Des prairies qui produisent des céréales et donnent de l`herbe

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Agro-écologie : La Prairie Céréalière
Nous sommes face à une
prairie verdoyante qui attend d’ê-
tre pâturée. Le trèfle est présent,
du ray gras, de la fétuque aussi.
On y trouve aussi un peu de pis-
senlit, mais Luc ne s’en alarme
pas du tout. Que dire de son
âge? 3 à 4 ans ? Une prairie tem-
poraire dans la fleur de l’âge ?
Et bien non, nous sommes
devant une prairie céréalière, une
vieille-rajeunit dont 20 qx/ha de
mélange céréaliers, 4 t/ha de
paille et 2,7 t/ha de paille de bou-
che viennent de sortir cette an-
née. Le tout sans labour, engrais,
pesticides ni semences achetées.
« Et encore, ça avait versé, nor-
malement, ce sont 30 qx/ha at-
tendus ».
Comment est-ce possible ? Re-
montons ensemble l’historique de
cette parcelle pour comprendre
ce qui a été fait…
En fin d’été 2013, cette prai-
rie présente des signes de dys-
fonctionnement, elle commence
par être envahit par du pissenlit,
signe d’un excédent d’éléments
fertilisants, mais aussi des problè-
mes d’anaérobie dans le sol. Luc
décide donc de la passer en prai-
rie céréalière. Il rase donc bien la
prairie en juillet/août, passe le
rotalabour puis sème un mélange
céréalier en direct. Tout se passe
bien, la prairie, détruite à plus de
90 %, se régénère petit à petit,
tandis que le mélange céréalier
lève et se développe, accompa-
gné d’autres espèces fourragères
présentes dans le stock de semen-
ces du sol (Luc laisse monter en
graine ses prairies). Au printemps,
le mélange céréalier est bien dé-
veloppé et n’a pas souffert de la
concurrence avec la prairie. Luc
décide donc de ne pas intervenir
et attend l’été pour moissonner.
Début juillet, les céréales versent
sous le poids de l’eau et à cause
du pois qui a dominé le mélange.
Luc décide donc de moissonner à
15 cm de haut (20 qx + paille) et
attends 5 semaines que la prairie
ai repoussée avant de faucher à 5
cm et de récupérer une paille de
bouche (mélange de paille et de
foin).
Ailleurs, Luc avait procédé
de la même manière sur une an-
cienne prairie avec du dactyle.
La prairie gagne sur le mélange
céréalier au printemps et il décide
de faucher. Il obtient un mélange
de méteil et de foin, avec un ren-
dement estimé à 7,5 t brut/ha. 15
à 20 jours après, cette prairie était
pâturée par ses vaches.
Voilà pour les exemples pratique
de cette année. Dans le détail, la
maîtrise de cette technique repo-
se sur 4 moments cruciaux :
- Juillet-août : Que fais-je de mes
prairies ? Je laisse ou je passe en
céréales ?
- Mai : Qui a gagné ? Je fauche
ou je laisse pour moissonner ?
- Juillet : Quelle hauteur de cou-
pe ? Quelle vitesse de ventila-
tion ?
- Août : Je pâture, je fauche ou je
ressème la prairie ?
Pour que vous soyez capable de
reproduire cette technique si vous
le souhaitez, mais aussi car ces
questions sont riches en enseigne-
ment, nous allons les expliciter
l’une après l’autre.
Q°1 : Comment choisir les prairies
à rajeunir ?
Des prairies qui produisent des céréales et donnent
de l’herbe fraîche de 5 semaines au mois d’août ?
C’est la prairie céréalière...
Cela fait plusieurs années que Luc Friconneau s’essaie à la pratique de semis de mélanges céréaliers dans ses
prairies. Bon an mal an, il perfectionne petit à petit cette technique qui préserve la fertilité de ses sols tout en lui
garantissant une grande autonomie, des fourrages de qualité et des faibles coûts de production. Nous avons
décortiqué pour vous cette technique qui a toute sa place dans les systèmes herbagers pâturants.
Automne 2014
L’ATOUT TRÈFLE 75
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Agro-écologie : La Prairie Céréalière
Le choix des prairies repose
en premier lieu sur vos besoins,
chez Luc, environ 1/4 de son asso-
lement doit être en prairie-
céréalière pour qu’il soit autono-
me. Partant de ça, il analyse l’en-
semble de ses parcelles et choisit
celles qui présentent des déséqui-
libres tels que : compaction,
anaérobie, blocage des nutri-
ments ou encore excès d’azote.
Le recours aux plantes bio-
indicatrices, permet de dresser ce
diagnostique avec précision. Par
exemple, s’il y a beaucoup de
chardons et de pissenlit, c’est que
le sol est compacté et ne respire
pas (anaérobiose) mais est néan-
moins riche en éléments fertilisant
(rapport C/N faible). Le passage
en prairie céréalière permettra au
sol de s’aérer (possibilité de dé-
comptacter si besoin) et à la prai-
rie de se régénérer. La culture va
agir comme une pompe à nutri-
ments et le rapport C/N va aug-
menter.
Le schémas ci-dessous résume les
principaux cas rencontrés.
Q°2 : Qui a gagné?
Au printemps, il faut analy-
ser la prairie céréalière pour voir si
le mélange céréalier est en train
de se faire dominer. De manière
générale, si, de visu, la prairie
présente plus de 50 % de la surfa-
ce, la décision de faucher est pri-
se. Si elle est dense, mais basse, il
n’y a pas trop à craindre. Mais la
concurrence n’est pas le seul cri-
tère de choix, s’il y a beaucoup
de plantes indésirables, la déci-
sion sera de faucher pour ne pas
laisser le tout monter en graine.
Cette année par exemple, le
dactyle a dominé une des parcel-
les, Luc ne voulait pas laisser cette
plante grainer et il a donc déci-
der de faucher. Par contre, si la
prairie contient des plantes à bon-
ne valeur fourragère et qu’elle
n’étouffe pas le mélange céréa-
lier, il est alors intéressant de lais-
ser aller jusqu’à maturité. Ici aussi
la connaissance des plantes bio-
indicatrices aide à prendre la
bonne décision.
Q°3 : Comment moissonner ?
Au moment de moissonner,
la question de la hauteur de cou-
pe et de la vitesse de ventilation
se pose. En ce qui concerne la
hauteur, plus on coupe bas, plus
on a d’herbe et l’on s’oriente alors
vers une paille de bouche. Plus on
monte, et plus on aura de paille.
Les besoins en paille et fourrage,
mais aussi la hauteur de pousse
de l’herbe sous le couvert définis-
sent alors cette hauteur. En ce qui
concerne la ventilation, cela dé-
pend des besoins en semences
fourragère et de l’historique de la
parcelle. Si elle fournissait un four-
rage de qualité pour les vaches,
diminuer la vitesse permet alors
de récupérer des graines que l’on
peut supposer de bonne qualité
fourragère.
Q°4 : Pâturer, faucher ou
ressemer ?
Dernière étape, dernière
question. Après la moisson, le sol
est humide, la prairie retrouve la
lumière et la chaleur. En 4 à 5 se-
maine, la prairie céréalière est
couverte d’une herbe fraîche. Un
bonus d’herbe qui tombe à pic
en été sec. Pas besoin de parcelle
parking, car un nouveau cycle de
pâturage peu commencer. Par
contre si l’été est humide et qu’on
dispose de surfaces encore pâtu-
rable, il faudra peut-être en fau-
cher une partie. Enfin, si la prairie
n’est pas bien repartie et que la
densité de fourrage est faible, Luc
décide parfois de pâturer bien ras
et de sursemer des espèces four-
ragères (environ 10kg de mélan-
ge).
T.S.
La rédaction de cet article a été
soutenu par le FEADER.
Quelques chiffres (2013/2014)
Charges opérationnelles
Prairies temporaires : 29 €/ha
Mélange céréalier : 182 €/ha (61 €/t)
Produits prairie céréalière
Rendements : 30 qx/ha
3 t paille/ha
1,5 t paille de bouche/ha
pâturage d’août = 2 000 kg Lait /ha
Au niveau de l’exploitation
Coût alimentaire = 79 €/1000 L
Marge brute = 427 €/1000 L
= 1 572 €/ha SFP
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