.; Duyne, R. P. V., J. Am. Chem. Soc. 2005, 127, 4484. (86) Haes, A. J.; Chang, L.; Klein, W. L.; Duyne, R. P. V., J. Am. Chem. Soc 2005, 127, 2264. (87) Stuart, D. A.; Yonzon, C. R.; Zhang, X.; Lyandres, O. L.; Shah, N. C.; Glucksberg, M. R.; Walsh, J. T.; Duyne, R. P. V., Anal. Chem. 2005, 77, 2013. (88) Veinot, J. G. C.; Yan, H.; Smith, S. M.; Cui, J.; Huang, Q. L.; Marks, T. J., Nano Lett. 2002, 2, 333. (89) Kamisetty, N. K.; Pack, S. P.; Nonogawa, M.; Devarayapalli, K. C.; Kodaki, T.; Makino, K., Anal. Bioanal. Chem. 2006, 386, 1649. (90) Hulteen, J. C.; VanDuyne, R. P., J. Vac. Sci. Technol. A 1995, 13, 1553. (91) Han, S. B.; Shi, X. Y.; Zhou, F. M., Nano Lett. 2002, 2, 435. (92) G. C. Schatz; Duyne, R. P. V., Handbook of Vibrational Spectroscopy, J. M. Chalmers and P. R. Griffiths, Ed., New York, Wiley 2002, 759 (93) Shafer-Peltier, K. E.; Haynes, C. L.; Glucksberg, M. R.; Duyne, R. P. V., J. Am. Chem. Soc. 2003 125, 588. (94) Love, J. C.; Estroff, L. A.; Krieble, J. K.; Nuzzo, R. G.; Whitesides, G. M., Chem. Rev. 2005, 105, 1103. (95) Willets, K. A.; Duyne, R. P. V., Annu. Rev. Phys. Chem. 2007, 58, 267. (96) Haynes, C. L.; Duyne, R. P. V., J. Phys. Chem. B 2003, 107, 7426 (97) McFarland, A. D.; Young, M. A.; Dieringer, J. A.; Duyne, R. P. V., J. Phys. Chem. B. 2005, 109, 11279 (98) Etchegoin, P.; Maher, R. C.; Cohen, L. F.; Hartigan, H.; Brown, R. J. C.; Milton, M. J. T.; Gallop, J. C., Chem. Phys. Lett. 2003, 375 84. (99) Moskovits, M., J. Raman Spectrosc. 2005, 36, 485. (100) Otto, A., J. Raman Spectrosc. 2002, 33, 593. Nicolas Marquestaut 55 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre I : La spectroscopie de diffusion Raman Nicolas Marquestaut 56 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Chapitre II Résultats expérimentaux SERS Nicolas Marquestaut 57 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Nicolas Marquestaut 58 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS 1 Introduction générale De nombreuses approches ont permis de concevoir et fabriquer des surfaces SERS efficaces par attaque électrochimique1, dépôt métallique rugueux2, 3, dépôt de solution colloïdale, mais ces méthodes de fabrication sont souvent peu reproductibles. Ce facteur est limitant en particulier en chimie analytique, pour laquelle reproductibilité et normalisation sont deux critères importants. Des méthodes de préparation plus reproductibles telles que la lithographie de type « nanosphère »4, surfaces colloïdales organisées6, 7 5 détaillée en Chapitre I, la reproduction à partir de ou l’utilisation de réseaux périodiques de fibres optiques recouvertes de métal8, 9 sont autant de façons récentes de fabriquer des plateformes SERS sur de grandes surfaces quasi-exemptes de défaut. D’un autre côté, des techniques lithographiques avancées telles la lithographie par faisceau d’électrons ou la lithographie par faisceau d’ions focalisés permettent de fabriquer sur mesure des surfaces SERS structurées efficaces en ajustant finement l’architecture des structures métalliques ainsi que le gap entre les structures adjacentes avec une résolution de 10 à 20 nm10-12. Cependant, ces dernières techniques présentent l’inconvénient d’être couteuses et de nécessiter de nombreuses étapes délicates. Lors de ces travaux de thèse, deux approches ont été utilisées pour fabriquer des plateformes SERS de taille (objets allant de 90 à 400 nm) et de géométrie comparables. En collaboration avec le groupe de Serge Ravaine (CRPP), une méthode lithographique de type « nanosphère » basée sur l’utilisation de la technique Langmuir-Blodgett (LB) a été utilisée pour contrôler le dépôt d’une monocouche de nanosphères de silice fonctionnalisées sur un substrat de silice. Cette approche offre une bonne reproductibilité et la possibilité de former des arrangements compacts de bonne qualité sur des surfaces de plusieurs cm2. Bien que des travaux antérieurs sur le transfert LB de nanoparticules d’argent (20 nm de diamètre) ont été démontrés pour la fabrication de substrats SERS13, cette approche basée sur les travaux du groupe de Serge Ravaine14-16 représente la première application de la technique LB pour transférer des sphères de silice fonctionnalisées de gros diamètre (290-980 nm) utilisées comme motifs pour la préparation de plateformes SERS. La seconde approche met en œuvre la méthode lithographique par faisceau d’électrons qui offre la flexibilité de pouvoir contrôler la géométrie des structures avec une très bonne résolution spatiale (< 20 nm). En assurant la quasi-reproductibilité des motifs, la bande plasmon de ces plateformes SERS peut être accordée très précisément en ajustant la taille des objets métalliques ainsi que la distance inter-objets. Nicolas Marquestaut 59 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Afin de comparer quantitativement les effets d’exaltation SERS, les deux approches ont été utilisées pour fabriquer des nanostructures de taille et de forme comparables, c'est-à-dire un arrangement régulier de motifs de Fischer17. Après dépôt d’or, des mesures optiques en transmission ont été menées afin d’enregistrer la bande plasmon pour différents échantillons préparés par technique LB et lithographie à faisceau d’électrons. Afin d’évaluer ces plateformes SERS, nous avons étudié l’adsorption d’une monocouche de systèmes moléculaires de type azobenzène organisée à la surface de l’or nanostructuré. De tels systèmes moléculaires organisés sous forme de monocouches18 ou de multicouches19 présentent un intérêt considérable pour induire un mouvement des molécules hôtes localisées au dessus de cette surface fonctionnalisée. Le contrôle des unités d’azobenzène par voie optique est initiée par une réaction d’isomérisation E-Z (Trans-Cis) réversible20, 21 . Cette photoisomérisation est suivie d’une réorientation angulaire des unités d’azobenzène pouvant déclencher des changements dans l’orientation des molécules environnantes. Ceci a été démontré notamment sur des molécules de type cristal liquide dont l’orientation peut être contrôlée par voie optique22-24. Ces mêmes propriétés des molécules azobenzène ont été utilisées pour générer des changements mécaniques de polymères25, et de telles forces photoinduites ont été précisément mesurées par microscopie à force atomique26. Sonder ce type de monocouche avec des techniques vibrationnelles présente un grand intérêt puisque les modes de vibration participants aux réactions de photoisomérisation et de réorientation angulaire peuvent être sondés sélectivement offrant la possibilité de déterminer l’amplitude et la dynamique des mécanismes de réorientations moléculaires27. Dans ce chapitre, des molécules d’azobenzène adsorbées de façon covalente sur des surfaces d’or nanostructurées sont étudiées. Les méthodes de fabrication des motifs d’or (géométrie de Fischer) sur les lames de verre par la technique LB puis par faisceau d’électrons sont décrites. Les techniques de caractérisation d’extinction et de diffusion Raman sont développées puis les coefficients d’exaltation Raman (CERs) sont quantifiés et comparés pour les deux types de plateformes SERS. En seconde partie de ce chapitre, des surfaces d’or préparées par lithographie électronique de géométries et de tailles différentes sont caractérisées puis les modes de résonance plasmon et les efficacités SERS sont corrélées. Nicolas Marquestaut 60 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS 2 Méthodes expérimentales 2.1 Préparation des particules de silice et fonctionnalisation Des sphères de silice monodisperses avec des diamètres allant de 290 à 980 nm sont préparées par hydrolyse d’un tétraethyl orthosilicate dans un milieu alcoolique en présence d’eau et d’ammoniac14, 16. Les polydispersités des sphères de silice sont de l’ordre de 1.05. Les sphères sont fonctionnalisées par des groupements vinyle et amine en utilisant les agents de couplage allyltrimethoxysilane et aminopropyltriethoxysilane, respectivement. La quantité d’agent de couplage est environ 10 fois plus importante que la quantité nécessaire pour couvrir la surface inorganique avec une monocouche (une molécule occupe ~ 0.5 nm2). Les sphères de silice amphiphiles résultantes peuvent être organisées pour former un film de Langmuir stable à l’interface air-eau. Le caractère hydrophobe donne aux particules de taille inférieure au micron la faculté de rester à la surface de l’eau. Comme souligné par Ravaine et al.16 un équilibre subtil entre le caractère hydrophile et hydrophobe de la surface des particules doit être obtenu pour éviter l’agrégation dans la solution (trop hydrophile) ou à l’interface air-eau (trop hydrophobe). Dans de tels cas extrêmes, il n’est pas possible d’atteindre un haut degré d’organisation des particules pour former un réseau colloïdal à l’interface28. L’allyltrimethoxysilane et l’aminopropyltriethoxysilane sont de bons candidats pour éviter ces problèmes, et permettent d’obtenir un équilibre des interactions particuleparticule et particule-sous-phase, menant à la formation d’une couche cohésive à la surface de l’eau29, 30 . Afin d’éliminer les agents restants, toutes les suspensions sont rincées à l’eau plusieurs fois ou soumises à plusieurs cycles de lavage et centrifugation. 2.2 Préparation des plateformes SERS de Langmuir-Blodgett Les films agglomérés sont obtenus par levage vertical en utilisant une cuve de Langmuir-Blodgett maintenue à température ambiante sous flot continu d’azote (Figure 2.1). Dans cette cuve en Teflon rectangulaire de (250 x 550 x 3) mm3, le niveau de la sous-phase est maintenu constant tout au long de l’expérience par ajout d’eau (eau Millipore Q avec une résistivité supérieure à 18 MΩ.cm-1). Avant le dépôt LB, les lames de verre sont nettoyées au chloroforme, rincées à l’eau distillée puis séchées. Une suspension diluée de particules de silice fonctionnalisées dans un mélange 80%/20% (volume/volume) de chloroforme et d’éthanol est préparée avant épandage dans une sous-phase d’eau pure (pH=5.5). Les Nicolas Marquestaut 61 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS particules à la surface de l’eau sont comprimées jusqu’à atteindre une pression de surface de 6 mN.m-1. Les lames de verre hydrophiles sont ensuite immergées rapidement dans la sousphase (10 cm.min-1) puis extraites hors de l’eau à une vitesse 0.1 cm.min-1. Dans ces conditions optimisées, le dépôt sur le substrat intervient seulement lors de la remontée avec un rapport de transfert proche de l’unité, avec seulement un cycle pour obtenir une monocouche bi-dimensionnelle compacte de particules de silice. Après transfert et séchage, un film d’or est déposé sur le cristal colloïdal par pulvérisation cathodique (Balzers SCD 030). Un courant de 30 mA est appliqué entre la cible et l’échantillon (distance cible-échantillon ~ 5 cm). Pour tous les substrats, l’épaisseur d’or varie entre 30 et 40 nm. A la suite du dépôt métallique, les échantillons sont passés au bain à ultra-sons dans une solution de chloroforme pendant une minute afin d’enlever les sphères de silice. Des nanostructures de type Fischer sont ainsi présentes à la surface du substrat. La lithographie de type « nanosphère » se révèle comme une méthode simple et efficace pour fabriquer des plateformes SERS. A la suite des travaux pionniers de Fischer17 et plus tard de Van Duyne pour les applications SERS31, différentes méthodes telles que l’autoassemblage sur surfaces (drop coating en anglais)31, le trempage vertical (dip-coating)32, 33, la centrifugation (spin coating)34, ou l’étalement horizontal (blade coating)35 répertoriées dans le premier Chapitre de ce manuscript, sont utilisées pour fabriquer des monocouches de nanosphères dans le but d’obtenir de grandes surfaces et de minimiser les défauts d’arrangement. Toutefois, les méthodes ci-dessus ont souvent besoin de grandes quantités de solution colloïdale monodisperse. Ces méthodes peuvent offrir la possibilité de fabriquer des échantillons homogènes sur des surfaces limitées à quelques millimètres carrés. Néanmoins, de nombreux défauts de dislocations et des agrégats localisés sur le côté de l’échantillon sont présents, empêchant une reproductibilité parfaite entre les échantillons. Le transfert LB de sphères de silice fonctionnalisées chimiquement sur une lame de verre permet d’obtenir de grandes surfaces bi-dimensionnelles cristallines sur des lames de microscope de l’ordre de (2.5 x 2.5) cm2 avec une quantité de défauts minimisée, particulièrement sur les bords du substrat15. De plus, dans notre configuration (Figure 2.1) mettant en œuvre une grande cuve de Langmuir, plusieurs échantillons peuvent être fabriqués simultanément avec une très bonne reproductibilité. Nicolas Marquestaut 62 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.1 : Représentation schématique de la préparation des plateformes SERS conçues par la méthode LB. (a) Le film Langmuir de nanosphères est (b) compressé à la surface de l’eau puis (c) transféré sur un substrat en verre. (d) Une couche d’or (30 – 60 nm) est déposée sur une couche compacte de nanosphères LB, et (e) les nanoparticules sont finalement enlevées à l’aide d’un bain à ultra-sons. (f) L’échantillon est finalement plongé dans une solution contenant des chromophores d’azobenzène. Dans cette étude, pour des sphères de silice avec des diamètres allant de 290 à 980 nm, l’homogénéité de la surface est relativement bonne et aucun défaut majeur n’est observé. Comme montré dans les images MEB (Figure 2.2), des dislocations dans les arrangements hexagonaux sont toutefois observées, notamment dues à la polydispersité des nanosphères de silice ou à la fois au levage vertical de la monocouche de billes de silice, mais une forte proportion de triangles organisés est observable. Nicolas Marquestaut 63 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.2 : Images de microscopie électronique à balayage des plateformes SERS préparées par la technique LB en utilisant des nanosphères de silice fonctionnalisées de (a) 290 nm, (b) 390 nm, (c) 460 nm, (d) 590 nm, et (e) 980 nm. Une couche d’or de 30 nm est déposée dans les interstices des sphères. Figure 2.3 : Exemple d’échantillon optimisé transféré par LB, suivi d’un dépôt d’or et d’un bain à ultrasons pour des particules de silice modifiées de 312 nm. La qualité de l’arrangement hexagonal est similaire sur l’ensemble de la surface de (2.5 x 2.5) cm2. De tels arrangements sur de larges surfaces peuvent être produits de façon reproductible mais restent dépendants de la monodispersité de la solution colloïdale employée. L’apparence visuelle est un bon indicateur de la qualité cristalline des films LB. Les échantillons arborent une irisation provenant de la diffraction de Bragg de la lumière visible. Un changement de Nicolas Marquestaut 64 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS couleur due à la diffraction de Bragg peut être observé en modifiant l’orientation du substrat pour des tailles de billes comprises dans le domaine du visible, comme présenté en Figure 2.4. Figure 2.4 : Photographies montrant l’évolution des couleurs diffractées par un cristal colloïdal fait d’une monocouche de particules de silice de 680 nm de diamètre en fonction de l’orientation du substrat en verre16. Le rapport des tailles de triangles et de la projection de sphère sur le substrat peut être calculé en considérant un arrangement compact de sphères. La surface théorique des assemblements de triangles d’or, ST, varie avec le carré du rayon r des particules ou linéairement avec la surface de projection des sphères, SD, ce qui correspond aux zones vides sur le substrat, menant à l’équation (2.2), qui est calculée à partir d’un site élémentaire de la maille de la surface hexagonale (Figure 2.1) ST = ( 3 − ST = ( π 2 )r 2 = 1.1026r 2 3 1 − ) S D = 0.0513S D π 2 (2.1) (2.2) Le pourcentage de la surface théorique des triangles d’or courbés et des vides sont % ST = 4.88% et % S D = SD = 95.12% , respectivement, et sont indépendants du rayon S D + ST de la particule. Ces valeurs sont comparées avec nos échantillons après analyse d’image en considérant le décalage existant par rapport à un arrangement hexagonal compact parfait. L’analyse d’image réalisée à l’aide du logiciel d’AFM (SPIP) montre que le pourcentage des zones d’or varie entre 10 et 20% de la surface totale de l’échantillon. Ce paramètre est important afin d’évaluer la densité de fonctionnalisation de surface et par conséquent le facteur d’exaltation Raman Nicolas Marquestaut 65 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS 2.3 Préparation des plateformes SERS par lithographie à faisceau d’électrons La seconde approche utilisée dans le cadre de cette thèse pour former des motifs d’or nanostructurés sur un substrat en verre est la lithographie à faisceau d’électrons. Cette technique permet de créer un arrangement similaire à la lithographie de type « nanosphère » mais avec un contrôle total de l’architecture de la surface. Ces motifs sont conçus par le groupe de F.Lagugné-Labarthet au laboratoire de nanofabrication de l’Université de Western Ontario (UWO, Département de Chimie, London, Canada). Les structures sont réalisées sur des lamelles de microscope de dimension (25 x 25 x 0.15) mm3 avec ou sans couche d’accroche. Ce détail est important car la couche d’accroche métallique (titane dans notre cas) a un effet important sur les caractéristiques du plasmon de surface comme nous le verrons par la suite. Les substrats sont préalablement nettoyés de toute impureté à l’aide d’une solution acide commerciale (Nanostrip® : 90% d’acide sulfurique, 5% d’acide peroxymonosulfurique, 1% de peroxyde d’hydrogène et 5% d’eau) durant 15 minutes. Les lamelles sont rincées abondamment avec de l’eau déionisée puis chauffées à 180°C pendant 5 minutes pour évaporer toute trace d’eau. Les étapes de fabrication sont résumées en Figure 2.5. Une solution 25%/75% (v/v) de résine photosensible positive ZEP 520A dans du Methyl Iso-Butyl Ketone (MIBK) est déposée par centrifugation (spin-coating) sur chaque échantillon de verre en utilisant une machine de dépôt Solitec 5110. Le ZEP 520A est une résine photosensible positive adaptée à la lithographie par faisceau d’électrons. Pour obtenir une couche de 500 nm de ZEP 520A, la solution est déposée puis étalée avec une vitesse de 500 tr.min-1 pendant 5s sur l’échantillon, puis centrifugée à 2000 tr.min-1 pendant 60s. Finalement, la lame nouvellement recouverte est placée dans un four à 180°C pendant 3 minutes afin d’évaporer le solvant (Figure 2.5, étape a). En lithographie par faisceau d’électrons, il est essentiel d’avoir un conducteur électrique sur la surface afin de dissiper l’accumulation de charges à la surface de la résine photosensible. Le ZEP 520A n’étant pas déposé sur un conducteur (le substrat utilisé est du verre), une couche de 20 Å de chrome est déposée à la surface de la résine photosensible par pulvérisation cathodique magnétron radio-fréquence à une puissance de 300W et un vide de 4.8 mTorr sous plasma d’argon pendant 1 min. (Figure 2.5, étape b) Les nano-motifs sont conçus avec DesignCad en parallèle avec le logiciel « Nanometer Pattern Generation System » (NPGS). Le système de lithographie à faisceau d’électrons installé dans le microscope électronique à balayage à émission de champ LEO 1530 en Nicolas Marquestaut 66 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS relation avec le programme NPGS est utilisé pour graver les motifs sur l’échantillon. Dans cette configuration, la position du faisceau d’électrons est fixée tandis qu’une platine haute résolution assure le positionnement précis de l’échantillon. Un faisceau d’électrons focalisé d’énergie 30 keV est utilisé pour exposer les zones sélectives sur la couche de résine photosensible recouverte de chrome avec un dosage surfacique de 100 µC/cm2. En changeant l’énergie d’exposition du faisceau d’électrons, il est possible de modifier la résolution des motifs exposés et, par conséquent, contrôler la pénétration du faisceau ainsi que la taille des objets. Figure 2.5 : Etapes de préparation de substrats SERS sur verre par lithographie électronique. Les zones irradiées de la résine photosensible sont développées avec une solution développante de ZED N50 pendant 2 min, l’échantillon est rincé dans une solution 1 : 3 de MIBK d’alcool isopropyle puis séché une dernière fois à l’azote après avoir enlevé la couche de chrome. (Figure 2.5, étape c). Ensuite, une couche de 40 nm d’or est déposée sur l’échantillon par évaporation à faisceau d’électrons à la vitesse d’ 1 Å.s-1. (Figure 2.5, étape d) Enfin, pour obtenir les nanostructures d’or, il est nécessaire de retirer la résine photosensible résiduelle de l’échantillon recouvert d’or, qui, pour ce faire est d’abord traité pendant 10 min dans une chambre de radiation à ultraviolets. Ensuite, la résine photorésistante modifiée, ainsi que le métal déposé à sa surface en excès sont enlevés par immersion dans l’acétone pendant 15 minutes (Figure 2.5, étape e). Nicolas Marquestaut 67 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS La lithographie à faisceau d’électrons est utilisée pour reproduire les arrangements sous forme de motifs de Fischer. Les structures résultantes montrées en Figure 2.6, sont obtenues après dépôt de 30 nm d’or. Figure 2.6 : (a – c) Images microscopie électronique à balayage des motifs d’or préparés par lithographie à faisceau d’électrons. Dans ces séries, les tailles des côtés des triangles sont (a) 145 nm, (b) 185 nm et (c) 385 nm. Les mêmes échantillons sont utilisés pour les tests Raman, avec des gaps de 45, 65 et 110 nm (d) Domaine de grande taille montrant la régularité des substrats à faisceau d’électrons. Sur la même lamelle de microscope sont gravées une série de motifs de Fischer avec des triangles individuels montrés en Figure 6a-c dont les tailles varient de 145 à 385 nm et les écarts triangle-triangle sont de 45, 65, et 110 nm, respectivement. Dépendant du flux d’irradiation du faisceau d’électrons par rapport au flux nominal utilisé dans le processus lithographique, on peut aussi jouer plus finement sur la taille des motifs ainsi que l’écart inter –triangles. Comme on le verra en Section 2.6, de faibles ajustements de tailles des motifs métalliques ont des effets importants sur la fréquence maximum du plasmon de surface. 2.4 Fonctionnalisation des plateformes SERS Les substrats SERS sont fonctionnalisés avec un dérivé de type azobenzène, dont la structure et le spectre UV-Visible associé sont montrés en Figure 2.7. Nicolas Marquestaut 68 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.7 : Formule chimique du chromophore azobenzène utilisé lors de la fonctionnalisation des subtrats SERS et spectre UV-Visible associé. En présence d’or, la liaison H-S se rompt et vient se greffer chimiquement au film d’or par liaison covalente Au - S. Les échantillons sont immergés dans une solution à 10-4 M du 2-(4(4-Decycloxylphenylazo)-phenyl)ethyl thiol dans du chloroforme pendant 12 h. L’excès de molécules d’azobenzène ou agrégats non adsorbés sur l’or est lavé avec du chloroforme. Le spectre d’absorbance entre 300 et 500 nm d’une solution d’azobenzène dans du chloroforme à 10-4 M qui montre deux bandes d’absorption, est enregistré dans l’UV-Visible (Figure 2.7). Les deux bandes situées à 360 nm et 450 nm sont caractéristiques des transitions électroniques π→π* et n→π*, respectivement. Ces deux transitions sont spécifiques des systèmes de type azobenzène dans la classification établie par Rau et correspondent aux spectres d’absorption des isomères Trans (π→π*) et Cis (n→π*).36, 37 Les mesures Raman sont par la suite enregistrées avec une longueur d’onde excitatrice dans le rouge (λ = 632 et 647 nm). Nous ne nous plaçons donc pas dans des conditions de résonance Raman, et les effets d’exaltation proviennent uniquement d’effets de surface. Nicolas Marquestaut 69 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS 2.5 Techniques de caractérisation des plateformes SERS Pour les plateformes LB de grande taille, le maximum d’extinction, λmax, de chaque échantillon est suivi et enregistré avec un spectromètre UV- Visible - Proche IR Cary Varian V5. Toutes les mesures macroscopiques sont effectuées dans une géométrie de transmission entre 300 et 1300 nm. Les images en microscopie électronique à balayage sont collectées par un microscope électronique à émission de champ LEO 1530. Les mesures Raman sont acquises par un spectromètre Horiba Jobin-Yvon HR800 à longue focale (f = 800 mm) avec un détecteur CCD refroidi par azote liquide couplé à un microscope confocal inversé Olympus. La longueur d’onde d’excitation laser utilisée dans cette étude est 647 nm provenant de la raie Kr+ du laser Ar - Kr. Afin d’éviter toute dégradation de la monocouche en surface, l’intensité moyenne au point focal est environ 200 µW. Sous de telles conditions d’irradiation, les spectres enregistrés sont stables, y compris après de longs temps d’acquisition, excluant par conséquent tout dommage thermique engendré sur la monocouche ou la surface. Les deux types d’objectifs utilisés sont soit un 60x, O.N. 0.7 pour les mesures en solution, soit un 100x, O.N. 0.9 pour les mesures en surface. Les spectres d’extinction sont enregistrés à l’aide d’un montage micro-UV-VisibleProche IR réalisé au laboratoire. En Figure 2.8 est montré le schéma du dispositif expérimental monté sur un microscope inversé (Olympus IX 71) et couplé à un spectromètre. Ce montage optique est conçu pour réaliser des spectres en transmission sur des échantillons de petite taille. La lumière blanche envoyée dans une fibre optique de 100 µm est focalisée avec un objectif 20X puis collimatée avec un objectif 10X corrigé à l’infini, dans une géométrie de transmission. Le spot laser irradiant la surface est de taille 50 µm de diamètre ce qui permet d’irradier la quasi-totalité de la surface de 60 x 60 µm2. La taille du spot peut être modifiée en prenant une fibre optique de différent diamètre ou bien en changeant le grossissement des objectifs collimateurs et focalisateurs. Ce montage est utilisé en transmission mais il peut également être utilisé en réflexion8. La diode interne au spectromètre est allumée au préalable afin d’aligner convenablement le spot de lumière blanche avec le trajet optique de collimation du spectromètre Raman. Le trou confocal est ouvert à son maximum, i.e. 1000 µm et les fentes d’entrée à 200 µm. Nicolas Marquestaut 70 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.8 : Schéma de principe du montage micro-UV-Visible pouvant être utilisé en transmission et en réflexion selon l’échantillon à analyser. Un spot laser de 50 µm de diamètre est obtenu dans ces conditions lorsque la lumière blanche est focalisée sur l’échantillon. La gamme spectrale d’acquisition des données est limitée par le détecteur CCD Symphony 1024*256 pixels, ce qui permet une acquisition avec un bon rapport signal/bruit dans une gamme de fréquence comprise entre 450 et 950 nm, comme le montre la réponse typique spectrale du détecteur en Figure 2.9. Figure 2.9 : Spectre de détection de la caméra CCD utilisée lors des enregistrements des spectres d’extinctions visible et proche infrarouge (Données constructeur Symphony) Un réseau 600 traits/mm est utilisé et 30 accumulations successives sont effectuées afin de réduire le rapport signal/bruit. Pour des expériences nécessitant une acquisition dans Nicolas Marquestaut 71 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS l’infrarouge, un filtre de couleur coupant les longueurs d’ondes inférieures à environ 500 nm est utilisé pour palier au recouvrement du réseau se produisant entre 950 et 1050 nm. 2.6 Résultats 2.6.1 Caractérisation spectroscopique Les spectres de transmission des échantillons sont enregistrés du domaine visible jusqu’au proche infrarouge. En Figure 2.10a sont montrés les spectres d’absorption des motifs obtenus par la méthode LB. Figure 2.10 : (a) Spectres d’absorption des motifs d’or gravés sur du verre en utilisant la méthode LB. La taille des triangles varie de (A) 85 nm à (E) 315 nm pour des tailles de sphères correspondantes de 290 à 980 nm, respectivement (b) Spectres Raman de l’azobenzène fonctionnalisé à la surface des plateformes SERS. La longueur d’onde d’excitation est fixée à 647 nm, l’irradiation est similaire pour les 5 échantillons. On constate sur les spectres en transmission un décalage significatif des bandes plasmons du aux effets de couplage entre les triangles d’or. Les diamètres des particules de silice sont de (A) 290, (B) 390, (C) 590, (D) 770 nm, et (E) 980 nm, et la résonance plasmon normalisée varie de 630 à 993 nm comme constaté sur la Figure 2.10. Les plus grandes structures ont une bande plasmon décalée vers les plus grandes longueurs d’onde. En Figure 2.10b sont montrés les spectres Raman associés d’une monocouche d’azobenzène adsorbée entre 800 et 1800 cm1 . Le spectre Raman du composé azobenzène adsorbé est composé de bandes intenses à 1140 cm-1 (δ(CH) cycle+ν9a), 1188 cm-1 (δ(CH) cycle+ ν9b), 1308 cm-1(νφ-N) asymétrique, 1408 cm-1 (νN=N), 1456 cm-1 (ωC=C+δCH) et 1601 cm-1(ωC=C) caractéristiques des groupes Nicolas Marquestaut 72 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS azobenzènes. L’absence de pic à 2590 cm-1 (non montrée) confirme la rupture de la liaison HS et la formation d’une monocouche d’azobenzène auto-assemblée sur la surface d’or nanostructurée. Les expériences Raman sont réalisées en utilisant une longueur d’onde excitatrice à 647 nm dans des conditions proches de la résonance avec la bande plasmon (A) comme montré en Figure 2.10a. Travailler à cette longueur d’onde n’induit pas une photoisomérisation des molécules d’azobenzène du fait qu’elle soit localisée hors de la bande d’absorption des chromophores. La plus importante amplification Raman est observée pour l’échantillon (A), démontrant que la condition de résonance avec la fréquence plasmon de surface peut induire une exaltation Raman plus efficace comparativement aux mesures hors résonance (C-E). La plus grande amplification est obtenue pour les plus petites particules (290 nm) avec des tailles de triangles d’environ 85 nm de côté. Des mesures similaires sont réalisées sur les plateformes lithographiées par faisceau d’électrons. En Figure 2.11 sont représentés les spectres de transmission enregistrés pour des échantillons avec des tailles de triangles variant de 145 à 385 nm. Figure 2.11 : (a) Spectres de micro-absorption des motifs de Fischer gravés sur du verre par lithographie à faisceau d’électrons. Les tailles des triangles sont (X) 145 nm, (Y) 185 nm, et (Z) 385 nm avec un maximum d’extinction λmax correspondant à 600, 650 et 800 nm, respectivement (b) L’amplification maximale Raman est obtenue pour les motifs à faisceau d’électrons avec les plus petites structures et avec la fréquence plasmon située à λ = 600 nm (échantillon X). La source d’irradiation est λ = 647 nm avec une intensité de 220 µW mesurée à l’échantillon. Les spectres sont moyennés à partir de 30 points différents sur les motifs. De manière similaire avec les observations reportées pour les films de nanosphères LangmuirBlodgett, les spectres en transmission sont décalés vers le rouge pour les motifs avec des tailles de triangles plus grandes. Les spectres Raman sont enregistrés sur ces derniers Nicolas Marquestaut 73 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS échantillons, et des amplifications significatives sont observées pour les échantillons avec des fréquences plasmons localisées en résonance avec la longueur d’onde d’excitation. Ces résultats semblent en désaccord avec ceux de Van Duyne et al.38 et Félidj et al.39, qui énoncent que le maximum d’exaltation a lieu lorsque la résonance plasmon est décalée dans le rouge de la longueur d‘onde d’excitation fixée et dans le bleu de la bande Raman Stokes décalée de 1140 cm-1 à partir de λexc (cf Chapitre I). En effet X donne le maximum de signal alors que l’on s’attendrait à ce que soit Y puisqu’elle est décalée dans le rouge de raie à 647 nm. Cependant les bandes plasmons étant très larges et la couverture d’or de X étant inférieure à Y, une amplification Raman supérieure est observée. 2.6.2 Estimation du coefficient d’amplification Raman Plus précisément, il nous faut considérer que, en SERS, le facteur d’exaltation en chaque molécule varie avec la géométrie, la taille, et la nature du substrat métallique mais dépend également de l’accord du champ électrique avec à la fois la source d’excitation et du signal Raman avec la bande plasmon7, 40 . Comme montré dans le premier chapitre, le facteur d’amplification électromagnétique du signal SERS est ainsi donné par : 2 F = E (ν excitation ) E (ν Raman ) 2 (2.3) En comparaison de l’équation du facteur d’amplification dans le Chapitre précédent, ici est donnée le produit des facteurs d’amplification E (ν excitation ) et E (ν Raman ) des champs électriques locaux à la fréquence incidente ν excitation et à la fréquence Stokes Raman ν Raman , respectivement. La bande plasmon étant large en comparaison du décalage Stokes Raman (cf Chapitre I), l’approximation suivante est donnée : F = E (ν excitation ) . Dans cette estimation, la 4 correspondance de la ligne excitatrice laser avec la fréquence plasmon est une condition essentielle pour obtenir de grandes amplifications Raman de surface. Une attention toute particulière doit être portée sur le fait que les caractéristiques SERS et les fréquences des bandes sont très similaires à celles obtenues pour les échantillons LB conventionnels. Toutefois, un signal de fond significatif est superposé aux spectres comme montré en Figure 2.11b. Ce fond est peut être dû au résidu de polymère photosensible utilisé lors du processus lithographique. Nicolas Marquestaut 74 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Afin d’établir une relation entre la surface nanostructurée et l’activité SERS de la plateforme, les facteurs d’amplification sont déterminés. L’estimation41 du coefficient d’exaltation Raman (CER) est un pré-requis pour quantifier et comparer les intensités SERS mesurées (ISERS) avec les intensités de diffusion Raman non exaltées (INE) par l’équation 2.4 : CER = I SERS N bulk I bulk N SERS (2.4) où NNE et NSERS sont le nombre de molécules sous illumination laser pour l’échantillon de référence (solution) et pour les motifs de surface fonctionnalisés. Malgré une difficulté expérimentale inhérente à mesurer précisément ce facteur d’exaltation, il est nécessaire d’avoir une bonne connaissance de la géométrie de la zone métallique pour estimer le nombre de molécules de diffusion qui participent au signal Raman. Dans l’approche présente, nous considérons les points suivants pour précisément estimer les facteurs d’exaltation obtenus avec notre configuration optique. (i) Un échantillon Raman de référence est d’abord mesuré en solution. Une solution d’azobenzène est préparée dans du chloroforme et sondée au microscope en utilisant un objectif 60x, O.N. 0.7 à correction d’épaisseur de lame. Le volume du point focal dans la solution est d’abord mesuré en sondant le changement d’intensité de la bande à 520 cm-1 du substrat en silicium immergé dans le même solvant. En faisant varier la focalisation du laser sur l’échantillon, le changement d’intensité du pic de Si décrit une courbe de type Gaussien comme représenté en Figure 2.12a. La largeur à mi-hauteur donne la profondeur de champ du volume focal dans le liquide considéré. La dimension transverse (rayon du spot laser) est déterminée par l’ouverture numérique de l’objectif utilisé pour une longueur d’onde spécifique. Pour la mesure de référence Raman en liquide, la taille du faisceau est d’environ 14.5 µm (Figure 2.12b), et le diamètre du faisceau avec un objectif d’ouverture numérique 0.7 est environ (1.22 λ)/ON=1.13 µm, donnant un volume cylindrique ≈ 14.5 µm3. Une incertitude de ±10% est toutefois appliquée à cette estimation à cause de la forme non cylindrique du faisceau. Nicolas Marquestaut 75 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.12 : (a) Configuration expérimentale pour mesurer la profondeur de champ du faisceau laser sur du silicium cristallin (b) Variation du signal Raman du silicium (520 cm-1) en fonction de la position Z de l’objectif. La largeur à mi-hauteur (FWHM) est d’environ 14.5 µm. (ii) Connaissant la concentration de la solution de référence (C=10-2 M), nous pouvons estimer le nombre de molécules localisées au point focal qui génèrent le signal Raman du volume, NNE, qui est de l’ordre de 9.84 x 107 molécules. (iii) Pour les plateformes SERS, il nous faut admettre que les motifs d’or sont couverts de façon homogène d’une monocouche de molécules, chacune d’entre elles occupant une surface de 0.3 nm2 si on utilise la moyenne estimée à partir des mesures en compression de Langmuir42. Nous utilisons la même aire moléculaire pour la fonctionnalisation de l’or avec les thiols d’azobenzène, bien que nous considérions que notre estimation comprend une erreur de ±5%. La surface de l’or peut être mesurée par un logiciel d’analyse d’images à partir des images MEB de nos échantillons. De telles surfaces varient avec la taille des objets inscrits. En considérant qu’une monocouche est formée sur l’or, et connaissant la surface totale de l’or aussi bien que l’aire moléculaire, nous connaissons le nombre de molécules de diffusion sous le spot focalisé. (iv) INE et ISERS sont les intensités Raman d’un mode vibrationnel donné du chromophore d’azobenzène. Les intensités de la source d’irradiation laser ainsi que les temps d’acquisition sont normalisés pour comparer les intensités Raman. Nicolas Marquestaut 76 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Dans le tableau 2.I et 2.II sont résumés les facteurs d’exaltation calculés pour le pic Raman à 1140 cm-1 (δ(CH) ring+ν9a) pour les plateformes LB aussi bien que pour les échantillons lithographiés par faisceau d’électrons. Tableau 2.I : Paramètres géométriques et spectroscopiques des plateformes LB. Les spectres d’extinction sont enregistrés sur 3 échantillons pour chaque taille par spectroscopie de transmission UV-Visible-Proche IR. Echantillon Diamètre des sphères de silice (nm) Taille du côté des triangles (nm) Maximum d’extinction λmax (nm) Aire théorique de la surface d’or Facteur d’amplification théorique (λexc=647nm) Aire expérimentale de la surface d’or Facteur d’amplification expérimental (λexc=647nm) A 290 85 645 4.88% B 390 100 704 4.88% C 460 150 740 4.88% D 590 180 840 4.88% E 980 315 996 4.88% 1.14 105 5.90 104 2.21 104 1.62 104 9.10 103 15% 20% 18% 15% 10% 3.70 104 1.44 104 5.99 103 5.28 103 4.44 103 Tableau 2.II : Paramètres géométriques et spectroscopiques des substrats préparés par lithographie à faisceau d’électrons. Les spectres d’extinction et les surfaces d’or ont été enregistrés pour 3 échantillons de chaque taille. Echantillon X Y Z Taille des triangles (nm) 145 185 385 Maximum d’extinction (nm) 622 667 813 Surface d’or 16% 25% 57% Facteur d’amplification 1.07 105 3.93 104 1.49 103 Pour tous les échantillons, l’amplification du signal Raman varie entre 103 et 105. Les amplifications maximales sont observées pour les mesures avec la source d’excitation correspondant à la fréquence plasmon de l’ensemble. Lorsque de telles conditions sont remplies, les facteurs d’exaltation Raman sont de l’ordre de 3.7 x 104 and 1.7 x 105 pour les échantillons LB et à faisceau d’électrons, respectivement. Ces valeurs sont du même ordre de grandeur, indiquant que la technique LB de préparation des plateformes SERS mettant en œuvre de grandes surfaces, est efficace, tout en étant rapide et économique. De plus, le signal de fond est très faible par comparaison avec les spectres associés aux échantillons gravés par Nicolas Marquestaut 77 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS faisceau d’électrons. Néanmoins, ces derniers sont plus flexibles puisque le gap et la taille des structures sont bien contrôlés et peuvent être adaptés à la fréquence de la raie laser utilisée. Dans le cas d’une fonctionnalisation avec une monocouche auto-assemblée, les spectres Raman peuvent être enregistrés dans des temps très brefs (seconde) alors qu’aucun signal n’est enregistré sur une surface d’or plane préparée par évaporation à faisceau d’électrons. Cela met l’accent sur le grand intérêt de développer des motifs par faisceau d’électrons sur des substrats transparents (lamelles de microscope, silice) pour des mesures Raman dans une géométrie de transmission. 2.6.3 Conclusion préliminaire sur les substrats SERS de type Fischer Lors de cette étude, deux séries de plateformes SERS fabriquées sur des substrats en verre sont comparées. Dans la première série d’expériences, nous avons approfondi pour la première fois la capacité de la technique LB à fabriquer de grandes zones d’échantillon de particules de silice monocouches compactes qui sont utilisées comme masque pour obtenir des arrangements de triangles d’or. Cette méthode étant à l’origine une approche efficace pour préparer des quantités élevées de cristaux colloïdaux bi-dimensionnels, nous avons maintenant démontré que ces cristaux colloïdaux peuvent être utilisés comme masque pour préparer des plateformes SERS homogènes. Dans la seconde série de manipulations, la lithographie à faisceau d’électrons est utilisée pour reproduire des échantillons sans défaut avec une géométrie similaire. Pour les deux types d’échantillons, une amplification Raman est observée, nous permettant d’enregistrer le signal d’une monocouche en quelques secondes à faible puissance. Dans chaque cas, nos expériences montrent que le maximum d’amplification Raman est observé lorsque la fréquence d’excitation Raman est proche de la fréquence de résonance plasmon de surface des substrats. Les plus grandes amplifications sont obtenues pour les substrats à faisceau d’électrons bien qu’une correspondance parfaite de la lumière d’excitation laser avec la fréquence plasmon ne soit acquise. De fortes amplifications sont également observées pour les substrats LB ce qui en fait une méthode de choix pour une fabrication rapide de plateformes SERS. Nicolas Marquestaut 78 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS 2.7 Etude approfondie de la correspondance résonance plasmon - excitation Raman 2.7.1 Réseau de Fischer Un substrat contenant 4 x 4 plateformes SERS est fabriqué avec des énergies d’exposition différentes à partir du système de lithographie. Basée sur le courant du faisceau d’électrons observé d’environ 30 pA, une exposition d’énergie échelonnée est utilisée comprise entre 70% et 145% de l’exposition nominale (par incréments de 5% par réseau de motifs). Le dosage surfacique nominal du faisceau d’électrons est de 100 µC.cm-2. En faisant varier l’exposition du faisceau d’électrons, la taille des structures en or est modifiée, les motifs les moins exposés étant ceux de plus petites dimensions. La taille des structures augmente avec une disposition des motifs organisés selon la Figure 2.13 ci-dessous. Figure 2.13 : Image de microscope des 16 motifs d’or de Fischer exposés de 70% à 145% de l’exposition nominale par incréments de 5%. Le réseau est composé de 4 x 4 motifs de 60 x 60 µm2 espacés de 140 µm. L’exposition échelonnée est basée sur des motifs de Fischer avec des triangles de 205 nm de côté espacés de 80 nm entre les sommets. Les signaux d’extinction (Figure 2.14) des nanostructures métalliques sont quantifiés en prenant pour mesure de référence le verre. Sur ces échantillons, une couche de titane de quelques nanomètres servant de couche d’accroche aux 40 nanomètres d’or est déposée préalablement par évaporation à faisceau d’électrons. Nicolas Marquestaut 79 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.14 : Spectres d’extinction pour 16 motifs de Fischer d’expositions croissantes de 70 % à 145 % par incréments de 5%. Un motif de base constitué de triangles de 205 nm de côté séparés les uns des autres de 80 nm est utilisé. Une couche d’accroche de titane de 3 nm est déposée préalablement aux 40 nm d’or. Les fréquences d’extinction maximales comprises entre 630 et 850 nm se décalent vers les longueurs d’onde supérieures pour des tailles croissantes de structures nanométriques. La fréquence de résonance d’oscillation collective des électrons en surface de l’ensemble de nanoparticules triangulaires diminue pour des tailles croissantes des triangles et une diminution des espaces inter-triangles. Intuitivement, l’intensité des pics d’extinction comprise entre 0.15 et 0.6 augmente en même temps que la taille des nanoparticules métalliques, i.e. la surface d’or. Il est intéressant de noter que pour de telles tailles de substrats SERS, les bandes plasmons sont comprises dans la gamme du visible et du proche infrarouge. La grande largeur des bandes plasmons provient de la couche d’accroche de titane, ce que nous verrons ultérieurement. Ce phénomène n’est en effet pas observé pour les échantillons ne disposant pas de couche d’accroche. Des mesures en polarisation des plasmons de surface ont été effectuées sur ces plateformes mais ne montrent pas d’effets particuliers. Les valeurs de fréquence et d’intensité pour les 16 pics d’extinction sont reportées dans le tableau 2.III ci-dessous. La proportion de la surface d’or et de la surface totale composée du substrat en verre et des structures métalliques est donnée en pourcentage pour les 16 tailles différentes. Ces valeurs sont approximées par calcul à partir de l’analyse des images MEB haute résolution. Nicolas Marquestaut 80 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Tableau 2.III : Longueurs d’onde et intensités des pics d’extinction correspondants aux 16 motifs de Fischer d’exposition croissantes Taille 1 2 3 4 5 6 7 8 Surface d'or (%) 0.092 0.105 0.135 0.141 0.141 0.150 0.173 0.182 λmax (nm) 628 646 670 682 703 718 739 741 Intensité pic 0.142 0.195 0,29 0.293 0.285 0.313 0.34 0.376 Taille 9 10 11 12 13 14 15 16 Surface d'or (%) 0.199 0.198 0,202 0.216 0.232 0.248 0.262 0.287 λmax (nm) 752 760 771 782 801 817 835 850 Intensité pic 0.44 0.445 0.483 0.504 0,53 0.54 0.572 0.572 L’évolution de la fréquence du pic d’extinction en fonction de la surface métallique sur le substrat semble linéaire, comme présenté en Figure 2.15. Les écarts en fréquence par rapport à l’ajustement linéaire sont dus aux erreurs des estimations des surfaces d’or et des positions en longueur d’onde des pics d’extinction. Figure 2.15: Longueur d’onde des pics d’extinction en fonction de la surface d’or. Approximation linéaire montrant l’évolution de la résonance plasmon de surface des motifs d’or triangulaires lorsque la surface de métal déposée augmente. L’approximation linéaire nous montre que le décalage de la longueur d’onde de la résonance plasmon est proportionnel à l’augmentation de la surface d’or qui corrélativement diminue les gaps entre les triangles. Des structures métalliques adaptables en fréquence de résonance plasmon peuvent ainsi être fabriquées pour un matériau noble (Au, Ag, Cu) et une Nicolas Marquestaut 81 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS épaisseur métallique (40nm Au + 3nm Ti) donnés. A partir de cet abaque, on peut ainsi affiner précisément la fréquence de résonance plasmon et l’accorder avec la raie excitatrice du laser. Des mesures Raman ont été enregistrées sur une monocouche d’azobenzène greffée sur ces dernières nanostructures SERS. Malheureusement, aucun signal Raman n’est obtenu. La couche d’accroche de titane diffusant dans la surcouche d’or pourrait en être la cause, comme reporté par Whitesides et autres auteurs43-46. Du fait de ces résultats négatifs, les mêmes structures ont été fabriquées mais cette fois-ci sans couche d’accroche. L’absence de titane n’affecte que très faiblement la qualité des échantillons. Les spectres d’extinction sont enregistrés pour les motifs de Fischer avec des tailles de triangles nominales de 205 nm de côté et des gaps de 80 nm avec deux épaisseurs différentes de 60 nm et 80 nm d’or (Figure 2.16a-b). Les spectres d’extinction sont normalisés afin de montrer clairement le décalage en longueur d’onde en Figure 2.16a. Figure 2.16 : Spectres d’extinction plasmon de motifs triangulaires de Fischer de taille nominale 205 nm de côté espacés de 80 nm. L’épaisseur d’or sans titane est (a) 60 nm et (b) 80 nm. L’insert (photo MEB) est identique aux deux figures (a) et (b). Les spectres portés en (a) sont normalisés tandis que ceux présentés en (b) ne sont pas normalisés. Nicolas Marquestaut 82 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Les pics d’extinction sont plus fins pour des structures exclusivement en or (cf Figure 2.16), ce qui corrobore l’hypothèse que la couche d’accroche de titane vient à élargir la bande de résonance plasmon de surface. Les pics d’extinction sont compris dans la gamme spectrale 695-735 nm et 620-670 nm pour les motifs SERS de 60 nm et 80 nm d’épaisseur d’or, respectivement. Ces deux échantillons montrent un décalage en fréquence très régulier. A taille de structure et type de matériau strictement identiques, l’épaisseur croissante de métal des substrats SERS décale la bande vers les longueurs d’onde dans le bleu. La fréquence de résonance des plasmons de surface peut ainsi être décalée en augmentant l’épaisseur métallique. A la suite de cela, des structures de plus grands dimensions avec des triangles de côté 300 nm (au lieu de 205 nm précédemment) et 60 nm d’épaisseur d’or ont été fabriquées. Les écarts de 80 nm entre les assemblements de nœuds papillons restent strictement identiques. Les spectres d’extinction Visible-Proche IR sont reportés en Figure 2.17. Figure 2.17 : Spectres d’extinction plasmon de 16 motifs triangulaires de Fischer d’expositions croissantes de taille nominale 300 nm de côté. Les triangles sont espacés les uns des autres de 80 nm. L’épaisseur d’or est 60 nm. Les pics d’extinction les plus intenses sont compris entre 950 et 1010 nm. Les longueurs d’onde de résonance de ces pics sont très nettement décalées vers le proche infrarouge par rapport aux structures précédentes de plus petite taille. Un décalage du pic principal d’environ 250 nm vers l’infrarouge est observé pour une augmentation de taille de triangles de 300 nm de côté. Un pic à plus haute énergie vers les 600 nm apparaît également et, est attribué à une Nicolas Marquestaut 83 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS résonance du second ordre des plasmons localisés. Ce pic est vraisemblablement présent lors des expériences précédentes mais ne peut être observé car se situant dans l’ultraviolet. Une monocouche du chromophore azobenzène est greffée une fois les substrats SERS caractérisés par extinction Visible-Proche IR. Par souci de clarté seuls figurent ici les spectres Raman acquis pour les plateformes SERS de taille de triangles de 205 nm et 300 nm de côté et de 60 nm d’épaisseur d’or (Figure 2.18ab). Pour tous les substrats SERS, les spectres Raman sont acquis avec une raie excitatrice à 647 nm et une puissance laser à l’échantillon de 1.8 mW pendant 5 s. Un objectif de grossissement 100X à air d’ouverture numérique 0.9 est utilisé, le trou confocal et la fente d’entrée sont ouverts à 400 et 100 µm, respectivement. Figure 2.18 : Spectres Raman relatifs des motifs de Fischer avec des triangles de côté (a) 205 nm et (b) 300 nm. L’épaisseur d’or est 60 nm Nicolas Marquestaut 84 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Pour une raie excitatrice à 647 nm, les structures triangulaires de 205 nm de côté ayant un pic maximal d’extinction proche de la raie excitatrice aux alentours de 700 nm donnent un signal Raman nettement plus intense (3000 coups Raman en 5 s d’acquisition, Figure 2.18a) que celles de 300 nm de côté avec une résonance éloignée de la ligne laser aux alentours de 1 µm (150 coups en 5s, Figure 2.18b). L’efficacité SERS est meilleure lorsque la bande plasmon du réseau de nano-triangles est proche de la ligne excitatrice laser. Concernant les motifs triangulaires de 205 nm de côté, la bande plasmon du motif le moins exposé de plus petite taille (λ = 710 nm) est la plus proche de l’excitation laser utilisée (λ = 647 nm). Les surexpositions croissantes des motifs décalent les bandes plasmons vers l’infrarouge, et les intensités des spectres Raman relatifs de l’azobenzène diminuent malgré le nombre croissant de molécules sondées. Les spectres SERS sont enregistrés avec un objectif de grossissement 100X d’ouverture numérique 0.9. Le diamètre minimal du faisceau focalisé sur la surface est estimé par (1.22 x 0.647)/0.9 = 0.877 µm2. La surface minimale Smin sondée par le spot laser est dans ces conditions, égale à 0.603 µm2. A partir du tableau 2.III, on peut calculer NSERS le nombre de molécules SERS d’intérêt, en considérant qu’une molécule d’azobenzène occupe une surface de 0.3 nm2 (voir section 2.6.2). NSERS est égal à (0.603 x 0.092)/3.10-7 et (0.603 x 0.287)/3.10-7 molécules, respectivement. Dans le rapport des intensités Raman en solution et adsorbées sur le substrat SERS, il nous faut prendre en compte les variations des paramètres expérimentaux. Les puissances laser, les temps d’acquisition et les intensités Raman des bandes les plus intenses à 1140 cm-1 de l’azobenzène sont pris en compte dans la comparaison des deux expériences. Nbulk est repris du calcul CER pour les motifs de Fischer précédents, i.e., 9.81 x 107 molécules. ISERS est égal à 2600 et 1600 coups et le CER à 1.33 x 106 et 2.65 x 105 pour les motifs les moins exposés et les plus exposés, respectivement. Ce calcul confirme nos affirmations précédentes. La différence des efficacités SERS est d’environ un ordre de grandeur pour la raie 1140 cm-1 de l’azobenzène, un décalage des deux motifs d’environ 40 nm et une raie laser à 647 nm. Calculons de la même manière les efficacités SERS des motifs de plus petite et de plus grande taille des structures triangulaires de 300 nm de côté, dont les spectres vibrationnels sont montrés en Figure 2.18b. Dans ce cas, NSERS, ISERS, le CER sont égaux à (0.603 x 0.18)/3.10-7 et (0.603 x 0.71)/3.10-7 molécules, 20 et 150 coups, 3.46 x 102 et 4.48 x 102 pour la structure la moins exposée et la plus exposée, respectivement. Les CERs de ces structures dont les bandes plasmons principales sont situées dans le proche IR sont de 3 à 4 ordres de grandeur Nicolas Marquestaut 85 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS inférieurs à ceux calculés précédemment en considérant la même bande intense de l’azobenzène et la même ligne laser. Pour ce lot d’échantillon de triangles de 300 nm de côté, les efficacités SERS sont semblables. Les structures de plus petite taille dont les bandes plasmons principales sont les plus proches de la raie laser ont une efficacité SERS nettement supérieures à celles de plus grande taille dont la bande plasmon est plus éloignée de la raie laser. Des structures avec des tailles de triangles plus grandes, i.e. 400 nm de côté ont été fabriquées. Les caractérisations des signaux d’extinction et de diffusion Raman obtenus ne font que confirmer les affirmations précédentes. Les bandes plasmons sont décalées dans l’infrarouge et le signal Raman acquis dans les mêmes conditions que précédemment est très faible malgré l’augmentation notoire du nombre de molécules greffées. 2.7.2 Réseau de lignes Des réseaux de lignes hachurées dont l’espacement dans les deux directions et l’épaisseur des lignes sont contrôlés, ont été fabriqués par lithographie électronique. Les travaux précédents de l’institut Charles Delaunay (Laboratoire de nanotechnologie et d’instrumentation optique de Troyes, FRE 2848) ont montré de forts effets d’exaltation ainsi que des effets de polarisation du fait de la forte anisotropie de ces réseaux de lignes. Nous avons reproduits de telles structures afin d’étudier leur réponse lorsque des molécules azobenzène sont adsorbées à leur surface. 2.7.2.1 Spectres d’extinction L’accord entre la raie laser et la fréquence plasmon a clairement été démontrée pour les motifs de Fischer, dans le paragraphe précédent. Il est maintenant intéressant d’étudier le comportement d’autres types de structures géométriques. C’est pourquoi des réseaux de lignes métalliques de taille nanométrique ont été fabriquées afin d’obtenir une amplification Raman via une fréquence de résonance plasmon de surface localisée. Nicolas Marquestaut 86 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.19 : (a) Spectres d’extinction de nano-bâtonnets d’or sur verre. La position des ordres des résonances plasmon est dépendante de la longueur des lignes. (b) Position des résonances plasmon en fonction de la longueur des nano-bâtonnets ou du facteur de forme. De tels substrats ont déjà été fabriqués par Billot et al. et Grand et al. à Troyes47, 48 et représentent de bonnes plateformes de référence pour comparer l’efficacité SERS de nos substrats. Brièvement, les travaux de Thèse de L.Billot sur les nano-bâtonnets reportent les observations suivantes et sont résumés en Figure 2.19: • Les modes plasmons d’ordre 1 (dipolaire) et d’ordres supérieurs sont observés. Cette observation implique que les modes d’ordres supérieurs sont actifs en Raman SERS lorsque la longueur d’onde plasmon est proche de la longueur d’onde Raman (décalage Raman) λps∼λRaman. • L’exaltation du champ électromagnétique est maximale à l’extrémité des bâtonnets. • Les bâtonnets les plus longs ont une meilleure efficacité SERS que les plus courts. Les réseaux de lignes bi-dimensionnelles lithographiées sont dépendants de l’orientation et/ou de la polarisation du faisceau. Des lignes de longueurs variables ont été fabriquées : 900, 670, 316 et 125 nm. Toutes les lignes ont une largeur de 60 nm et sont séparées horizontalement et verticalement de 150 nm. Nicolas Marquestaut 87 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.20 : Image de microscopie électronique à balayage de réseaux de lignes d’or de (a) 900 nm (b) 670 nm (c) 316 nm et (d) 125 nm de longueur. Les lignes ont une largeur de 60 nm et sont espacées de 150 nm horizontalement et verticalement. L’épaisseur d’or est fixée à 60 nm. Les spectres plasmons de réseaux de lignes de 900, 670, 316 et 125 nm fabriqués par lithographie à faisceau d’électrons (Figure 2.20) sont représentés en Figure 2.21a-b. L’épaisseur d’or pour ces échantillons est gardée constante à 60 nm. La polarisation incidente est linéaire selon les directions H ou V comme montré en Figure 2.21b. Nicolas Marquestaut 88 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.21 : (a) Spectres d’extinction plasmon multipolaires pour des réseaux de lignes d’or d’épaisseur constante 60 nm, 60 nm de largeur, espacées les unes des autres de 150 nm en X et Y et de longueurs 900, 670 et 316 nm. La lumière blanche est polarisée selon l’axe long des lignes (polarisation H) (b) Spectres d’extinction polarisés selon l’axe court et l’axe long de quasi-ellipsoïdes de 125 nm de longueur et 60 nm de largeur. Les spectres d’extinction en Figure 2.21a présentent plusieurs modes de résonance plasmons contrairement aux spectres Visible-Proche IR présentés pour les motifs de Fischer. Ces modes de résonance multiples ont été mis en évidence pour la première fois par Schider et co-auteurs qui l’ont assigné à des résonances plasmon multipolaires49-52. Peu après, Laurent et co-auteurs ont montré l’existence d’excitations multipolaires en SERS sur le bleu de méthylène53. Comme reporté par Schider et al., les positions des ordres multipolaires se décalent vers les longueurs d’ondes supérieures lorsque la longueur des fils augmente49, Nicolas Marquestaut 89 54 . Les lignes de Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS longueur 900, 670, 316 et 125 nm montrent une résonance plasmon de surface localisée proche de la raie excitatrice à 647 nm pour les ordres septième, cinquième, troisième et dipolaire (ordre 1) respectivement. Laurent et al. ont également montré que seuls les modes d’ordre impair pouvaient être excités en incidence normale alors que les modes d’ordre pair pouvaient être excités de manière résonante en inclinant l’échantillon d’un certain angle54. Les spectres plasmons acquis pour des lignes de 125 nm de longueur dénotent une particularité par rapport aux spectres précédents. Le ratio longueur/largeur s’approchant de l’unité (125 nm de longueur pour une largeur de 60 nm), les lignes peuvent être assimilées à des ellipsoïdes comme reporté par Grand et al.48 Le comportement des oscillations des électrons de surface du réseau de nano-plots se trouve modifié par rapport aux échantillons précédents. La bande principale correspond à la polarisation longitudinale selon l’axe long des lignes et la bande de plus faible intensité à la polarisation transverse selon l’axe court des lignes48 (Figure 2.21b). 2.7.2.2 Calcul du coefficient d’exaltation Raman Après caractérisation Visible-Proche IR, les réseaux de lignes en or sont fonctionnalisés en les immergeant dans une solution d’azobenzène disulfide à 10-4 M puis lavés selon le même protocole suivi en Section 2.4. Les paramètres expérimentaux sont strictement identiques à ceux utilisés lors de la caractérisation des motifs de Fischer. La raie laser excitatrice est celle du Kr à 647 nm et une puissance de 1.8 mW est mesurée à l’échantillon. La polarisation du laser est parallèle à l’axe long des nanofils de la même façon que lors de la caractérisation plasmons. Les spectres Raman pour des réseaux de lignes de 900, 670 et 360 et 125 nm de longueur sont représentés en Figure 2.22. Nicolas Marquestaut 90 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.22 : Spectres Raman relatifs des réseaux de lignes de (a) 900nm, (b) 670 nm, (c) 316 nm et (d) 125 nm de longueur. La dépolarisation du laser focalisé sur les lignes est faible55, 56. La diminution de la longueur des lignes se répercute en une nette diminution des signaux de diffusion Raman relatifs comme représenté en Figure 2.22. Afin de comparer les efficacités des 4 plateformes SERS précédentes, il nous faut calculer le coefficient d’exaltation Raman. Pour ce faire, considérons un réseau de lignes de 900 nm de longueur et de 60 nm de largeur espacés les unes des autres de 150 nm dans le plan XY (Figure 2.23). Figure 2.23 : Représentation schématique des substrats SERS de lignes d’or. La surface d’or totale sur laquelle sont greffées les molécules d’azobenzène est donnée par la relation: STotale Au = Nicolas Marquestaut S min S Au +Verre 91 ⋅ S Au (2.5) Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS où SAu correspond à la surface d’or d’une ligne et SAu+Verre à la surface d’une ligne d’or plus un espacement inter-lignes en largeur et en longueur. L’intensité maximale du pic Raman le plus intense à 1140 cm-1 est 4500, 800, 170 et 50 coups en 5 s d’acquisition pour les réseaux de lignes de 900, 670, 360 et 125 nm, respectivement. En reprenant la méthode de calcul détaillée précédemment, le coefficient d’exaltation Raman obtenu est égal à 4.05 x 105, 7.4 x 104 et 1.7 x 104 et 1.7 x 103 pour les réseaux de lignes de 900, 670, 316 et 125 nm de longueur, respectivement. Les lignes les plus longues exhibent le plus fort signal SERS, ce qui proviendrait d’un ordre multipolaire supérieur47 à ceux des lignes plus courtes, situé à proximité de la raie excitatrice. De plus, étant donné le fort rapport longueur sur largeur de ces lignes, un effet électrostatique peut exister au sommet des fils, propres aux sondes champ proche dont nous parlerons plus longuement dans les chapitres suivants. Egalement, un effet d’antenne électromagnétique est surement à l’origine pour des longueurs spécifiques de lignes57. Ces résultats sont en accord avec le groupe de Royer et co-auteurs47 qui observent également le maximum d’amplification pour les lignes de longueur 900 et 670 nm. Le CER décroit de pair avec la diminution de la longueur des lignes. Une amplification maximale est obtenue pour des fils de 900 nm de longueur avec un rapport longueur/largeur important de 15. 2.7.2.3 Effet de l’espacement inter-linéaire sur les plasmons de surface et l’efficacité SERS Les échantillons démontrant la plus forte efficacité SERS (L = 900 nm) ont été reproduits mais les gaps ont été modifiés afin d’analyser l’incidence de ce facteur sur le comportement plasmonique et le signal Raman de ces substrats SERS. Les spectres plasmons des réseaux de lignes de 900 nm avec des gaps horizontaux et verticaux de 150, 250 et 350 nm sont présentés en Figure 2.24 (a-c). De plus, pour chaque lot d’échantillons, les gaps ont été légèrement modifiés par surexposition du faisceau d’électrons. Nicolas Marquestaut 92 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.24 : Spectres d’extinction plasmon pour des lignes de 900 nm de longueur dont les gaps varient de (a) 150 nm, (b) 250 nm et (c) 350 nm. Les modes plasmons du septième ordre aux longueurs d’onde 660, 680 et 700 nm correspondent à des réseaux de lignes de 900 nm avec des gaps de 150, 250 et 350, respectivement (Figure 2.24a-c). Les modes multipolaires se décalent de la raie laser à 632 nm vers les longueurs d’onde supérieures lorsque le gap s’agrandit. Pour un même lot d’échantillons, par surexpositions successives, les bandes plasmons se décalent faiblement vers les longueurs d’onde supérieures. Les échantillons ont été fonctionnalisés à l’aide d’une monocouche d’azobenzène. Les spectres Raman enregistrés pour les échantillons de réseaux de lignes de 900 nm de longueur avec des gaps de 150 nm et 250 nm sont présentés dans les Figures 2.25a-b ci-dessous. Nicolas Marquestaut 93 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Figure 2.25 : Spectres Raman polarisés longitudinalement enregistrés pour les réseaux de lignes de 900 nm d’espacement (a) 150 nm et (b) 250 nm. Les spectres sont moyennés pour une raie laser à 632 nm (He-Ne) avec une puissance de 1 mW à l’échantillon sur une zone de 10 x 10 µm2 durant 120 s à l’aide d’un système de balayage laser (DuoScan, Horiba-Jobin-Yvon). Le signal Raman relatif le plus intense de la bande à 1140 cm-1 est environ égal à 1000 et 200 coups pour les échantillons de gap 150 et 250 nm, respectivement. Aucune bande de l’azobenzène n’est observée dans les mêmes conditions pour l’échantillon avec des lignes espacées de 350 nm. Il faudrait pour cela augmenter considérablement le temps d’exposition. Le signal diminue donc de pair avec l’élargissement du gap inter-lignes. L’éloignement de la bande plasmon du 7ieme ordre de la raie excitatrice explique probablement ce phénomène. De plus, pour chaque série d’échantillons, les spectres Raman relatifs diminuent de pair avec les surexpositions (cf Figure 2.25 a et b). Le faible décalage des bandes plasmons correspondantes vers les longueurs d’ondes supérieures peut en partie expliquer ce phénomène. L’explication est surement plus complexe, il faudrait en toute rigueur prendre en compte les effets électromagnétiques statiques et dynamiques propres à ces lignes d’or qui peuvent être considérées comme des antennes métalliques. Des calculs de simulation du champ électromagnétique autour de telles structures sont actuellement menés par le groupe de F. Lagugné–Labarthet afin de mieux appréhender l’interaction entre le champ incident et les géométries des structures. De tels travaux seront complémentaires des études expérimentales présentées dans ce chapitre. Conclusion du Chapitre II Nicolas Marquestaut 94 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Deux types de réseaux métalliques de taille nanométrique ont principalement été étudiés, l’un composé de triangles en forme d’étoiles (motifs de Fischer) et l’autre composé de lignes parallèles. Les motifs de Fischer ont été préparés à l’aide de deux techniques différentes afin de proposer un comparatif. La première méthode repose sur l’utilisation d’un masque réalisé par la technique de Langmuir. Des plateformes SERS de bonne qualité et de grandes dimensions sont obtenues à moindre coût. La seconde méthode par lithographie à faisceau d’électrons, nous a permis de fabriquer des surfaces de petite dimension exemptes de défauts. Après étude plasmonique, les coefficients d’exaltation Raman (CERs) sont calculés puis comparés pour la première fois. Des facteurs d’amplifications équivalents de l’ordre de ∼104 à 105 sont obtenus sur des monocouches adsorbées a la surface de ces plateformes SERS démontrant la viabilité des deux méthodes. La conception des plateformes SERS doit prendre en compte le type d’échantillons ainsi que la raie laser excitatrice utilisée et peut certainement être affiné à priori avec des méthodes de calculs du champ EM et expérimentalement en jouant sur les paramètres de fabrication. En seconde partie de notre étude SERS, d’autres types de plateformes sont fabriquées afin de mieux appréhender l’oscillation collective du nuage d’électrons dans les réseaux métalliques. La lithographie à faisceau d’électrons laissant libre cours à l’imagination, il est possible de fabriquer des réseaux de lignes métalliques nanométriques. Les réponses plasmons et les efficacités SERS de ces structures sont mises en relation avec des motifs de Fischer. Un facteur d’amplification du signal Raman de 106 est obtenu dans le meilleur des cas pour les motifs de Fischer alors qu’une exaltation de 105 est atteinte pour des réseaux de lignes de 900 nm de longueur espacées de 150 nm. Au delà des résultats présentés dans ce manuscript, d’autres motifs ont été conçus pour générer de plus forts effets d’exaltation. La conception de nouvelles structures couplées à de futurs travaux expérimentaux et simulations numériques affineront le modèle du comportement des électrons pour des réseaux de tailles et de géométries différentes. L’étude approfondie des relations entre le comportement des électrons du métal et le signal SERS engendré par les molécules en surface permettra de proposer des structures plasmoniques adaptables en fréquence de résonance plasmon. A terme, de telles nanostructures pourront être insérées dans des canaux microfluidiques afin d’amplifier localement le signal Raman de reactions en milieu confiné. En outre, de telles plateformes pourront être lithographiées au sommet de fibres transparentes nanoscopiques à l’instar des travaux de Smythe et al.58 afin d’amplifier la détection du signal Raman de solutions très diluées ou de cellules vivantes en milieu in-situ. De tels travaux sont en cours au sein de notre groupe de recherche. Nicolas Marquestaut 95 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Références Bibliographiques (1) Jeanmaire, D. L.; Van Duyne, R. P., J. Electroanal. Chem. 1977, 84, 1. (2) Park, H. K.; Yoon, J. K.; Kim, K., Langmuir 2006, 22, 1626. (3) Merlen, A.; Gadenne, V.; Romann, J.; Chevallier, V.; Patrone, L.; Valmalette, J. C., Nanotechnology 2009, 20, 215705. (4) Dieringer, J. A.; McFarland, A. D.; Shah, N. C.; Stuart, D. A.; Whitney, A. V.; Yonzon, C. R.; Young, M. A.; Zhang, X.; Duyne, R. P. V., Faraday Discuss. 2006, 132, 9. (5) Hulteen, J. C.; Duyne, R. P. V., J. Vac. Sci. Technol. A 1994, 13, (3), 1553. (6) Bartlett, P. N.; Baumberg, J. J.; Coyle, S.; Abdelsalam, M., Faraday Discuss. 2003, 125, 19. (7) Baumberg, J. J.; Kelf, T. A.; Sugawara, Y.; Cintra, S.; Abdelsalam, M. E.; Bartlett, P. N.; Russell, A., Nano Lett. 2005, 5, 2262. (8) Guieu, V.; Lagugné-Labarthet, F.; Servant, L.; Talaga, D.; Sojic, N., Small 2008, 4, 96. (9) White, D. J.; Mazzoloni, A. P.; Stoddart, P. R., J. Raman Spectrosc. 2007, 38, 377. (10) Cui, B.; Clime, L.; Li, K.; Veres, T., Nanotechnology 2008, 19, 145302/1. (11) Félidj, N.; Grand, J.; Laurent, G.; Aubard, J.; Lévi, G.; Hohenau, A.; Galler, N.; Aussenegg, F. R.; Krenn, J. R., J. Chem. Phys. 2008, 128, 094702. (12) Li, K.; Clime, L.; Cui, B.; Veres, T., Nanotechnology 2008, 19, 145305/1. (13) Lu, Y.; Liu, G. L.; Lee, L. P., Nano Lett. 2005, 5, 5. (14) Massé, P.; Reculusa, S.; Ravaine, S., Colloids Surface 2006, A, (284-285), 229. (15) Reculusa, S.; Ravaine, S., Chem. Mater. 2003, 15, 598. (16) Reculusa, S.; Ravaine, S., Appl. Surf. Sci. 2005, 246, 409. (17) Fischer, U. C.; Zingsheim, H. P., J. Vac. Sci. Technol. 1981, 19, 881. (18) Ye, Q.; Fang, J.; Sun, L., J. Phys. Chem. B 1997, 101, 8221. (19) Yu, H.-Z.; Zhang, J.; Zhang, H.-L.; Liu, Z.-F., Langmuir 1999, 15, (15), 16. (20) Delaire, J.; Nakatani, K., Chem. Rev. 2000, 100, (5), 1817. (21) Natansohn, A.; Rochon, P., Chem. Rev. 2002, 102, (11), 4139. (22) Buchel, M.; Sekkat, Z.; Paul, S.; Weichart, B.; Menzel, H.; Knoll, W., Langmuir 1995, 11, 4460. (23) Shishido, A.; Tsutsumi, O.; Kanazawa, A.; Shiono, T.; Ikeda, T.; Tamai, N., J. Am. Chem. Soc. 1997, 119, 7791. (24) Yokoyama, S.; Yamada, T.; Kajikawa, K.; Kakimoto, M.-A.; Imai, Y.; Takezoe, H.; Fukuda, A., Langmuir 1994, 10, 4599. (25) Yu, H.; Asaoka, S.; Shishido, A.; Iyoda, T.; Ikeda, T., Small 2007, 3, 768. (26) Hugel, T.; Holland, N. B.; Cattani, A.; Moroder, L.; Seitz, M.; Gaub, H. E., Science 2002, 296, 1103. (27) Buffeteau, T.; Natansohn, A.; Rochon, P.; Pézolet, M., Macromolecules 1996, 29, 8783. (28) Lee, Y.-L.; Du, Z.-C.; Lin, W. X.; Yang, Y.-M., J. Colloid Interface Sci. 2006, 296, 233. (29) Binks, B. P., Curr. Opin. Colloid Interface Sci. 2002, 7, 21. (30) Horvolgyi, Z.; Németh, S.; Fendler, J. H., Langmuir 1996, 12, 997. (31) Haynes, C. L.; McFarland, A. D.; Van Duyne, R. P., Anal. Chem. 2005, A, 338. (32) Jensen, T. R.; Malinsky, M. D.; Haynes, C. L.; Van Duyne, R. P., J. Phys. Chem. B 2000, 104, 10549. (33) Ye, Y.; LeBlanc, F.; Haché, A.; Truong, V., Appl. Phys. Lett. 2001, 78, (1), 52. (34) Ma, W.; Hesse, D.; Gösele, U., Small 2005, 1, (8-9), 837. Nicolas Marquestaut 96 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS (35) Ormonde, A.; Hicks, E. C. M.; Castillon, J.; Van Duyne, R. P., Langmuir 2004, 20, 6927. (36) Rau, H., In Photochemistry and Photophysics, Rabek, J. F., Ed. CRC Press: Boca Raton, FL., 1990; Vol. 2, pp 119. (37) Buffeteau, T.; Lagugné-Labarthet, F.; Pézolet, M.; Sourisseau, c., Macromolecules 2001, 34, 7514. (38) Haynes, C. L.; Duyne, R. P. V., J. Phys. Chem. B 2003, 107, 7426 (39) Félidj, N.; Aubard, J.; Lévi, G.; Krenn, J. R.; Hohenau, A.; Schider, G.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R., Appl. Phys. Lett. 2003, 82, 3095 (40) Schatz, G. C.; Young, M. A.; Van Duyne, R. P., Electromagnetic Mechanisms of SERS. In Surface-Enhanced Raman Scattering, Kneipp, K.; Moskovits, M.; Kneipp, H., Eds. Springer-Verlag Berlin: Berlin Heidelberg, 2006; Vol. 103, pp 19. (41) Ru, E. C. L.; Blackie, E.; Meyer, M.; Etchegoin, P. G., J. Phys. Chem. C 2007, 111, 13794. (42) Engelking, J.; Witteman, M.; Rehahn, M.; Menzel, H., Langmuir 2000, 16, 3407. (43) Love, J.; Estroff, L. A.; Kriebel, J. K.; Nuzzo, R. G.; Whitesides, G. M., Chem. Rev. 2005, 105, 1103 (44) Hampy, R. E.; Yost, F. G.; Ganyard, F. P., J. Vac. Sci. Technol. 1979, 16, 25. (45) George, M. A.; Glaunsinger, W. S.; Thundat, T.; Lindsay, S. M., Thin Solid Films 1990, 189, 59. (46) Masahiro, K.; Noboru, S. J., J. Mater. Sci. 1993, 28, 5088. (47) Billot, L.; Lamy de la Chapelle, M.; Grimault, A. S.; Vial, A.; Barchiesi, D.; Bigeon, J. L.; Adam, P. M.; Royer, P., Chem. Phys. Lett. 2006, 422, 303. (48) Grand, J.; Lamy de la Chapelle, M.; Bigeon, J. L.; Adam, P. M.; Vial, A.; Royer, P., Phys. Rev. B 2005, 72, 033407. (49) Schider, G.; Krenn, J. R.; Hohenau, A.; Ditlbacher, H.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R.; Schaich, W. L.; Puscasu, I.; Monacelli, B.; Boreman, G., Phys. Rev. B 2003, 68, 155427. (50) Krenn, J. R.; Schider, G.; Rechberger, W.; Lamprecht, B.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R.; Weber, J. C., Appl. Phys. Lett. 2000, 77, 3379. (51) Schaich, W. L.; Schider, G.; Krenn, J.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R.; Puscasu, I.; Monacelli, B.; Boreman, G., Appl. Opt. 2003, 42, 1. (52) Schider, G.; Krenn, J. R.; Gotschy, W.; Lamprecht, B.; Ditlbacher, H.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R., J. Appl. Phys. 2001, 90, 3825. (53) Laurent, G.; Félidj, N.; Aubard, J.; Levi, G.; Krenn, J. R.; Hohenau, A.; Schider, G.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R., Phys. Rev. B 2005, 71, (4), 45430. (54) Laurent, G.; Félidj, N.; Aubard, J.; Lévi, G.; Krenn, J. R.; Hohenau, A.; Schider, G.; Leitner, A.; Aussenegg, F. R., J. Chem. Phys. 2005, 122, 011102. (55) Débarre, A.; Jaffiol, R.; Julien, C.; Nutarelli, D.; Richard, A.; Tchénio, P.; Chaput, F.; Boilot, J. P., Eur. Phys. J. D 2004, 28, 67. (56) Novotny, L.; Sanchez, E. J.; Xie, X. S., Ultramicroscopy 1998, 71, 21. (57) Martin, Y. C.; Hamann, H. F.; Wickramasinghe, H. K., J. Appl. Phys. 2001, 89, 5774. (58) Smythe, E. J.; Dickey, M. D.; Bao, J.; Whitesides, G. M.; Capasso, F., Nano Lett. 2009, 9, 1132. Nicolas Marquestaut 97 Institut Sciences Moléculaires Chapitre II : Résultats expérimentaux SERS Nicolas Marquestaut 98 Institut Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Chapitre III La microscopie Raman Champ Proche Nicolas Marquestaut 99 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Nicolas Marquestaut 100 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche 1 Introduction Cette dernière décennie a vu l'émergence d'un domaine scientifique nouveau : les "nanosciences" ou "nanotechnologies". Bien que soient souvent mises en avant les applications potentielles de ces nano-objets, comme éléments essentiels de futurs superordinateurs, de récepteurs chimiques capables de détecter et de piéger les polluants de l'air ou de l'eau, comme vecteurs de principes actifs,..., le monde des nanosciences n’en n’est pourtant qu’à ses premiers balbutiements. Un nanomètre (nm) représente un milliardième de mètre (10-9 m), soit environ 10 atomes placés côte à côte. Par définition, un édifice nanostructuré doit avoir au moins l'une de ses dimensions de l'ordre de quelques nanomètres. De tels objets nanométriques ont des fonctions variées et se déclinent sous des formes différentes : • Les nanotubes et la famille des fullerènes forment des cylindres et des sphères composés d'atomes de carbone organisés. Ces édifices présentent des propriétés électroniques, thermiques et mécaniques exceptionnelles et leur utilisation comme nano-transistor est démontrée. • Les nanocristaux, amas d'atomes organisés plus volumineux qu’une molécule isolée mais plus petits qu’un matériau massique, ont démontré leur potentiel comme marqueurs biologiques, catalyseurs, nano-lasers ou guides de lumière. • La chimie des dendrimères permet un contrôle quasi-parfait de la structure et de la taille de macromolécules ayant une forme globulaire constituée d’éléments chimiques répétitifs et fonctionnalisables à souhait. Ces nano-matériaux organiques sont d’intérêt en particulier pour mimer des processus naturels comme en catalyse enzymatique, pour la conception de cellules photovoltaïques ou comme agents porteurs de principes actifs utilisables en médecine. • Les molécules biologiques, telles que la chaîne d’ADN ou les enzymes, forment également des nanostructures naturelles pouvant faire partie intégrante de nanomachines. Cette liste d'exemples n'est pas exhaustive et de nombreux laboratoires français et internationaux maîtrisent la conception et la synthèse de tels nano-objets. La caractérisation et manipulation de ces nano-édifices fait néanmoins appel à des techniques d’imagerie classiques, telles que la microscopie électronique en transmission et la microscopie à force Nicolas Marquestaut 101 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche atomique, qui sont vite limitées en particulier pour la caractérisation moléculaire de ces matériaux. Pourtant, la caractérisation moléculaire de ces nano-objets par des méthodes optiques et spectroscopiques offre un diagnostic allant au-delà d’une simple imagerie. Ceci est en particulier rendu possible grâce à deux éléments essentiels: les sources lumineuses et les techniques de microscopie optique. D'une part, les sources laser offrent une finesse spectrale exceptionnelle et leurs longueurs d'onde sont accordables du domaine visible jusqu’au domaine infrarouge. De plus, due à la possibilité des impulsions laser ultra-brèves (de l'ordre de la femtoseconde, soit 1015 s), ces sources offrent non seulement la possibilité de suivre des réactions photophysiques ou photochimiques ultra-rapides, mais également de sonder des processus optiques linéaires et non-linéaires. D'autre part, depuis son invention au XVIème siècle, le microscope optique n’a cessé d’évoluer dans la perspective d’observer et de caractériser des échantillons toujours plus petits avec une plus grande résolution spatiale et un meilleur contraste. L’émergence du microscope confocal a conduit en particulier à l’essor du couplage de la microscopie optique avec des mesures spectroscopiques tridimensionnelles. La microscopie confocale Raman, par exemple, permet l’identification spectrale d’un spécimen de moins d’un picogramme (10-12 g) avec une résolution spatiale proche de 250 nm ce qui correspond à la limite de diffraction en optique conventionnelle, i.e. (λ/2) où λ est la longueur d’onde considérée. Le couplage de ce même microscope pour des mesures optiques non-linéaires, telles que la fluorescence à deux photons ou la génération de troisième harmonique, offre une résolution encore meilleure, de l’ordre de 200 nm. Ceci est dû à la réduction du volume focal excité, phénomène inhérent aux processus optiques non-linéaires de deuxième et troisième ordres. En parallèle, la microscopie à force atomique (AFM), et plus particulièrement sa version optique, le microscope optique à balayage en champ proche ou NSOM (dont l’acronyme anglais vient de Near-Field Scanning Optical Microscopy) ont permis d’aller encore plus loin dans la caractérisation physique et chimique d’objets nanométriques. Le microscope en champ proche1, 2 « classique » est basé sur l’utilisation d’une fibre optique dont la pointe possède une ouverture limitée à environ 20-100 nm. Cette sonde a une double fonction: en premier lieu, elle balaie la surface de l’échantillon révélant sa topographie avec une résolution axiale de l'ordre de quelques nanomètres et une résolution latérale d'environ 20-100 nm. Ceci est rendu possible grâce à un scanner piézoélectrique, dont le déplacement est contrôlé avec une très grande précision. Simultanément au balayage de la surface, la Nicolas Marquestaut 102 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche pointe de la fibre optique collecte les photons émis ou diffusés par cet échantillon, révélant ainsi un contraste optique qui peut être corrélé à sa topographie. Toutefois cette approche n’est pas performante en microscopie Raman car le flux photonique de l’ouverture de la pointe est bien trop faible. Ainsi une approche basée sur une pointe métallique « sans ouverture » a été menée par de nombreux groupes afin de pouvoir exalter localement la diffusion Raman via cette pointe métallique. Au mode « sans ouverture » s’est donc substitué naturellement le mode « Tip Enhanced Raman Scattering » (TERS) ou « exaltation Raman par effet de pointe » afin d’accroitre le signal Raman confiné au bout de la pointe métallique. Lors des dix dernières années, les développements en microscopie optique en champ proche ont été résumés dans plusieurs ouvrages de référence3-10. 2 Microscopie Champ Proche 2.1 Limite de résolution d’un Microscope Optique Bien que régulières depuis ses débuts, les améliorations techniques réalisées en microscopie optique standard se heurtent à la limite de diffraction latérale définie par le critère de Rayleigh - Abbe11, 12 qui exprime la limite de résolution spatiale δ selon : δ = 0.61λ / ON (3.1) où λ est la longueur d’onde de la radiation, et ON = n ⋅ sin α l’ouverture numérique de l’objectif de microscope (typiquement entre 0.9 et 1.2 pour un grossissement 100X). Au point focal, le diamètre minimum du spot lumineux est de 2δ ce qui correspond à la distance entre les deux premiers minima de la distribution d’intensité. Le pouvoir séparateur de l’objectif (sa résolution spatiale donc) correspond à la distance lorsque le minimum d’un premier point correspond au maximum d’un second point focal adjacent (Figure 3.1). Cette distance est égale à δ et correspond à la résolution spatiale maximale accessible par un objectif donné. Ce critère théorique tient compte uniquement de l’ouverture numérique de l’objectif de microscope et de la longueur d’onde utilisée, qui est souvent surévalué car il ne tient pas compte de la fonction d’appareil (optiques optimisées pour un domaine spectral défini, réflexions multiples, alignement optique imparfait) qui tend à décroître la résolution spatiale associée à une mesure en microscopie optique. Généralement une limite de résolution de ∼λ/2 est évoquée dans la littérature, mais dans des conditions optimales (grande ouverture numérique, mode confocal), cette limite se rapproche de ∼λ/3. Nicolas Marquestaut 103 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Figure 3.1 : Tâches d’Airy de deux spots laser focalisés et distributions d’intensités correspondantes. 2.2 Ondes Evanescentes Pratiquement dans tout phénomène de diffraction, deux types d’ondes optiques sont mises en jeu. Les ondes propagatives (parfois appelées progressives), réfléchies, diffusées ou diffractées par l’objet qui sont observables en champ lointain et détectables avec un photodétecteur, sont porteuses des faibles fréquences spatiales de l’objet liées aux détails les plus grossiers (supérieurs à λ/2). Les ondes évanescentes sont confinées à la surface de l’objet et contiennent les hautes fréquences spatiales. Celles-ci ont une amplitude qui décroit exponentiellement en s’éloignant de l’échantillon. Elles ne sont donc pas directement observables en champ lointain. Ces ondes évanescentes confinées à la surface ( z ≤ λ ) 2π constituent le « Champ Proche Optique » (2-10 nm) comme représenté en Figure 3.2. La détection du champ proche optique repose sur le principe de réciprocité suivant : si une onde propagative peut se convertir en une onde évanescente confinée à la surface de l’objet, alors la réciproque est vraie et une onde évanescente peut aussi être convertie en onde propagative qui est dès lors détectable. Nicolas Marquestaut 104 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Cette « conversion » repose sur le principe de frustration : lorsqu’un objet de taille nanométrique (ou sub λ/2) vient perturber ou « frustrer » le champ proche optique dans la zone z ≤ λ , alors il y a conversion des ondes évanescentes en onde progressives. Le principe 2π de la microscopie optique en champ proche est ainsi énoncé : il s’agit donc d’induire une frustration du champ proche optique via l’interaction d’une pointe (fibre optique, pointe métallique) de dimensions nanométriques. La position de celle-ci doit être contrôlée précisément afin de sonder le champ proche confiné à la surface de l’échantillon. Expérimentalement le système de boucle de rétroaction combiné à des déplacements d’éléments piézoélectriques d’un microscope à force atomique est parfaitement adapté puisqu’il permet de maintenir une pointe de dimension nanométrique dans le champ proche. Il nous faut tout d’abord considérer le principe d’indétermination d’Heisenberg sous sa forme originale. Le produit des incertitudes de la position x et de la quantité de mouvement p d’une particule qui ne peut être plus petit qu’une fraction fixe de la constante de Planck s’exprime selon : ∆x ⋅ ∆p > h 2 (3.2) De plus, la relation d’indétermination d’Heisenberg transposée au couple position-vecteur d’onde s’écrit 13 : ∆x ≥ 2π ∆k x (3.3) En considérant que la quantité de mouvement p s’écrit en fonction du vecteur d’onde kx dans le plan parallèle à l’objet selon p = hk , et en tenant compte du principe d’Heisenberg sous sa forme ∆x ⋅ ∆p = 1.22h , il vient : ∆k = 4π ⋅ ON λ (3.4) D’où ∆x ≥ λ 2 ⋅ ON > λ 2 (3.5) Le critère de Rayleigh–Abbe ci-dessus démontre qu’il n’est pas possible de résoudre des objets dont la taille est inférieure à la demi-longueur d’onde du rayonnement utilisé pour l’observer. Nicolas Marquestaut 105 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Z Zone du champ lointain (basses fréquences spatiales) => Ondes progressives Z = λ/2π Zone du champ proche (hautes fréquences spatiales) => Ondes évanescentes Objet Figure 3.2 : Ondes évanescentes et ondes progressives à la surface d’un objet comportant des rugosités de taille inférieure à la longueur d’onde. En reprenant l’Equation (3.3), sachant que la composante kx est plus grande dans une onde évanescente qu’elle ne l’est dans une onde progressive, on entrevoit immédiatement une façon d’améliorer la résolution ∆x au-delà du critère de Rayleigh – Abbe. En effet, le raisonnement à propos des relations d’indétermination d’Heisenberg nous montre que les informations concernant les objets de dimensions inférieures à λ/2 sont nécessairement portées par des ondes évanescentes, autrement dit ∆x petit nécessite d’utiliser de grands ∆kx. Plus précisément, les informations concernant les plus fins détails de l’objet sont contenues dans les plus hautes fréquences spatiales de son spectre. On comprend à la fois pourquoi la microscopie classique voit sa résolution limitée : ne détectant que les ondes diffractées en champ lointain, c'est-à-dire à des grandes distances de l’objet, la microscopie classique ne peut capter que les ondes progressives qui ne transportent pas d’informations relatives aux structures inférieures à λ/2. On comprend aussi comment franchir la barrière de diffraction de Rayleigh : les informations concernant les objets sub-longueur d’onde restant confinées sur la surface de l’objet sans pouvoir se propager, on ne pourra les détecter qu’en allant les perturber de façon à les convertir en ondes progressives. L’amplitude d’une onde évanescente décroit de façon exponentielle lorsque l’on s’éloigne de l’objet. L’écriture de la composante kz d’une telle onde permet de déterminer la distance à laquelle le détecteur doit s’approcher : Nicolas Marquestaut 106 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche kz = ω2 c2 − k x2 = j k x2 − ω2 c2 (3.6) Avec ω la fréquence de l’onde et c la célérité de la lumière dans le vide ; kz est d’autant plus grand que kx est grand, l’amplitude des ondes associées à chaque fréquence « évanescente » décroit donc d’autant plus rapidement que kx est grand. Les informations concernant les détails les plus fins restent donc confinées le plus prés de la surface et la résolution pourra être d’autant plus grande que le détecteur pourra s’approcher plus prés de l’objet14, 15. On conçoit ainsi la difficulté de réaliser un microscope optique à champ proche. Les développements technologiques en microscopie à sondes locales (STM) ont cependant permis de telles réalisations. La résolution d’un microscope champ proche dépend de la distance sonde-objet mais également de la dimension de l’extrémité de la sonde. En reprenant l’Equation (3.4) il vient pour un rayon de courbure du sommet d’une sonde très inférieur à la longueur d’onde (d<<λ) : ∆k ≈ 4π ∆d (3.7) Plus cette sonde sera de petite dimension, plus son pouvoir de récupération d’ondes évanescentes de très grands vecteurs d’onde sera grand et plus la résolution pourra donc être importante. En microscopie champ proche, deux types de sondes sont à considérer : les sondes avec ouverture utilisées dans les microscopes SNOM (Scanning Near-Field Optical Microscope) et les sondes métalliques sans ouverture employées notamment en microscopie à force atomique et à effet tunnel (voir Figure 3.3). (a) (b) Figure 3.3 : Images de microscopie électronique à balayage haute résolution (a) d’une pointe SNOM avec ouverture16 et (b) d’une pointe AFM recouverte d’argent sans ouverture17 Nicolas Marquestaut 107 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche 2.3 Microscopie optique en champ proche avec ouverture En microscopie optique champ proche, on l’a vu, la résolution spatiale latérale δ ne dépend plus de la longueur d’onde λ mais d’une longueur caractéristique d qui correspond au diamètre de la sonde locale. La microscopie optique champ proche avec ouverture repose sur un flux confiné de photons entre une sonde locale et la surface de l’échantillon. La sonde est balayée au dessus de la surface, et pour des positions prédéfinies (X,Y) de celleci, un détecteur (PMT, CCD) acquiert la réponse optique. De cette manière, une image de contraste optique peut être obtenue. Le principe de la sonde locale avec ouverture peut être modélisée par une ouverture de taille sub-longueur d’onde dans un écran métallique parfaitement réfléchissant18 (voir Figure 3.4). Eclairage incident Z Champ Lointain Z = λ/2π d<<λ Champ Proche Y X Scan Ecran métallique r<< λ Objet ∆x Lentille collimation Champ Lointain ∆x « λ Plan Image (détecteur) Figure 3.4 : Principe de la microscopie optique avec ouverture. Un faisceau incident éclaire une ouverture sub-longueur d’onde placée dans le champ proche d’un objet (dizaine de nanomètres). Les ondes évanescentes transformées en ondes propagatives par la perturbation de la sonde, sont collectées en champ lointain dans une géométrie de transmission (montrée ici) ou de réflexion. Immédiatement derrière l’écran, le champ lumineux est spatialement confiné autour de cette ouverture de diamètre d. L’échantillon (diffuseur) interagit avec ce champ proche seulement s’il est situé à une distance r de l’ouverture. L’emploi d’une particule irradiée par un champ Nicolas Marquestaut 108 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche électromagnétique pour atteindre la localisation de la lumière en dessous de la longueur d’onde a été suggéré à l’origine par Synge lors d’une lettre à Einstein. L’idée n’a jamais été publiée dans sa forme originale de part le doute que l’exposition directe de l’échantillon à un champ radiatif éclipserait l’interaction locale entre la particule et l’échantillon. En 1928, Synge a publié un article dans lequel il propose l’utilisation d’une très petite ouverture dans un écran métallique pour obtenir une source de lumière en dessous de la longueur d’onde19. Cette hypothèse fut oubliée peu après sa découverte alors que les techniques de nanofabrication n’étaient pas encore inventées. Cependant, dans les décennies suivantes, l’idée a été réinventée plusieurs fois par Keefe20 en 1956 puis Ash et Nichols21 en 1972 qui ont évoqué la possibilité de franchir la « limite » de Rayleigh. Ils ont également proposé des dispositifs capables de collecter des informations sub-longueur d’onde. Ce n’est cependant qu’à partir du début des années 80 qu’ont été publiés les premiers résultats expérimentaux réalisés aux fréquences optiques par Pohl1 et Fischer22 en Europe, Massey23 Lewis2 et Betzig24 aux Etats-Unis, et plus particulièrement en France sous l’impulsion du groupe de Daniel Courjon25, 26 à Besançon. Figure 3.5: Principes de fonctionnement d'un microscope en champ proche. (a) Mode illumination, (b) mode collection en transmission, (c) en réflexion à incidence oblique ou (d) incidence normale. (e) Mode à effet tunnel où la pointe induit une fuite de photons lors de la réflexion totale. (f) Le mode "sans ouverture" est réalisé avec une pointe métallique: le champ électromagnétique exalté à l'interface pointe-échantillon est détecté en champ lointain Nicolas Marquestaut 109 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Les dispositifs de microscopie optique champ proche à balayage (SNOM) se présentent sous de nombreuses formes comme résumé en Figure 3.5. En mode « avec ouverture », une fibre optique, affinée puis métallisée, avec une ouverture de quelques dizaines de nanomètres, permet de sonder localement le champ proche de l’échantillon en mode « illumination » (Figure 3.5a) ou « collection »(Figure 3.5b-c).27 D’autres modes existent tels que le dispositif par réflexion pour lequel l’illumination et la collection sont effectuées en incidence normale (Figure 3.5d) ou le SNOM à effet tunnel (Figure 3.5e). Enfin, le mode « sans ouverture » utilisant une pointe métallique sera détaillé ultérieurement (Figure 3.5f). Pour les modes « avec ouverture », la fibre optique est animée d’une oscillation mécanique parallèlement à la surface, commandée par un diapason en quartz (cf Figure 3.6). Ces derniers sont réputés pour leur facteur de qualité mécanique très élevé ce qui les rend sensibles à des forces de cisaillement inférieures au pico-Newton, lorsqu’ils sont excités à leur fréquence de résonance (~ 100 kHz). Lorsque la pointe est localisée à quelques nanomètres de l’échantillon, les forces de Van der Waals vont modifier la fréquence et l’amplitude d’oscillation du diapason. Afin de maintenir une amplitude d’oscillation constante, donc une distance pointe échantillon constante, la hauteur de l’échantillon est ajustée suivant la cote Z. Ceci est rendu possible par l’intermédiaire d’une boucle de contre-réaction qui ajuste en permanence la tension de l’élément piézoélectrique, afin de maintenir une amplitude d’oscillation de la pointe invariante. Connaissant très précisément les variations mécaniques du piézoélectrique, on en déduit les variations topographiques suivant Z, puis celles suivant les directions X et Y du balayage latéral. Le signal optique détecté provient de la perturbation des ondes évanescentes confinées à l’extrémité de la pointe et se traduit par une variation d’intensité du champ propagatif, qui est collecté par un objectif en réflexion ou en transmission en champ lointain. Ce signal optique est ensuite analysé par un monochromateur offrant une grande résolution spatiale. Dans le cas de mesures Raman, les photons diffusés à des fréquences différentes de l’excitation sont dispersés par le monochromateur et la détection est assurée par un détecteur bi-dimensionnel de type CCD refroidi et amplifié, par exemple. Nicolas Marquestaut 110 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Figure 3.6 : Principe technique d’un microscope optique champ proche à balayage (SNOM) couplé à un spectrographe La spectroscopie vibrationnelle est tout à fait complémentaire de la microscopie champ proche. Les fibres optiques traditionnelles n’étant pas transparentes aux longueurs d’onde infrarouges (4-18 µm), la spectroscopie IR est toutefois écartée pour des mesures optiques champ proche, à moins de disposer de sources infrarouges lasers accordables. La spectroscopie Raman quant à elle, présente un avantage considérable, car elle met en jeu des longueurs d’onde visibles entre 400 et 750 nm, qui peuvent être facilement collectées par des fibres optiques. L’attrait majeur du couplage spectromètre Raman - Microscope Champ Proche est donc de gagner au moins un ordre de grandeur en résolution spatiale sur les techniques de microscopie confocale. Malheureusement, seulement une petite fraction de la lumière couplée dans la fibre est émise à travers l’ouverture du fait de la perte en propagation des modes des guides d’onde28. La sortie peut être augmentée de façon significative en utilisant des sondes avec des grands angles de cône. Cependant, une résolution de 50 nm ne peut être reproduite de manière fiable sans artefact, avec les techniques courantes avec ouverture. Nombreuses sont les limitations et contraintes de cette technique : la difficulté d’obtenir une couche non-rugueuse d’aluminium Nicolas Marquestaut 111 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche introduit la non-reproductibilité de la fabrication des sondes, les bouts plats des sondes avec ouverture ne sont pas adaptés pour l’imagerie topographique simultanée haute résolution, et l’absorption de la lumière dans le métal induit des échauffements significatifs qui posent problème pour des applications sensibles en température29. Ces points limitent l’impact de la technique « avec ouverture » pour les applications en nanoscience. Dans le cas d’un couplage spectromètre Raman – Microscope Champ Proche, il est important de rappeler quelques ordres de grandeur des différents effets Raman. En champ lointain, la diffusion Raman est atténuée par un facteur de puissance égal à 6 ou 9 comparativement au champ incident. En champ proche, la situation est encore pire car il faut aussi prendre en compte la faible section efficace de collection de la pointe qui varie en (d/λ)4 d’après BetheBouwkamp30, 31, où d est le diamètre de l’ouverture de la pointe. La conséquence de ce très faible taux de collection va alors impliquer des temps d’acquisition très longs, parfois de quelques heures, ce qui est très pénalisant, voire rédhibitoire, pour réaliser des cartographies résolues spatialement32. 2.4 Microscopie optique en champ proche sans ouverture Les sondes métalliques irradiées par un laser ont été introduites afin de surpasser les limitations des sondes avec ouverture et améliorer la résolution en microscopie optique en champ proche33-38. Deux régimes différents ont été établis : l’approche en diffusion locale et l’approche avec excitation locale. Dans l’approche par diffusion locale, une sonde telle qu’une pointe ou une particule est utilisée pour perturber localement le champ proche localisé à la surface de l’échantillon ; la réponse à cette perturbation est détectée en champ lointain. Les mesures en diffusion ont typiquement un bon rapport signal sur bruit, mais l’interprétation de l’information enregistrée est compliquée à causes des artéfacts topographiques39. Le problème est lié au fait que l’efficacité de diffusion dépend sensiblement de la séparation entre la sonde et l’échantillon, rendant la différentiation du vrai contraste optique (relié à la constante diélectrique locale) difficile. Néanmoins, différentes approches théoriques et expérimentales ont été développées pour découpler l’information topographique et optique, ce que nous verrons dans un paragraphe ultérieur. Nicolas Marquestaut 112 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Z Eclairage en réflexion Lentille collimation Montage 45° Champ Lointain Z = λ/2π d<<λ Champ Proche Y Scan X Objet Eclairage en transmission Conversion ondes évanescentes en champ propagatif R<< λ Lentille collimation Champ Lointain ∆x ∆x « λ Plan Image (détecteur) Figure 3.7: Principe de fonctionnement d’un microscope champ proche sans ouverture. La sonde sans ouverture (pointe métallique STM ou AFM) est positionnée dans le champ proche de l’objet d’intérêt. La pointe illuminée soit par réflexion, soit par transmission, frustre les ondes évanescentes qui sont détectées en champ lointain en tant qu’ondes progressives. De telles sondes « sans ouvertures », des pointes AFM ou STM la plupart du temps (voir Figure 3.7), peuvent aussi être utilisées comme une source de lumière locale. Cela est accompli sous des conditions de polarisation et d’excitation propres à travers l’utilisation de matériaux et de géométries de sonde appropriés40, 41 . Sous ces conditions, le champ à proximité du sommet de la pointe peut devenir fortement amplifié en plus du champ de la lumière du laser incident, établissant ainsi une source de lumière nanoscopique. De cette manière, au lieu d’utiliser une pointe pour diffuser localement le champ proche d’un échantillon, on peut alors utiliser cette pointe pour fournir une source d’excitation locale pour une réponse spectroscopique de l’échantillon. La pointe est positionnée quelques nanomètres au dessus de la surface de l’échantillon impliquant une forte interaction localisée entre le champ amplifié et l’échantillon. Cette approche permet des mesures simultanées spatiales submicroniques et spectrales, mais dépend de l’amplitude du facteur d’amplification du champ. L’approche d’excitation locale est communément appelée microscopie optique en champ proche exaltée par une pointe. En principe, les deux méthodes, excitation locale et diffusion locale, ne sont pas indépendantes. Une forte exaltation du champ est une condition Nicolas Marquestaut 113 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche nécessaire pour une diffusion efficace et vice versa. Pour des mesures Raman en Champ Proche, le mode « sans ouverture » est privilégié comme on le verra par la suite 2.4.1 Amplification du champ à proximité de pointes métalliques L’amplification du champ à proximité de nanostructures métalliques est un phénomène résultant de trois différentes contributions : (i) l’effet paratonnerre électrostatique (lightning rod effect) qui requiert une très petite dimension du sommet de la pointe et peut être observé pour des sondes pointues semi-infinies (ii) l’effet de résonance d’antennes propres aux pointes qui en leurs sommets modifient la radiation électromagnétique, (iii) l’effet de résonances plasmons de surface reflétant la forme et les propriétés diélectriques de la pointe. L’amplification du champ sur une pointe fine provient de l’effet « paratonnerre » décrit à l’origine par Benjamin Franklin en 1752 faisant référence au phénomène électrostatique pour lequel les charges électriques d’un conducteur métallique sont spatialement confinées par sa forme. Dans la vie courante, des paratonnerres métalliques sont habituellement utilisés pour protéger les bâtiments du pouvoir destructeur de la foudre. Bien que cet effet trouve ses origines dans l’électrostatique, un comportement similaire peut être observé pour une pointe de taille nanométrique irradiée par un laser. Les électrons libres d’un métal réagissent à une excitation électromagnétique par induction de charges surfaciques. Lorsque la surface présente une « proche singularité » tel qu’un sommet de pointe, la densité de charges surfaciques est augmentée de façon drastique dans cette région, menant à une amplification avec le champ incident et une très forte localisation. Pour des métaux ayant une conductivité et un rayon de courbure au sommet de la pointe finis, le champ peut y être très fortement amplifié. L’effet « paratonnerre » électrostatique dépend de la conductivité du matériau aux fréquences optiques, et augmente vers le domaine spectral infrarouge42. La fonction des pointes métalliques est similaire aux antennes électromagnétiques qui convertissent l’énergie localisée en radiation et vice versa. Dans cette zone confinée, le circuit électrique envoie ou reçoit le signal associé au champ électromagnétique. Du fait de cette analogie, les sondes métalliques pointues utilisées en optique champ proche sont également Nicolas Marquestaut 114 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche appelées antennes optiques. La difficulté dans la conception d’une antenne est de faire correspondre efficacement les impédances de la zone proche et de la zone éloignée de la source (ou receveur). En d’autres termes, l’antenne modifie localement la densité des états électromagnétiques, amplifiant ainsi les modes dans lesquels la source peut rayonner et réciproquement. Les conceptions d’antennes les plus efficaces mises en œuvre aux fréquences optiques sont l’antenne43 λ 2 (Figure 3.8) et l’antenne nœud papillon44-46. Dans le cas d’antennes λ 2 , les résonances d’antenne deviennent appropriées si la longueur de la structure métallique est en accord avec des multiples de la moitié de la longueur d’onde de la radiation comme représenté en Figure 3.8. En tenant compte des résonances électromagnétiques associées aux plasmons de surface, toute nanostructure métallique peut être vue comme une antenne optique. Bien entendu, l’efficacité dépend de la composition du matériau et de la géométrie de la nanostructure. Figure 3.8 : (a) Distribution du champ électrique résonant prés d’une antenne de 220 nm de longueur et 20 nm d’épaisseur d’or (λ = 1250 nm) (b) Spectre correspondant du signal électrique amplifié aux extrémités47. Bien que diverses études expérimentales utilisant des pointes semi-conductrices ou diélectriques aient démontré la capacité à accomplir des images à l’échelle nanométrique48-51, il est généralement accepté que le champ amplifié et l’efficacité de diffusion sont plus forts pour des pointes métalliques52, 53. Dépendante du type de métal et de sa géométrie54-57, la fréquence de résonance plasmon de surface localisée peut être fortement amplifiée par la force du champ électrique du rayonnement entrant. Des particules d’or ou d’argent peuvent être de différentes formes58-60; des particules sphériques d’or ont été attachées au bout de fibres et utilisées comme sondes optiques en champ proche61. Bien que les particules ellipsoïdales aient des propriétés supérieures, elles n’ont pas été utilisées à cause des difficultés pour les attacher dans une orientation préférée. En effet, les particules ellipsoïdales montre des résonances distinctes (cf Chapitre II) pour un champ amplifié aux pôles et une efficacité de Nicolas Marquestaut 115 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche diffusion maximisés62. Cependant, on peut espérer que ces défis techniques vont être surmontés prochainement, par exemple, en utilisant les forces de gradient électrostatiques générées par un potentiel appliqué entre la pointe et l’électrode. Les résonances d’antennes et plasmons montrent différentes dépendances à la longueur d’onde d’excitation avec des maxima prononcés qui peuvent être modifiés à travers la gamme spectrale visible. Par exemple, si la particule est excitée par une onde évanescente, la symétrie est brisée et la résonance se découple63. Le même résultat est obtenu lorsque la particule est placée dans un environnement inhomogène, prés de l’interface d’un métal par exemple. Généralement, une des résonances résultantes domine les propriétés optiques. Une longue particule ellipsoïdale pour laquelle seulement un pôle est irradié est l’équivalent d’une pointe. Les pointes métalliques sont communément utilisées comme sondes en microscopie optique champ proche. Elles sont faciles à fabriquer et à manipuler. Toutefois, du fait de la géométrie ouverte, on ne s’attend pas à une résonance plasmon de surface prononcée comme dans le cas d’une particule finie ellipsoïdale64. Figure 3.9 : Comparaison de la distribution de champ E2 à proximité d’une pointe et d’une particule en or irradiées par un mode laser HG (1,0) focalisé dans l’axe. Au sommet de la pointe, le champ du laser excitateur est polarisé selon l’axe de la pointe résultant en une polarisation longitudinale. Le champ résultant est amplifié prés du sommet. Les profils en bas de la figure représentent la distribution de champ sur une ligne transverse à 1 nm de la pointe et de la particule, respectivement. Cependant, la distribution de champ dans le cas de la pointe métallique a été échelonnée par un facteur 0,02. La concordance entre les distributions de champ indique que la pointe peut être modélisée par une particule avec une polarisabilité qui dépend du facteur d’amplification du champ65. Nicolas Marquestaut 116 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche La géométrie complexe d’une pointe oblige les théoriciens à utiliser des méthodes particulières pour analyser les distributions de champ résultantes d’une irradiation externe. Les Figures 3.9a et 3.10a montrent des calculs sur une pointe en or réalisés grâce à la méthode multiple multipôles (MMP)66, basée sur la résolution des équations de Maxwell. Dans ces exemples, deux différentes polarisations d’excitation sont considérées, transversale irradiée par mode laser Hermite–Gaussien (1,0) et longitudinale à l’axe de la pointe, respectivement. Pour la polarisation transversale, aucune amplification du champ n’est observée alors que pour la polarisation longitudinale l’amplification dépend fortement de la géométrie et du matériau de la pointe ainsi que des conditions d’excitation67-69. Figure 3.10 : Comparaison des distributions de champ E2 à proximité (a) d’une pointe et (b) d’une particule en or irradiées par un faisceau laser Gaussien focalisé selon l’axe. Au sommet de la pointe, le champ laser excitateur est polarisé transversalement à l’axe de la pointe résultant en une polarisation transverse. Le champ résultant est réduit prés du sommet65. Pour avoir une compréhension physique plus intuitive de la réponse optique de la pointe métallique, il vaut mieux trouver un modèle approximatif que l’on peut résoudre analytiquement. Le modèle le plus simple pour une pointe est une sphère quasi-statique. Les Figures 3.9b et 3.10b montrent la réponse optique d’une petite sphère d’or avec le même rayon de courbure que la géométrie de la pointe. Dans le cas de la polarisation transverse, les Nicolas Marquestaut 117 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche distributions de champ aux figures 3.9a et 3.9b démontrent que le remplacement d’une pointe par une sphère polarisable donne une très bonne approximation. Les courbes dans les figures représentent l’amplitude du champ E2 évaluée 1 nm en dessous de la pointe et de la sphère, respectivement. Pour la pointe en or, l’amplification du champ est plus forte que le champ amplifié associé à une petite sphère en or. Pourtant, on a besoin d’adopter une polarisabilité empirique pour la sphère qui dépend de l’amplitude de l’exaltation du champ sur la pointe en or. En bref, les champs à proximité d’une pointe métallique peuvent être décrits par une sphère polarisable avec une polarisabilité anisotropique qui compte pour l’effet d’amplification du champ. Figure 3.11 : Densité de charges surfaciques σ calculée sur une pointe métallique irradiée par un laser. La polarisation de la lumière est orientée perpendiculairement à l’axe de la pointe dans le calcul en bas à gauche et aligné selon l’axe principal de la pointe dans le calcul en haut à droite. La forme de la pointe est soulignée par le trait noir solide70. La Figure 3.11 montre la densité de charges à la surface calculée sur une pointe métallique quand la pointe est excitée par une polarisation longitudinale. Les charges en surface oscillent à la même fréquence que le champ excitateur. La lumière incidente conduit les électrons libres du métal le long de la direction de polarisation. Alors que la densité de charge est nulle à l’intérieur du métal à chaque instant ( ∇ ⋅ E = 0 ), les charges s’accumulent sur la surface du métal. Quand la polarisation incidente est parallèle à l’axe de la pointe, la densité de charges Nicolas Marquestaut 118 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche en surface induite est symétrique, répartie rotationnellement et a la plus grande amplitude au bout de la pointe. Les charges en surface forment une onde oscillante (plasmon de surface) avec des longueurs d’onde plus courtes que la longueur d’onde de la lumière incidente71. En revanche, il n’y a pas d’amplification du champ quand la polarisation est perpendiculaire à l’axe de la pointe. Dans ce cas, la pointe est simplement polarisée dans le plan transverse et il n’y a pas d’accumulation de charges en surface de la pointe. 2.4.2 Approches Expérimentales basées sur la diffusion Il est utile et instructif de regarder quelques aspects instrumentaux à la microscopie optique en champ proche à balayage de diffusion, comme le montre la configuration expérimentale en Figure 3.12. Figure 3.12 : Schéma de principe de diffusion par une pointe métallique pour un montage en transmission. Les sondes pointues métalliques peuvent être illuminées selon deux géométries. L’illumination en mode réflexion (cf Figure 3.13a) permet l’étude d’échantillons non transparents, une composante de la polarisation du champ incident selon l’axe de la pointe peut être facilement obtenue. Une polarisation linéaire transverse dans le plan formé par la réflexion du laser a une composante selon l’axe de la pointe. Dans le cas d’échantillons transparents, et d’une illumination en transmission, une composante longitudinale de la polarisation peut être obtenue par focalisation sur la pointe d’un faisceau polarisé radialement. Une telle polarisation peut être obtenue au point focal Nicolas Marquestaut 119 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche lorsque les composantes sont orientées perpendiculairement à l’axe de propagation vers l’extérieur du faisceau. Au point focal, la relation de phase entre les orientations des composantes de polarisation génère une composante selon la direction de propagation du champ incident. Deux méthodes sont reportées pour générer un tel mode optique. La première consiste à utiliser 4 ou 8 sections de lames λ/2 proprement orientées et collées les unes aux autres pour former une lame de polarisation qui peut générer un mode radial.72, 73 (cf Figure 3.13b). La seconde, est un système commercial74 basé sur l’orientation de cristaux liquides (cf Figure 3.13c) qui permet d’obtenir un faisceau laser polarisée soit radialement soit azimuthalement. Des échantillons non transparents peuvent être analysés à grande ouverture numérique en utilisant des miroirs paraboliques75. Les miroirs paraboliques (cf Figure 3.13d) présentent l’avantage de ne pas montrer d’aberrations chromatiques et peuvent être utilisés à toutes températures ainsi que sous conditions ultravides, ce qui convient idéalement à l’étude de tous types de surfaces. L’alignement étant délicat, des déviations mineures peuvent altérer les champs focalisés et réduire la sensibilité de détection. (b) (a) (d) (c) Figure 3.13 : (a) Illumination de côté au dessus d’un échantillon non-transparent (b) Utilisation d’une lame λ/2 modifiée 4 cadrans menant à une polarisation radiale ou azimutale selon que le laser incident soit polarisé verticalement ou horizontalement, respectivement (c) Modification de la polarisation incidente à l’aide de cristaux liquides (d) Miroir parabolique pour focaliser la lumière selon l’axe de la pointe. Nicolas Marquestaut 120 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche La microscopie à force atomique est particulièrement bien adaptée pour maintenir le diffuseur local (une pointe recouverte de métal) dans le champ proche de la surface. Lorsque la pointe balaie la surface, la boucle de contre réaction de la pointe en mode dynamique à contact intermittent (« tapping mode») maintient un écart moyen constant entre la pointe et l’échantillon. Cela permet d’acquérir la topographie de la surface et, dans le cadre d’une utilisation en champ proche, d’acquérir simultanément sa réponse optique. Contrairement au mode « tapping » AFM conventionnel, l’amplitude du mode dynamique (la séparation pointeéchantillon) est contrôlée à une valeur de l’ordre de l’étendue spatiale du champ proche. Un objectif à forte ouverture numérique est utilisé pour collecter la lumière diffusée, qui est composée de la lumière localement diffusée aussi bien que de la diffusion de fond des structures localisées dans la zone pointe-échantillon. L’utilisation d’objectifs d’ouvertures numériques supérieures à 1, diminue la taille du volume confocal contribuant au fond champ lointain ce qui maximise l’efficacité de collection de la lumière émise. La diffusion champ proche est discriminée de la diffusion d’arrière plan par une détection calée sur la fréquence du mode « tapping ». Ce dispositif fournit généralement un bon rapport signal sur bruit, et lorsqu’il est enregistré dans les plus hautes harmoniques de la fréquence d’oscillation de la pointe, permet d’éviter des complications associées aux artéfacts topographiques76, 77. Comme souligné auparavant, l’approche de diffusion locale en microscopie champ proche à balayage prend avantage sur les ondes évanescentes non propagatives présentes à la surface d’un échantillon irradié en utilisant une pointe AFM pour localement perturber (diffuser) ces champs dans le rayonnement. Dans cette approche, le champ diffusé au sommet de la pointe est mesurable au préalable et généralement à la même longueur d’onde que la lumière incidente. De ce fait, une évolution dans la complexité expérimentale sur les microscopies champ proche standards est requise pour détecter et distinguer les champs diffusés localement sous la pointe (champ proche) et la lumière de fond (champ lointain). L’intensité de la diffusion est dépendante de l’interaction électromagnétique entre la pointe et la surface de l’échantillon et sont elles-mêmes gouvernées par la constante diélectrique locale de l’échantillon, les propriétés électromagnétiques de la sonde, et la séparation sondeéchantillon78. La réduction des artefacts optiques associés aux interactions optiques nonlocalisées représente une amélioration significative sur la fiabilité et la facilité d’interpréter les mesures de microscopie optique en champ proche à balayage de diffusion. Détecter aux plus hautes harmoniques de la modulation en fréquence exploite le fait que l’efficacité de la diffusion en champ proche est non-linéaire et génère des harmoniques comme une fonction de Nicolas Marquestaut 121 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche la séparation pointe-échantillon alors que la diffusion champ lointain est linéaire et ne génère pas d’harmoniques79. 2.4.3 Approches basées sur l’excitation locale L’approche excitation locale permet aux signaux optiques qui sont décalés spectralement de la longueur d’onde d’excitation d’être détectés. Dans le passé, cette approche a été appliquée dans la fluorescence excitée à un photon80 et deux photons37, la diffusion Raman38, 81-83 et aux effets optiques non-linéaires tels que la technique CARS84 (Coherent Anti-Stokes Raman Spectroscopy). Ces expériences ont été menées avec des pointes métalliques ou semiconductrices majoritairement, mais d’autres géométries avec des propriétés d’antennes résonantes optimisées ont également été employées43-45. Les premières images de fluorescence haute résolution avec des pointes en or extrêmement fines ont été obtenues dès 1999. Dans ces travaux de S.Xie et al.37, la fluorescence de l’échantillon est excitée par absorption à deux photons en utilisant le champ amplifié localement au sommet de la pointe. Des images de fluorescence avec une résolution atteignant les 30 nm ont été enregistrées sur des membranes photosynthétiques contenant des molécules chlorophylliennes comme fluorophores actifs. Ces travaux initiaux ont volontairement fait appel à l’interaction optique non-linéaire, telle que l’absorption bi-photonique, pour supprimer le fond de fluorescence associé à l’irradiation directe de la surface de l’échantillon (pour rappel la pointe est irradiée dans le champ lointain). L’approche par excitation locale combinée à la diffusion Raman38, 82, 83 a également été menée avec succès. En spectroscopie de diffusion Raman, l’amplification du champ sur une sonde métallique irradiée par un laser amplifie le signal Raman de façon similaire au SERS. L’acronyme TERS (Tip enhanced Raman scattering) a donc pris le relais sur le SERS afin de qualifier les effets d’exaltation Raman par interaction avec une pointe métallique. La diffusion Raman sonde le spectre vibrationnel du système moléculaire d’intérêt et reflète directement sa composition chimique et sa structure moléculaire. La lumière Raman diffusée étant légèrement décalée spectralement par rapport à la radiation excitatrice, l’amplification de la lumière Raman diffusée est proportionnelle au facteur d’amplification du champ électrique à la puissance quatre (cf. Chapitres I et II), c'est-à-dire, que l’émission Raman et l’excitation sont amplifiées du même ordre de grandeur. Les premières images Raman champ proche de Nicolas Marquestaut 122 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche nanomatériaux isolés ont été menées par le groupe de L. Novotny85 (Rochester, USA) sur des échantillons composés de nanotubes. Ces travaux restent à ce jour un état de l’art de ce qui est réalisable en microscopie Raman champ proche. De par leur structure quasiunidimensionnelle et leurs fortes sections efficaces de diffusion, les nanotubes de carbone sont un échantillon test idéal. Une image représentative enregistrée en microscopie Raman champ proche est montrée en Figure 3.14a. Figure 3.14 : (a) Imagerie Raman en Champ Proche de nanotubes de carbone mono-paroi. Cette image a été enregistrée en balayant de manière contrôlée l’échantillon sous une pointe métallique irradiée et en intégrant pour chaque pixel, le nombre de photons qui tombent dans une bande spectrale étroite autour de la ligne G de fréquence ν = 1594 cm-1 (b) Spectre de diffusion Raman enregistré au sommet du nanotube (c) Amplification du signal de la ligne G en fonction de la distance pointe – échantillon ∆z85. Le contraste dans l’image correspond à l’amplitude de la ligne G centrée à ν = 1594 cm-1. La résolution spatiale de l’image spectroscopique d’environ 15 nm, se base sur la largeur à mihauteur de la variation de l’intensité du signal optique du mode G. (Figure 3.14a). De plus, le faible signal de la bande D à ν=1270 cm-1 indique que le tube formé par dépôt par vapeur chimique (CVD) est exempt de défaut. Il a été démontré que d’autres méthodes de croissance pouvaient engendrer des défauts qui peuvent être localisés et caractérisés par la technique Raman champ proche86. La Figure 3.14c montre l’amplification du signal comme une fonction de la distance pointe-échantillon. Cette variation exponentielle a été enregistrée pour la ligne G et mis en évidence en Figure 3.14b. En considérant les différentes zones sondées en champ proche et champ lointain, un facteur d’exaltation Raman effectif d’environ 102-104 est calculé, considérablement plus faible que les facteurs d’amplification prédits théoriquement. Nicolas Marquestaut 123 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Il est également démontré que l’amplification n’est pas uniforme pour les différentes lignes spectrales. La spectroscopie vibrationnelle en champ proche avec effet de pointe a récemment été étendue au régime optique non-linéaire par Kawata et ses associés84. Ce groupe a utilisé la spectroscopie CARS (Coherent Anti Stokes Raman Spectroscopy) champ proche pour imager des agrégats d’ADN avec un contraste correspondant aux modes de respiration du diazole de molécules d’adénine. On peut attendre de la microscopie CARS qu’elle trouve des applications intéressantes dans les nanosciences et notamment en biologie. Son intérêt est d’utiliser des sources avec des impulsions ultracourtes limitant ainsi de possibles effets thermiques. Dans les effets d’exaltation par une pointe métallique, plusieurs résultats préliminaires et approfondissements théoriques, issus en particulier du groupe de Hallen et al.87-89 (Raleigh, North-Carolina, USA), suggèrent que les intensités et règles de sélection en Raman champ proche traduisent un fort effet de polarisation selon la direction Z perpendiculaire à la surface; cet effet d’exaltation du champ électromagnétique de plusieurs ordres de grandeur (≈103-104) dans une région restreinte et selon la direction de la pointe a par ailleurs été prévu dans nombreux travaux théoriques dus, en particulier, à Novotny et al.40 à Denk et Pohl35 ou encore à Boccara et Rivoal90, 91 . Ainsi, des informations vibrationnelles distinctes pourraient être atteintes en Raman champs proche et lointain, car il y aurait une prédominance, dans le premier cas, des contributions de diffusion par Effet de Gradient de Champ (“Electric-Field Gradient Raman” ou EFGR) et, dans le second cas, des contributions classiques bien connues par gradients ou variations des polarisabilités dérivées. La possibilité de générer un champ orienté selon l’axe de la pointe comme décrit précédemment, est donc une approche idéale pour sonder des modes dont l’orientation est perpendiculaire à la surface et qui ne sont pas accessibles par une polarisation transverse. Tous ces phénomènes peuvent être appréhendés de façon relativement simple par les développements physiques suivants. En effet, si on considère des transitions entre niveaux de vibration gouvernées par l’Hamiltonien de perturbation H= -µE, où µ est le moment dipolaire et E est le champ électrique, les composantes du moment dipolaire se décomposent ainsi : 1 dE j 3 dk µ =µip +αij E j + Aijk +Gij B j +... (3.8) où αij est le tenseur de polarisabilité, B le champ magnétique (i, j ou k = x, y ou z) . Les coefficients αij , Aijk et Gij sont dus aux couplages entre opérateurs moléculaires purement Nicolas Marquestaut 124 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche dipolaires électriques, dipolaires-quadrupolaires électriques et dipolaires électriquesmagnétiques, respectivement. Si on effectue une expansion au premier ordre de µi par rapport à une coordonnée normale Q de vibration on obtient : dµ p dE dαij E j p Q+ 1 j µi =(µi )0 + i Q+(αij E j )0 + dQ dQ 0 3 dk 0 (Aijk )0 + dAdQijk Q +... (3.9) 0 Les termes non dépendants de Q (premier, troisième, cinquième…) ne sont pas à considérer puisqu’ils ne participent pas au couplage entre états vibrationnels, le second terme correspond directement à l’absorption photonique (en spectroscopie infrarouge), tandis que les intensités en spectroscopie Raman sont gouvernées essentiellement par le quatrième terme. Au-delà, les autres termes peuvent expliquer l’activation en infrarouge de modes par couplage quadrupolaire, comme cela a été démontré dans quelques cas par Moskovits et al. pour des molécules adsorbées sur des surfaces métalliques92, mais ils seraient peut-être également à considérer ici puisque le champ varie fortement. Généralement, le champ électrique est supposé être indépendant de Q et il est alors simplement extrait de la dérivée du quatrième terme. En revanche, comme en champ proche ce champ peut varier très rapidement au voisinage d’une surface métallique, ce terme va donner lieu à deux composantes principales, dα dE j ij Q Raman classique + EFGRaman ≈ E j +αij. dQ dQ 0 0 (3.10) Finalement, les composantes à retenir du moment dipolaire induit sont les suivantes : p dα dE j 1 dE j dAijk dµi ij + + E j +αij dQ dQ dQ 3 dk dQ 0 0 0 µi = Q 0 (3.11) où les 4 termes traduisent l’absorption infrarouge, la diffusion Raman classique et les effets EFGRaman par couplages dipolaires et quadrupolaires. Selon l’importance relative des polarisabilités dérivées et des variations du champ électrique, différents termes pourront prédominer et/ou interférer, mais il est clair que de nouvelles règles de sélection seront attendues pour un “pur” effet EFGRaman, puisque la composante Ej devra appartenir à la même classe de symétrie que la coordonnée de vibration Q : Nicolas Marquestaut 125 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche En règle principale, seules les vibrations possédant une composante normale à la surface métallique seront donc activées et les intensités de ces modes seront certainement fortement dépendantes de la distance pointe-substrat. Toutes ces prévisions théoriques demandent encore à être établies et des résultats fiables et reproductibles d’expériences Raman en champ proche restent à établir. Comme indiqué par les références récentes des travaux de la littérature, ceci reste un problème d’actualité à résoudre. Le défi est d’une grande importance car il permettrait, en particulier, de réconcilier les différents courants de pensée et approches théoriques développées depuis plus de vingt ans pour expliquer les divers effets d’intensification en spectroscopie Raman des surfaces. Conclusion du Chapitre III Les résultats présentés dans ce chapitre démontrent clairement que la microcopie optique champ proche exaltée par une pointe s’est développée en un outil puissant bien que de nombreux points restent à vérifier ou à optimiser. Cette technique permet des mesures optiques de surfaces avec la plus haute résolution et un important signal d’amplification. Ce dispositif fournit une information structurale détaillée basée sur l’observation de la diffusion Raman et une détection très haute sensibilité. Néanmoins le succès du développement de la microscopie Raman en champ proche par effet de pointe dépend de plusieurs critères essentiels : • la reproductibilité de fabrication des pointes, la stabilité du système de balayage ainsi que le système de mesure optique ou spectroscopique doivent être optimisés. • l’échantillon doit montrer un signal stable en microscopie confocale classique et un contraste optique avec son support (un nanotube de carbone sur de la silice fondue par exemple). Le contraste CP/CL favorable de cette technique la rend particulièrement efficace pour des structures 0D et 1D. L’imagerie de structures sur une surface de même composition reste un défi du fait du faible contraste. Comparée aux techniques champ lointain, la microscopie champ proche exaltée par une pointe est à même de fournir une résolution spatiale supérieure, limitée essentiellement par le diamètre du sommet de la pointe. Les techniques champ lointain fournissent cependant de plus rapides temps d’acquisition. Le signal de diffusion Raman amplifié par la pointe provenant d’interactions électromagnétiques champ proche entre la sonde et l’échantillon, la Nicolas Marquestaut 126 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche réponse optique détectée peut différer significativement de la réponse champ lointain. Les modifications du signal induites par la pointe ont besoin d’être modélisées afin de mieux comprendre des modifications du spectre Raman. Les effets de polarisation sont particulièrement intéressants car de nouveaux modes Raman de surface peuvent être spécifiquement excités via l’effet EGFR. A terme, des instruments compacts intégrant la microscopie optique et l’AFM/STM pourraient être optimisés. La microscopie champ proche amplifiée par une pointe est certainement un domaine de recherche fascinant qui aide à améliorer notre compréhension des phénomènes optiques champ proche. Nicolas Marquestaut 127 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche Références bibliographiques (1) Pohl, D. W.; Denk, W.; Lanz, M., App. Phys. Lett. 1984, 44, 651. (2) Lewis, A.; Isaacson, M.; Harootunian, A.; Murray, A., Ultramicroscopy 1984, 13, 227. (3) Dunn, B., Chemical Reviews 1999, 99, 2891. (4) Paesler, M. A.; Moyer, P. J., Near Field Optics : Theory, Instrumentation and Applications. New York, 1996. (5) Fillard, J. P., Near-field Optics and Nanoscopy. 1996. (6) Kawata, S.; Ohtsu, M.; Irie, M., Nano-Optics. 2002. (7) Kawata, S., Near Field Optics and Surface Plasmon Polaritons. 2001. (8) Kawata, S.; Shalaev, V. M., Tip Enhancement. 2007. (9) Prasad, P. N., Nanophotonics. New York, 2004. (10) Richards, D.; Zayats, A., Phil. Trans. R. Soc. Lond. A 2004, 362, 699. (11) Abbe, E., Arch. Mikrosk. Anat. 1873, 9, 413. (12) Rayleigh, L., Philos. Mag. 1879, 5, 261. (13) Vigoureux, J. M., Annales de la Fondation Louis de Broglie 2003, 28, 525. (14) Vigoureux, J. M.; Courjon, D., Appl. Opt. 1992, 31, 3170. (15) Vigoureux, J. M.; Girard, C.; Courjon, D., Opt. Lett. 1989, 19, 1039. (16) Veerman, J. A.; Otter, A. M.; Kuipers, L.; Hulst, N. F. V., Appl. Phys. Lett. 1998, 72, 3115. (17) Hayazawa, N.; Inouye, Y.; Sekkat, Z.; Kawata, S., Chem. Phys. Lett. 2001, 335, 369. (18) Synge, E. H., Phil. Mag. 1928, 6, 356. (19) Synge, E. H., Phil. Mag 1928, 6, 356. (20) O'Keefe, J. A., J. Opt. Soc. Am. 1956, 46, 359. (21) Ash, E. A.; Nicholls, G., Nature 1972, 237, 510. (22) Fischer, U. C., J. Vac. Sci. Technol. B 1985, 3, 386. (23) Massey, G. A., App. Opt. 1984, 23, 658. (24) Betzig, E.; Harootunian, A.; Lewis, A.; Isaacson, M., App. Opt. 1986, 25, 1890. (25) Courjon, D.; Sarrayedine, K.; Spajer, M., Opt. Commun. 1989, 71, 23. (26) Courjon, D.; Vigoureux, J. M.; Spajer, M.; Sarrayedine, K.; Leblanc, S., App. Opt. 1999, 26, 3734. (27) Betzig, E.; Trautman, J. K., Science 1992, 257, 189. (28) Novotny, L.; Pohl, D. W., Light propagation in scanning near-field optical microscopy. 1995; p 21. (29) Rosa, A. H. L.; Hallen, H. D., Appl. Opt.Appl. Opt. 2002, 41, 2015. (30) Bethe, H. A., Phys. Rev. Lett. 1944, 66, 163. (31) Bouwkamp, C. J., Philips Res. Rep. 1950, 5, 321. (32) Webster, S.; Batchelder, D.; Smith, D., Appl. Phys. Lett. 1998, 72, 1478. (33) Inouye, Y.; Kawata, S., Opt. Lett. 1994, 19, 159. (34) Zenhausern, F.; Oboyle, M. P.; Wickramasinghe, H. K., Appl. Phys. Lett. 1994, 65, 1623. (35) Denk, W.; Pohl, D. W., J. Vac. Sci. Technol. B 1991, 9, 510. (36) Novotny, L.; Sanchez, E. J.; Xie, X. S., Ultramicroscopy 1998, 71, 21. (37) Sanchez, E. J.; Novotny, L.; Xie, X. S., Phys. Rev. Lett. 1999, 82, 4014. (38) Hartschuh, A.; Sanchez, E. J.; Xie, X. S.; Novotny, L., Phys. Rev. Lett. 2003, 90, 095503. (39) Hecht, B.; Bielefeldt, H.; Inouye, Y.; Pohl, D. W.; Novotny, L., J. Appl. Phys. 1997, 81, 2492. (40) Novotny, L.; Bian, R. X.; Xie, X. S., Phys. Rev. Lett. 1997, 79, 645. Nicolas Marquestaut 128 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche (41) Martin, O. J. F.; Girard, C., Appl. Phys. Lett. 1997, 70, 705. (42) Kappeler, R.; Erni, D.; Xudong, C.; Novotny, L., J. Comput. Theor. Nanosci. 2007, 4, 686. (43) Muhlschlegel, P.; Eisler, H. J.; Martin, O. J. F.; Hecht, B.; Pohl, D. W., Science 2005, 308, 1607. (44) Schuck, P. J.; Fromm, D. P.; Sundaramurthy, A.; Kino, G. S.; Moerner, W. E., Phys. Rev. Lett. 2005, 94, 017402. (45) Grober, R. D.; Schoelkopf, R. J.; Prober, D. E., Appl. Phys. Lett. 1997, 70, 1354. (46) Farahani, J. N.; Pohl, D. W.; Eisler, H. J.; Hecht, B., Phys. Rev. Lett. 2005, 95, 017402. (47) Novotny, L., Progress in Optics. 2007; Vol. 50, p 137. (48) Bohn, J. L.; Nesbitt, D. J.; Gallagher, A., J. Opt. Soc. Am. A 2001, 18, 2998. (49) Hamann, H. F.; Larbadi, M.; Barzen, S.; Brown, T.; Gallagher, A.; Nesbitt, D. J., Opt. Commun. 2003, 227, 1. (50) Gerton, J. M.; Wade, L. A.; Lessard, G. A.; Ma, Z.; Quake, S. R., Phys. Rev. Lett. 2004, 93, 180801. (51) Zenhausern, F.; Martin, Y.; Wickramasinghe, H. K., Science 1995, 269, 1083. (52) Haefliger, D.; Plitzko, J. M.; Hillenbrand, R., Appl. Phys. Lett. 2004, 85, 4466. (53) Frey, H. G.; Witt, S.; Felderer, K.; Guckenberger, R., Phys. Rev. Lett. 2004, 93, 200801. (54) Martin, Y. C.; Hamann, H. F.; Wickramasinghe, H. K., J. Appl. Phys. 2001, 89, 5774. (55) Krug, J. T.; Sanchez, E. J.; Xie, X. S., J. Chem. Phys. 2002, 116, 10895. (56) Kottmann, J. P.; Martin, O. J. F.; Smith, D. R.; Schultz, S., Chem. Phys. Lett. 2001, 341, 1. (57) Sonnichsen, C.; Franzl, T.; Wilk, T.; Plessen, G. V.; Feldmann, J., Phys. Rev. Lett. 2002, 88, 077402. (58) Jin, R. C.; Cao, Y. W.; Mirkin, C. A.; Kelly, K. L.; Schatz, G. C.; Zheng, J. G., Science 2001, 294, 1901. (59) Mock, J. J.; Barbic, M.; Smith, D. R.; Schultz, D. A.; Schultz, S., J. Chem. Phys. 2002, 116, 6755. (60) Gole, A.; Murphy, C. J., Chem. Mater. 2004, 16, 3633. (61) Kalkbrenner, T.; Ramstein, M.; Mlynek, J.; Sandoghdar, V., J. Microsc. 2001, 202, 72. (62) Calander, N.; Willander, M., Appl. Phys. Lett. 2002, 92, 4878. (63) Renger, J.; Grafstrom, S.; Eng, L. M.; Deckert, V., J. Optic. Soc. Am. A 2004, 21, 1362. (64) Neacsu, C. C.; Steudle, G. A.; Raschke, M. B., Appl. Phys. B 2005, 80, 295. (65) Bouhelier, A.; Novotny, L., Surface Plasmon Nanophotonics. 2007. (66) Hafner, C., The Generalized Multiple Multipole Technique for Computational Electromagnetics. Boston, 1990. (67) Kawata, Y.; Xu, C.; Denk, W., J. Appl. Phys. 1999, 85, 1294. (68) Zayats, A. V., Opt. Commun. 1999, 161, 156. (69) Bouhelier, A.; Renger, J.; Beversluis, M. R.; Novotny, L., J. Microsc. 2003, 210, 220. (70) Novotny, L.; Bian, R. X.; Xie, X. S., Phys. Rev. Lett. 1997, 79, 645. (71) Novotny, L.; Bian, R. X.; Xie, X. S., Phys. Rev. Lett. 2003, 90, 95503. (72) Saito, Y.; Kobayashi, M.; Hiraga, D.; Fujita, K.; Kawano, S.; Smith, N. I.; Inouye, Y.; Kawata, S., J. Ram. Spec. 2008, 39, 1643. (73) Quabis, S.; Dorn, R.; Leuchs, G., Appl. Phys. B 2005, 81, 597. (74) Arcoptix http://www.arcoptix.com/radial_polarization_converter.htm (75) Stanciu, C.; Sackrow, M.; Meixner, J. A., J. Microsc. 2008, 229, 247. (76) Hillenbrand, R.; Stark, M.; Guckenberger, R., Appl. Phys. Lett. 2000, 76, 3478. Nicolas Marquestaut 129 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre III : Microscopie Raman en Champ Proche (77) Wurtz, G.; Bachelot, R.; Royer, P., Eur. Phys. J. Appl. Phys. Rev. Lett. 1999, 5, 269. (78) Keilmann, F., J. Electron Microsc. 2004, 53, 187. (79) Hillenbrand, R.; Keilmann, F., Phys. Rev. Lett. 2000, 85, 3029. (80) Hamann, H. F.; Gallagher, A.; Nesbitt, D. J., Appl. Phys. Lett. 2000, 76, 1953. (81) Stockle, R. M.; Suh, Y. D.; Deckert, V.; Zenobi, R., Chem. Phys. Lett. 2000, 318, 131. (82) Hayazawa, N.; Inouye, Y.; Sekkat, Z.; Kawata, S., J. Chem. Phys. 2002, 117, 1296. (83) Anderson, M. S., Appl. Phys. Lett. 2002, 76, 3130. (84) Ichimura, T.; Hayazawa, N.; Hashimoto, M.; Inouye, Y.; Kawata, S., Phys. Rev. Lett. 2004, 92, 220801. (85) Anderson, N.; Hartschuh, A.; Cronin, S.; Novotny, L., J. Am. Chem. Soc. 2005, 127, 2533. (86) Anderson, N.; Hartschuh, A.; Novotny, L., Materials Today May 2005, 50. (87) Ayars, E. J.; Hallen, H. D., Appl. Phys. Lett. 2000, 76, 3911. (88) Ayars, E. J.; Hallen, H. D.; Jahncke, C. L., Phys. Rev. Lett. 2000, 85, 4180. (89) Ayars, E. J.; Jahncke, C. L.; Paesler, M. A.; Hallen, H. D., J. Microsc. 2001, 202, 142. (90) Cory, H.; Boccara, A. C.; Rivoal, J. C.; Lahrech, A., Microwave and Opt. Technol. Lett. 1998, 18, 120. (91) Aigouy, L.; Lahrech, A.; Grsillon, S.; Cory, H.; Boccara, A. C.; Rivoal, J. C., Optics Lett. 1999, 24, 187. (92) Sass, J. K.; Neff, H.; Moskovits, M.; Holloway, S., J. Phys. Chem. 1981, 85, 621. Nicolas Marquestaut 130 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Chapitre IV Résultats expérimentaux Microscopie Raman en Champ Proche Nicolas Marquestaut 131 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Nicolas Marquestaut 131 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche 1 Introduction L’attrait principal de la spectroscopie Raman exaltée de surface réside essentiellement dans sa capacité à accroître l’intensité du signal Raman. Toutefois cette exaltation globale due à un effet de surface ne permet généralement pas de corréler le signal Raman aux détails sublongueur d’onde d’un objet ou d’une surface nano-structurée. Pourtant, l’effet TERS confiné autour d’une nanostructure de taille nanométrique peut permettre d’améliorer la résolution spatiale de la mesure Raman. C’est cet effet qui est mis à profit en microscopie en champ proche par effet de pointe comme décrit dans le chapitre précédent. La résolution spatiale de l’effet Raman ne dépend alors que de la taille de l’extrémité de cette pointe métallique. Lorsque cette pointe de métal noble est irradiée par une lumière excitant la résonance plasmon de surface localisée de la pointe, un champ électromagnétique intensifié est observé à son extrémité et peut dès lors être mis à profit pour accroitre l’intensité Raman de diffusion de molécules situées à proximité de cette pointe. Des pointes en or ou argent dont l’extrémité est limitée à quelques dizaines de nanomètres ont pu démontrer des amplifications de 2 à 4 ordres de grandeur1-3 tout en offrant une résolution spatiale de l’ordre de 10-20 nm4. Comme mentionné précédemment, les nanotubes de carbone sont majoritairement étudiés à la fois parce qu’ils sont de très petite taille et qu’ils présentent de fortes sections efficaces de diffusion. Néanmoins, d’autres structures uni-dimensionnelles (nanofils, nanotubes) ou bi-dimensionnelles telles que des monocouches moléculaires greffées sur un substrat (ADN5, colorants tels que l’oxazyne BCB6, rhodamine 6G…) ou des solides tri-dimensionnels (silicium dopé, stressé7, …) sont largement recensés dans la littérature récente8, 9. Des mesures TERS sur des molécules uniques ont également été menées dans la perspective de détecter un signal vibrationnel. De telles mesures TERS sont alors souvent menées en association avec des effets électroniques résonants. L’intérêt de l’approche TERS vient du couplage expérimental qui combine un microscope Raman confocal et un microscope à force atomique utilisant de telles pointes nanométriques. Ce procédé combine à la fois les effets d’exaltation Raman par effet de pointe avec l’excellente résolution spatiale du système de microscopie à force atomique. Au delà du défi du TERS, l’acquisition simultanée des mesures topographiques et des mesures Raman du même objet est particulièrement intéressante. La spectroscopie TERS peut fournir un spectre Raman avec une résolution spatiale proche du rayon de courbure de la pointe AFM, soit Nicolas Marquestaut 133 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche environ 1 à 2 ordres de grandeurs meilleur que la limite de diffraction optique de la lumière typiquement rencontrée dans les microscopes optiques confocaux (cf Chapitre III). Pour cette raison, le TERS est référencé comme une technique de « spectroscopie Raman en champ proche sans ouverture ». Sonder la signature vibrationnelle de nanomatériaux avec une résolution spatiale de l’ordre de quelques dizaines de nanomètres est d’un grand intérêt pour comprendre les nouvelles propriétés des matériaux nanométriques du fait des effets de confinements. De plus, la corrélation du signal Raman intensifié avec les données topographiques peut aider à localiser les défauts aussi bien dans les zones amorphes que dans les zones cristallines. Sonder simultanément la topographie de surface d’un objet avec un microscope à force atomique et sa composition avec une technique vibrationnelle telle la spectroscopie Raman confocale est en soit très important pour des applications dans les nanomatériaux, les biomatériaux et l’étude de cellules biologiques in-vivo. Lorsque les effets de pointe sont mis à profit, la résolution spatiale R dépend du rayon de courbure r de la pointe qui est donné par la relation : R = 1 rpo int e 2 (4.1) Pour des pointes AFM commerciales recouvertes d’environ une vingtaine de nanomètres d’un métal (Au, Ag, Al), la résolution spatiale peut ainsi atteindre dans les meilleures conditions la dizaine de nanomètres. Des expériences TERS sur des nanotubes de carbone mono-paroi (cf Chapitre III) ont permis de briser la limite de diffraction et de les imager avec une résolution spatiale de 15 nm. Sur ces mêmes nanotubes ont pu être détectés des états excités localisés qui ont pu être corrélés aux défauts structuraux de ces nano-objets. Dans le cadre de cette thèse, nos efforts portent sur l’étude de nanofils uniques de silicium déposés à la surface de substrats transparents pour un dispositif expérimental TERS en géométrie de transmission. Dans ce chapitre, le plan suivant est adopté : Le montage expérimental et son mode de fonctionnement sont développés. On développera notamment comment générer un mode radial afin d’obtenir une composante de polarisation longitudinale au point focal. Les premières mesures TERS sont menées sur des nanofils de silicium en utilisant des géométries de pointes et d’irradiation distinctes. Les mesures TERS sont comparées à des mesures Raman confocales et de possibles effets thermiques sont discutés. Des mesures TERS sont également conduites sur des nanofils de nitrure de gallium d’orientation cristalline [1 1 0] sur lesquels un effet est révélé sur un mode Raman distinct. Nicolas Marquestaut 134 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Enfin, des effets d’amplification du signal Raman par effet de pointe sur les substrats SERS métalliques présentés en chapitre II sont démontrés. 2 Dispositif expérimental L’approche du Groupe de Spectroscopie Moléculaire (GSM) à l’Institut des Sciences Moléculaires (ISM) à Bordeaux, menée en collaboration avec Veeco Instruments et Horiba Jobin Yvon, s’articule autour d’une plateforme flexible combinant un microscope à force atomique (Veeco, Bioscope II) et un microscope confocal Raman inversé (Labram HR inversé) dans une géométrie de transmission, présentée en Figure 4.1. Figure 4.1 : Dispositif expérimental TERS développé au laboratoire en collaboration avec les industriels Jobin Yvon et Veeco. Le couplage mécanique ainsi que le protocole de communication (Routine Labview Veeco et protocole TCP-IP Horiba Jobin Yvon) permettent le contrôle des deux instruments pour un mode d’acquisition AFM - Raman pas à pas. Lors du processus expérimental, une image topographique AFM est préalablement enregistrée via le logiciel de contrôle propre au microscope à force atomique. Cette image est ensuite Nicolas Marquestaut 135 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche importée dans le logiciel de couplage AFM-Raman Labview (Figure 4.2), puis une zone d’intérêt est sélectionnée afin de générer une matrice de points discrétisés. Figure 4.2 : Interface Labview du logiciel de couplage développé en collaboration avec Jobin Yvon et Veeco pour contrôler simultanément le mouvement de la pointe dans les 3 directions de l’espace et l’acquisition des spectres Raman. Une fois asservie, la pointe est positionnée en (X, Y, Z) puis l’acquisition Raman est lancée par l’utilisateur. En chaque point, un spectre est enregistré dans le logiciel de contrôle du microscope Raman, dans lequel sont sélectionnés les paramètres d’acquisition, i.e. le réseau de diffraction, la gamme spectrale, le temps d’acquisition, l’ouverture du trou confocal et de la fente d’entrée. Le pas de déplacement selon les côtes X et Y est également déterminée par l’utilisateur. L’échantillon est déplacé dans les deux directions X et Y avec le système piézoélectrique afin que le point focal du laser soit précisément aligné sur le sommet de la pointe AFM. Le logiciel de couplage permet en outre de positionner la pointe à une hauteur comprise entre 1 et 2000 nm de la surface. Cette fonction est implémentée afin qu’en chaque position (X, Y) de la pointe AFM, un spectre Raman soit collecté lorsque la pointe est en contact puis en non-contact. Le spectre Raman de différence, c'est-à-dire le signal champ proche soustrait à la contribution champ lointain, fournit théoriquement la réponse pure TERS de la configuration en chaque point (X, Y). Nicolas Marquestaut 136 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche 2.1 Polarisation longitudinale Afin de se placer dans les conditions optimales d’amplification locale du champ électromagnétique par la pointe, il est nécessaire d’irradier celle-ci dans les bonnes conditions de polarisation. Les simulations numériques présentées dans le premier chapitre démontrent qu’une polarisation longitudinale selon l’axe d’une pointe métallique crée une exaltation maximale. Cette amplification locale du champ électrique est à l’origine de l’effet TERS. Pour ce faire, nous avons imaginé un montage optique (Figure 4.3) afin de transformer la polarisation transverse du laser (TEM 00) en une polarisation radiale, avec 4 composantes de la polarisation orientées vers l’extérieur du faisceau, perpendiculairement à l’axe de propagation du faisceau10. Figure 4.3 : Dispositif optique permettant de changer la polarisation transverse du faisceau en polarisation radiale. Le faisceau gaussien polarisé verticalement est filtré à l’aide d’un premier filtre spatial composé d un objectif de microscope de grossissement 10X et trou de 50 µm. Le faisceau est ensuite collimaté avec un second objectif de même grossissement puis vient irradier le centre de la lame modifiée où se joignent 4 lames λ 2 assemblées selon le schéma décrit en Chapitre III. Un support équipé de vis micrométriques permet de déplacer la lame modifiée dans les directions X et Y afin d’ajuster finement le point central. La lame est orientée de façon à obtenir un faisceau radial en sortie. Ce mode obtenu, le laser est guidé vers un deuxième filtre spatial puis collimaté une nouvelle fois afin d’obtenir un faisceau ayant une forme « doughnut » comme montré par l’image vidéo du faisceau parallèle sur la figure 4.4. Nicolas Marquestaut 137 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche r E r E r E r E Figure 4.4 : (a) Image vidéo du faisceau laser enregistrée en sortie du dispositif optique. Les 4 lobes et le trou central forment un faisceau laser dit « doughnut » (b) Distributions transverses du faisceau. Le profil passe par un minimum principal au centre, les ordres secondaires aux extrémités sont également observés. Le profil du mode TEM 01 et les distributions diagonales associées montrent bien que l’intensité du faisceau passe par zéro entre deux maxima et les seconds ordres sont également observés. Un polariseur linéaire rotatif est placé sur le trajet optique dans le but d’observer la forme du faisceau parallèle sous différentes polarisations. Lorsque le polariseur est orienté à ± 90° (à la verticale), les lobes gauche et droit du « doughnut » sont éteints alors que pour un polariseur horizontal ce sont les lobes haut et bas. L’orientation des lobes dépend de la position du polariseur comme observé en Figure 4.5. 0° 45° 90° 135° 180° Figure 4.5 : Images vidéo des lobes du faisceau doughnut en fonction de l’orientation du polariseur placé en sortie de la lame λ/2 modifiée. Rotation de 0 à 180° par rapport à l’horizontale par incréments de 45°. Nicolas Marquestaut 138 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche 2.2 Validation du montage Doughnut Un cristal de quartz α de 300 µm d’épaisseur coupé selon son axe Z est utilisé afin de valider le montage optique. Cette méthode a été décrite précédemment, notamment par le groupe de S.Kawata11. Un tel cristal de symétrie D3 possède deux bandes Raman d’intérêt, l’une sensible à la polarisation Z à 465 cm-1 (composante αzz2 du tenseur de polarisabilité) et une autre à la polarisation dans le plan XY à 395 cm-1 (composante αzx,y2 ). Les spectres sont acquis avec une excitation laser à 647 nm et une puissance à l’échantillon de 100 mW avec un temps d’acquisition de 2 min. Des objectifs Olympus 10X, 20X, 50X, 100X (MPLAN) air et 60X (UPLSAPO) à immersion eau sont utilisés d’ouvertures numériques croissantes 0.25, 0.35, 0.75, 0.9 et 1.2, respectivement. Tous les spectres sont normalisés en fonction des puissances lasers à l’échantillon variables selon les objectifs de microscope et sont enregistrés pour un trou confocal de 200 µm et des fentes d’entrée de 100 µm. Un analyseur vertical (Y) est placé dans le spectromètre. Le faisceau laser est focalisé à la surface du cristal. Dans le cas d’un laser polarisé linéairement (Figure 4.6a), au point focal, la direction de la polarisation reste transverse. Dans le cas d’une polarisation radiale (Figure 4.6b), la polarisation résultante des r moments de tous les vecteurs p qui gardent une relation de phase du fait de l’utilisation de lame λ/2 , est colinéaire à l’axe optique ou longitudinale12, 13. Figure 4.6 : Schéma représentatif de la focalisation d’un faisceau laser. (a) un faisceau polarisé transversalement reste transverse lorsque les composantes s’additionnent (b) un r faisceau polarisé radialement a sa composante principale k parallèle à l’axe de propagation du faisceau au point focal12. L’ouverture numérique allant de pair avec α le demi-angle formé par l’axe optique et le faisceau de l’objectif (voir Figure 4.6 ci-dessus), plus l’angle α est important plus la somme r r des moments des vecteurs polarisation p au point focal possède une composante k selon Z Nicolas Marquestaut 139 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche importante. Les spectres Raman enregistrés pour les différents modes de polarisation (transverse et radiale) et ouvertures numériques sont montrés en Figure 4.7 ci-après. Figure 4.7 : Spectres Raman relatifs d’un cristal de quartz α avec des objectifs de grossissement 10X (ON 0.25), 20X (ON 0.35), 50X (0.75), 100X (0.9) et 60X immersion à eau (ON =1.2). Les graphes sur la gauche sont enregistrés en mode gaussien et ceux à droite, avec un mode doughnut. Les mesures avec un 100X en mode doughnut n’ont pu être conduites du fait de la trop faible pupille d’entrée de l’objectif de microscope. Nicolas Marquestaut 140 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Dans le cas gaussien, le rapport des bandes à 465 et 395 cm-1 sensibles à la polarisation Z et à la polarisation dans le plan XY, respectivement, augmente avec l’ouverture numérique de l’objectif utilisé. En regardant les résultats obtenus pour le mode gaussien, le rapport Z/XY est maximal pour le 100X, O.N. 0.9 alors que l’on s’attend à ce qu’il le soit pour le 60X, O.N. 1.2. Toutefois, ce dernier étant un objectif à immersion eau, conçu pour travailler à travers des lamelles de microscopes, on peut concevoir que la présence de l’interface d’eau perturbe les mesures. De plus nos expériences ont été réalisées sans lamelle de microscope pour éviter des effets d’interface supplémentaires malgré la correction de l’objectif. Cette approche peut également engendrer des erreurs supplémentaires. Dans le cas radial, le ratio Z/XY est déjà bien supérieur à 1 avec le 10X d’ouverture numérique 0.25. Cela confirme que le mode radial focalisé sur l’échantillon a une forte composante longitudinale y compris pour des angles d’attaque sur l’échantillon très peu rasants. Lorsque l’on augmente l’ouverture numérique, ce ratio augmente légèrement jusqu’à atteindre un palier avec le 50X d’ouverture numérique 0.75, comme indiqué sur la Figure 4.7. Le montage doughnut est donc validé, la polarisation radiale une fois focalisée sur r l’échantillon engendre une forte composante longitudinale k selon Z. Ce montage est utilisé afin de polariser le faisceau laser selon l’axe d’une pointe AFM, pour se placer dans les conditions optimales d’une forte amplification électromagnétique au sommet de la sonde, comme nous le verrons ultérieurement. 3 Etude de nanofils de silicium en imagerie Raman confocale 3.1 Effets thermiques Ces travaux portent sur l’étude de systèmes de type nanofils semi-conducteurs. De tels nanomatériaux sont d’un grand intérêt dans l’industrie des semi-conducteurs donnant accès aux dispositifs d’intégration haute densité et aux applications électroniques avec notamment les batteries rechargeables hautes performances14. De par la taille réduite des nanofils à quelques nanomètres, le confinement des électrons ouvre de nouvelles questions fondamentales afin de mieux appréhender les phénomènes physico-chimiques. Dans ce cadre, la micro-spectroscopie Raman est une technique d’intérêt afin d’interpréter les phénomènes à de telles échelles. Par exemple, celle-ci permet d’accéder via des changements spectraux à différents paramètres tels que l’échauffement local15-18, l’effet Fano19-21, le stress compressif22, 23 le dopage en porteurs de charges et électrons24-26 et le confinement de phonons dans la Nicolas Marquestaut 141 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche maille cristalline27-30. Nous avons plus particulièrement étudié des fils de silicium de 90 nm de diamètre et de quelques microns de long. Ces nanomatériaux ont été élaborés par CVD (Chemical Vapor Deposition) avec des précurseurs d’or comme catalyseurs. Ces matériaux sont synthétisés au sein du groupe de P. Yang (Chemistry Department, University of California, Berkeley, USA). Cette technique permet d’obtenir des objets de taille nanométrique avec un haut degré de cristallinité. En un point d’un fil de silicium isolé, un spectre Raman est enregistré avec des puissances laser variables de 2.2 µW à 2.2 mW et de 4.8 µW à 4.8 mW pour des raies excitatrices à 514 et 647 nm, respectivement. L’objectif utilisé est un 100X, et des filtres neutres de différentes densités optiques sont employés afin de faire varier la puissance laser à l’échantillon. Les spectres Raman aux fréquences Stokes et Anti-Stokes sont enregistrés simultanément et ceci pour les deux raies excitatrices. Une mesure supplémentaire est aussi réalisée à la plus faible puissance pour vérifier la réversibilité de l’effet. Les spectres (raies Stokes, Figure 4.8 ci-dessous) sont modélisés à partir d’une approximation Gaussienne/Lorentzienne. Figure 4.8 : Raies Stokes du silicium pour des puissances laser à l’échantillon croissantes (a) dans le vert à 532 nm (b) dans le rouge à 647 nm Nicolas Marquestaut 142 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Les valeurs expérimentales de fréquence, largeur de bande à mi-hauteur et rapport d’intensité Stokes/Anti-Stokes de la bande du silicium sont répertoriées dans le tableau 4.I. Tableau 4.I : Caractéristiques expérimentales des bandes Stokes et Anti-Stokes du silicium en fonction de la puissance laser. Ordre mesures Puissance (mW) (λ = 514 nm) υmax (cm-1) A B C D E F A (bis) 2.2 10-3 2.2 10-2 2.2 10-1 0.55 1.11 2.22 2.2 10-3 520.56 520.53 520.42 520.27 519.99 519.33 520.49 FWHM (cm-1) 4.01 4.3 4.63 5.48 5.77 IS/IAS Puissance (mW) (λ = 647 nm) υmax (cm-1) FWHM (cm-1) IS/IAS 9.45 9.14 8.87 7.51 6.2 4.8 10-3 4.8 10-2 4.8 10-1 1.2 2.4 4.8 520.55 520.57 3.26 11.38 520.53 3.49 11.21 520.45 3.74 10.67 520.15 4.59 9.03 519.43 5.73 7.34 Sous l’effet de la puissance laser, les bandes Stokes du silicium à 521 cm-1 sont décalées vers le rouge et s’élargissent symétriquement quelle que soit la raie laser d’irradiation. Les courbes pour les valeurs de fréquence Stokes et de largeur à mi-hauteur en fonction de la puissance sont tracées en Figure 4.9a et 4.9b pour les deux longueurs d’ondes excitatrices utilisées. Une échelle logarithmique est utilisée pour des puissances variant du µW au mW. Figure 4.9 : (a) Décalage en fréquence de la raie Stokes du silicium en fonction de la puissance laser à l’échantillon pour deux longueurs d’onde excitatrices, 532 nm (cercles pleins) et 647 nm (carrés pleins) (b) Elargissement de la largeur à mi-hauteur de la raie Stokes du silicium cristallin en fonction de la puissance pour les deux mêmes longueurs d’onde laser. Une échelle logarithmique est employée pour des puissances lasers variant de plusieurs puissances de 10. Nicolas Marquestaut 143 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Des paliers dans le décalage et l’élargissement des raies Stokes des nanofils de silicium sont détectés à partir d’une puissance de 0.55 et 1.2 mW pour des excitations laser dans le vert et le rouge, respectivement. Les spectres se décalent vers les plus basses fréquences et s’élargissent plus rapidement pour une excitation dans le vert que dans le rouge. Ces changements dans les spectres peuvent trouver leur origine de plusieurs effets. Selon le modèle développé par Richter et al.31 pour des particules sphériques puis étendu par Campbell et Fauchet32 aux particules cylindriques, un confinement de phonon peut être déduit en considérant un décalage vers les plus faibles fréquences et un élargissement asymétrique du pic Raman du silicium cristallin. Les nombreuses études se rapportant au confinement de phonons dans des nanofils de silicium font référence à des fils d’une dizaine de nanomètres tout au plus. Dans notre cas, l’élargissement symétrique des pics Raman du silicium et la grande taille des fils utilisés (90 nm de diamètre) prouvent que le décalage en fréquence et l’élargissement de la bande ne proviennent pas d’un effet de confinement de phonons. De même, un effet d’interférence Fano a été observé dans du silicium dopé de type n33, 34 et de type p35, 36. A des niveaux de dopage suffisants, des trous ou des électrons libres participent à un processus de diffusion inélastique de la lumière qui excite les porteurs libres vers les niveaux de plus haute énergie des bandes de conduction ou de valence. Cette diffusion à partir du niveau de continuum peut participer en une résonance Fano avec le phonon optique de diffusion. Une forme de ligne asymétrique Fano qui dépend de la force de couplage électron – phonon en est le résultat. Encore une fois, les caractéristiques des fils analysés et l’élargissement symétrique des spectres Raman enregistrés ne nous permettent pas de conclure à un effet Fano. Une forte puissance laser peut éventuellement amplifier la température locale dans des échantillons nanométriques en silicium et influencer le spectre Raman27, 37 . La température étant une force scalaire, elle ne peut ni modifier les règles de sélection de polarisation ni supprimer la dégénérescence des modes vibrationnels. Cependant, elle peut affecter la fréquence et la largeur à mi-hauteur des phonons provenant de l’expansion de volume et des interactions des termes anharmoniques du potentiel d’énergie de vibration atomique. L’effet de température sur l’intensité de diffusion Raman trouve ses origines à partir des facteurs de population des phonons et également de la possibilité de faire varier une énergie de gap appropriée à la fréquence d’excitation (technique de diffusion Raman induite en température). La température peut être déduite par le rapport entre l’intensité du signal Nicolas Marquestaut 144 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Raman Stokes et l’intensité du signal Raman Anti-Stokes dépendants de la température de l’échantillon donné par nombre d’occupation de Maxwell – Boltzmann, présentée sous une forme différente dans le Chapitre I : ω IS = A S I AS ω AS 3 hω exp kT (4.3) Avec ω la fréquence Raman du pic de silicium exprimée en Hz, T la température en Kelvins, h constante de Planck égale à 1.05 x 10-34 J.s et k constante de Boltzmann égale à 1.38 x 10-23 J.K-1. IS et IAS font référence à l’aire intégrée des bandes Stokes et Anti-Stokes à puissance ω laser égale. La constante C = A S ω AS 3 dépend de la constante d’absorption optique, la section efficace de diffusion et le facteur de Rayleigh aux fréquences Stokes et Anti-Stokes. En considérant que l’absorption optique est constante et la section efficace de diffusion soient les mêmes pour les deux processus, on obtient une valeur de 0.8 pour la température la plus basse (salle)19, 38. Une valeur de température absolue à l’intérieur du fil ne peut être calculée. Pour ce faire il faudrait corriger la réponse spectrale du spectromètre qui n’est pas constante sur toute la gamme spectrale et qui dépend des réseaux et du détecteur. Seul un écart de température ∆T peut être obtenu. Les courbes des rapports d’intensité Stokes et Anti-Stokes sont tracées en fonction de la puissance en Figure 4.10. Figure 4.10 : Rapport des intensités Stokes et Anti-Stokes en fonction de la puissance laser à l’échantillon pour des longueurs d’onde dans le rouge (carrés pleins) et le vert (cercles pleins). Une échelle logarithmique est utilisée pour la puissance laser (utilisation de filtres de densité pour varier la puissance). Nicolas Marquestaut 145 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Pour les deux longueurs d’onde, le rapport des intensités Stokes et Anti-Stokes diminue avec la puissance laser irradiant le fil. Selon la formule de Maxwell - Boltzmann, une diminution du rapport des intensités est synonyme d’une élévation de la température. On peut donc conclure à un phénomène d’échauffement local dans les fils de silicium entrainé par l’accentuation de la puissance laser. Les rapports d’intensité diminuent plus rapidement pour une raie laser dans le vert plutôt que dans le rouge. Il nous faut considérer les profondeurs de pénétration différentes pour les deux longueurs d’onde laser. En effet, à λ = 514 nm, la profondeur de pénétration du faisceau laser dans le silicium est d’environ 0.68 µm tandis qu’à λ = 647 nm elle est d’environ 3 µm39, 40. On peut donc conclure que l’absorbance du laser de la maille cristalline du silicium est plus importante pour les longueurs d’onde dans le vert plutôt que dans le rouge. L’absorbance de la maille cristalline entraine donc une dilatation du volume et des interactions au niveau des termes anharmoniques des modes de vibrations phonons. Cet effet est plus influent pour les excitations de plus forte énergie du fait d’une meilleure absorbance laser du silicium se traduisant par un décalage en fréquence et un élargissement plus important. 3.2 Cartographies Raman Ces effets thermiques sont localisés par cartographie Raman en intégrant la bande à 521 cm-1 d’un nanofil de silicium de 90 nm de diamètre sans précurseur d’or. Des cartographies de largeur de bande à mi-hauteur et de rapport Stokes/Anti-Stokes sont également réalisées. Une longueur d’onde excitatrice dans le vert à 514 nm avec une puissance de 2 mW à l’échantillon et un temps d’acquisition de 0.5 s sont utilisées. Une platine piézoélectrique directement contrôlée par le logiciel du spectromètre déplace l’échantillon par pas de 50 nm. L’objectif est un 100X à air d’ouverture numérique 0.9 avec un trou confocal ouvert à 400 µm et des fentes d’entrée à 100 µm, enfin un réseau 600 traits/mm est utilisé. La résolution spatiale est limitée par le critère de Rayleigh en λ/2, c'est-à-dire approximativement 250 nm. Les cartographies sont présentées ci-dessous en Figure 4.11. Nicolas Marquestaut 146 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Figure 4.11 : Cartographies d’un nanofil de silicium de 90 nm de diamètre sans précurseur d’or (a) en intégrant le signal Raman, (b) la largeur à mi-hauteur et (c) le rapport d’intensité des bandes Stokes et Anti-Stokes, de la bande à 521 cm-1 du silicium, pour une longueur onde excitatrice dans le vert. L’intensité Raman et le rapport Stokes / Anti – Stokes de la bande à 521 cm-1 sont constants le long du fil de silicium (cf Figure 4.11a et c). La largeur de bande à mi-hauteur (Figure 4.11b) est homogène au centre du fil, par contre aux deux extrémités un élargissement légèrement supérieur est détecté. Aux extrémités, un échauffement faiblement supérieur aux autres zones du fil est remarqué, certainement du au confinement géométrique de l’irradiation. 3.3 Conclusion préliminaire Une étude comparative Raman a été menée sur un nanofil de silicium pour deux longueurs d’onde dans le vert et le rouge. Un effet de température est suggéré provoquant un décalage vers le rouge de la bande Stokes et un élargissement symétrique de celle-ci pour une augmentation de la puissance locale. Le rapport Stokes/Anti-Stokes décroissant pour une irradiation graduelle est apparenté à une augmentation locale de la température. Enfin, la cartographie nous renseigne sur un échauffement homogène le long du nano-objet. Pour des Nicolas Marquestaut 147 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche nanofils avec précurseur d’or résiduel, un échauffement local supérieur au reste du fil aurait probablement été détecté. Le couplage d’un spectromètre Raman avec un microscope AFM peut permettre dans ce cas, de détecter à la fois l’échauffement local et le relief de la zone apportant une dimension supplémentaire à la microscopie Raman confocale. 3.4 Application de la configuration TERS à la caractérisation de nanomatériaux Dans ce paragraphe, une approche combinant des mesures simultanées AFM et Raman est menée afin d’examiner des nanofils semi-conducteurs isolés avec des tailles différentes et des modifications de surface et de composition. Les échantillons sont déposés à la surface d’un substrat transparent en verre. Au préalable, un dépôt atomique d’oxyde d’aluminium par ALD (Atomic Layer Deposition) peut aider à stabiliser mécaniquement l’objet à la surface. L’imagerie d’un nanofil de silicium de 180 nm de diamètre est enregistrée simultanément en diffusion Raman confocale et microscopie AFM. En chaque point (X, Y), la platine de l’AFM est arrêtée 0.5 s afin de permettre l’acquisition simultanée d’un spectre Raman, d’un profil de force et de hauteur. Une matrice 64 x 64 points est enregistrée. Une pointe commerciale en nitrure de silicium (Veeco DNP) de constante de raideur 0.58 N.m-1 est utilisée. Un objectif 60X à air avec une correction d’épaisseur de lame 0.18 mm est employé irradiant le nanofil et la pointe avec une longueur d’onde dans le rouge à 647 nm à une puissance de 0.1 mW. L’image AFM de volume de force (mode particulier de l’AFM) et de hauteur ainsi que la cartographie Raman intégrant la bande à 521 cm-1 du silicium cristallin sont obtenues avec un pas de 62 nm. La pointe AFM est toujours en rétroaction avec la surface. Les cartographies Raman, de topographie et de force par AFM de nanofils de silicium sont présentées en Figure 4.12 ci-dessous. (a) Figure 4.12 : (a) Image de force AFM (b) Cartographie Raman de deux nanofils de silicium enchevêtrés obtenue par intégration de la bande à 521 cm-1 (c) Image topographique AFM en mode contact. Les 3 images sont obtenues simultanément. Nicolas Marquestaut 148 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche L’image Raman montre un signal intense au centre de l’objet alors qu’aux extrémités le signal est plus faible. Les images de force et de relief par microscopie à force atomique nous donnent des informations supplémentaires sur les fils de silicium, en fait il ne s’agit pas d’un objet unique mais d’un chevauchement de deux fils. La corrélation des données topographiques et vibrationnelles permise avec cette configuration nous donne des informations complémentaires. Ainsi, l’intensification Raman au centre de l’image résulte de la jonction des deux nanofils observée sur les images de force et de hauteur fournies par l’AFM et vice versa. Des défauts structuraux peuvent être caractérisés très précisément par ces deux techniques parfaitement complémentaires à de très petites échelles. Par la suite, en un point d’un nanofil de silicium de 90 nm de diamètre ont été enregistrés deux spectres, un premier avec une pointe AFM recouverte de 70 nm d’or à proximité de la surface puis un deuxième avec la pointe relevée. Dans cette expérience, un objectif 100X immersion huile d’ouverture numérique 1.4 est utilisé avec un faisceau laser de longueur d’onde 647 nm polarisé selon Z à l’aide du montage « doughnut » précité. Les 2 spectres sont montrés ci-dessous. Pointe Or Champ Proche Contraste 0.4 Champ Lointain Figure 4.13 : Spectres Raman locaux avec la pointe AFM en contact avec l’échantillon et pointe hors échantillon d’un nanofil de silicium de 90 nm de diamètre Nicolas Marquestaut 149 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Un contraste champ proche-champ lointain est observé, dû à un effet TERS pur. Le contraste peut être quantifié selon l’expression41 : Contraste = I CP I CL (4.4) et I Total −1 (4.5) I CL et ICL, ou ITotal, est ce qui est mesuré lorsque la pointe est en contact, basé Contraste = La somme de ICP sur la condition qu’il n’y a pas de contribution additionnelle à ITotal. Le signal de contact en Figure 4.13 est environ 40 % plus important que le signal sans pointe. Le contraste est donc dans ce cas égal à 0.4. Les conditions de polarisation, la forte ouverture numérique ainsi que l’or déposé au sommet de la pointe ont permis d’observer cette amplification locale du signal Raman apportée par la pointe. 4 Imagerie d’un nanofil de GaN Les nanofils de nitrure de gallium (GaN) semi-conducteurs à large bandgap sont des candidats très intéressants pour de futurs dispositifs nanométriques tels que les appareillages optoélectroniques à courte longueur d’onde (laser bleu), l’électronique haute température/haute densité, ou les capteurs pour applications biologiques42-44. Des nanofils de GaN sont obtenus en utilisant une approche de synthèse développée par Yang et coauteurs45, 46 [ ] . Brièvement, les nanofils 1 1 0 sont élaborés par croissance verticale sur un substrat Al2O3 avec une orientation (100) en utilisant le procédé de dépôt par vapeur chimique métalorganique (MOCVD). L’imagerie Raman en mode confocal de fils individuels a été réalisée au sein de notre laboratoire dès 2005 par F. Lagugné-Labarthet en collaboration avec le groupe de P. Yang afin de cartographier les modes Raman de nanofils de GaN uniques [ ] avec des orientations de l’axe de croissance selon les directions [001] et 1 1 0 avec une analyse en polarisation des modes phonons comme montré en figure 4.1447. Nicolas Marquestaut 150 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Figure 4.14 : Spectres Raman polarisés de nanofils isolés de GaN avec des orientations cristallographiques (a) [001] et (b) 1 1 0 47. [ ] Cette étude a montré que la microscopie Raman pouvait être utilisée pour distinguer sans ambiguïté les structures cristallines de nanofils avec des temps d’acquisition très courts (seconde). Cependant la résolution spatiale reste restreinte à la taille du spot du laser, c'est-àdire ~ 1 µm. Dans l’étude présente, nous avons étudié par effet TERS un nanofil isolé de GaN [1 1 0] unique en utilisant la combinaison d’un microscope à force atomique et d’un microscope confocal inversé. Les spectres Raman et les cartographies associées d’un objet unique de taille 200 nm de diamètre environ, sont collectés en mode confocal champ lointain et avec l’interaction d’une pointe d’un microscope à force atomique pour bénéficier de l’effet local d’amplification de la pointe. Les expériences sont conduites avec une pointe droite recouverte d’or à une excitation λ = 647 nm en mode gaussien et avec une pointe inclinée recouverte d’argent avec une excitation λ = 514 nm en mode gaussien. Des pointes AFM commerciales sont utilisées en mode dynamique contact intermittent (« tapping ») : Nanosensors PPP-NCHAu ; 330kHz ; 42 N/m avec 30 nm d’or et AdvancedTEC NC 335 kHz ; 45 N/m ; inclinées à 120° recouvertes de 30 nm d’argent. Un objectif de microscope 60X à immersion eau d’ouverture numérique 1.2 est employé. Le trou confocal est ouvert à 200 µm afin de discriminer la contribution champ proche du signal champ lointain et Nicolas Marquestaut 151 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche l’intensité laser est réglée à 100 µW. Le schéma du dispositif expérimental est donné en Figure 4.15. Figure 4.15 : Dispositif AFM/Raman utilisé dans cette étude. La pointe est soit droite, soit inclinée (montré ici). Le diamètre du fil est évalué à environ 200 nm par imagerie AFM (cf Figure 4.16). [ ] Figure 4.16 : (a) Image vidéo d’un nanofil de GaN 1 1 0 avec un 60X, O.N. 1.2 à immersion eau (b) Image AFM du même nanofil en mode non-contact. La largeur à mi-hauteur montre un diamètre de ~ 200 nm. Nicolas Marquestaut 152 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Figure 4.17 : (a) Section topographique (en volts) à partir d’un balayage AFM séquentiel (pas de 80 nm). La largeur à mi-hauteur indique un diamètre de 240 nm ce qui est surestimé comparé au diamètre nominal (200 nm) (b) Spectres Raman avec la pointe AFM recouverte d’or en contact avec le nanofil (c) Variation du signal Raman du mode E2 le long du profil du nanofil de GaN. Un nombre de points est d’abord défini selon une ligne transverse. Une fois asservie, les coordonnées (X, Y, Z) de la position de la pointe sont utilisées pour définir le profil topographique comme montré en Figure 4.17a. Il est important de noter que ces expériences sont menées avec une procédure pas à pas et non en mode continu AFM. Pour chaque position (X, Y, Z), la pointe s’arrête et un spectre Raman est acquis pour un temps d’acquisition de 10 s (cf Figure 4.17b). Deux bandes principales sont observées à 520 cm-1 et 568 cm-1 attribuées au silicium de la pointe et nitrure de gallium, respectivement. La variation en intensité Raman du mode E2 du GaN à 568 cm-1 le long du fil est montrée en Figure 4.17c. Malgré une épaisseur d’or de 30 nm sur la pointe, un fort signal du silicium est tout de même détecté en plus du spectre Raman du nanofil. Aucun fond de fluorescence n’est observé. Lorsque la pointe est rétractée au delà du micron, le signal diminue de façon significative comme montré en Figure 4.18a. Le profil Raman est tracé en Figure 4.18b. Nicolas Marquestaut 153 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Figure 4.18 : (a) Spectres Raman d’un nanofil de GaN en interaction avec une pointe en silicium recouverte d’or. La pointe est positionnée à 2 µm au dessus du nanofil (b) Variation du signal du mode à 568 cm-1 le long du profil du nanofil. Cependant, il n’a pas été possible d’obtenir une différence des deux spectres Raman champ proche-champ lointain. Le spectre Raman obtenu avec une pointe AFM relevée de 2 µm et la variation du signal à 568 cm-1 selon la coupe transverse du nanofil sont montrés en Figure 4.18. Ainsi, pour cet échantillon à cette longueur d’onde en particulier et avec les paramètres expérimentaux décrits ci-dessus, nous n’avons observé aucun effet TERS. Figure 4.19 : Spectres Raman d’un nanofil [1 1 0] . En haut : temps acquisition 60 s, trou confocal 400 µm, en bas temps d’acquisition 10 s et trou confocal 200 µm Nicolas Marquestaut 154 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Pour le même échantillon, nous avons utilisé une excitation laser à 514 nm (TEM 00) ainsi qu’une pointe inclinée recouverte de 30 nm d’argent, de façon à ce qu’une composante de la lumière polarisée linéairement et orientée transversalement soit selon l’axe de la pointe. Dans de telles conditions, la composante électrique de la lumière peut être localement amplifiée. De plus un dépôt d’argent a été effectué sur la pointe car ce métal a une activité SERS ou TERS plus prononcée lorsque la longueur d’onde d’irradiation est dans le vert. Dans cette configuration expérimentale, le pic à 520 cm-1 de la pointe recouverte d’argent est absent parce qu’une infime partie est irradiée par le faisceau laser du fait de la géométrie particulière. Les spectres Raman montrent également 2 bandes à 558 et 568 cm-1qui correspondent aux modes E1(TO) et E2 (high) de ce nanofil de GaN7, 47. En Figure 4.19 sont reportés les spectres de référence d’un échantillon de GaN acquis durant 60 s (trou confocal ouvert à 400 µm), et les spectres Raman avec la pointe soit en contact du nanofil, soit relevée de 2 µm au dessus de l’échantillon (10 s par point, trou confocal ouvert à 200 µm). Ces signaux sont comparables en intensité avec un fort mode E2 et un très faible mode E1. En Figure 4.20 est montrée la différence des deux spectres. Figure 4.20 : Signal de différence TERS (pointe en contact – pointe relevée). La principale différence apparaît pour le mode E1 (TO) à 559 cm-1. Aucun signal TERS n’est observé pour le mode E2 (high) De façon surprenante, aucun signal TERS n’est observé pour le mode intense E2 alors qu’un signal est mesuré pour le mode E1 (TO). Cet effet a récemment été reporté par Kawata et coauteurs48 sur un film mince de GaN sur un substrat Al2O3. Dans nos mesures d’imagerie, avec des temps d’acquisition plus courts (10 s par point), nous n’avons pu distinguer le mode A1 Nicolas Marquestaut 155 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche (TO) comme reporté par Kawata et co-auteurs. Cela est surement du au temps d’acquisition trop court utilisé. Néanmoins, l’imagerie du profil de hauteur du nanofil a pu être mesurée simultanément au profil du signal de différence Raman du mode E1 comme montré en Figure 4.21. Figure 4.21 : Profils de hauteur et différence Raman (signal pointe en contact – pointe relevée) de la bande E1 (TO) après intégration du domaine 554 – 571 cm-1. Les largeurs à mi-hauteur sont de 210 et 190 nm pour la hauteur et le signal TERS, respectivement, ce qui est en accord avec la section du fil mesurée en Figure 4.16. Cela montre que l’approche TERS peut être utilisée pas seulement pour les matériaux couches minces, mais également pour des objets isolés uniques. La spectroscopie Raman exaltée par une pointe implique que les règles de sélection dans les structures cristallines sont relaxées et que de nouveaux modes autrement oubliés peuvent être observés à l’échelle de nano-objets dus à la polarisation du champ induit par la pointe. Ces effets, reportés par Hallen et coauteurs49, 50, supposent que l’intensité Raman champ proche et les règles de sélection sont fortement dépendantes de la polarisation parallèle à l’axe Z du champ propagatif, perpendiculairement à la surface. Pour des matériaux cristallins, le facteur d’amplification TERS est dépendant de la symétrie du mode phonon et de la géométrie de la configuration. Les règles de sélection de la diffusion Raman exaltée par une pointe sont différentes des expériences conventionnelles champ lointain et de nouveaux modes peuvent être observés en géométrie TERS en particulier pour Nicolas Marquestaut 156 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche des structures cristallines comme développé en chapitre III du fait de l’effet de gradient de champ. Cela est particulièrement intéressant pour l’étude de cristaux uniques avec des dimensions nanométriques. Dans ces études préliminaires, nous avons montré qu’il est possible d’imager un nanofil unique isolé avec un diamètre d’environ 200 nm en collectant simultanément son profil topographique ainsi que son spectre Raman pour une section (ligne) définie. Cela peut être réalisé sur une cartographie 2D mais de plus longues acquisitions impliquent que le signal Raman doit être suffisamment intense. Au delà de l’aspect purement associé à l’imagerie, la spectroscopie TERS amplifie certains modes préférentiellement en fonction de la polarisation du champ incident, et de la symétrie des modes considérés. La spectroscopie TERS peut donc être considérée comme une nouvelle spectroscopie avec des règles de sélection spécifiques. 5 Substrats SERS Les substrats SERS caractérisés dans le chapitre II de cette thèse, sont utilisés afin d’étudier l’effet d’interaction d’une pointe métallique avec un objet en or fonctionnalisé par un système moléculaire azobenzène adsorbé à sa surface. Les réseaux de lignes d’or de 900 nm espacées de 350 nm sont utilisés. Ces motifs étudiés dans le chapitre II, montrent une efficacité SERS relativement faible comparée aux motifs de gaps inférieurs. Nous espérons ainsi, via une amplification par effet de pointe d’obtenir un signal Raman malgré la faible amplification de surface. Le protocole de couplage AFM/Raman est utilisé pour sélectionner une zone de scan sur l’image AFM enregistrée au préalable (cf Figure 4.22). Figure 4.22 : (a) Image AFM des lignes d’or de 900 nm de longueur espacées de 350 nm, de 60 nm d’épaisseur. Les profils topographiques et vibrationnels Raman sont réalisés transversalement à l’axe principal des lignes. Nicolas Marquestaut 157 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Une section transverse aux fils est choisie, avec des pas de 40 nm permettant d’enregistrer 110 spectres Raman pointe en contact et pointe relevée. En contact la pointe est positionnée en champ proche des substrats SERS puis relevée de 2 µm entre chaque point successif. Une puissance laser de 180 µW et un temps d’acquisition de 10 s par spectre sont paramétrés. Une pointe Nanosensors, PPP-NCH-Au Si3N4 recouverte d’or est utilisée. Dans cette expérience, le mode radial à 647 nm est employé afin de se placer dans les conditions optimales d’obtention d’un signal TERS. Les résultats sont présentés en Figure 4.23 ci-dessous. Pointe champ proche Pointe hors échantillon Figure 4.23 : Spectres pointe champ proche et sans pointe d’une monocouche d’azobenzène adsorbée sur les substrats SERS de lignes d’or. Lorsque la pointe est hors de l’échantillon, un signal Raman très faible est enregistré. En revanche, lorsque la pointe est en rétro-action sur la surface, un fort signal Raman est observé. Un effet TERS apparaît pour les bandes 1415, 1512 et 1544 cm-1, principalement. L’effet de pointe est constaté pour les 110 spectres enregistrés le long du profil, même si, ne sont présentés que les spectres en un seul point. Les spectres du système azobenzène obtenus par polarisation radiale sont différents de ceux en mode gaussien (cf Chapitre II). La composante de polarisation selon Z semble mettre en évidence d’autres modes de vibration de cette molécule non accessibles lorsque la polarisation est transverse. Ce résultat se rapproche des observations faites par Hallen et décrites au Chapitre III mettant en évidence un fort effet de polarisation selon la direction Z. Ces résultats semblent indiquer que nous sommes en présence d’un effet EGFR et que les vibrations possédant une composante perpendiculaire à la surface métallique sont activées. Les signaux TERS ne sont hélas pas constants le long du profil. En effet, des bandes non constantes en intensité sont observées ce qui ne permet pas de réaliser une cartographie vibrationnelle autour d’une bande spécifique des molécules Nicolas Marquestaut 158 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche d’azobenzène. Cet effet peut provenir d’effets d’exaltation trop importants engendrant de possibles effets thermiques. Il faudrait pour cela baisser la puissance laser à l’échantillon même si celle-ci est déjà de très faible intensité (180 µW). Toutefois, un signal TERS apparaît bel et bien en chaque point, démontrant ainsi une forte amplification due à la pointe. Une estimation de l’effet TERS peut être quantifiée selon l’approximation suivante tenant compte des volumes métalliques en interaction (pointe + substrat) ainsi que du nombre de molécules greffées sur les structures en or. EF = I CP VCL I CL VCP (4.6) et I V EF = total − 1 CL I CL VCP (4.7) VCL et VCP sont le volume d’or sur lequel sont greffées les molécules d’azobenzène des substrats SERS et le volume d’or de la pointe intensifiant le signal des molécules par interactions courte distance. Itotal est le signal Raman enregistré lorsque la pointe est en contact, égal à la somme des contributions champ proche et champ lointain et ICL le signal lorsque la pointe est hors de l’échantillon. L’objectif utilisé lors de ces expériences est un 60X immersion eau d’ouverture numérique 1.2. Le diamètre minimal sondé par cet objectif à λ = 647 nm est égal à (1.22 x 0.647)/1.2 = 0.338 µm. En reprenant l’équation (2.5) du chapitre II, la surface totale d’or sondée sur les substrats SERS est égale 0.035 µm2. L’épaisseur d’or étant 60 nm on obtient VCL = 2.1 µm3. Le rayon de courbure r des pointes recouvertes d’or est égal à environ 50 nm. VCL au sommet de cette pointe, en considérant la pointe comme une demi-sphère, est égal à 2πr3/3 d’où VCP = 2.61 x 10-4 µm3. Les intensités de la bande à 1415 cm-1 pointe contact et pointe non contact sont 950 et 60 coups, respectivement. Le coefficient d’amplification Raman est alors égal à 1.19 x 105. Malgré cette approximation de premier ordre, l’amplification Raman obtenue en combinant effet TERS et substrats métalliques en or est très importante, s’approchant des meilleurs résultats de la littérature récente.1-3. Dans cette étude, nous démontrons une exaltation très importante provenant d’une amplification extérieure, en l’occurrence une pointe. Le couplage d’un effet SERS (106, cf Chapitre II) avec cet effet TERS (105) peut à terme, permettre l’amplification du signal Raman d’une très faible quantité de molécules adsorbées, ainsi que l’imagerie vibrationnelle avec une résolution extrêmement bonne, à condition, toutefois, d’obtenir des spectres Raman exaltés constants au Nicolas Marquestaut 159 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche cours du temps. Il est à noter que dans cette étude, nous avons utilisé un mode radial mais son effet est peu étudié lors d’une interaction entre deux particules présentes selon l’axe de propagation du laser incident. De tels travaux doivent être complétés par des mesures expérimentales mais aussi des modélisations du champ EM dans une configuration similaire. Conclusion du chapitre IV Le dispositif TERS développé autour de deux instruments commerciaux, a permis des enregistrements simultanés de la topographie et du signal Raman via le protocole de communication. L’utilisation d’un mode optique de type « doughnut » qui, au point focal, a une forte composante longitudinale (i.e. selon le sens de propagation du faisceau laser) montre de forts effets d’exaltation en champ proche et par conséquent un accroissement de la résolution spatiale de la mesure Raman. En chaque point (X, Y), un signal Raman peut être enregistré à une position donnée de la pointe en champ proche ou en champ lointain La différence des deux spectres est proportionnelle au signal TERS qui peut être corrélé aux caractéristiques de l’objet. L’importance de la longueur d’onde excitatrice est une fois de plus soulignée. Travailler dans le vert influence plus nettement les caractéristiques des nanofils de [ ] silicium que dans le rouge. Pour les nanofils de GaN de type 1 1 0 , une pointe recouverte d’argent et une excitation à 514 nm sont les meilleures conditions pour observer un effet TERS marqué mais spécifique à un mode de vibration. Enfin, l’utilisation conjointe de substrats SERS en interaction avec une pointe du même matériau et d’un mode doughnut ont permis d’atteindre des amplifications TERS importantes (105). A terme, la combinaison de tout effet d’exaltation en combinant effet TERS et substrats SERS devrait permettre d’envisager des mesures sur des nano-objets avec une résolution spatiale de l’ordre de quelques nanomètres. De nombreuses contraintes physiques demeurent et des améliorations matérielles seront nécessaires mais la caractérisation AFM-Raman d’objets de quelques nanomètres à faible section efficace de diffusion voire de molécules uniques reste tout a fait envisageable. Nicolas Marquestaut 160 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche Références bibliographiques (1) Hayazawa, N.; Inouye, Y.; Sekkat, Z.; Kawata, S., Chem. Phys. Lett. 2001, 355, 369. (2) Stöckle, R.; Suh, Y. D.; Deckert, V.; Zenobi, R., Chem. Phys. Lett. 2001, 335, 131. (3) Sun, W. X.; Shen, Z. X., Ultramicroscopy 2003, 94, 237. (4) Hartschuh, A.; Qian, H.; Meixner, A. J.; Anderson, N.; Novotny, L., Surf. Int. Anal. 2006, 38, 1473. (5) Rasmussen, A.; Deckert, V., J. Raman Spectrosc. 2006, 37. (6) Stöckle, R. M.; Suh, Y. D.; Deckert, V.; Zenobi, R., Chem. Phys. Lett. 2000, 318, 131. (7) Saito, Y.; Motohashi, M.; Hayazawa, N.; Kawata, S., J. Microsc. 2008, 229, 217 (8) Kawata, S., Near-Field Optics and Surface Plasmon Polaritons, Topics in Applied Physics, Springer Ed. 2001. (9) Kawata, S.; Shalaev, V. M., Nano - Optics and Nano - Photonics, Elsevier Ed. 2007. (10) Quabis, S.; Dorn, R.; Leuchs, G., Appl. Phys. B 2005, 81, 597. (11) Saito, Y.; Kobayashi, M.; Hiraga, D.; Fujita, K.; Kawano, S.; Smith, N. I.; Inouye, Y.; Kawata, S., J. Raman. Spectrosc. 2008, 39, 1643. (12) Quabis, S.; Dorn, R.; Glöckl, O.; Reichle, M.; Eberler, M., Proc. SPIE 2000, 105, 4429. (13) Quabis, S.; Dorn, R.; Leuchs, G., Appl. Phys. B 2006, 81, 597 (14) Cui, Y.; Lieber, C. M., Science 2001, 291, 851. (15) Hart, T. R.; Aggarwal, R. L.; Lax, B., Phys. Rev. B 1970, 1, 638. (16) Tsu, R.; Hernandez, J. G., Appl. Phys. Lett. 1982, 41, 1016. (17) Chen, Y.; Peng, B.; Wang, B., J. Phys. Chem. C 2007, 111, 5855 (18) Chen, Y.; Peng, B.; Wang, B., J. Phys. Chem. C 2007, 111, 5855 (19) Balkanski, M.; Wallis, R. F.; Haro, E., Phys. Rev. B 1983, 28, 1928. (20) Fano, U., Phys. Rev. 1961, 124, 1866. (21) Nickel, N. H.; Lengsfeld, P.; Sieber, I., Phys. Rev. B 2000, 61, 15558. (22) Menagh, T. P.; Liu, L. G., J. Phys. Chem. Solids 1991, 52, 507. (23) Kohno, H.; Iwasaki, T.; Mita, Y.; Takeda, S., J. Appl. Phys. 2002, 9, 3232. (24) Meng, C. Y.; Chen, J. L.; Lee, S. C., Phys. Rev. B 2006, 73, 245309. (25) Fukata, N.; Matsushita, S.; Okada, N.; Chen, J.; Sekiguchi, T.; Uchida, N.; Murakami, K., Appl. Phys. A. 2008, 93, 589 (26) Colli, A.; Fasoli, A.; Ronning, C.; Pisana, S.; Piscanec, S.; Ferrari, A. C., Nano Lett. 2008, 8, 2188 (27) Adu, K. W.; Gutiérrez, H. R.; Kim, U. J.; Eklund, P. C., Phys. Rev. B 2006, 73, 155333. (28) Adu, K. W.; Gutiérrez, H. R.; Kim, U. J.; Sumanasekera, G. U.; Eklund, P. C., Nano Lett. 2005, 5, 410. (29) Sun, H. D.; Tang, Z. K.; Chen, J.; Li, G., Solid State Commun. 1999, 109, 365. (30) Konstantinovic, M. J., Physica E 2007, 38, 109. (31) Richter, H.; Wang, Z. P.; Ley, L., Solid State Commun. 1981, 39, 625. (32) Campbell, I. H.; Fauchet, P. M., Solid State Commun. 1986, 58, 739. (33) Chandrasekhar, M.; Renucci, J. B.; Cardona, M., Phys. Rev., B 1978, 17, 1623. (34) Jouanne, M.; Beserman, R., Solid State Commun. 1975, 16, 1047. (35) Cerdeira, F.; Cardona, M., Phys. Rev., B 1972, 5, 1140. (36) Balkanski, M.; Jain, K. P.; Beserman, R.; Jouanne, M., Phys. Rev. B 1975, 12, 4328. (37) Gupta, R.; Xiong, Q.; Adu, C. K.; Kim, U. J.; Eklund, P. C., Nano Lett. 2003, 3, 627. (38) Konstantinović, M. J.; Bersier, S.; Wang, X.; Hayne, M.; Lievens, P.; Silverans, R. E.; Moshchalkov, V. V., Phys. Rev. B 2002, 66, 161311. Nicolas Marquestaut 161 Institut des Sciences Moléculaires Chapitre IV : Résultats expérimentaux microscopie Raman Champ Proche (39) Feng, Z. C.; Mascarenhas, A. J.; Choyke, W. J.; Powell, J. A., J. Appl. Phys. 1988, 64, 6827. (40) Mehtani, D.; Lee, N.; Hartschuh, R. D.; Kisliuk, A.; Foster, M. D.; Sokolov, A. P.; Cajko, F.; Tsukerman, I., J. Opt. A : Pure Appl. Opt. 2006, 8, 183. (41) Lee, N.; Hartschuh, R. D.; Mehtani, D.; Kisliuk, A.; Maguire, J. F.; Green, M.; Foster, M. D.; Sokolov, A. P., J. Raman Spectrosc. 2007, 38, 789 (42) Choi, H.-J.; Johnson, J. C.; He, R.; Lee, S.-K.; Kim, F.; Pauzauskie, P.; Golberger, J.; Saykally, R. J.; Yang, P., J. Phys. Chem. B 2003, 107, 8721. (43) Huan, Y.; Duan, X.; Cui, Y.; Lieber, C., Nano Lett. 2002, 2, 101. (44) Pauzauskie, P.; Kuykendall, T.; Zhang, Y.; Goldberger, J.; Sirbully, D.; Denlinger, J.; Yang, P., Nat. Mater. 2004, 3, 524. (45) Johnson, J. C.; Choi, H.-J.; Knutsen, K. P.; Schaller, R. D.; Yang, P.; Saykally, R. J., Nature Materials 2002, 1, 106. (46) Kuykendall, T.; Pauzauskie, P.; Lee, S.; Zhang, Y.; Golberger, J.; Yang, P., Nano Lett. 2003, 3, 1063. (47) Pauzauskie, P.; Talaga, D.; Seo, K.; Yang, P.; Lagugné-Labarthet, F., J. Am. Chem. Soc. 2005, 127, 17146. (48) Matsui, R.; Verma, P.; Ichimura, T.; Inouye, Y.; Kawata, S., Appl. Phys. Lett. 2007, 90, 061906. (49) Ayars, E. J.; Hallen, H. D., Appl. Phys. Lett. 2000, 76, 3911. (50) Ayars, E. J.; Hallen, H. D.; Jahncke, C. L., Phys. Rev. Lett. 2000, 85, 4180. Nicolas Marquestaut 162 Institut des Sciences Moléculaires Conclusion générale et perspectives Conclusion générale et perspectives Dans ce mémoire de thèse, nous avons étudié les effets d’amplification du signal Raman par effet SERS et effet TERS. Ces deux approches développées au sein de l’Institut des Sciences Moléculaires en collaboration avec plusieurs groupes français et internationaux ont été menées sur plusieurs types d’échantillons comme des films mono-moléculaires ou des nanofils de matériaux semi-conducteurs. La fabrication de plateformes SERS basées sur des structures métalliques nanostructurées déposées sur verre a été réalisée par plusieurs approches incluant la fabrication de masques avec des nanoparticules de silice ou par lithographie électronique. Le développement du montage TERS en mode transmission est une partie importante de cette thèse. Ce projet a pu être réalisé dans le cadre de projets scientifiques soutenu par la Région Aquitaine, l’université Bordeaux 1, le CNRS et en collaboration avec des partenaires industriels afin de pouvoir combiner un microscope à force atomique et un microscope optique associé à un spectromètre Raman. La technique Langmuir – Blodgett habituellement utilisée pour transférer des films moléculaires sur des substrats (mono et multi – couches) a été utilisée en collaboration avec le groupe de S.Ravaine (CRPP) pour fabriquer des arrangements de billes de silice mésoorganisées en guise de masque. Un dépôt de métal noble (Or) a ensuite été réalisé pour créer les plateformes SERS. Des échantillons d’excellente qualité, de dimensions dont les tailles mises en jeu sont contrôlées en fonction du diamètre des billes ont ainsi pu être fabriqués et caractérisés. Ces échantillons ont été fonctionnalisés avec des molécules de type azobenzène via un greffage covalent sur l’or du fait de la présence d’un groupe thiol. Les spectres Raman exaltés de surface de ces échantillons ont mis en évidence des effets d’exaltation dont l’intensité est fonction des caractéristiques de la résonance plasmon et de la longueur d’onde d’irradiation. Grâce à des mesures spectroscopiques (micro UV-Visible et Raman), nous avons démontré que lorsque la lumière d’excitation se situe en résonance avec la bande LSPR, le facteur d’exaltation le plus fort est observé confirmant ainsi les travaux les plus récents de la littérature liant SERS et plasmonique. Des plateformes ont également été réalisées par lithographie électronique afin de mieux contrôler la reproductibilité de ces substrats et ajuster les paramètres morphologiques et géométriques de structures métalliques. Des motifs de taille et qualité comparables ont Nicolas Marquestaut 163 Institut des Sciences Moléculaires Conclusion générale et perspectives démontré des facteurs d’exaltation Raman de l’ordre de 105 hors conditions de résonance électronique. Par la suite, dans le but d’approfondir notre analyse, nous avons fabriqué d’autres types de réseaux, notamment des lignes et reporté leurs effets. Des ordres plasmoniques supérieurs (jusqu’au 7ie ordre) apparaissent par spectroscopie d’extinction. Cependant, les liens unissant la bande LSPR et la raie laser excitatrice ne sont pas aussi évidents que lors du cas précédent. Ainsi, des effets d’antennes et des phénomènes électrostatiques (effet paratonnerre) aux sommets de ces fils au fort rapport longueur/ largeur donnent à penser que l’effet de résonance plasmon n’est pas le seul facteur mis en jeu, bien qu’une relation avec les ordres plasmons supérieurs ait été démontrée. Des simulations numériques devraient permettre d’établir un lien entre les caractéristiques des antennes et leur réponse à un champ électromagnétique polarisé. L’adaptation de ces structures au sommet de fibres optiques peut, à terme, permettre la détection à distance de solutions très diluées ou le traçage biologique en milieu in-vivo de cellules et autres bactéries. Cette approche est multidisciplinaire car elle implique à la fois physique des matériaux, méthodes optiques et chimie moléculaire et ouvre de nombreuses possibilités et applications à condition de pouvoir maitriser la reproductibilité des effets obtenus. En deuxième partie de ce mémoire, l’effet TERS et ses différentes facettes sont développés. La combinaison la plus simple d’un microscope AFM avec des mesures spectrales est particulièrement intéressante pour caractériser des nano-objets afin de corréler topographie et réponse spectroscopique de zones bien définies. Au-delà de la corrélation entre mesures topographiques et optiques, nous avons mis en œuvre un tel dispositif afin de bénéficier d’effets locaux d’exaltation entre une pointe métallique et un objet d’intérêt. Cet effet TERS est mis à profit afin d’étudier dans un premier temps des objets unidimensionnels, tels que des fils de silicium et de nitrure de gallium cristallins. Des mesures de puissance sur des échantillons en silicium ont été réalisées au préalable afin de déterminer des effets thermiques. Les premières intensifications du signal Raman par une pointe métallique ont été obtenues sur ces mêmes fils. Une amélioration de la résolution spatiale en comparaison avec l’imagerie confocale a été démontrée. Sur une section d’un fil de GaN, la résolution spatiale de l’AFM a été obtenue par intégration du profil spectral d’une bande visible uniquement par effet TERS (558 cm-1). Enfin, les substrats SERS ont été utilisés comme échantillon et leur réponse optique étudiée en fonction de la distance de la pointe Nicolas Marquestaut 164 Institut des Sciences Moléculaires Conclusion générale et perspectives AFM. Nous nous sommes attachés à optimiser l’état de polarisation du champ électromagnétique incident afin de se placer dans les conditions favorables à une amplification du champ électromagnétique d’une pointe en or irradiée par un mode HG01. Une amplification du signal Raman de 5 ordres de grandeur a été obtenue mais des mesures supplémentaires doivent être conduites afin d’obtenir des résultats parfaitement reproductibles. Un point important sur ce montage expérimental est l’alignement critique de la pointe métallique au point focal. Une amélioration en cours de développement consiste à utiliser un système de miroirs galvanométriques, qui permettra de positionner parfaitement le laser d’irradiation au sommet de la pointe. Des améliorations peuvent également être apportées à la détection du signal. Un système de comptage de photons allié à une détection synchrone du signal calée sur la fréquence d’oscillation de la pointe AFM, permettront de mieux discriminer la contribution champ proche de celle en champ lointain. A terme, la combinaison AFM/Raman devrait permettre la localisation et la caractérisation sur les nanofils de précurseurs d’or résiduels, défauts cristallins, dopage en porteurs ou accepteurs de charges via effet Fano ou bien d’un confinement de phonons. La détection du signal Raman de molécules uniques peut également être envisagée grâce à l’extrême précision permise par ce dispositif expérimental mais des effets de résonance électroniques devront alors être mis à profit. Nicolas Marquestaut 165 Institut des Sciences Moléculaires