La RMN de Bourgogne. - Olympiades de Physique

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Benjamin BARTHOD-MALAT |
Cécile BRÜTT | Floriane LEBLOND
Olympiades de
Physique
I.R.M et R.M.N de
Bourgogne
2011-2012
Avec l'aide de MM. BARTHES et LANGLOIS,
Lycée Gustave Eiffel, Dijon
Résumé
L'IRM et la RMN sont des appareils d'imagerie et de caractérisation de la
matière utilisant tous deux le même principe qu'est la résonance des atomes
d'hydrogène dans un champ magnétique. Devant la difficulté de reproduire un tel
appareil dans une salle de travaux pratiques, nous avons essayé de dégager les
principes de bases de leur fonctionnement. Pour cela nous avons utilisé des aimants
pour représenter les atomes d'hydrogène et nous avons étudié leur comportement
dans un champ magnétique statique accompagné d'un champ magnétique variable.
Dans le cadre de ces Olympiades de la Physique, nous nous sommes intéressés au
principe de résonance magnétique nucléaire (RMN). Ce principe quantique est à la base de
l'imagerie par résonance magnétique (IRM) utilisé pour le diagnostic médical. Il s'applique
également dans la recherche puisqu'il permet de «cartographier» les molécules les plus
complexes et d'accéder à toutes les informations concernant leur structure.
A la suite d'une visite à la faculté de Dijon, nous nous sommes demandés s'il était
possible d'expliquer simplement le principe de résonance magnétique nucléaire en le
modélisant, et s'il était envisageable d'utiliser ce principe pour réaliser une acquisition IRM
à notre tour...
I.] La Résonance Magnétique Nucléaire
1. Notre point de départ : la visite de l'Université de Dijon
Grâce à notre professeur de physique-chimie de seconde, M. Nancey, nous sommes
intéressés à la physique quantique et nous avons eu la chance de pouvoir visiter les
installations de RMN de l'université de Dijon.
Courant novembre 2010, nous sommes allés visiter le laboratoire du docteur Michel
Picquet à l'Institut de Chimie Moléculaire de l'Université de Bourgogne (Icmub). Pour
satisfaire à ses thèmes de recherche, il utilise quotidiennement des appareils dont le
fonctionnement est basé sur la résonance magnétique nucléaire et qui lui permettent
d'obtenir, après traitement par transformée de Fourier, des spectres similaires à celui
donné ci-dessous. Ces derniers lui permettent de déterminer les structures des molécules
synthétisées. D'autres techniques existent : l'imagerie infrarouge, la spectrométrie de
masse, la diffraction des rayons X.
Il nous a expliqué que la réponse des noyaux dépend de l'environnement dans
lequel ces derniers se trouvent ; grâce à des tables existantes, il est possible de
déterminer, en fonction de la réponse, l'environnement dans lequel se trouve le noyau. On
peut donc aboutir à une reconstitution de la structure de la molécule.
Il a également évoqué la notion de moment gyromagnétique, ce dernier étant créé
par le mouvement de rotation du noyau sur lui-même. On peut également l'appeler spin
(to spin = tourner) et se le représenter comme un vecteur.
Pour réaliser une spectrophotométrie par résonance magnétique, il faut tout d'abord
orienter tous les spins dans le même sens : l'échantillon est donc immergé dans un champ
magnétique principal très intense.
Puis une onde électromagnétique d'une fréquence particulière est envoyée sur les
noyaux : les spins, qui étaient tous alignés, vont basculer perpendiculairement. On arrête
l'émission de cette onde : le noyau va chercher à revenir à sa position d'équilibre, en
oscillant autour de son orientation initiale jusqu'à se stabiliser. C'est cette oscillation qui est
enregistrée (la courbe est une sinusoïde amortie en fonction du temps).
Une transformée de Fourier permet par la suite d'obtenir l'intensité en fonction de la
fréquence à la place de l'intensité en fonction du temps initiale. Cela permet de pouvoir
étudier un spectre où les différentes fréquences apparaissent. On revient alors au principe
de départ : les fréquences de résonance obtenues dépendant de l'environnement, on peut
savoir comment la molécule est constituée.
Dans les faits, le champ magnétique principal intense est produit à l'aide de
supraconducteurs, c'est-à-dire de conducteurs qui n'ont quasiment aucune résistance. Cela
se concrétise par l'absence d'alimentation électrique pour ce champ puisque les 84
ampères d'intensité circulent dans la bobine sans aucune perte depuis l'installation des
machines.
Ces dernières avaient l'aspect de cuves gigantesques ; pourtant, la bobine supraconductrice est d'une taille minime par rapport à la machine dans son ensemble. Cela
s'explique par la présence, autour de la bobine, de deux couches de liquides de
refroidissement : les matériaux utilisés ne sont supra-conducteurs qu'à très basse
température, d'où la présence d'une première enceinte d'hélium liquide (4 K) et d'une
deuxième d'azote liquide (qui évite l'évaporation de l'hélium liquide très coûteux). Ces
fluides cryogéniques sont remplacés à hauteur de 2000 litres d'azote liquide par an et
environ 1000 litres d'hélium.
Nous étions en présence de trois appareils de tailles différentes. En effet chacun
avait un champ magnétique d'une intensité différente, allant de 7 à 14 Teslas. Ces valeurs
sont très importantes devant celle du champ magnétique terrestre, qui est de l'ordre de la
dizaine de microteslas. Des passeurs d'échantillons sont installés afin que les acquisitions
s'enchaînent 24 heures sur 24.
Dans le domaine de l'imagerie médicale, les champs magnétiques mis en places ont
au maximum une intensité de 3 teslas ; la différence est dans la résolution. En effet, la
précision utile pour repérer une tumeur ou une zone cancéreuse dans le corps humain
(échelle macromoléculaire) est largement moindre à celle utile pour comprendre comment
s'organisent les éléments dans une molécule.
Au-delà de l'explication théorique, M. Picquet nous a fait travailler à notre tour et
réaliser une vraie RMN.
Nous nous sommes heurtés au problème des isotopes « silencieux » : par exemple,
le carbone 12, qui est le plus répandu dans la nature, n'a pas de spin puisque son nombre
de protons est pair. Par conséquent la RMN du carbone se base sur le carbone 13, qui est
beaucoup moins répandu (1,1%). Donc sur un échantillon présentant cent atomes de
carbone, en moyenne, seul un répondra. Cela oblige les chercheurs à travailler sur des
quantités plus importantes de matière, de vingt à trente fois plus importantes que dans le
cas de la RMN de l'hydrogène, où l'isotope le plus répandu a un spin. Mais dans ce cas, le
solvant ne doit présenter aucun atome d'hydrogène car ce dernier répondrait et fausserait
les résultats : nous avons donc utilisé du chloroforme deutérié CDCL3 où les atomes
d'hydrogène avaient été remplacés par des atomes de deutérium.
La durée d'acquisition dépend de la quantité de matière à analyser, mais également
de la nature des noyaux que l'on va faire répondre. En effet, la réponse du carbone 13 est
6000 fois moins intense que celle de l'hydrogène.
Nous avons étudié le méthanol, l'éthanol et l'isopropanol.
Cette visite nous a permis de constater que le principe physique auquel nous nous
intéressons pouvait être exploité pour connaître la structure de molécules bien plus
compliquées que l'éthanol.
Spectre RMN de l’isopropanol
Photographie et vue en coupe d'un spectromètre RMN.
2. Une première expérience de démonstration
a. Le champ magnétique principal
La première étape a été de reproduire le champ magnétique principal utilisé en
RMN pour orienter tous les spins. Celui-ci doit être assez puissant, mais également
homogène. Ainsi, nous nous sommes intéressés à plusieurs types de bobines pour choisir
celle qui répond le plus à nos besoins. Nous avons tout d'abord mesuré le champ à
l'intérieur d'un solénoïde. Il s'est avéré constant, mais la forme de la bobine ne convenait
pas pour la réalisation de nos mesures.
Comme le montre le schéma ci-après, les lignes de champ créées par une bobine
simple s'incurvent immédiatement hors de la bobine : la zone où le champ magnétique est
homogène (dans le rectangle bleu) est très restreinte et cela ne convient pas pour aligner
plusieurs aimants sur une zone étendue.
Finalement, nous avons opté pour deux bobines de Helmholtz : ce sont deux bobines
plates identiques, séparées par une distance égale à leur rayon et qui ont la particularité
de générer un champ magnétique constant et homogène dans la surface qui les sépare.
Représentation des lignes de champ magnétique entre deux bobines de Helmholtz
4,5
4
3,5
3
2,5
Série1
2
1,5
1
0,5
0
0
5
10
15
20
25
Champ B
position
3,47
3,74
3,85
3,88
3,9
3,85
3,74
3,49
3,1
2,69
2,26
1,87
1,49
1,2
0,96
0,77
0,62
0,52
0,42
0,35
0,3
Graphique montrant l’évolution de B selon la position à l’intérieur des bobines.
Ces valeurs sont obtenues pour un rayon égal à l’écartement entre les bobines (6,5cm).
Nous obtenons donc un champ magnétique important et homogène sur une surface
suffisante pour pouvoir installer notre dispositif.
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
b. L'analogie proton-aimant
Dans ce champ magnétique, nous avons placé un aimant que nous assimilons à un
proton, c'est-à-dire à un noyau d'hydrogène. En effet, le proton possède un spin et aura
donc tendance à se comporter comme notre aimant.
Le spin peut être représenté par le vecteur S, dont la direction est celle de l'axe de
rotation
Or toute charge en mouvement induit autour d'elle un champ magnétique : il s'agit du
moment magnétique nucléaire représenté sur la figure 2 par le vecteur µ, qui a même
sens et même direction que le vecteur S.
On peut donc assimiler le proton à un aimant ayant un pôle Nord et un pôle Sud.
En l’absence de champ magnétique,
l’orientation est aléatoire.
Le champ magnétique B0 oriente l’aimant.
Une fois l'aimant aligné dans le champ magnétique principal, nous avons placé une
seconde bobine plus petite à proximité de celui-ci, de façon à ce que son champ
magnétique soit perpendiculaire au champ principal. Cette petite bobine est reliée à un
GBF permettant un balayage de fréquence. Cette bobine, que nous appellerons par la suite
bobine excitatrice, crée un champ magnétique variable, qui permet de faire osciller
l'aimant.
Ensuite, pour les données transmises par l'oscillation de l'aimant, nous avons ajouté une
bobine réceptrice créant un signal corrélé à la réponse de l'aimant.
c. La bobine réceptrice : à la découverte de l'induction
Nous savions qu'une bobine traversée par un courant créait un champ magnétique :
nous avons estimé que l'inverse pourrait être vrai, c'est-à-dire que la variation de champ
magnétique à proximité d'une bobine pourrait créer une différence de potentiel aux bornes
de cette bobine... Afin de vérifier cette hypothèse, nous avons pris une bobine et nous
l'avons reliée à un galvanomètre. Nous avons pu constater que lorsque nous approchons
l'aimant permanent de la bobine, l'aiguille quitte sa position initiale (premier schéma) : un
courant transitoire est donc apparu. (schéma 1). Puis, lorsque le mouvement de
rapprochement s'arrête, l'aiguille reprend sa position initiale (0)-(schéma 2 ). En éloignant
l'aimant de la bobine, un courant transitoire est de nouveau créé, de sens opposé au
premier. (schéma 3).
Nous avons donc bien un courant induit par la mise en mouvement d'un aimant
permanent devant la bobine. Si nous répétons les étapes précédentes plusieurs fois de
suite, c'est à dire approcher et éloigner l'aimant de la bobine, un courant alternatif est
généré par ce principe d'induction.
C'est ce principe d'induction qui nous permet de récupérer le signal d'excitation de
nos aimants. En effet, en se mettant en mouvement à proximité de la bobine réceptrice,
ils créent du fait de la variation de champ magnétique une différence de potentiel aux
bornes de celle-ci.
Cette tension est récupérée et envoyée au système d'acquisition. Cependant elle est
faible et doit être amplifiée afin d'être exploitable. Nous avons donc recours à un système
d'amplificateur opérationnel dont le schéma est donné ci-dessous.
Schéma 1
Schéma 2
Schéma 3
Celui-ci est composé de trois parties :
- en violet, l'amplificateur (signal V2 en sortie)
- en vert, un autre amplificateur utilisé en filtre passe-haut (signal V3 en sortie)
-en bleu, un filtre électronique qui réduira le bruit (les parasites)et détectera l'enveloppe.
(signal V4 en sortie)
d. La réponse du proton : excitation et relaxation
Dans un premier temps, nous avons observé les effets du champ magnétique sur
une boussole que nous déplacions à l'intérieur du champ magnétique principal. La
boussole présentait un avantage : les frottements entre l'aiguille et son support étant
limités, les oscillations étaient plus libres. Cependant du fait de sa légèreté et de sa petite
taille, la réponse magnétique de l'aiguille était bien trop faible pour être quantifiée. Nous
avons donc dû trouver un moyen d'avoir une aiguille oscillant librement sur un axe fixe.
Nous avons opté pour des Géomag : une bille en fer entourée de deux aimants, un
de couleur rouge et un autre gris. Les frottements sont minimisés car il n'y a quasiment
pas de contact entre les composants de l'aiguille. De plus, la différence de couleur entre
les deux aimants rend les oscillations de l'aiguille beaucoup plus visibles.
Pour réaliser notre expérience, nous avons fait générer un champ magnétique de
fréquence variable dans la bobine excitatrice afin de faire osciller l'aiguille, tout en
récupérant le signal avec la bobine réceptrice. A une certaine fréquence, on peut
remarquer que l'aiguille se met à osciller très fortement : on obtient une oscillation
d'amplitude maximale. La fréquence particulière correspondant à cet état d'excitation est
appelée fréquence de résonance.
Cette fréquence de résonance précède une phase de relaxation : quand la bobine
excitatrice n'émet plus cette fréquence de résonance, l'aiguille retrouve progressivement
son orientation initiale (celle du champ principal) en oscillant librement.
Le signal obtenu est ensuite traité par ordinateur : on applique la transformée de
Fourier (une opération mathématique), comme les chercheurs le font, pour obtenir la
réponse de l'aimant en fonction de la fréquence et non en fonction du temps.
Fréquence de résonance de l'aiguille, matérialisée un pic.
Ainsi, nous avons pu scinder en plusieurs parties indépendantes le système
permettant d'obtenir la réponse du proton par résonance magnétique nucléaire.
Nous pouvons conclure que ces différentes parties sont :
- le champ magnétique principal, puissant et homogène sur une zone étendue,
alignant tous les spins,
- un champ magnétique secondaire, perpendiculaire au premier, dont la fréquence est
variable et qui va amener le proton à sa phase d'excitation,
- une troisième bobine utilisée en récepteur afin de pouvoir quantifier la réponse du
proton.
3. L'influence de l'environnement : comment expliquer un spectre RMN ?
a. Influence de l'intensité
Pour comprendre d'où viennent les différences entre les réponses des différents éléments,
nous nous sommes intéressés aux paramètres faisant varier la fréquence de résonance.
Tout d'abord, nous avons fait varier l'intensité du courant appliqué aux bobines de
Helmholtz sans déplacer l'aiguille et en lui opposant toujours le même champ magnétique
secondaire variable. L'intensité du courant est donc le seul paramètre variant d'une
acquisition à une autre.
Évolution de la fréquence de résonance de l'aiguille en fonction du courant présent dans les bobines
Le graphique ci-dessus montre que la fréquence de résonance se déplace en
abscisses en fonction de la variation de l'intensité dans les bobines (toutes les courbes ont
mêmes ordonnée).
Ainsi, nous avons remarqué que la fréquence de résonance est proportionnelle à
l'intensité du courant présent dans les bobines de Helmholtz. Le champ magnétique étant
lui-même proportionnel à l'intensité du courant, nous en avons déduit que la fréquence de
résonance est proportionnelle au champ magnétique. Pour toutes les mesures suivantes,
nous avons donc toujours conservé le même champ magnétique homogène.
b. Vers une interprétation d'un spectre RMN.
Voici le spectre RMN de l'éthanol. C'est la courbe à laquelle nous nous sommes le
plus intéressés.
Les expériences suivantes ont pour but de comprendre et de modéliser simplement
les différents phénomènes mis en évidence par ce spectre. Nous allons nous intéresser à
deux particularités de celui-ci : d'une part, nous avons remarqué que tous les « pics » des
fréquences de résonance ne se situent pas au même endroit, et d'autre part que certains
pics, notamment celui du CH2 sont en fait constitués de pics multiples.
c. Interaction des noyaux « muets »
Nous avons placé un aimant fixe à proximité de notre aimant-proton dans le but de
modéliser l'interaction d'un atome d'oxygène ou de carbone 12 sur un proton de la
molécule.
La présence de l'aimant ajouté à notre dispositif modifie bien la fréquence de
résonance, cela est même visible. Mais la fréquence évolue selon deux critères : la force
de l'aimant et l'éloignement. Lorsque l'aimant est trop éloigné de l'aiguille, son influence
n'est plus visible. C'est pourquoi l'atome d'oxygène de l'éthanol interagit seulement avec le
proton le plus proche.
d. Influence du couplage
Nous avons ensuite placé une autre aiguille, similaire à la première, et avons
observé l’influence de sa présence sur la fréquence de résonance de l'aiguille initiale.
Nous constatons que l'aiguille ne présente plus une seule, mais deux fréquences de
résonance, l'une plus basse et l'autre plus haute que la fréquence de résonance de
l'aiguille seule. Ce couplage nous a permis de comprendre l'influence que deux protons ont
l'un sur l'autre.
Plus nous avons approché nos deux aiguilles, plus les fréquences de résonance se
sont éloignées
En rapprochant suffisamment les aiguilles, la deuxième fréquence de résonance
était assez élevée pour être audible (30 Hz).
Mesures expérimentales des deux fréquences de résonance d'une aiguille lors d'un couplage entre
deux aiguilles identiques
La courbe bleue présente les deux pics de résonance lorsque les deux aimants sont
assez éloignés, et la courbe rouge lorsqu'ils sont proches. La différence d'écart entre les
deux fréquences est bien visible : la flèche rouge est beaucoup plus longue que la flèche
bleue, bien que la deuxième aiguille ne soit approchée que de quelques millimètres de la
première.
Cette expérience permet de comprendre l'apparition de pics multiples : lorsque
plusieurs protons sont proches les uns des autres, un couplage se créée et des fréquences
de résonance multiples apparaissent. Sur le spectre RMN de l'éthanol, le pic du CH2 est
particulier : en effet, si l'on observe attentivement, on distingue non pas deux, mais quatre
pics. Les deux protons interagissent l'un sur l'autre comme lors de notre expérience, mais
en plus de cela, le champ magnétique de l'un agit sur le champ magnétique de l'autre,
entraînant un deuxième couplage.
Ce couplage se limite aux protons présents dans le même groupe : sur ce même
spectre, on peut voir que seuls les deux noyaux d'hydrogène de CH2 interagissent l'un sur
l'autre, alors que d'autres protons sont présents dans OH et CH3. Pourtant, théoriquement,
cet autre couplage devrait apparaître...
e. Particularité à basse température
Ce couplage inter-groupes n'est visible qu'à basse température. Comparons le
spectre RMN du méthanol à 240 K et à 300 K.
On voit que lorsque la température diminue, le couplage présent sur OH (vers 2,3
ppm) se précise. Quatre pics apparaissent clairement alors qu’ils n’étaient pas définis à
300 K. Cela montre bien la présence de trois autres protons dans la molécule CH3-OH.
Pour expliquer cela, il faut d’abord parler de l’échange des protons. La liaison O-H
est plus faible que la liaison des H avec les C. Ce qui fait que les protons des groupes
alcool auront tendance à s’échanger les uns les autres entre les différentes molécules ; le
signal est alors élargi et le couplage est présent mais masqué. En fait, le refroidissement
de la solution ralentit l’échange des protons. Cet échange se faisant par le biais de la
consommation d’énergie contenue dans le milieu, si le milieu est froid, il a y a moins
d’énergie et l’échange se fait plus lentement. Par conséquent on pourra détecter le H d’un
groupe alcool avant qu’il n’ait eu le temps de passer sur une autre molécule. Le signal est
donc plus clair et on peut remarquer que ce couplage existe bel et bien.
Il existe deux autres moyens de ralentir l’échange afin d’obtenir un couplage net :
ajouter dans le milieu un aimant puissant (qui modifiera la fréquence de résonance des H
et, une fois de plus, permettra de ralentir l’échange) ou diluer l’échantillon afin
d’ « éloigner » les molécules les unes des autres.
II.] L'Imagerie par Résonance Magnétique
1.Principe global
L'Imagerie par Résonance Magnétique se base sur le même principe que la RMN et
les mêmes technologies, à une échelle différente. C'est une technique d'imagerie médicale
utilisée pour repérer une zone de plus forte densité (correspondant souvent à une tumeur
ou à un cancer) ou les zones d'activité du cerveau. Par exemple, c'est grâce à l'IRM que
l'on sait quelles zones du cerveau sont touchées par la maladie d'Alzheimer.
Il s'agit d'un outil de prédilection dans le domaine du diagnostic médical, puisqu'il
n'est pas invasif et n'irradie pas le sujet (rappelons que d'après le bulletin « Contrôle »
n°192 de l'Autorité de Sûreté Nucléaire, sur les 3,7 mSv absorbés par an par habitant, 1,8
sont dus à l'exposition médicale aux rayonnements ionisants).
Dans les faits, la réalisation d'une IRM correspond sous plusieurs aspects à la
réalisation d'une spectrophotométrie RMN : le même principe quantique est utilisé, mais à
une échelle moindre. Ainsi, il nous était plus simple d'envisager de réaliser une IRM qu'une
RMN.
Nous avons gardé notre aiguille-proton qui cette fois devient une aiguille-tumeur.
Nous l'avons placée dans le même champ magnétique constant qu'auparavant, sur un
support en bois (afin de ne pas modifier les propriétés du champ magnétique). De plus,
nous avons ajouté un gradient de champ afin de faire varier progressivement le champ
magnétique global d'un bout à l'autre du support. Les mouvements de l'aiguille suite à une
impulsion varient en fonction de l'intensité champ et donc de sa position : nous pouvons la
localiser en fonction de sa réponse.
2. Gradient de champ
Afin de pouvoir localiser l'aiguille à l'intérieur des bobines de Helmholtz, nous avons
créé un gradient de champ magnétique que nous avons placé dans le champ magnétique
principal.
Ainsi, l'aiguille est soumise à un champ magnétique différent en fonction de sa
position. La fréquence de résonance de l'aiguille étant liée à la valeur du champ
magnétique qui l'entoure, nous pouvons déterminer la position de l'aiguille en comparant
les différentes fréquences.
Nous avons d'abord essayé de placer un aimant en-dehors des bobines de
Helmholtz. Les résultats n'étaient pas satisfaisants car le champ magnétique créé était
bien trop faible, et l'aimant n'étant pas fixe, les résultats n'étaient pas reproductibles.
Pour résoudre le problème d'intensité du champ créé, nous avons placé de chaque
côté de la surface un aimant, placé en opposition de champ par rapport à l'autre.
Néanmoins, le champ magnétique n'était pas linéaire, et le problème de reproductibilité
était toujours présent.
Nous avons donc choisi d'insérer les aimants dans la plaque sur laquelle l'aiguille est
placée. Notre gradient de champ varie entre 1,5 et 3,6 mT et entre les deux extrémités de
notre surface (23 cm). Nous avons obtenu 2 Hz de différence entre les fréquences de
résonance aux positions extrêmes : cette différence nous permet de localiser l'aiguilletumeur en fonction de sa réponse.
Pour éviter que deux réponses à deux positions différentes ne soient trop proches, il
nous fallait obtenir un gradient de champ le plus linéaire possible. En effet, plus le champ
est régulier, plus nous pouvons être précis dans nos mesures, et ainsi faire varier la place
de l'aiguille sur davantage de positions. Cela a occupé une bonne partie de notre temps de
travail puisqu'il a fallu disposer des aimants de différentes forces en opposition et mesurer
au teslamètre jusqu'à trouver une combinaison convenant à nos besoins...
Nous obtenons finalement un gradient globalement linéaire, comme le montrent les
valeurs suivantes et le graphique correspondant.
GRADIENT DE CHAMP
x
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
B
1,66
1,74
1,83
1,94
2,03
2,14
2,19
2,26
2,35
2,47
2,53
2,66
2,79
2,88
3,03
3,22
3,37
3,5
3,6
BIRM
4
3,5
3
2,5
B (m T)
2
1,5
OD : oeil droit
CG : corne gauche
C : coquille
GS : glande salivaire
1
0,5
0
3
8
13
18
23
x (cm )
Fréquence de résonance mesurée à la position des différents organes
OD
CG
C
GS
4,82Hz
5,12Hz
5,64Hz
6,40Hz
Comme nous l'avons montré au début de notre découverte des propriétés de la
fréquence de résonance, cette dernière évolue selon l'intensité du champ magnétique
principal : ainsi, nous disposons d'un gradient de champ permanent. On constate bien une
différence de 2 Hz entre les positions extrêmes (« OD » et « GS »).
Dans les faits, nous commençons par faire un étalonnage des différentes positions.
Nous nous sommes inspirés des « tables de RMN » grâces auxquelles Michel Picquet
pouvait identifier l’environnement dans lequel le proton se trouve en fonction de sa
réponse.
Etalonnage montrant les quatre fréquences différentes.
En conclusion, nous arrivons à repérer la position de l’aiguille sur une dimension.
Lorsqu’une IRM est réalisée, ce repérage s’effectue sur deux dimensions ; il existe deux
gradients sur chacune.
Bien que cela soit à une échelle différente, nous sommes donc parvenus à créer un
dispositif d’IRM avec le matériel de laboratoire.
Nous avons également tenté de faire une RMN de l’eau avec nos moyens mais cela
s’avère impossible. En effet, nous avons calculé à l’aide du rapport gyromagnétique que la
réponse des molécules d’H20, pour un champ B0 de 10 mT, se situerait aux alentours de
100 MHz.
Cette fréquence est très élevée. Si les générateurs dont nous disposons peuvent
tout à fait atteindre ces hautes fréquences, le problème se situe dans les nombreux fils
dont nous nous servons, qui ne sont pas blindés : ils constituent, pour cette plage de
fréquence, de vraies antennes. De plus, le traitement électronique de telles fréquences
s’avère difficile. Enfin, la réponse des molécules d’eau serait très faible : impossible de
récupérer un signal peu important avec autant de parasites…
Dispositif final, permettant le diagnostic par
IRM
Bibliographie
Ouvrages :
Pour la Science n°378, avril 2009, « L’imagerie RMN »
Pour la Science n°338, décembre 2005, « Diffusion de l’eau et IRM »
Pour la Science n° 378, avril 2009 « L'imagerie RMN miniaturisée »
Jean-Philippe Dillenseger, Elisabeth Moerschel, J.-L. Dietemann et A. Constantinesco, mai
2009, Guide des technologies de l’imagerie médicale et de la radiothérapie : Quand la
théorie éclaire la pratique, éd. Masson
Gunther, 1994, La spectroscopie RMN, éd. Masson
Contrôle de l’Autorité de Sûreté Nucléaire n°192, juillet 2011, « Imagerie médicale :
maîtriser les expositions aux rayonnements ionisants ».
Sites web consultés :
www.chemistry.ccsu.edu/glagovich/teaching/316/nmr/couplingoxygen.html : « Why don’t
protons on oxygen split adjacent hydrogens ? »
http://www.lachimie.fr/analytique/rmn/frequence-larmor.php au sujet du rapport gyromagnétique
Remerciements
Le docteur Michel Picquet, maître de conférence, enseignant-chercheur à l’Université de
Bourgogne
Le personnel du laboratoire de RMN de Dijon, pour sa disponibilité et sa patience,
l’Institut de Chimie Moléculaire de l’Université de Bourgogne
La plateforme RMN de Dijon
Loïc Nancey, pour nous avoir lancés dans cette aventure
Le soutien des professeurs et aides de laboratoire du lycée Eiffel.
Sommaire
I.] La Résonance Magnétique Nucléaire
1. Notre point de départ : la visite de l'Université de Dijon
page 3
2. Une première expérience de démonstration
a. Le champ magnétique principal
page 6
b. L'analogie proton-aimant
page 8
c. La bobine réceptrice : à la découverte de l'induction
page 10
d. La réponse du proton : excitation et relaxation
page 12
3. L’influence de l’environnement : comment expliquer un spectre RMN ?
a. L’influence de l’intensité du champ B0
page 14
b. Vers une interprétation d’un spectre RMN
page 15
c. Interaction des noyaux « muets »
page 16
d. Influence du couplage
page 16
e. Particularité à basse température
page 18
II.] L'Imagerie par Résonance Magnétique
1. Principe global
page 20
2. Gradient de champ
page 20
Bibliographie
page 24
Remerciements
page 25
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