LA MORT SUBITE DE L’ADULTE Dr Rémy DALL’ANESE Cardiologue Membre du Club des Cardiologues du Sport LA MORT SUBITE DE L’ADULTE est très peu connue ou médiatisée, mais constitue un véritable problème de santé publique responsable de 30 000 à 50 000 décès par an en France. L’arrêt cardiaque se produit dans 80% des cas à domicile, avec un témoin dans un cas sur deux mais moins de 5% des Français sont formés aux gestes de première urgence. Ceci justifie l’importance des mesures de préventions d’une part et d’autre part des gestes de premiers secours avec la généralisation d’appareillages de réanimation comme LES DEFIBRILLATEURS SEMI AUTOMATIQUES. La mort subite de l’adulte est un décès brutal, survenant dans l’heure suivant les symptômes quels qu’ils soient. La cause de décès est d’origine cardiaque dans 80% des cas. Avant l’âge de 35 ans, il existe des maladies cardiaques spécifiques susceptibles de provoquer un trouble du rythme cardiaque létal. Après l’âge de 35 ans, 80% des cas de mort subite font suite à un infarctus du myocarde compliqué d’un trouble du rythme cardiaque brutal, paroxystique et fatal. Pour plus de la moitié des cas, l’événement survient chez un sujet n’ayant pas d’antécédent cardiovasculaire connu. Il existe des causes plus rares de mort subite d’origine cardiaque faisant suite à la prise de produits illicites (cocaïne, …) ou le cas très particulier du commotio cordis, où le décès est provoqué par un choc sur la poitrine par un projectile (palet de hockey, coup de point dans le sternum, …), mais également des causes non cardiaques (respiratoires, métaboliques, neurologiques, …) Il apparaît donc que les personnes présentant des facteurs de risque cardiaque tels que le tabagisme, l’hypercholestérolémie, l’hypertension artérielle, le diabète, ont un risque potentiel de maladie coronarienne et donc d’événement cardiaque plus important. Toutefois Il semble exister des facteurs plus spécifiques à un risque de mort subite comme un antécédent de mort subite d’un ou des deux parents, le statut diabétique, une obésité abdominale, un profil de fréquence cardiaque particulier, un taux élevé d’acide gras libres circulants, l’absence d’activité physique, un stress aigu (tremblement de terre, acte terroriste, …), et une consommation d’alcool (surtout de vin rouge) soit nulle soit trop forte, (jamais plus de 4 verres en usage ponctuel, pas plus de 3 verres d’alcool par jour chez l’homme et pas plus de 2 verres chez la femme non enceinte). Ainsi le médecin pourra, par l’interrogatoire, l’examen clinique, un électrocardiogramme (recommander à tous sujet dès l’âge de 12 ans) évaluer le potentiel risque d’accident. Selon les cas il pourra recourir à des examens de sang ou à un test d’effort par un cardiologue. Il est à signaler qu’un sédentaire, défini par l’OMS comme un sujet effectuant moins de 30 minutes de marche quotidiennement, cours un risque d’accident cardio-vasculaire dans les premiers temps de reprise d’une activité sportive multiplier par 107, mais avec rapidement de nombreux bénéfices médicaux à condition que la pratique soit régulière et modérée. On recense en effet en France entre 1500 à 4000 décès durant l’activité sportive (décès sur terrain de sport comme le footbaleur Marc Vivien Foë le 26 juin 2003 à Lyon), et entre 5 000 et 6 000 infarctus du myocarde au cours ou au décours de l’effort, avec dans ce cadre, très fréquemment des symptômes négligés ou mal évalués par le sujet (cigarette d’après effort, …) Une conduite préventive consiste donc dans la correction des facteurs de risques de la maladie coronarienne, mais certaines mesures semblent avoir un impact plus spécifique sur le risque de mort subite comme la pratique régulière de l’exercice physique modéré ou la consommation de poisson gras deux fois par semaine. Voire même la consommation raisonnée et raisonnable de vin rouge, mais sur ce point, il n’y a pas à l’heure actuelle de preuves suffisantes pour favoriser la consommation d’un sujet abstinent. La mort subite est une urgence vitale absolue où chaque minute compte ; 1 minute sans manoeuvre de réanimation fait perdre 10% de chance de survie. Autrement dit, d’un point de vue purement mathématique, au bout de 10 minutes d’arrêt cardiaque on a 100% de risque de ne pas en survivre. Il reste donc à améliorer la prise en charge de l’arrêt cardiaque en dehors de l’hôpital. En effet, LES POMPIERS (18) ou LE SAMU (15) ont un délai d’action, au mieux, de 10 à 20 minutes. Selon les recommandations actuelles éditées en 2005, la consigne est de « FAIRE PLUS SIMPLE POUR ALLER PLUS VITE ». L’urgence est de rétablir une circulation sanguine, la ventilation par le bouche-àbouche devenant secondaire. Il faut respecter les « 4 MAILLONS DE LA CHAINE DE SURVIE » avec une ALERTE PRECOCE, débuter les PREMIERS GESTES QUI SAUVENT, puis une DEFIBRILLATION PRECOCE et enfin une REANIMATION SPECIALISEE. La première conduite impérative est de s’assurer de la SECURITE du témoin et du sujet. Il faut ensuite reconnaître l’arrêt cardio-respiratoire en 10 secondes, en évaluant l’état de conscience de la victime (secouer les épaules et crier "ça va ?… vous m’entendez ?... serrez-moi la main !… ouvrez les yeux !…») et l’absence de mouvement respiratoire normal. La prise du pouls carotidien ou fémoral ne doit plus être faite, car sa recherche est trop imprécise et parfois difficile dans ce contexte, avec un risque de perte de temps et donc de chance de réussite de la réanimation. A noter que l’arrêt cardiaque est souvent d’origine respiratoire en cas de noyade, d’asphyxie, ou chez le jeune enfant. En cas de réponse il faut laisser la victime dans la position où elle est le mieux, évaluer les détresses éventuelles, et ALERTER les secours (15 ou 112 ou 18). En l’absence de réponse : ALERTER les secours (15 ou 112 ou 18). L’heure précise de début de l’arrêt cardiaque doit être notée. Les renseignements fournis doivent être simples mais précis, avec le lieu, les moyens de liaison (téléphone portable), des informations sur la victime et son état. Dans le doute les éventuels témoins de l’arrêt cardio-circulatoire doivent débuter sans retard, les premiers gestes de réanimation car ils ne sont pas dangereux pour une personne qui n’en n’a pas besoin. Il n’y a aucun risque médico-légal à le pratiquer. Mieux vaut sans retard un massage cardiaque imparfait sans ventilation associée qu’aucune prise en charge avec un risque fatal rapide (chaque minute perdue est définitive…). Il ne faut pas, même pour vérifier les signes de vie, interrompre la réanimation jusqu’à l’arrivée des secours. La réanimation doit être commencée par le massage cardiaque externe à un rythme de 100 compressions par minute. Il doit être énergique et profond (« PUSH HARD AND PUSH FAST » appuyer fort et appuyer vite). La technique des compressions thoraciques peut, même dans le contexte de l’urgence, être enseigné par téléphone. Le massage, peut dans les premières minutes, être réalisé sans ventilation. En effet, l’organisme dispose d’un stock de sang oxygéné qu’il faut faire circuler sans attendre. Ainsi cela pourrait supprimer les réticences liées à la crainte d’une contamination ou la peur de ne pas savoir coordonner les manœuvres. Si l’on pratique un cycle massage/ventilation, les recommandations actuelles proposent une alternance de 30 compressions pour 2 ventilations brèves d’1 seconde après avoir libérer les voies aériennes. Le massage cardiaque devrait donc être un geste civique. La Croix-Rouge Française, le SAMU ou d’autres organismes de secourisme organisent des formations pour toutes personnes volontaires. Ainsi aux Etats-Unis, à Seattle, ces consignes simplifiées ont permis de faire passer le taux de succès de réanimation de l’arrêt cardiaque jusqu’à 30% au lieu de moins de 5%. Le taux de survie sans séquelle après arrêt cardiaque varie entre 2 et 5% en France. Il est de 30 voire de 50% aux Etats-Unis qui possèdent un programme d’accès du grand public aux Défibrillateurs Semi Automatiques. Air France qui dispose de tels appareillages évalue à 17% le taux de survie sans séquelles lors d’événement dans ces avions. Le décret du 27 mars 1998 autorise l’emploi de cet appareillage au personnel médical ou non médical, après formation et recyclage annuel. Toutefois le décret du 5 mai 2007 déclare que « Toute personne, même non médecin, est habilitée à utiliser un défibrillateur automatisé externe », qui correspond à un appareillage « totalement » autonome. Le Défibrillateurs Semi Automatique est un boîtier très simplifié de 2 à 5 kg, muni de 3 boutons de couleurs, avec des électrodes cutanées autocollantes enduites de gel. Une fois installé, une voix de synthèse donne des ordres simples. Le système analyse le rythme cardiaque de la victime, et propose, s’il existe alors un trouble du rythme cardiaque grave, la délivrance d’un choc électrique. Le choc est délivré volontairement en appuyant sur le bouton approprié. Toute la procédure est enregistrée sur une carte mémoire de plusieurs heures. L’appareil coûte entre 1000 € et 1500 €. En France, il est de plus en plus répandu dans les ambulances, chez les pompiers, dans certaines entreprise (EDF, Peugeot, …) dans les avions de lignes (depuis 1997 chez American Airlines, Air France, …), mais également dans les lieux publics (aéroports, gares, casinos, supermarchés, parcs d’attractions) ou lors d’événement à forte concentration (spectacle, manifestation sportives, meetings, …) Les Défibrillateurs Semi Automatiques devraient être encore plus répandus. De la même façon que les extincteurs sont obligatoires dans tous les lieux publics, ce type d’appareillage doit se développer dans les villes sur des points stratégiques (et pourquoi pas chez le particulier). Il existe l’exemple de la ville de Monaco qui, dès 2001 sous l’impulsion du Prince Rainier III, a installé 9 défibrillateurs semi-automatiques dans des lieux de grande fréquentation sécurité (centre commercial, héliport, plage, centre de congrès, stade, hôtels, palais princier), sous la responsabilité des personnels de sécurité. L’expérience s’est poursuivie en octobre 2005, par la mise à disposition de 25 Défibrillateurs Semi Automatique dans les rues de la principauté après une formation appropriée de la population volontaire. Dr DALL’ANESE rémy CARDIOLOGUE 68 rue du Palais Gallien 33000 BORDEAUX la chaîne de survie Un des 25 Défibrillateur Semi Automatique dans la ville de Monaco (octobre 2005) Défibrillateur Semi Automatique dans la ville de Monaco (octobre 2005)