aujourd’hui, au-delà des querelles d’écoles, ce sont
l'expertise clinique et la dimension qualitative des
psychothérapies qui sont passées au crible. Il s’agit de
prendre en compte les variables individuelles, l'interaction
entre le soignant et le soigné, tout en s'efforçant de saisir les
principes fondamentaux de la méthode utilisée face à une
situation psychopathologique spécifique.
Le Dr Palazzolo a passé en revue certaines études ayant
rapporté que le facteur thérapeute influence plus la
variabilité des résultats obtenus que la technique utilisée.
En analysant la pratique de thérapeutes rapportant "peu de
résultats satisfaisants", les chercheurs ont mis en évidence
l’existence accrue d’expériences déstabilisantes, stressantes,
voire à terme de désengagement chez ces praticiens.
D’autres études ont suggéré que les résultats de la thérapie
dépendent en grande partie de la capacité d’adaptation du
thérapeute. Les praticiens rapportant les meilleurs résultats
seraient les thérapeutes capables d’ajuster leurs approches
au profil de leur interlocuteur, c’est-à-dire à être attentifs au
feedback
de leurs patients, ou même des proches du
patient. Dans ce cadre, le thérapeute devient plus sensible
au contexte interactif et à l’expérience subjective du
patient, tout en restant à l’écoute sur sa propre expérience
émotionnelle.
Ainsi, un certain profil de thérapeutes serait en train de se
dégager aujourd’hui ; des thérapeutes qui bien sûr doivent
maitriser des théories, des techniques mais qui sont aussi
capables de les utiliser sans rigidité dogmatique et de
s’adapter au contexte en fonction du
feedback
de leur
patient.
De son côté, le Dr Philippe Huguelet (Genève) pose une
autre question : "La religion peut-elle être utile au soutien
de nos patients ?"
Le Dr Huguelet est directeur de la consultation des Eaux-
Vives à l’hôpital universitaire de Genève. Lors du CPNLF, ce
spécialiste de l’interface entre religion et psychiatrie a
exposé les raisons pour lesquelles il juge audacieux de
prendre en compte la religiosité potentielle des patients
dans l’échange thérapeutique, même lorsque le thérapeute
est lui-même agnostique ou issu d’une culture à spiritualité
autre que celle du patient.
La religion et la psychiatrie n’ont pas toujours fait bonne
entente, surtout en France, où les psychiatres sont très peu
formés à l’interface religion-psychiatrie. Cependant, note le
Dr Huguelet, le fait est que la religion est pourvoyeuse de
sens existentiel chez de nombreux individus. La spiritualité
permet en effet de générer chez certains un but, un espoir,
et peut ainsi être qualifiée de méthode de "
coping
" - une
stratégie que l’on met en place pour faire face aux difficultés
de la vie.
Le
coping
religieux peut être positif (par exemple la prière
peut aider un individu à diminuer ses anxiétés) ou négatif
(par exemple la lecture de la Bible qui renforcerait la
4Post Scriptum
L E S E C H O S D U C P N L F. . . L E S E C H O S D U C P N L F. . .
significative en terme de taux de mortalité par suicide en
faveur du dispositif de soutien à distance.
En France, une expérience similaire a été menée dans le
Nord-Pas-de-Calais, où 13 des 16 services d’urgence de la
région se sont associés pour tester un système de veille
téléphonique des sujets récemment admis aux urgences
pour une tentative de suicide. Les résultats se sont révélés
positifs, avec deux fois mois de tentatives enregistrées à un
an. Une étude randomisée de grande envergure vient d’être
mise en route, visant à tester plusieurs modèles pour
dégager le meilleur algorithme de veille et de soutien à
distance, qui pourrait ensuite être déployé sur tout le
territoire Français à un coût raisonnable.
Mais "Peut-on évaluer l'efficacité d'une psychothérapie ?"
s'interroge le Dr Jérôme Palazzolo (Nice).
Alors que la méthodologie d’évaluation des thérapeutiques
médicamenteuses est aujourd’hui bien établie, quand il
s’agit d’évaluer "l’efficacité" d’une psychothérapie, les avis
divergent systématiquement et donnent lieu à de nombreux
débats. Lors de son intervention, le Dr Palazzolo a présenté
l’évolution actuelle des tentatives d’évaluation, en gardant
à l’esprit une question centrale: "Peut-on vraiment parler
d’évaluation dans un domaine qui a avant tout à voir avec
l’humain et la rencontre singulière entre un patient et un
thérapeute ?"
Comme dans tout domaine scientifique, les psychothérapies
ont d’abord été soumises aux critères d’efficacité et de
rentabilité de l’
evidence-based medicine
. L'efficacité
générale des psychothérapies puis l'efficacité relative des
différentes approches ont été évaluées. Cependant, cette
méthode d’analyse ne faisant pas consensus, la dynamique
de recherche s’est petit à petit recentrée sur une question
en lien direct avec la pratique clinique : "Pourquoi et
comment une psychothérapie marche-t-elle ?" Ainsi,
Le Dr Jérôme Palazzolo