ce n’est pas dire qu’il est arbitraire : il y a de bonnes raisons de douter, ce sont elles qui sont
progressivement mises en place dans Med 1. C’est plutôt dire qu’il s’agit d’une résolution difficile,
et qu’il faut, pour réussir à respecter cette résolution, mettre en place certaines procédures
artificielles, les raisons de douter précisément.
Cinquièmes réponses, AT IX, p. 204 : pource que c’est une action de la volonté que de iuger ou ne pas iuger,
ainsi que j’au expliqué en son lieu, il est évident qu’elle est en nostre pouvoir : car enfin, pour se defaire de toute
sorte de préjugez, il ne faut autre chose que se resoudre à ne rien assurer ou nier de tout ce qu’on avoit assuré ou
nié auparavant, sinon après l’avoir derechef examiné, quoy qu’on ne laisse pas pour cela de retenir toues les
mesmes notions en sa memoire. J’ay dit neantmoins qu’il y avoit de la difficulté à chasser ainsi hors de sa
creance tout ce qu’on y avoit mis auparavant, party à cause qu’il est besoin d’avoir quelque raison de douter
avant que de s’y determiner : c’est pourquoy j’ai proposé les principales en ma premiere Meditation : & partie
aussi à cause que, quelque resolution qu’on ait prise de ne rien nier ni assurer, on s’en oublie aisement par après,
si on ne l’a fortement imprimée en sa memoire : c’est pourquoy i’ai desiré qu’on y pensast avec soin.
— Systématique, il concerne toutes les connaissances absolument. Il ne s’agit pas seulement
de mettre en doute ce qui n’est pas vrai, ou ce dont on se demande si c’est vrai, mais aussi ce qui
nous paraît vrai. Pourquoi cela ? Parce que le fait de mettre en doute toutes les connaissance est le
seul moyen de faire le tri entre les connaissances indubitables et les autres.
Comparaison employée par Descartes : si l’on veut trier les pommes pourries et les pommes
saines d’un panier, il faut commencer par toutes les sortir du panier pour les examiner l’une après
l’autre.
Septièmes objections, ici in FA II, p. 982 : Si d’aventure il avait une corbeille pleine de pommes, et qu’il
apprehendât que quelques-uns ne fussent pourries, et qu’il voulût les ôter, de peur qu’elles ne corrompissent le
reste, comment s’y prendrait-il pour le faire ? Ne commencerait-il pas tout d’abord à vider sa corbeille ; et après
cela, regardant toutes ces pommes les unes après les autres, ne choisirait-il pas celles-là seules qu’il verrait n’être
point gâtées ; et, laissant là les autres, ne les remettrait-il pas dans son panier ? Tout de même aussi, ceux qui
n’ont jamais bien philosophé ont diverses opinions en leur esprit qu’ils ont commencé à y amasser dès leur plus
bas âge ; et, appréhendant avec raison que la plupart ne soient pas vraies, ils tâchent de les séparer d’avec les
autres, de peur que leur mélange ne les rende toutes incertaines. Et, pour ne se point tromper, ils ne sauraient
mieux faire que de les rejeter une fois toutes ensemble, ni plus no moins que si elles étaient toutes fausses et
incertaines ; puis, les examinant par ordre les unes après les autres, reprendre celles-là seules qu’ils reconnaîtront
être vraies et indubitables.