La construction sociale du masculin
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fondée sur le travail, permet d’illustrer cette constance : Depuis une trentaine d’années,
et ceci malgré l’accès massif des femmes au marché du travail et de nombreuses
adaptations formelles, la division selon le genre entre travail professionnel (salarié) et
travail domestique (qui reste non-rémunéré) n’a pour ainsi dire pas évolué. Il en va de
même de l’écart de salaires entre femmes et hommes, qui n’a subi qu’une très légère
baisse. En termes de pouvoir, cette situation se traduit par une sous-représentation
chronique des femmes dans les sphères dirigeantes du monde économique et politique.
De plus, les nombreuses violences dont font l’objet les femmes de la part des hommes
achèvent de souligner la dimension conflictuelle et hiérarchique des rapports de genre.
Les hommes, quant à eux, sont demeurés jusqu’à récemment absents dans les études sur
les inégalités entre les sexes, mais également dans les politiques publiques mises en
place pour tenter d’y répondre. Or, on pourrait dire que leur absence du discours sur le
Pouvoir, entendu comme concept théorique et politique, est à la mesure de leur
omniprésence dans la pratique du pouvoir. Parler du genre (ou du sexe), dans les
discours politiques mais aussi scientifiques, revient presque toujours à parler des
femmes, comme si les hommes n’y avaient pas leur place. Cela peut s’expliquer
aisément : tout rapport de domination étant fondé sur une asymétrie des groupes, les
dominants bénéficient précisément de l’avantage de ne pas être remis en cause en tant
que groupe, ce qui a entre autres effets d’occulter leur fonction dans le rapport
hiérarchique1. De même que la question de l’inégale répartition des richesses se réduit
souvent à une « lutte contre la pauvreté et l’exclusion » ou à une « sociologie de la
pauvreté », celle des inégalités entre hommes et femmes tend le plus souvent à se
concentrer exclusivement sur la situation de ces dernières, avec dans chaque cas pour
conséquence de ne pas s’intéresser aux privilèges, matériels et symboliques, des
dominants entendus à la fois comme individus et comme groupe. Dans cette optique, le
présent travail peut être précisément compris comme une contribution à une
1 Lorenzi-Cioldi (2002)