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Jésus-Christ vrai Dieu et vrai homme
Ce parcours sur le Credo 2012/2013 s’inscrit dans ce qui a été initié l’an dernier (découverte du Dieu
créateur et Père) et dans la proposition faite par Benoît XVI de vivre une année de la foi (cf. extrait de
Porta Fidei).
Quels sont les articles qui expriment la foi de l’Eglise à propos de Jésus-Christ, deuxième personne
divine ? :
- Nicée : « Je crois en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, du Père avant
tous les siècles. Il est Dieu, de Dieu, lumière, née de la lumière, vrai Dieu, du vrai Dieu.
Engendré, non pas créé, de même nature que le Père, et par lui tout a été fait. Pour nous les
hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel. Par l'Esprit-Saint, il a pris chair de la Vierge
Marie, et s'est fait homme »
- Symbole des apôtres : « Et en Jésus Christ son Fils unique, notre Seigneur, qui a été conçu du
Saint Esprit, est né de la Vierge Marie… »
Regardons successivement la double origine de Jésus qui nous est révélée dans l’Ecriture ; que
signifie l’affirmation : Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme ; le pourquoi de l’Incarnation ; le
comment de l’Incarnation ; les titres du Seigneur (Jésus, Christ, Kyrios, Fils unique de Dieu).
1. La double origine de Jésus dans la Révélation
Matthieu et Luc, dans les évangiles de l’enfance, nous parlent de l’enfance de Jésus avant de nous
présenter son ministère. Leurs récits apportent une double réponse à la question de l’origine de
Jésus :
- Jésus a une origine humaine : il est de Marie ; il est descendant de David. Les articles
suivants le rappelle : « il a pris chair de la Vierge Marie » ; « né de la Vierge Marie »
- Jésus une origine divine : son Père est Dieu lui-même. Les articles suivants le rappelle : « né
du Père avant tous les siècles » ; « conçu du Saint Esprit »
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L’origine humaine de Jésus
Entre saint Luc et saint Matthieu les récits évangéliques de l’enfance de Jésus ne concordent pas, ce
qui veut bien dire que ce sont d’abord et avant tout des constructions théologiques qui cherchent à
dire quelque chose de la foi de l’Eglise naissante au sujet de Jésus. Observons ces récits pour dégager
ce qui les caractérisent (termes employés, structure...) et ce dont ils sont porteurs au sujet de la
personne de Jésus-Christ :
- les récits d’enfance usent de termes propres aux humains et parlent de « l’enfant », du
« petit enfant Jésus », du « nouveau- » (Lc 1, 4 ; Lc 1, 80 ; Lc 2, 7 ; Lc 2, 12 ; Lc 2, 27... En
cela, ils mettent en avant son humanité
- le récit de l’annonciation, dans l’évangile de Luc (Lc 1, 26-45), renforce ce que l’on vient
d’observer, car il exprime que Jésus est d’une femme, Marie. Il est donc pleinement
homme. Il ne vient pas de nulle part (il ne « tombe pas du ciel », si l’on ose dire), mais il entre
dans le lot commun de toute humanité : naissance d’une femme, croissance, éducation... Il a
été confié au corps, puis aux mains et à l’éducation d’une femme, assistée par Joseph son
époux
- Les généalogies de Lc et de Mt :
o la généalogie de saint Matthieu fait remonter l’origine de Jésus à Abraham,
montrant ainsi que l’existence de Jésus s’enracine dans l’histoire du peuple hébreu.
Elle est construite selon 3x14 générations. Le premier ensemble culmine avec David
(v. 6) ; le second s’arrête au temps de la déportation (v. 11), le moment le plus
douloureux de l’histoire dIsraël ; le troisième culmine avec Jésus. Ainsi Jésus
assume les hauts et les bas de l’histoire de son peuple. Il vient dans cette histoire,
pour l’accomplir
o la généalogie de saint Luc remonte jusqu’à Adam, suggérant ainsi que Jésus se situe
bien dans l’histoire de toute l’humanité. Ici il y a 7x11 générations. Or, selon un
texte apocryphe, le quatrième livre d’Esdras, le Messie doit venir à la onzième
semaine du monde, soit au bout de 77 jours
Tout un message est donc livré à travers les lignes de ces généalogies : Jésus s’inscrit dans
l’histoire d’un peuple (Mt) ou dans la suite des générations humaines (Lc) ; il est bien le
Messie qui vient à la plénitude des temps (Lc).
Ces premiers éléments que l’on peut observer dans les récits d’enfance contribuent donc à dire que
Jésus partage bien la condition humaine de tout homme, qu’il est homme.
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L’origine divine de Jésus
Les récits évangéliques de l’enfance de Jésus expriment aussi autre chose à propos de sa naissance et
de son origine : « il vient de l’Esprit Saint » ; « il est du Père ». Il convient de remarquer que ces
récits d’enfance ont été écrits plus tard que les récits relatifs au ministère de Jésus, et surtout plus
tard que les récits relatant sa passion, sa mort et sa résurrection (le mystère pascal). Or quand les
récits du Nouveau Testament parlent de la résurrection de Jésus, le verbe utilisé est toujours
conjugué au passif : « Dieu l’a ressuscité, ce Jésus que vous aviez crucifié » (Ac 24). Il n’est donc
jamais dit que Jésus se ressuscite lui-même. De la sorte, tout un message s’exprime là, affirmant
implicitement que Jésus-Christ ne se donne pas l’existence à lui-même, qu’il ne tire pas la vie de son
propre fond : il la reçoit du Père. Sa vie est remise dans les mains d’un autre, il est totalement relatif
au Père comme il ne cesse de le dire et de le vivre durant sa vie publique.
Les récits d’enfance (Lc et Mt) qui ont été écrits plus tard que le reste des évangiles sont donc
traversés, colorés, orientés par la foi pascale en la résurrection : ils ont été écrits à la lumière de la
résurrection. Selon les mots du théologien Bernard Sesbouë : « La composition littéraire des récits de
la nativité constitue un report du message pascal sur la naissance de Jésus ». Dès lors ces récits
signifient précisément plusieurs choses :
- que l’Eglise naissante a reconnu que Jésus n’est pas devenu Seigneur, Christ et Fils bien aimé
de Dieu, à partir de la résurrection, ni même à partir de son baptême, mais dès sa
conception. Comme l’écrit Moltmann :
Chez Luc et Matthieu l’annonce de la naissance de Jésus doit exprimer le fait que ce n’est pas
depuis sa résurrection d’entre les morts seulement, ni depuis son baptême par Jean dans le
Jourdain seulement, mais depuis son origine céleste et son commencement terrestre que
Jésus est le Fils messianique de Dieu et le Seigneur du Royaume messianique. Jésus n’a pas
seulement agi dans la puissance du Saint Esprit, mais il est issu, depuis le commencement,
de la puissance du Très Haut, le Saint Esprit.
- que les récits d’enfance ne sont donc pas des récits historiques qui présenteraient la
conception de Jésus comme un acte procréateur, comme si Dieu procréait avec une femme,
ce qui s’apparenterait au mythe des religions avoisinantes
1
. Ces récits expriment que Jésus
vient de la puissance de l’Esprit, il est un don du Père au monde. Dieu n’est donc pas à voir
comme le père biologique de l’enfant Jésus.
1
Voir à ce propos, J. Ratzinger, La foi chrétienne hier et aujourd’hui, p. 191.
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Par ailleurs, le récit de l’annonciation est pétri de résonances vétérotestamentaires :
- la salutation de l’ange dans le récit de l’annonciation de Luc rappelle la salutation de
Sophonie à la Jérusalem sauvée (So 3, 14)
- quand saint Luc affirme que l’Esprit « viendra sur Marie », il fait écho à l’Esprit qui plane sur
les eaux lors de la création. La venue au monde de Jésus est donc regardée comme un
nouvel acte créateur, une nouvelle création, et non comme un acte procréateur entre Dieu
et une femme. C’est le signe d’un nouvel Adam qui va surgir : en Jésus le visage de l’être
humain tel que Dieu le désire, pleinement à son image et à sa ressemblance, est donné au
monde. Le Christ est la nouveauté radicale de l’histoire de l’humanité
- de plus le texte de saint Luc reprend les paroles de bénédiction par lesquelles on avait salué
autrefois les femmes célèbres d’Israël : « Bénie soit parmi les femmes Yaël... » (Jg 5, 24),
« Soit bénie ma fille, plus que toutes les femmes de la terre ! » (Jdt 13, 18, acclamation
après que Judith ait décapité le tyran Holopherne). Marie est ainsi désignée comme le petit
reste saint d’Israël : avec elle, Dieu établit un nouveau commencement qui n’est pas le
produit de l’histoire humaine, mais qui est donné par Dieu comme un don
Ainsi, les récits évangéliques de l’enfance s’attachent à raconter les origines de Jésus avec des termes
de l’Ancien Testament, afin de montrer que Jésus est bien l’accomplissement des promesses : il est
un don de Dieu donné au monde !
2. Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme
Qu’est-ce que cela signifie que Jésus-Christ soit en même temps vrai Dieu et vrai homme ? En Jésus,
Dieu est vraiment l’un d’entre nous et il est ainsi devenu notre frère (cf. l’hymne aux Philippiens 2, 5-
8)
2
; sans cesser pour autant d’être en même temps Dieu et notre Seigneur. Le concile de
Chalcédoine (451) a déclaré qu’en la personne de Jésus-Christ la nature divine et la nature humaine
étaient liées « de manière indivise et sans mélange » (CEC 464-467, 469).
L’Eglise a longtemps peiné pour exprimer correctement la relation entre la divinité et l’humanité en
Jésus-Christ. Divinité et humani ne se font pas concurrence comme si Jésus n’était qu’en partie
homme et qu’en partie Dieu. On ne peut pas dire non plus que le divin et l’humain se mélangent en
Jésus, ni que Dieu aurait fait simplement semblant de prendre un corps humain en Jésus
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« Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéantit lui-même
prenant condition d’esclave et devenant semblable aux hommes. S’étant comporté comme un homme, il
s’humilia plus encore, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort sur la croix ».
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(docétisme) : il s’est fait vraiment homme. Il n’y a pas non plus en Jésus deux personnes conjointes,
l’humain et la divini (nestorianisme). Enfin, c’est aussi une hérésie d’affirmer que la nature
humaine disparaît complètement dans la nature divine (monophysisme).
Contre toutes ces hérésies, l’Eglise a maintenu fermement la foi en Jésus-Christ vrai Dieu et vrai
homme, deux natures en une seule personne. Le Christ n’est pas une personne humaine, son « je »
est celui du Verbe. La célèbre formule du concile de Chalcédoine « sans division et sans confusion »
n’essaye pas d’expliquer ce qui dépasse l’entendement humain. Elle insiste sur les deux points clés
de la foi : une personne en deux natures. Elle indique la direction dans laquelle il faut chercher le
mystère de la personne de Jésus.
Cette personne de Jésus, si mystérieuse soit elle, nous aide aussi à percevoir ce à quoi nous sommes
appelés, promis. Or, quand nous contemplons Jésus dans son humanité, que voyons-nous
précisément ? :
- un homme qui vit son existence humaine en la recevant sans cesse de Dieu, avec tout ce que
cela implique de confiance, d’abandon, de lâcher-prise sur la tentation de prouver sa valeur,
sur la tentation de tout maîtriser...
- un homme qui vit son existence dans une écoute attentive de la Parole de Dieu et de sa
volonté. C’est d’ailleurs toute la différence qui apparaît entre ce qui se passe en Gn 3 et dans
le récit des tentations au désert en Lc 4 et Mt 4. En Gn 3, le péché est présenté comme ce qui
consiste à vouloir être comme Dieu, à vouloir être Dieu, à ne pas écouter la Parole donnée
par un Autre, à se vouloir la mesure de toutes choses, à décider de tout par soi-même, de ce
qui est bon ou mauvais pour nous et les autres (goûter à l’arbre de la connaissance du bien et
du mal). Le récit des tentations lui, met en évidence, sous forme symbolique, ce qu’ont pu
être les tentations de Jésus au cours de son parcours terrestre, et en particulier lors des
moments difficiles de vulnérabilité plus grande. Il montre que Jésus s’est appuyé sur la parole
reçue de Dieu, sur la certitude de son amour. Il a toujours refusé de revendiquer d’être l’égal
de Dieu, de se laisser tenter et conduire par la tentation de la facilité, la tentation des
honneurs et d’un pouvoir dominateur
- un homme qui fait de sa vie un don pour servir, aimer, faire vivre, relever, dire l’amour et la
miséricorde de Dieu. C’est ce que montre l’ensemble des évangiles
A partir de là, nous avons à nous laisser instruire par la figure du Christ, dans notre condition
d’enfants adoptifs.
On pourrait faire une partie sur : Comment les Fils de Dieu est-il homme ? (cf. CEC 470-483).
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