UNIVERSITE PARIS NORD - INSTITUT GALILÉE LABORATOIRE DE PHYSIQUE DES LASERS RAPPORT DE STAGE DE 3ième ANNEE DE INSTITUT D'OPTIQUE Graduate School 10 avril - 10 octobre 2006 par Laurent Philippet Nouvelle source cohérente dans l’UV lointain (125 nm) pour la nanolithographie optique Responsable de stage : Sébastien Forget (Maître de Conférences à l’Université Paris Nord) -2- -3- Remerciements Je tiens à remercier le Laboratoire de Physique des Lasers et son directeur, M. Charles Desfrançois, de m’avoir accueilli pendant six mois et de m’avoir permis d’utiliser leurs installations techniques et leur matériel scientifique dans le cadre de mon stage. Je tiens à remercier plus particulièrement toute l’équipe LUMEN pour leur chaleureux accueil, leur gentillesse qui les caractérisent si bien et leur grande disponibilité à répondre à toutes mes questions et interrogations. Je les remercie aussi pour m’avoir fait partager leurs connaissances, leur dynamisme et leur goût pour la recherche. Je remercie aussi toutes les autres personnes du laboratoire avec qui j’ai pu entretenir de bons rapports. -4- Table des matières -5- Table des matières Chapitre 1 : Introduction p7 1.1 Présentation du Laboratoire de Physique des Lasers (LPL) et de l’équipe LUMEN p 7 1.2 Présentation du sujet de stage et objectifs p8 1.2.1 Déroulement du stage 1.2.2 Pourquoi essayer d’obtenir un rayonnement à λ = 125 nm ? 1.2.3 Comment obtenir du rayonnement VUV ? 1.3 État de l’art des sources VUV p 10 1.4 Notre source p 12 1.5 Conclusion p 15 Chapitre 2 : Points de théorie p 17 2.1 Polarisation non linéaire d’un matériau p 17 2.2 Mélange à quatre ondes p 18 2.2.1 Expression de la susceptibilité non linéaire du troisième ordre 2.2.2 Expression de l’intensité du rayonnement VUV Chapitre 3 : Expérimentation p 23 3.1 Problématique p 23 3.2 Dispositif expérimental p 23 Table des matières -6- Chapitre 4 : Résultats et Discussions p 43 4.1 Quels paramètres expérimentaux faire varier ? p 43 4.2 Expériences réalisées p 44 4.2.1 Gain VUV en fonction du décalage temporel entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser vaporisateur 4.2.2 Gain VUV en fonction de l’énergie incidente, sur le bain de mercure, du laser vaporisateur Chapitre 5 : Conclusion et Perspectives p 49 Références p 51 Annexes p 53 Origine physique de effets non linéaires p 53 Doublement de fréquence p 57 Courbe de sensibilité spectrale du photomultiplicateur p 60 Lexique p 61 Chapitre 1 : Introduction -7- Chapitre 1 : Introduction Dans ce premier chapitre, je commencerai par présenter rapidement le laboratoire ainsi que l’équipe dans laquelle j’ai effectué mon stage. Je présenterai ensuite le sujet du stage : « nouvelle source cohérente dans l’UV lointain (125 nm) pour la nanolithographie optique » ainsi que les objectifs du stage. Enfin, après un rapide état de l’art des différentes sources dans l’UV lointain, je détaillerai plus spécifiquement les caractéristiques de notre source. 1.1 Présentation du Laboratoire de Physique des Lasers et de l’équipe LUMEN J’ai réalisé mon stage de troisième année de Institut d’Optique Graduate School au sein du Laboratoire de Physique des Lasers (LPL). Ce Laboratoire est une Unité Mixte de Recherche (UMR 7538 du département MPPU1) du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et de l’Université Paris Nord, au sein de l’Institut Galilée. Les thématiques scientifiques du laboratoire déclinent l’étude des interactions physiques entre onde et matière, allant de l’atome isolé jusqu’au milieu vivant, en passant par les molécules simples ou complexes et les agrégats. L’onde est tantôt un outil pour accéder aux informations concernant le milieu, tantôt elle-même l’objet d’étude, qu’il s’agisse de lumière et de lasers ou d’ondes de matière. Le laboratoire développe également de l’instrumentation dans le domaine de l’optique et notamment pour les lasers, le diagnostic médical et les nanosciences. Le laboratoire est structuré en huit équipes expérimentales (AF, COMETA, IOA, OCR, HOTES, AMIBES, LUMEN, OPTIMA) et est constitué d’environ soixante personnes (pour plus de détail, voir le site web du laboratoire à l’adresse http://www-lpl.univparis13.fr/). L'équipe LUMEN (Lasers vUv, Matériaux Electroluminescents et Nanostructures) est une des huit équipes du LPL qui m’a accueilli pendant ces six mois. Cette équipe se concentre essentiellement sur deux axes de recherche : • Le développement de sources cohérentes dans l’ultraviolet du vide (VUV2) • Le développement de diodes électro-luminescentes organiques (OLEDs3) L'équipe s’intéresse plus particulièrement à la génération, à la détection et aux applications du rayonnement cohérent dans le VUV. Une source cohérente VUV originale à λ = 125 nm (E = 10 eV) a été développée au laboratoire et la recherche de nouveaux concepts pour l’amélioration du rendement des sources VUV cohérentes est dorénavant un axe de recherche prioritaire pour l’équipe. : Département scientifique Mathématique, Physique, Planète et Univers : Le terme VUV reviendra régulièrement dans ce rapport. Il est l’acronyme en anglais de Vacuum UltraViolet que l’on peut traduire en français par ultraviolet du vide ou bien encore ultraviolet lointain. Ce domaine correspond au domaine spectral compris entre 100 nm et 200 nm (ou domaine d’énergie compris entre 6,2 eV et 12,4 eV) 3 : OLEDs pour, en anglais, Organic Light Emitting Diodes 1 2 Chapitre 1 : Introduction -8- Ces dernières années, l’équipe LUMEN s’est également intéressée à certains aspects de la physique de l’interaction du rayonnement VUV avec la matière : ablation VUV et nanostructuration 1D sur des films polymères, caractérisation de détecteurs VUV « solarblind » à base de diamant CVD par exemple. Pour dire un mot sur l’autre activité de l’équipe (qui ne sera pas abordée dans ce stage), les OLEDs sont des puces lumineuses constituées de l’empilement de plusieurs couches (de quelques dizaines de nanomètres d’épaisseur) de matériaux organiques, placés entre une anode transparente et une cathode métallique. A la fois souples, économiques et simples à fabriquer, ces nouvelles diodes offrent des perspectives infinies aussi bien pour l’affichage (écrans plats) que pour l’éclairage économique. L’équipe réalise et caractérise des OLEDs bleues et blanches en collaboration avec des chimistes. L’objectif à long terme est de mettre en place des outils de nanostructuration originaux par laser VUV de ces OLEDs en vue d’en améliorer le rendement et les caractéristiques spectrales (projet « salle blanche » en cours). 1.2 Présentation du sujet de stage et objectifs 1.2.1 Déroulement du stage L’équipe LUMEN a développé depuis plusieurs années une source cohérente produisant un rayonnement VUV à λ = 125 nm à partir de faisceaux laser dans un milieu gazeux. Cette source a déjà fait l’objet, par le passé, d’une étude approfondie. L’équipe a récemment démontré un nouveau concept pour augmenter l’énergie du faisceau à λ = 125 nm (présentation à CLEO4 en 2006). Mon stage a consisté à remettre en place cette source, dans une nouvelle salle d’expériences, afin d’étudier ce nouveau phénomène d’amplification. Dans un premier temps, il a fallu procéder avec soin à l’alignement des faisceaux laser sur les différentes optiques du montage (lentilles, hublots, miroirs, prismes, cristaux…), caractériser (mesure de qualité de faisceau, largeur à mi-hauteur des impulsions laser) et optimiser ces faisceaux (à partir de leurs formes et de leurs puissances), insérer des éléments optiques, mettre en place un système de détection du rayonnement VUV (nécessité d’un pompage à vide, amplification du signal, calibration d’un photomultiplicateur…). Une fois ce travail préliminaire réalisé, les conditions étaient réunies pour obtenir et détecter le rayonnement VUV. Dans un second temps, il a fallu mettre en place le système d’amplification. Le but de ce stage a donc été de remettre en place cette source, de la caractériser, puis d’étudier une nouvelle architecture permettant d’augmenter la puissance de la source grâce à un système d’amplification qui sera décrit plus loin. 4 : CLEO pour Conference on Lasers Electro-Optics (à Long Beach USA en mai 2006) Chapitre 1 : Introduction -9- 1.2.2 Pourquoi essayer d’obtenir un rayonnement à λ = 125 nm ? L’intérêt de disposer d’une source cohérente, intense, compacte, fiable et robuste à de telles longueurs d’onde est multiple. Tout d’abord une courte longueur d’onde peut permettre de créer un spot d’illumination plus petit (en effet, le rayon de la tache centrale de diffraction, proportionnel à la longueur d’onde λ du rayonnement, est donné par : r = 1,22.λ/ON, où ON est l’ouverture numérique de l’instrument utilisé pour obtenir cette tache). D’autre part la région de l’ultraviolet du vide (100 nm < λ < 200 nm, 6,2 eV < E < 12,4 eV) concerne un vaste champ d’applications dans le domaine de la photochimie car, dans ce domaine d’énergie, les photons interagissent efficacement avec la matière qu’elle soit sous forme gazeuse, liquide ou solide. En outre, la fenêtre 110 nm < λ < 130 nm présente un grand intérêt car : Ce domaine correspond aux plus petites longueurs d’onde accessibles où il existe encore des matériaux optiques transparents (par exemple en fluorure de lithium LiF ou en fluorure de magnésium MgF2) L’atmosphère présente une absorption relativement faible comparée au reste du domaine VUV. Le dioxygène O2 présente une fenêtre de transparence relative entre λ < 110 nm et λ ∼ 140 nm (par exemple à λ = 121,6 nm, le coefficient d’absorption de O2 est de 0,3cm-1 alors qu’il est de 175 cm-1 à λ = 157 nm). L’eau par contre absorbe un maximum vers λ = 125 nm. L’intérêt de la fenêtre 110 nm < λ < 130 nm est que l’on peut travailler dans une atmosphère neutre (du diazote N2 ou de l’argon Ar). Il ne sera pas nécessaire de faire un vide élevé et donc d’avoir un système de vide contraignant. Les applications fondamentales pouvant bénéficier d’une source laser autour de E = 10 eV intense, pulsée, polarisée, accordable ou non sont nombreuses dans des domaines aussi variés que : La spectroscopie (de masse, d’absorption, à haute résolution, résolue en temps…). Par exemple la spectroscopie d’agrégats de gaz rares (par étude de la fluorescence). La nanostructuration des matériaux optiques (verres, cristaux, molécules et polymères organiques…). On peut par exemple graver des motifs nanométriques, de type « cristaux photoniques », sur des couches minces organiques dans le but d’améliorer le rendement d’extraction lumineuse des OLEDs. La photochimie avec l’ablation laser (sources de forte brillance), photodissociation de molécules organiques, la photoionisation à un photon… La micro et la nanolithographie L’interférométrie VUV en exploitant la cohérence de la source la Chapitre 1 : Introduction - 10 - On peut ainsi coupler l’interférométrie et la nanolithographie pour obtenir une technique performante de photogravure et de déposition à très petite échelle (réseaux périodiques de pas inférieur à 100 nm). 1.2.3 Comment obtenir du rayonnement VUV ? Pour produire du rayonnement dans le domaine ultraviolet (UV), la méthode la plus simple reste le mélange de fréquences (par somme ou différence) dans un cristal présentant un fort coefficient de susceptibilité non linéaire du deuxième ordre (par exemple le KTP ou le BBO). Hélas ces techniques ne permettent pas, en raison de la fenêtre de transmission des cristaux, d’obtenir des rayonnements de longueur d’onde inférieure à 190 nm. Certains cristaux (fluorures ou borates) sont transparents jusqu’à λ = 160 nm mais pas en dessous. On a donc recours à des processus d’optique non linéaire dans des gaz pour atteindre le rayonnement VUV (on verra lesquels au paragraphe suivant). Le rayonnement VUV étant très rapidement absorbé dans l’air (sur quelques µm), le système de propagation du rayonnement jusqu’au détecteur devra être placé sous vide (un vide primaire suffit) ou dans un milieu riche en gaz rare (par exemple de l’argon Ar ou du diazote N2). Pour pouvoir manipuler facilement un tel rayonnement, on dispose de peu d’optiques transparentes à ces longueurs d’ondes. On utilisera essentiellement des lentilles, des hublots et des prismes en fluorure de lithium LiF (longueur d’onde de coupure à 105 nm) ou en fluorure de magnésium MgF2 (longueur d’onde de coupure à 120 nm) qui transmettront au mieux 50% du rayonnement incident (sur des épaisseurs typiques de quelques mm). 1.3 État de l’art des sources VUV Dans la famille des sources VUV, on peut distinguer trois grandes catégories : les lasers à excimère, les sources basées sur des processus d’optique non linéaire dans les gaz (qui permettront même d’atteindre le domaine XUV (λ < 100 nm)) et le rayonnement synchrotron. Les lasers à excimère sont des lasers à gaz, pulsés (impulsions de quelques ns à 100 ns à des fréquences allant de quelques 10 Hz à 1 kHz). Ce sont des sources puissantes émettant dans l'UV (quelques 10 mJ à plusieurs J par impulsion). Il en existe à diverses longueurs d’onde en fonction du mélange gazeux utilisé : à λ = 351 nm (XeF), à λ = 308 nm (XeCl), à λ = 248 nm (KrF), à λ = 222 nm (KrCl), à λ = 193 nm (ArF), à λ = 157 nm (F2) et en cours d’étude à λ = 126 nm (Ar2). Ce type de laser trouve des applications dans le domaine scientifique (pompages des lasers à colorant), dans l’industrie (photolithographie pour les semi-conducteurs, usinage) et dans le médical (ophtalmologie, rectification de la cornée). Le terme excimère (pour « excited dimer »), désigne une molécule constituée de deux atomes électroniquement excités afin de permettre la réaction chimique. Ces molécules, liant un atome de gaz halogène (par exemple fluor F ou chlore Cl) et un atome de gaz rare (par exemple argon Ar ou xénon Xe), n'existent pas à l'état fondamental ni à l’état naturel. On a donc recours à une décharge électrique très puissante (pompage) pour réaliser cette réaction qui permet de parvenir à l'état excité à l'origine du rayonnement. Chapitre 1 : Introduction - 11 - Par exemple dans le cas de la molécule Ar-F, la décharge électrique permet de passer à l’état excité (ArF)*, qui se désexcite ensuite en émettant un photon selon la réaction : (ArF)* → Ar + F + hν. Ainsi l’inversion de population est automatique. Ces lasers délivrent, en général, un faisceau de section rectangulaire présentant une répartition d'énergie quasi uniforme. A titre d’exemple, on utilisera dans notre expérience un laser ArF pulsé à λ = 193 nm qui délivre des impulsions de 6 ns à la cadence de 10 Hz. L’énergie par impulsion est de 3 mJ soit une puissance crête de 0,5 MW. L’inconvénient des lasers à excimère est leur très faible cohérence temporelle et spatiale, ainsi que leur qualité de faisceau médiocre, rendant l’interférométrie difficile. Les sources basées sur des processus d’optique non linéaire ont fait l’objet de nombreux travaux par le passé. Elles sont plus cohérentes, plus fiables, mais ont des énergies et des rendements en général beaucoup plus faibles. A défaut de matériaux optiques (cristaux) suffisamment transparent en deçà de λ = 200 nm, de nombreux travaux ont permis de démontrer la grande efficacité des conversions dans des milieux non linéaires tels que les gaz rares et les vapeurs métalliques. Ainsi, on a vu apparaître des sources basées sur la génération de troisième harmonique dans des gaz rares (λ = 118 nm dans du xénon Xe, λ = 122 nm dans du krypton Kr) et des sources utilisant le mélange à quatre ondes (par somme ou différence) dans des vapeurs métalliques (par exemple strontium Sr, magnésium Mg, zinc Zn, mercure Hg…). Ces dernières sont assez compliquées à mettre en place. En effet pour augmenter uniformément la densité atomique du milieu, elles nécessitent des architectures de cuves (contenant le métal dont la vapeur constitue le milieu non linéaire) très complexes qui doivent être chauffées. Le principe de ces cuves est toujours le même, il s’agit de chauffer le métal à de hautes températures (autour de 200 °C pour le mercure) et d’essayer de le maintenir au centre de la cellule pour éviter qu’il ne se dépose sur les fenêtres. Des systèmes (« heat pipe ») de refroidissement à eau ou à azote liquide sont donc généralement utilisés pour tenter de condenser la vapeur métallique avant qu’elle n’atteigne les fenêtres (dans certaines cuves ces fenêtres sont elles-mêmes chauffées). Par ailleurs l’addition d’un gaz tampon (hélium He ou argon Ar) aux deux extrémités de la cuve permet également d’isoler les fenêtres de la vapeur métallique. Malheureusement aucune de ces techniques n’est totalement efficace et les fenêtres doivent être nettoyées après quelques heures d’utilisation (lorsque cela est encore possible). Tout ceci souligne le fait qu’il est très contraignant d’avoir un tel type de cuve chauffée. On peut également mentionner le fait qu’il n’est pas facile de manipuler des vapeurs métalliques pour des raisons écologiques et de sécurité (très dangereux à respirer). De plus, afin de générer un rayonnement VUV par mélange à quatre ondes, il est nécessaire de disposer d’au moins deux lasers (la plupart du temps des lasers à colorant) ou des OPO5 à la fois accordables et fins spectralement, ce qui a tendance à rendre la source encore plus volumineuse. 5 : OPO pour Oscillateur Paramétrique Optique Chapitre 1 : Introduction - 12 - Enfin dans un domaine de longueurs d’ondes qui n’est plus tout à fait le VUV (100 nm < λ < 200 nm) mais les XUV (λ < 100 nm), on trouve des sources qui génèrent des ondes harmoniques d’ordre très élevé (jusqu’à la 100ième harmonique parfois) dans les gaz rares. Ces harmoniques nécessitent l’utilisation de lasers intenses ultracourts (femtoseconde) de puissance crête plus grande (GW voire plus) que celles qui entrent en jeu dans les sources VUV. De par leur cohérence spatiale et la très courte durée des impulsions harmoniques, elles sont depuis quelques années une source XUV particulièrement intéressante pour des applications en optique non linéaire XUV, en physique atomique dans le domaine attoseconde (10-18 s) etc. (la largeur spectrale ∆λ est très grande car la durée des impulsions ∆t est très petite et ∆λ.∆t = constante). La gamme spectrale des sources dépend du gaz utilisé et se situe généralement entre 10 nm et 80 nm. Le rayonnement synchrotron est un rayonnement produit par une particule libre chargée qui se déplace le long d’une trajectoire courbe et qui subit une accélération. On n’en parlera pas plus ici car cela ne fait pas intervenir les mêmes échelles d’installations. 1.4 Notre source L’équipe a montré récemment les potentialités de la vapeur de mercure Hg en tant que milieu non linéaire pour créer un rayonnement VUV à λ = 125,14 nm (les vapeurs métalliques sont plus efficaces que les gaz rares notamment à cause des résonances à trois photons qui sont plus fortes dans les vapeurs métalliques). Bien que le zinc ou le magnésium puissent générer une lumière cohérente VUV en dessous de λ = 130 nm, le mercure reste le milieu le plus approprié si l’on veut atteindre des domaines de longueurs d’ondes plus courtes avec une bonne efficacité de conversion (100 nm < λ < 130 nm). Ce rayonnement est obtenu par somme de fréquences à partir d’un seul laser à colorant émettant à λ = 625,7 nm. En effet, le spectre du mercure, riche et étendu, permet d’utiliser de nombreuses résonances à deux photons pour amplifier le phénomène non linéaire (on verra plus en détail au paragraphe 2.3 l’importance d’exalter la susceptibilité non linéaire du troisième ordre χ(3) au voisinage d’une résonance à deux photons). Ces différentes transitions à deux photons se situant dans le domaine UV, on peut facilement les exciter à partir d’un seul laser visible doublé en fréquence. On peut donc utiliser une somme de fréquences du type ωVUV = 2ωUV + ωVIS = 2ωUV + ωUV/2 = 5ωUV/2 pour engendrer un rayonnement VUV intense à λ = 125,14 nm lorsque le niveau 7s1 S0 du mercure est excité à deux photons (exaltation du χ(3) au voisinage de la résonance à deux photons sur la transition 6s 1S0 → 7s1 S0 du mercure, voir figure 1.1). Chapitre 1 : Introduction - 13 - Dans ces conditions le montage expérimental est considérablement simplifié puisqu’il ne nécessite qu’un seul laser à colorant doublé (dans un cristal doubleur) dont on mélange la fréquence fondamentale (ωVIS, λVIS = 625,7 nm) avec la fréquence harmonique (ωUV = 2ωVIS, λUV = 312,85 nm)6. Par ce processus, un rendement7 élevé de 5.10-4 a pu être obtenu à température ambiante. Une technique simple a été récemment proposée par l’équipe LUMEN pour augmenter le rendement de conversion de ce mélange à quatre ondes dans une vapeur de mercure à température ambiante. Elle consiste à augmenter localement la densité atomique (autrement que par le chauffage de la cuve), à la fois temporellement et spatialement, en focalisant sur le bain de mercure un faisceau laser annexe, quelques µs avant le passage des impulsions, de façon à vaporiser des atomes de mercure. La nature liquide du mercure à température ambiante lève tout problème lié à la dégradation de la cible. La vaporisation est réalisée par un laser excimère ArF à λ = 193 nm, présentant l’avantage d’être fortement absorbé par le mercure liquide en incidence normale (coefficient d’absorption de 70%). 9p 1P1 54 cm-1 ωVIS (λ λVIS = 625,7 nm) 7s 1S0 ωUV (λ λUV = 312,85 nm) ωUV (λ λUV = 312,85 nm) ωVUV (λ λVUV = 125,14 nm) ωVUV = 2ωUV + ωVIS ωUV = 2ωVIS 6s 1S0 Figure 1.1 : Diagramme d’énergie simplifié dans le cas de la production de rayonnement VUV à λ = 125,14 nm dans une vapeur de mercure : A partir de maintenant, pour éviter d’alourdir le texte de ce rapport, à chaque fois que l’on parlera de faisceau ou d’énergie VUV (respectivement visible et UV) on fera référence au rayonnement de longueur d’onde λ = 125,14 nm (respectivement λ = 625,7 nm et λ = 312,85 nm) 7 : Ici le rendement de conversion est défini par : PVUV/(PVIS + PUV) qui n’a pas de signification physique à proprement parler mais qui est utilisé parmi la communauté scientifique (le fait de dire qu’on augmente l’énergie VUV ou qu’on augmente le rendement de conversion revient au même). 6 Chapitre 1 : Introduction - 14 - Nous allons voir à présent quels avantages et quels inconvénients présente notre source VUV par rapport aux autres types de sources VUV, notamment les lasers à excimère et les autres sources basées sur des processus d’optique non linéaire dans les gaz. Contrairement aux lasers à excimère, notre source est cohérente temporellement et spatialement. De plus, on peut atteindre des longueurs d’onde beaucoup plus courtes (λ = 125 nm dans notre cas contre λ = 193 nm voire λ = 157 nm avec les lasers à excimère). Les énergies mises en jeu ne sont, par contre, pas du même ordre de grandeur (quelques µJ au mieux pour notre source contre quelques 10 mJ à plusieurs J pour un laser excimère). Par rapport aux autres types de sources basées sur le mélange à quatre ondes, notre source est beaucoup plus facile à réaliser notamment par la simplicité de la cuve à mercure qui comme on l’a vu ne nécessite pas d’être chauffée. L’utilisation d’un seul laser simplifie grandement le montage (source moins volumineuse). L’inconvénient est que l’on ne peut pas exploiter pleinement l’effet de double résonance (possibilité de résonance à trois photons sur la transition 6s 1S0 → 9p 1P1 du mercure en plus de celle à deux photons) pour obtenir un rayonnement VUV encore plus intense. L’utilisation d’un seul laser ne nous permet pas non plus d’obtenir un rayonnement VUV accordable (longueur d’onde fixe à 125,14 nm). ωVIS Laser à colorant ωVIS (λ = 625,7 nm) Doublement de fréquence ωUV = 2ωVIS (λUV = 312,85 nm) ωVIS ωUV Cuve à mercure (milieu non linéaire) Laser excimère de vaporisation (amplification) (λ = 193 nm) VUV généré ωVUV = 2ωUV + ωVIS (λ λVUV = 125,14 nm) Figure 1.2 : Représentation schématique du montage expérimental permettant d’obtenir l’amplification du rayonnement VUV à 125,14 nm Chapitre 1 : Introduction - 15 - Un générateur de délai permet de contrôler le décalage temporel entre l’impulsion du laser « vaporisateur » et les impulsions des faisceaux fondamentaux8. Le faisceau du laser excimère est focalisé sur le mercure liquide. Une « plume » de mercure est alors formée, augmentant ainsi localement la densité d’atomes de mercure et amplifiant par là même le rayonnement VUV généré (en première approximation, l’intensité VUV varie comme le carré de la densité d’atomes de mercure). On reviendra plus en détail par la suite sur l’ensemble du montage expérimental permettant de générer et d’amplifier le rayonnement VUV et la façon dont on l’optimise. On verra que la vaporisation conduit à une modification profonde du régime d’optique non linéaire tel qu’on le connaît. 1.5 Conclusion En utilisant une architecture de cuve à mercure simple (sans chauffage), combinée à l’utilisation d’un seul laser, une solution originale a été apportée pour augmenter l’énergie d’une source cohérente VUV en augmentant localement la densité atomique par vaporisation du bain de mercure à l’aide d’un laser annexe. L’augmentation de la densité atomique obtenue classiquement par chauffage de l’ensemble de la cuve est ici limitée à sa composante utile, dans le temps comme dans l’espace, afin d’obtenir un effet comparable avec un système moins contraignant expérimentalement. 8 : Quand on parlera des faisceaux fondamentaux, on fera référence aux faisceaux visible et UV - 16 - Chapitre 2 : Points de théorie - 17 - Chapitre 2 : Points de théorie Dans ce deuxième chapitre, nous allons revoir quelques points de théorie sur l’optique non linéaire. Pour rappeler brièvement l’origine physique des effets non linéaires à partir d’un modèle simple d’électron élastiquement lié, le lecteur pourra se reporter à la première annexe avant de commencer la lecture de ce chapitre. J’aborderai la notion de polarisation non linéaire d’un matériau pour pouvoir introduire la susceptibilité non linéaire. Je traiterai ensuite le cas du mélange à quatre ondes que l’on utilise dans nos expériences. 2.1 Polarisation non linéaire d’un matériau r On sait (voir la première annexe), que lorsque le champ E( t ) est important, la polarisation induite n’est plus proportionnelle à l’amplitude du champ laser et qu’il apparaît (on verra juste après qu’il apparaît même à des intensités lasers plus modérées) une non-linéarité dans la relation constitutive entre polarisation d’un milieu et champ électrique appliqué (voir figures 2.1 et 2.2). Lorsque les termes non harmoniques sont pris en compte, il n’existe plus de solution générale à l’équation du mouvement (voir équation A.1 de l’annexe 1). Toutefois, dans la limite où ces termes sont suffisamment petits devant la composante harmonique, il est possible de résoudre l’équation (voir équation A.1 de l’annexe 1) par perturbation en effectuant un développement de la solution x(t) en puissances de l’amplitude du champ électrique. Ceci conduit à une expression de la polarisation du milieu admettant également un développement en puissance de E, du type : [ ] Pi = PL i + PNLi = ∑ ε 0 χ ij(1)E j + ∑ ε 0 χ ijk( 2 )E jE k + χ ijkl(3 )E jE k E l + ... (2.1) j jkl 1 4243 1 44444424444443 PLi PNLi où i = (x, y, z), ε0 est la permittivité du vide et χ(i) est le tenseur susceptibilité électrique d’ordre i. Le premier terme de ce développement appelé susceptibilité linéaire définit la constante diélectrique du milieu ε = n² = 1 + χ(1). Les quantités χ(2), χ(3)…sont appelées susceptibilités non linéaires du deuxième et du troisième ordre du milieu. La non-linéarité associée aux termes anharmoniques ne se manifestera qu’à condition que le champ laser ne soit pas totalement négligeable devant le champ intra-atomique Eat responsable du lien entre électron et cœur ionique. Par exemple, en focalisant un faisceau laser sur une surface de 100 µm2, avec des impulsions de 10 ns et une énergie par impulsion de 100 mJ, on obtient une densité de puissance de l’ordre de 1013 W/cm2. Une telle densité de puissance correspond à un champ électrique ayant une amplitude de 1010 V/m au niveau de la tache focale. Ce champ électrique est donc comparable au champ intra-atomique Eat (de l’ordre de 1011 V/m). Il n’est en fait pas nécessaire de disposer d’intensités lasers si élevées pour avoir accès par l’observation à la plupart des processus non linéaires. En effet lorsque les dipôles induits oscillent tous de façon cohérente (relation de phase entre eux), les champs qu’ils rayonnent individuellement peuvent dans certains cas interférer de façon constructive et conduire à un champ ayant une intensité considérablement plus grande que celle du même nombre de dipôles rayonnants de façon incohérente. Chapitre 2 : Points de théorie - 18 - On verra au paragraphe 2.2 qu’en optique non linéaire, la condition pour obtenir une telle interférence constructive porte le nom de condition d’accord de phase. L’intensité requise pour observer certains effets non linéaires peut être encore réduite de plusieurs ordres de grandeur lorsque l’une ou plusieurs des fréquences lasers impliquées sont proches des fréquences de résonance des dipôles oscillants. On verra également plus en détail au paragraphe 2.2 qu’il s’agit du phénomène d’exaltation résonnante des non-linéarités. Effet de la relation non linéaire entre la polarisation P et le champ électrique oscillant E (fréquence ω) : t P(t) P t E E(t) Figure 2.1 : Lorsque le champ électrique incident est suffisamment faible, la polarisation apparaît essentiellement comme une fonction linéaire de E Milieu centro-symétrique (c’est notre cas avec la vapeur de mercure) : χ(2) = 0, χ(3) = premier terme non linéaire t P(t) P E t E(t) Figure 2.2 : A plus fortes valeurs du champ électrique, la polarisation présente une forme distordue contenant plusieurs harmoniques de ω 2.2 Mélange à 4 ondes Nous avons vu que notre source VUV est basée sur des effets non linéaires de mélange de fréquences à quatre ondes dans une vapeur de mercure. On va voir que la symétrie du milieu non linéaire ne fait apparaître que des termes d’ordres impairs dans l’expression de la susceptibilité non linéaire (premier terme non nul : χ(3)) et comment la résonance à 2 photons amplifie le rendement de conversion (certains dénominateurs de l’expression (2.2) deviennent petits et donnent une contribution importante à la susceptibilité). On va également voir comment varie l’intensité VUV en fonction des différents paramètres dont on a commencé à parler (densité atomique, χ(3)…). Chapitre 2 : Points de théorie - 19 - 2.2.1 Expression de la susceptibilité non linéaire du troisième ordre La susceptibilité non linéaire est une caractéristique propre du milieu non linéaire et dépend de la structure électronique et moléculaire de ce dernier. Dans notre cas, le milieu non linéaire (vapeur de mercure) permettant la création de rayonnement VUV par mélange à quatre ondes est centro-symétrique (en fait, tous les gaz sont des milieux centro-symétriques : χ(2) = 0). C’est pourquoi les phénomènes non linéaires observés dans les gaz résultent d’un processus d’ordre impair. Ainsi, le premier terme non nul de la susceptibilité non linéaire est celui du troisième ordre χ(3). Elle possède un certain nombre de symétries spatiales réduisant ainsi le nombre de termes non nuls du tenseur χijkl(3) (21 éléments non nuls dont 3 seulement sont indépendants). Dans le cadre de la limite « petit signal » (pour des intensités IUV et IVIS des faisceaux incidents petites sinon il y a apparition de phénomènes de saturation) et dans le cas de la résonance à 2 photons (χ(3) = χR(3) + χNR(3) où le terme non résonnant χNR(3) est négligeable devant le terme résonnant χR(3)), cette susceptibilité non linéaire du troisième ordre a pour expression : χ( 3 ) (− ωVUV; ωUV , ωUV , ωVIS ) ∝ ρ6S 6s µ i i µ 7s 7s µ 9p 9p µ 6s (2.2) 6s − 9 p − (2ωUV + ω VIS ) − iγ 9 p [ω6s −7s − 2ωUV − iγ 7s ][ω6s − i − ωUV − iγ i ] 3 1442443 14444 4244444 3 14442444 ∑ [ω i ] près de la résonance à 3 photons exacte résonance à 2 photons 9p 1P1 terme relié à la résonance à 1 photon 54 cm-1 ωVIS 7s 1S0 ωUV ωVUV ωUV 6s 1S0 État fondamental du mercure Chapitre 2 : Points de théorie - 20 - Les différents termes qui interviennent dans l’expression (2.2) sont : ωVUV, ωUV et ωVIS : pulsations des rayonnements VUV, UV et visible ρ6s : proportion d’atomes de mercure dans l’état fondamental 6s (population du niveau 6s) µ : opérateur moment dipolaire a µ b : élément de matrice dont le module au carré est lié à la probabilité pour l’atome de passer d’un état a à un état b (transition a → b ) ωi-f : fréquence de Bohr du niveau d’énergie f couplé par un moment de transition avec le niveau fondamental i. Elle est reliée à l’énergie des niveaux par : ∆E = E f − E i = hωi−f γi : largeur du niveau i (γi-1 représente le temps caractéristique de relaxation du niveau i) Cette expression suppose que tous les atomes de mercure sont initialement dans leur état fondamental 6s . La somme porte sur tous les états i possibles du mercure. L’atome passe successivement de l’état fondamental 6s à l’état 7s (en passant par un état « virtuel » avec ωUV) puis à un état « virtuel » proche de l’état 9p (avec ωVIS) pour revenir dans son état fondamental 6s . Dans cette expression, on voit que l’on a tout intérêt à minimiser le dénominateur en se plaçant exactement à la résonance à deux photons (ω6s-7s 2ωUV = 0). On voit aussi que l’on est près de la résonance à trois photons (il manque 54 cm-1 pour avoir ω6s-9p – (2ωUV + ωVIS) = 0). Contrairement à la résonance à un photon, la résonance à deux photons n’induit pas de forte absorption des faisceaux lasers incidents (ωUV et ωVIS). La résonance à trois photons quant à elle induit une réabsorption du rayonnement VUV engendré. Il est donc en général souhaitable de se placer légèrement à côté de cette résonance. 2.2.2 Expression de l’intensité du rayonnement VUV L’intensité VUV a pour expression (des exemples de valeurs d’énergies VUV, UV et visibles seront donnés au chapitre suivant) : IVUV α NHg2.IUV2.IVIS.|χ(3)|2. F(b∆k) (2.3) où : IUV : intensité du faisceau UV IVIS : intensité du faisceau visible NHg : densité d’atomes de mercure (4.1013 at. /cm3 à 20 °C) F(b∆k) : fonction d’adaptation de phase (sans dimension) qui traduit l’influence des conditions de focalisation sur l’accord de phase ∆k = kVUV – (2kUV + kVIS) (2.4) et qui traduit les interférences locales entre les ondes harmoniques VUV créées en tout point du milieu non linéaire. Chapitre 2 : Points de théorie - 21 - On voit tout de suite l’importance de la résonance à deux photons sur le χ(3) qui intervient au carré dans la formule (2.3). La vaporisation va donc avoir un effet intéressant dans l’augmentation de l’intensité VUV car elle va augmenter localement la densité atomique NHg d’atomes de mercure qui intervient elle aussi au carré. On voit enfin qu’on aura intérêt à optimiser l’intensité du faisceau visible afin que l’intensité du faisceau UV soit la plus grande possible (là aussi dépendance au carré)9. Dans les conditions de forte focalisation b << L (où b est le paramètre confocal et L la longueur du milieu non linéaire, voir figure 2.3) et dans l’hypothèse d’un désaccord de phase indépendant de la position (hypothèse non valable dans le cas de la vaporisation)10, on montre que la fonction d’adaptation de phase F(b∆k) est maximale pour b∆k < 0 (pour des faisceaux fondamentaux parallèles, la condition d’accord de phase serait ∆k = 0) A λ = 125,14 nm, ∆k > 0 si on suppose tous les atomes de mercure dans l’état fondamental : la population non négligeable de l’état 7s 1S0 permet d’expliquer le ∆k < 0 et donc le rendement de conversion non nul (en l’absence de vaporisation). Vapeur de mercure b (paramètre confocal) Nuage d’atomes de mercure vaporisés Faisceau gaussien L longueur du milieu non linéaire Figure 2.3 : Conditions de forte focalisation dans la vapeur de mercure 9 : Le rendement de conversion du cristal doubleur permettant de générer du rayonnement UV à partir du rayonnement visible est définit par : PUV( l ) , où l est la longueur du cristal. PVIS ( 0 ) 10 : car les faisceaux fondamentaux interagissent essentiellement dans le milieu sur une distance de l’ordre de la distance de Rayleigh ZR (b = 2ZR) - 22 - Chapitre 3 : Expérimentation - 23 - Chapitre 3 : Expérimentation Dans ce troisième chapitre, je décrirai en détail le montage expérimental utilisé pour obtenir du rayonnement VUV. Je parlerai des travaux préliminaires qui ont été réalisé pour caractériser les faisceaux laser et calibrer le système de détection. Je présenterai ensuite le montage expérimental qui nous a permis d’amplifier le rayonnement VUV. Enfin je donnerai les performances typiques que nous avons été capable d’atteindre avec la source VUV. 3.1 Problématique On a vu avec le principe de notre expérience qu’il fallait des photons visible à λ = 625,7 nm et des photons UV à λ = 312,85 nm pour générer, par mélange à quatre ondes, du rayonnement VUV. La solution est apportée par l’utilisation d’un seul laser à colorant que l’on envoie ensuite dans un cristal pour faire du doublement de fréquence. On aurait pu utiliser un OPO qui présente l’avantage d’être compact, tout solide et d’éviter de manipuler des colorants. Mais avec une qualité de faisceau pas très bonne et une mauvaise stabilité (pour un OPO affiné), nous avons préféré utiliser un laser à colorant qui est plus performant. 3.2 Dispositif expérimental Je commencerai par présenter le montage expérimental dans son ensemble puis je détaillerai les différentes parties de ce montage. Laser à colorant E = 25 mJ, durée d’impulsion = 7 ns (Quantel TDL-50) λ = 532 nm Laser Nd:YAG déclenché doublé en fréquence à partir de λ = 1064 nm E = 300 mJ, f = 10 Hz, durée d’impulsion = 10 ns (SAGA Series, Q-Switched Nd:Yag Lasers, Thomson-CSF Laser) Cristal doubleur de KDP λvis = 625,7 nm Montage « zig-zag » (séparation puis superposition des faisceaux) λUV = 312,85 nm Doublet achromatique f’ = 280 mm à λvis = 625,7 nm et à λUV = 312,85 nm Énergies incidentes typiques dans la cuve à mercure : - 4,3 mJ à λvis = 625,7 nm (~ 0,6 MW) - 3,5 mJ à λUV = 312,85 nm (~ 0,5 MW) Lentille en LiF Prisme de Pellin-Broca en LiF (T ~20% à λ = 125,14 nm) Vide (10-5 mbar) Figure 3.1 : Vue d’ensemble du montage expérimental Cuve à mercure (Psat (Hg, 300K) = 3,2 10-3 mbar) Oscilloscope PM (CsI) Amplificateur VUV à λ = 125,14 nm E ∼ 0,8 µJ Chapitre 3 : Expérimentation - 24 - Un laser Nd :Yag (SAGA) déclenché, dont le rayonnement est doublé en fréquence, permet de pomper un laser à colorant qui est ensuite doublé par un cristal de KDP, ce qui permet d’obtenir les rayonnements visible et UV. Ces deux faisceaux, légèrement divergents et non parfaitement superposés sont séparés puis recombinés par l’intermédiaire d’un système dit en « zig-zag ». Après recombinaison, les deux faisceaux fondamentaux sont focalisés dans la cuve à mercure à l’aide d’un doublet achromatique. Le rayonnement VUV généré est ensuite séparé des faisceaux visible et UV par l’intermédiaire d’un prisme de Pellin-Broca. Il est finalement envoyé dans un PM (PhotoMultiplicateur) puis amplifié avant d’être observé sur un écran d’oscilloscope. a) Le laser Nd :Yag déclenché (SAGA Séries, Thomson-CSF Laser) Je n’entrerai pas dans les détails de son fonctionnement car il n’a pas fait l’objet, contrairement au laser à colorant, d’optimisation et de réglages particuliers. Les principales caractéristiques de ce laser Nd :Yag déclenché à λ = 532 nm sont : - Énergie par impulsion = 300 mJ Durée des impulsion = 10 ns Fréquence = 10 Hz Diamètre du faisceau en sortie = 10 mm Polarisation verticale Il est constitué d’un oscillateur et d’un amplificateur contenant chacun un barreau de Nd :Yag pompé par lampes flash. La cavité oscillante fonctionne en mode déclenché, son ouverture et sa fermeture étant assurées par une cellule de Pockels (qui se comporte comme une lame quart d’onde lorsqu’une tension est appliquée). Le rayonnement à λ = 532 nm est obtenu par doublement de fréquence du rayonnement IR à λ = 1064 nm dans un cristal de KD*P. Ce laser permet également la génération de troisième harmonique (λ = 355 nm) par mélange des rayonnements à λ = 1064 nm et λ = 532 nm dans un cristal de KD*P. Le faisceau à λ = 1064 nm et les deux harmoniques sont ensuite séparés par des miroirs dichroïques. Un système fermé de circulation d’eau permet de refroidir les barreaux de Nd :Yag et un asservissement en température permet de ne pas les endommager (la température des cristaux est aussi régulée). L’oscillateur et l’amplificateur sont alimentés par de hautes tensions (1500 V pour l’amplificateur et environ 900 V pour l’oscillateur). Le faisceau à λ = 532 nm, qui va nous servir à pomper le laser à colorant, a fait l’objet d’une rapide caractérisation qui nous a permis d’évaluer la qualité de son faisceau ainsi que de connaître la taille de son waist et sa divergence. Chapitre 3 : Expérimentation - 25 - Travail préliminaire : Mesure de la qualité du faisceau à λ = 532 nm Avant de se lancer dans le montage de la source VUV, un travail préliminaire a consisté à caractériser le laser de pompe Nd :Yag à λ = 532 nm en évaluant la qualité de son faisceau. Le laser à colorant que nous utilisons était prévu avec un laser de pompe Quantel. Nous avons choisi d’utiliser un autre laser de pompe plus puissant. Il faut donc adapter son faisceau au laser à colorant pour retrouver les mêmes performances. Le facteur M2 permet d’évaluer la qualité du faisceau laser (multimode transverse) par rapport à un faisceau gaussien TEM00 limité par la diffraction (M2 de 1). Le principe de la méthode est simple : en focalisant le faisceau avec une lentille, on mesure à l’aide d’une caméra CCD (ici une caméra Spiricon) l’évolution du rayon du faisceau laser le long de la direction de propagation. πω0 θ On en déduit la valeur du paramètre M2 par la relation : M2 = λ La mesure du facteur M² nous a permis d’avoir une idée de la divergence du faisceau et de la taille du waist dans les deux directions (voir les deux courbes ci dessous). Logiciel d’acquisition y x z Lame de verre Polariseur Lentille f’ = +500 mm R = 4% Miroir réfléchissant à λ = 532 nm R = 4% Lame de verre Nd :Yag SAGA Filtres Waist Caméra CCD Déplacement de la caméra sur un rail gradué 270 µm Figure 3.2 : Schéma du montage permettant la mesure du M² 270 µm Figure 3.3 : Image du waist obtenue avec une lentille convergente f’ = 500 mm Chapitre 3 : Expérimentation - 26 - On peut mesurer très précisément la divergence du laser. Les mesures sont faites en focalisant, avec une lentille convergente f’ = 500 mm, le faisceau direct du laser atténué par deux lames de verres (elles permettent de passer de P = 3 W à P = 3 mW et leur face arrière dépolie évite les réflexions multiples). Les filtres et le polariseur permettent de régler l’intensité du faisceau à λ = 532 nm en fonction de la position de la caméra autour du waist. Plusieurs méthodes permettent de mesurer la largeur du faisceau laser. Les deux calculs les plus communs pour mesurer la largeur d’un faisceau laser sont : - la méthode d'arête en lame de couteau 90/10 (Knife Edge 90/10) qui calcule l’énergie contenue entre 10% et 90% de la largeur totale du faisceau - le calcul du second moment (qui n’a pas besoin que le faisceau soit gaussien afin d'obtenir un calcul correct de diamètre). En utilisant la méthode Knife Edge 90/10 proposée par le logiciel d’acquisition de la caméra, on obtient l’évolution du rayon du faisceau dans les deux directions x et y en fonction du déplacement de la caméra selon z : Figure 3.4 : Rayon du faisceau pompe à λ = 532 nm en fonction du déplacement de la caméra Chapitre 3 : Expérimentation - 27 - Commentaires : Le faisceau au waist est très éloigné d’un faisceau parfaitement gaussien : mesurer sa taille n'a pas beaucoup de sens quelle que soit la méthode utilisée (voir figure 3.3). L’ajustement pour le rayon R(X) surestime la taille du waist qui est en réalité plus petit, 11 est donc une valeur pessimiste de Mx². L’ajustement pour le rayon R(Y) à l'inverse donne au faisceau un waist plus petit qu'il ne l'est en réalité, 3,5 est une valeur optimiste de My². En mesurant la pente, après le waist, on en déduit la divergence du faisceau : θ = 9 mrad. En partant d'un diamètre de waist de 270 µm (très imprécis dû à la méthode de mesure), on arrive à un M2 de 7. CONCLUSION : Le M² atteint ses limites pour ce laser, faisceau trop éloigné d'une gaussienne. On peut cependant estimer la taille du waist à environ 300 µm en diamètre lorsque le faisceau direct est focalisé avec une lentille de focale 500 mm ; il a alors une divergence de 9 mrad. La mesure de M² plus précise fait apparaître que le M² doit être le même dans les deux directions (pas de différence notable de taille, juste un peu d'astigmatisme) et que ce dernier est compris entre 3,5 et 11. Chapitre 3 : Expérimentation - 28 - b) Le laser à colorant (Quantel TDL-50) 12 11 8 10 4a 13 Oscillateur 7a Faisceau pompe du laser Nd :Yag SAGA à λ = 532 nm 9 4c 1 3a 6a Préamplificateur 2 7b 14 5 3b Amplification de la moitié gauche 4e 15 4d 6b 3c 7c Amplification de la moitié droite Amplificateur 4b 16 Légende : (1) : Lame séparatrice 4% (2) : Cellule photoélectrique (3) : Bloqueur de faisceau (4) : Prisme à réflexion totale 90° (5) : Lame séparatrice 10% (6) : Lentille divergente, f’ = -7 cm (7) : Lentille convergente, f’ = 5 cm (8) : Miroir tournant Sortie du laser à colorant à λ = 625,7 nm (9) : Réseau 2400 traits/mm (10) : Train de prismes (11) : Cuve de l’oscillateur (12) : Miroir de sortie de cavité (13) : Diaphragme (14) : Cuve du préamplificateur (15) : Lentille convergente, f’ = 30 cm (16) : Cuve de l’amplificateur Figure 3.5 : Schéma du laser à colorant Quantel TDL-50 Chapitre 3 : Expérimentation - 29 - Après avoir été séparé de l’IR résiduel par un zig-zag de miroirs dichroïques, le rayonnement à λ = 532 nm est utilisé pour pomper un laser à colorant Quantel TDL-50 constitué d’une cavité oscillante suivie de deux amplificateurs (voir figure 3.4). Afin d’optimiser la zone de pompage et de se ramener dans les conditions de pompage optimales (avec l’ancien laser de pompe Quantel), nous avons réduit par deux le diamètre du faisceau à λ = 532 nm à l’aide d’un afocal. L’oscillateur (11) est pompé transversalement par 4% de l’énergie du faisceau pompe, le premier amplificateur (14) par 10% et l’énergie restante sert à pomper le second amplificateur (16). La cavité oscillante, délimitée par les deux miroirs (8) et (12), contient entre autres : Un milieu actif (colorant) constitué d’un mélange de Rhodamine 640 et de DCM dilué dans du méthanol et circulant dans une cuve rectangulaire (11) Un réseau (9) utilisé au premier ordre en incidence rasante. Ce réseau, piloté par le logiciel informatique LOGIDYE, permet d’effectuer un balayage spectral. Un miroir plan totalement réfléchissant (8) peut pivoter au dessus du réseau pour sélectionner la longueur d’onde du laser Un système de prismes (10) permet d’élargir le faisceau pour éclairer tout le réseau et d’améliorer la finesse spectrale de l’émission laser. La cuve de l’oscillateur est inclinée de façon à ce que la sortie du faisceau laser se fasse par diffraction sur le bord de la cellule tandis que la fluorescence est rejetée dans une autre direction (voir figure 3.5). En sortie de l’oscillateur, le faisceau est élargi avant d’être amplifié par simple passage à travers les deux amplificateurs. Ce type de montage permet d’avoir deux amplificateurs qui ne sont pas pompés du même côté ce qui a pour effet d’obtenir une tache laser très uniforme. Signalons aussi que les trois cuves à colorant sont inclinées à l’angle de Brewster de façon à polariser verticalement le faisceau du laser à colorant. Pour résumé, les principales caractéristiques de ce laser à colorant à λ = 625,7 nm sont : - Énergie par impulsion = 25 mJ Durée des impulsion = 6 à 7 ns Fréquence = 10 Hz Diamètre du faisceau en sortie = 4 mm Polarisation verticale Finesse spectrale = 0,1 cm-1 Colorant : mélange de DCM et de Rhodamine 640 dissous dans du méthanol pur Cuve de l’oscillateur (11) Miroir fixe (12) Fluorescence Réseau + Miroir tournant Faisceau laser Faisceau pompe Figure 3.6 : Sortie du faisceau par diffraction sur le bord de la cuve de l’oscillateur (vue de dessus) Chapitre 3 : Expérimentation - 30 - Travail préliminaire : 1) Optimisation du faisceau à λ = 625,7 nm Un travail important a consisté à régler le laser à colorant afin d’optimiser le faisceau laser sur sa puissance mais aussi sur sa forme (voir figure 3.7). Pour optimiser sa puissance, on peut utiliser un détecteur (incertitude de mesure de 10%), que l’on place à la sortie du laser à colorant , pour mesurer directement la puissance reçue ou on peut utiliser une photodiode rapide en recherchant un pic d’intensité maximale à l’oscilloscope. Pour optimiser sa forme, on dispose de papier photosensible pour relever des traces du faisceau. Pour optimiser le faisceau on joue à la fois : - sur les concentrations des cuves de l’amplificateur d’une part, du préamplificateur et de l’oscillateur d’autre part (le colorant qui circule dans ces deux cuves provient du même réservoir) - sur l’alignement et le centrage du faisceau pompe en réglant les lentilles (7a, 7b et 7c), qui focalisent le faisceau pompe sur les cuves (on joue sur la distance de focalisation, la hauteur, l’inclinaison des lentilles) et les prismes (4c, 4d et 4e) - sur l’alignement et le centrage du faisceau laser en réglant les lentilles (6a et 15) permettant d’ajuster la taille du faisceau sur la face d’entrée des cuves (14 et 16) et les prismes (4a et 4b). Dans un premier temps, on commence par optimiser le faisceau à sa sortie de l’oscillateur en réglant le miroir de sortie de la cavité (12), la focalisation de la lentille cylindrique (7a) et la concentration de la cuve à colorant de l’oscillateur (11) (et celle de l’amplificateur qui est la même). Puis on s’occupe de l’amplification de la moitié gauche du faisceau (on coupe le trajet du faisceau pompe vers l’amplificateur avec le bloqueur (3c)) en jouant sur les réglages des optiques (prismes, lentilles). En relevant la trace du faisceau, on doit voir une zone sombre bien nette sur la partie gauche du faisceau, correspondant à l’amplification, mais qui perd en intensité lorsqu’on s’en éloigne (le gain diminue en s’éloignant de la zone de pompage, voir figure 3.7). Enfin, on s’occupe de l’amplification de la moitié droite du faisceau (on coupe cette fois le trajet du faisceau pompe vers le préamplificateur avec le bloqueur (3b)). De la même façon, on retouche un peu à la concentration de l’amplificateur et on l’ajuste à la forme du faisceau (avec cette fois une amplification de la partie droite, voir figure 3.7). Les réservoirs à colorant sont concentrés à partir d’une solution de concentration C0, calculée de façon à avoir un pic d’émission autour de λ = 626 nm et un pic d’absorption autour de la longueur d’onde du laser de pompe λ = 532 nm. Cette solution C0 contient un mélange de 288 mg de DCM et 75 mg de Rhodamine 640 en poudre dilué dans un litre de méthanol pur. Chapitre 3 : Expérimentation - 31 - Au départ, la solution de l’amplificateur était concentrée à 0,18.C0 et celle de l’oscillateur était concentrée à 0,44.C0 (précédentes expériences). Le but est d’augmenter les concentrations de l’oscillateur et de l’amplificateur (en ajoutant de petites doses de solution à C0) pour obtenir un compromis entre la puissance du faisceau (la plus grande possible) et sa forme (la plus ronde et la plus uniforme possible). Au final, en affinant les réglages des optiques du laser à colorant et en utilisant des concentrations de 0,26.C0 pour l’amplificateur et de 0,47.C0 pour l’oscillateur, on obtient un faisceau laser avec la bonne forme et avec une puissance de 210 mW (avec les concentrations de départ on avait 70 mW). Tache laser obtenue avec l’oscillateur seul (après le prisme 4a) Tache laser obtenue avec l’oscillateur et le préamplificateur mais sans l’amplificateur (après le préamplificateur 14). Partie gauche amplifiée Tache laser obtenue avec l’oscillateur et le préamplificateur mais sans l’amplificateur (après le prisme 4b) Simple retournement du faisceau Tache laser obtenue avec l’oscillateur et l’amplificateur mais sans le préamplificateur (après l’amplificateur 16) Autre partie amplifiée Figure 3.7 : Taches du faisceau du laser à colorant en différents endroits et pour différentes configurations (sur papier photosensible) Tache laser obtenue avec l’oscillateur, le préamplificateur et l’amplificateur (après l’amplificateur 16) Faisceau entier amplifié Chapitre 3 : Expérimentation - 32 - 2) Puissance à la sortie du laser à colorant en fonction de la puissance du laser de pompe Nd :Yag Afin de complètement caractériser le laser à colorant, il est intéressant d’étudier l’évolution de la puissance de sortie en fonction de la puissance du laser de pompe Nd :Yag. Pour faire varier la puissance du laser Nd :Yag sans modifier sa géométrie (diaphragme, filtres) ni les conditions d’accord de phase du cristal doubleur, on va jouer sur le décalage temporel entre le déclenchement des lampes flashs et l’ouverture des cellules de Pockels (à l’aide du générateur de délai Stanford Research). En effet plus les cellules de Pockels s’ouvrent tardivement par rapport aux lampes flashs et moins la puissance du faisceau de pompe est grande. Figure 3.8 : Puissance visible à la sortie du laser à colorant en fonction de la puissance de pompe du laser Nd :Yag SAGA On voit qu’à partir de la puissance de pompe seuil (inférieure à 600 mW), la puissance du laser à colorant varie linéairement avec la puissance du laser de pompe jusqu’à environ 2,5 W. Ensuite, la puissance du laser à colorant n’augmente plus en fonction du pompage (saturation). Chapitre 3 : Expérimentation - 33 - On retrouve bien le modèle prévu par la théorie : - pas d’effet laser pour un pompage faible (le gain ne compense pas les pertes dans la cavité, la population du niveau excité augmente avec la puissance de pompe) - au delà du seuil laser, la puissance de pompe est transférée au laser (la population du niveau excité n’augmente plus - la saturation observée pour de fortes puissances de pompe pourrait être éliminée en utilisant par exemple un faisceau pompe plus gros. Nous n’avons pas effectué cette expérience car le gain potentiel est assez peu important. c) Le système de doublement de fréquence Le rayonnement visible à λ = 625,7 nm du laser à colorant est doublé par un cristal de KDP. L’accord de phase est réalisé de manière angulaire en faisant varier, à l’aide d’un moteur, l’angle entre l’axe optique du cristal et la direction de propagation des faisceaux. Un second cristal identique est placé sur le trajet du faisceau laser. Le mouvement de ce deuxième cristal est couplé au premier de telle sorte que la rotation de celui-ci laisse toujours la direction du faisceau laser inchangée après traversée des deux cristaux. L’adaptation de phase est théoriquement asservie en fréquence par une boucle de contreréaction. Le signal d’erreur pilotant cette boucle est obtenu en analysant la répartition de l’intensité lumineuse. Lorsque l’accord de phase est correctement réalisé, l’énergie doit être répartie uniformément alors qu’en dehors de cet accord de phase la répartition de l’énergie est dissymétrique par rapport à deux photodiodes situées de part et d’autre de la zone centrale de la tache laser. Dans nos expériences, nous n’avons pas réussi à faire fonctionner cet asservissement électronique théorique. Pour optimiser la quantité de rayonnement UV « l’œil de l’expérimentateur » a été abondamment utilisé. Le faisceau visible étant polarisé verticalement, l’accord de phase pour le doublement de fréquence implique que le faisceau UV soit polarisé horizontalement. Le cristal de KDP que l’on utilise à un rendement de conversion de l’ordre de 15 à 20%. Les énergies typiques obtenues après le système de doublement sont de l’ordre de 18 mJ pour le rayonnement visible et 6 mJ pour le rayonnement UV. Chapitre 3 : Expérimentation - 34 - Travail préliminaire : Rendement de conversion du cristal doubleur de KDP Pour caractériser complètement notre système de doublement, on s’est intéressé au rendement de conversion du cristal doubleur de KDP. En faisant varier la puissance du laser de pompe (voir travail préliminaire du laser à colorant), on fait également varier la puissance à la sortie du laser à colorant et la puissance du rayonnement UV à la sortie du cristal. Figure 3.9 : Puissance UV en sortie du cristal doubleur en fonction de la puissance visible à l’entrée du cristal Le lecteur pourra se référer à la deuxième annexe pour une brève explication du doublement de fréquence et pour le détail du tracé de la courbe théorique. Mis à part les premiers points de mesure, la courbe expérimentale présente une dépendance quadratique de la puissance UV en fonction de la puissance visible. L’écart avec la théorie peut s’expliquer par les approximations qui entrent dans le cadre de la théorie (section de faisceau constante, faible rendement de conversion) mais qui ne sont pas forcément valables expérimentalement. Notons de plus que : - L’on a fait varier indirectement la puissance de rouge en faisant varier la puissance de pompe ce qui peut avoir pour conséquence de modifier la taille du faisceau visible à l’entrée du cristal doubleur - L’on n’a pas pris en compte les pertes UV lors du passage dans le second cristal doubleur (traité anti-reflet) et lors de la réflexion sur le miroir M1 (voir figure 3.10) Chapitre 3 : Expérimentation - 35 - d) Le montage « zig-zag » : séparation, superposition puis focalisation des faisceaux fondamentaux UV + rouge UV + résidu de rouge M2 à 45° UV + rouge SUPERPOSÉS Achromat f’ = 280 mm M1 à 45° Bras UV Bras rouge Prisme UV en Suprasil M3 à 45° Lambdamètre Espace disponible pour mettre des optiques ou des détecteurs Figure 3.10 : Schéma du montage « zig-zag » Du fait de la biréfringence du cristal doubleur de KDP, les deux faisceaux visible et UV ne sont pas rigoureusement superposés, ce qui diminue l’efficacité du processus de conversion de fréquences. Pour remédier à cela, on utilise un montage dit en « zig-zag » constitué : - d’un prisme UV en Suprasil - de deux miroirs M1 et M3 hautement réfléchissants à λ = 308 nm (proche de 312,85 nm) et hautement transparents à λ = 621 nm (proche de 625,7 nm) - d’un miroir M2 hautement réfléchissant à λ = 308 nm - de deux ensembles, appelés « bras rouge » et « bras UV » sur la figure 3.10, constitués d’une lame demi-onde et d’un prisme de Glan Thomson (séparateur de polarisation) à λ = 313 nm et à λ = 626 nm, l’ensemble formant un polariseur. Chapitre 3 : Expérimentation - 36 - La superposition des faisceaux visible et UV se fait très finement sur le miroir M3. Séparer ainsi les rayonnements visible et UV en deux « bras » présente deux avantages : - L’insertion de manière indépendante sur le « bras visible » ou sur le « bras UV » d’éléments optiques tels que lames (demi-onde ou quart d’onde) ou densités afin de faire varier l’intensité d’un des deux faisceaux indépendamment de l’autre - Superposer parfaitement les deux faisceaux avant de les focaliser dans la cuve à mercure à l’aide d’un achromat de 280 mm, conférant ainsi à ces deux faisceaux gaussiens la même distance focale. La polarisation du rayonnement VUV qui sera généré dans la cuve à mercure ne dépend que de la polarisation du rayonnement visible. La vapeur de mercure étant un milieu isotrope, les polarisations des faisceaux visible et UV peuvent aussi bien être croisées que parallèles (verticales ou horizontales) pour la même efficacité de conversion. Le facteur de transmission du Pellin-Broca à λ = 125,14 nm dépendant de la polarisation du rayonnement incident, il a été montré qu’il est préférable que le faisceau VUV soit polarisé horizontalement pour réduire les pertes. On fait donc en sorte de polariser le faisceau visible horizontalement en tournant la lame demi-onde de 45° par rapport à la polarisation incidente. Pour mettre en place le montage « zig-zag », un premier réglage préliminaire a consisté à s’assurer que les faisceaux visible et UV soient exactement à la même hauteur et exactement parallèles sur une grande distance. Une fois ce réglage réalisé, on peut insérer un à un chaque élément optique en vérifiant à chaque fois que l’alignement ne se dérègle pas. Afin de s’assurer que les faisceaux visible et UV soient strictement focalisés au même point dans la cuve à mercure et soient strictement superposés (longueur d’interaction avec le milieu non linéaire plus grande), on utilise un petit prisme que l’on met juste derrière l’achromat pour dévier à 90° les faisceaux. Ce réglage permet de projeter sur un écran placé à plusieurs mètres les faisceaux visible et UV afin de s’assurer qu’ils restent bien parallèles sur une grande distance et qu’ils sont confondus. e) La cuve à mercure La cuve est constituée d’un tube en acier d’environ 30 cm de long où se trouve en son centre un petit réservoir contenant quelques gouttes de mercure liquide. Elle est fermée à ses deux extrémités par un hublot d’entrée en quartz permettant le passage des faisceaux fondamentaux et par une lentille en fluorure de lithium LiF (f’ = 167 mm) qui assure la connexion avec une autre enceinte à vide. Cette lentille est choisie de façon à former un faisceau VUV parallèle d’environ 1 mm de diamètre. Cette cuve est pompée, avant chaque expérience, jusqu’à atteindre la pression de vapeur saturante du mercure à température ambiante (3,2.10-3 mbar à T = 300 K). Une jauge (J3) permet de contrôler en direct la pression à l’intérieur de la cuve. Un robinet en Dural permet de faire une arrivée d’air. Chapitre 3 : Expérimentation - 37 - Une molette permet de faire monter et descendre la cuve sur quelques cm par rapport aux faisceaux fondamentaux. Durant les expériences, les faisceaux fondamentaux traversent la cuve en passant à environ 0,5 mm au dessus de la surface liquide du mercure (hauteur optimale trouvé expérimentalement). f) L’enceinte « Pellin-Broca » : séparation des faisceaux HT PM Amplificateur Oscilloscope Alimentation : Diaphragme de filtrage Pompe turbo Cuve à Hg PellinBroca Vanne Pompe Cuve Pellin Broca J1 Figure 3.11 : Schéma de principe de la séparation des faisceaux et de la propagation du rayonnement VUV jusqu’au système de détection Robinet en Dural Lentille en LiF J2 J3 Hublot d’entrée Pompe Cellule Hg : Faisceau visible : Faisceau UV : Faisceau VUV A la sortie de la cuve à mercure, les faisceaux sont collimatés puis envoyés dans une autre enceinte pour être séparés par un prisme de Pellin-Broca. Une pompe primaire permet d’atteindre une pression de quelques 10-3 mbar dans l’enceinte (contrôlée par la jauge J1) puis est ensuite relayée par une pompe turbo-moléculaire pour atteindre une pression de l’ordre de 10-5 mbar (contrôlée par la jauge J2). Une pression inférieure suffirait à faire propager le rayonnement VUV mais ne permettrait pas de faire fonctionner le PM (à cause de la tension de claquage proportionnelle à la pression). Le rayonnement VUV généré dans la cuve à mercure se propage colinéairement aux deux faisceaux fondamentaux visible et UV. Un des problèmes à résoudre est alors de séparer le rayonnement VUV des rayonnements fondamentaux. Pour cela nous disposons d’un prisme Pellin-Broca en fluorure de lithium LiF dont l’indice de réfraction à λ = 125,14 nm, beaucoup plus grand qu’à λ = 625,7 nm et λ = 312,85 nm, permet de beaucoup plus dévier le rayonnement VUV. Chapitre 3 : Expérimentation - 38 - Ce prisme est monté sur une platine de rotation et un passage air-vide permet de le faire tourner depuis l’extérieur de façon à ce que le rayonnement VUV soit dévié de 90° vers le système de détection. Un diaphragme disposé à la sortie du prisme de Pellin-Broca permet d’éliminer les réflexions parasites (visible et UV). Pour mettre en place tout ce système sous vide (enceinte et cuve à mercure), il a fallu passer du temps pour trouver les optiques, les bons raccords, les pièces d’adaptation et les joints d’étanchéité qui tiennent suffisamment le vide. g) Le système de détection Le rayonnement VUV est détecté par un PM (les expériences ont été réalisées avec le PM Hamamatsu R2032 à photocathode en iodure de césium CsI). Le signal électrique qu’il délivre étant trop faible, il est envoyé dans un amplificateur réalisé par l’atelier d’électronique du laboratoire (gain : 50 dB, bande passante : quelques GHz) adapté pour détecter nos impulsions laser (de quelques ns avec un temps de montée de quelques ns aussi). Il est ensuite mesuré sur un oscilloscope (Tektronix TDS 540A de bande passante 500 MHz). Le déclenchement de l’observation s’effectue sur une impulsion du laser Nd :Yag recueillie par une photodiode rapide ThorLabs. L’énergie VUV est finalement déduite de l’amplitude du signal électrique par les courbes de calibration du PM (différentes en fonction de la Haute Tension (HT) appliquée). Figure 3.12 : Exemple de signal VUV observé sur l’oscilloscope Chapitre 3 : Expérimentation - 39 - Travail préliminaire : Calibration du photomultiplicateur Lorsque l’on s’intéresse précisément à l’énergie VUV que l’on obtient à la sortie de la cuve à mercure, il faut : Connaître l’énergie VUV qui arrive au niveau du PM Mesurer les transmissions à λ = 125,14 nm de toutes les optiques qui se trouvent entre la cuve à mercure et le PM (qui ne peut pas se faire avant la calibration). La calibration du PM va consister à connaître la relation de proportionnalité qui existe entre l’amplitude du signal VUV détecté sur l’oscilloscope et l’énergie correspondante. Le problème est que l’on ne peut pas calibrer directement le PM à λ = 125,14 nm car étant sous vide, on ne peut pas placer de détecteur dans l’enceinte « Pellin-Broca » (de plus nous n’avons pas de détecteur sensible à cette longueur d’onde). Par contre à la longueur d’onde du laser excimère (λ = 193 nm), on peut utiliser un détecteur (celui que l’on utilise est sensible jusqu’à λ = 150 nm) car le rayonnement se propage dans l’air. On va donc dans un premier temps calibrer le PM à λ = 193 nm. Puis, dans un deuxième temps, on aura aucun mal à connaître la calibration du PM à λ = 125,14 nm en utilisant sa courbe de sensibilité spectrale (fournie par le constructeur et donnée en annexe 3). Ne pouvant pas utiliser de détecteur lorsque l’on fait le vide pour le PM, on doit connaître la relation de proportionnalité qui existe entre l’endroit où l’on mesure l’énergie à la sortie du laser excimère (position 1 sur la figure ci dessous) et l’endroit où se trouvera le PM (position 2). En faisant varier l’énergie du laser excimère en position 1 (en fermant plus ou moins les diaphragmes, en insérant des hublots, des grilles de densité…), on a pu en déduire (en moyenne) un coefficient de proportionnalité à peu près constant entre l’énergie mesurée en position 1 et l’énergie mesurée en position 2 : E1/E2. Pour vérifier si ces valeurs étaient correctes, on a mesuré en plus les transmissions de toutes les optiques utilisées dans le montage ci dessous. Les valeurs mesurées sont bien celles que l’on attendait. Position 1 Position 2 Miroir en Suprasil Optiques d’atténuation Laser excimère Diaphragmes Prisme UV Hublot en Quartz Figure 3.13 : Montage expérimental pour la calibration du PM à λ = 193 nm Chapitre 3 : Expérimentation - 40 - Une fois ce coefficient connu, on place le PM en position 2 (on refait le vide), et pour différentes HT du PM et différentes énergies du laser excimère en position 1, on relève l’amplitude du signal détecté à l’oscilloscope. On obtient alors la courbe de calibration du PM à λ = 193 nm pour différentes HT du PM. Le rapport entre les sensibilités spectrales à λ = 125,14 nm et à λ = 193 nm étant de 50 (courbe donnée par le constructeur), on en déduit l’énergie incidente sur le PM à λ = 125,14 nm par la relation : E2 (λ = 125,14 nm) = E2 (λ = 193 nm)/50. On obtient finalement la calibration du PM à λ = 125,14 nm (voir figure ci dessous). Lorsque l’on détectera un signal VUV à l’oscilloscope, on sera donc en mesure de connaître l’énergie VUV qu’il y a à la sortie de la cuve à mercure. On voit que ces courbes présentent une saturation à partir d’une certaine énergie incidente sur le PM. Il faudra donc prendre garde, pour chaque expérience où on détectera un signal VUV, de toujours se placer dans la partie linéaire de la courbe de calibration du PM. 7000 HTPM 350 V 300 V Signal mesuré à l'oscillo (mV) 6000 5000 250 V 4000 3000 2000 200 V 1000 0 0 100 200 300 400 500 600 700 150 V 100 V 75 V 50 V 800 900 Energie incidente sur le PM (nJ) Figure 3.14 : Courbe de calibration du PM Hamamatsu R2032 à λ = 125,14 nm Il nous reste à mesurer précisément les transmissions à λ = 125,14 nm de toutes les optiques qui se trouvent entre la cuve à mercure et le PM pour connaître sans ambiguïté l’énergie VUV obtenue à la sortie de la cuve à mercure. Le principe est toujours de mesurer les transmissions à λ = 193 nm puis d’en déduire celles à λ = 125,14 nm par les courbes de calibration du PM. Nous avons mesuré : T = 52.4% pour la lentille de collimation en LiF et T = 82.1% pour le prisme de Pellin-Broca. Typiquement, on mesurait sur l’oscilloscope (dans les meilleures conditions) des signaux de l’ordre de 1500 mV pour HTPM = 250 V, ce qui conduit à 0.8 µJ d’énergie VUV à la sortie de la cuve à mercure en tenant compte des transmissions (avec 4,3 mJ d’énergie visible et 3,5 mJ d’énergie UV à l’entrée de la cuve à mercure). Chapitre 3 : Expérimentation - 41 - h) Le générateur de délai Afin d’introduire un décalage temporel entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser excimère, nous avons utilisé un générateur de délai ajustable Stanford Research. Ce générateur nous permet d’envoyer des signaux électriques (signaux créneaux TTL) au laser de pompe Nd :Yag et au laser excimère avec des décalages temporels que l’on peut faire varier. En agissant sur l’ouverture des cellules de Pockels et le déclenchement des lampes flash du laser Nd :Yag, on peut générer une impulsion à λ = 532 nm avec le retard temporel que l’on veut. De la même façon, on génère une impulsion à λ = 193 nm en envoyant un signal de commande au laser excimère. En définissant judicieusement les différentes relations temporelles entre signaux électriques, et en jouant sur le temps qui sépare le déclenchement des lampes flashs du laser Nd :Yag et le signal de commande du laser excimère, on peut faire varier simplement le décalage temporel entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser excimère (indispensable pour les expériences de vaporisation). i) Le système d’amplification Système Laser Générateur de délai ajustable (Stanford Research) Prisme UV Laser vaporisateur ArF à λ = 193 nm E = 3 mJ, f = 10 Hz, durée d’impulsion = 6 ns Faisceaux fondamentaux Visible à λ = 625,7 nm UV à λ = 312,85 nm Lentille convergente f’ = 85 mm Hublot Hublot d’entrée en Quartz Lentille en LiF VUV généré Vers la pompe primaire Figure 3.15 : Montage expérimental d’amplification du rayonnement VUV par vaporisation du bain de mercure Bain de mercure Chapitre 3 : Expérimentation - 42 - La technique qui a été proposée par l’équipe LUMEN pour augmenter l’énergie de la source VUV à λ = 125,14 nm est assez simple. En effet on a vu qu’elle consiste à augmenter localement la densité atomique, à la fois temporellement et spatialement, en vaporisant le bain de mercure, à l’aide d’un laser ArF à λ = 193 nm (laser non polarisé). Le décalage temporel entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser vaporisateur est contrôlé par le générateur de délai Stanford Research. Le faisceau du laser vaporisateur ArF est dévié à 90° par un prisme UV (en silice Suprasil) de façon à pouvoir focaliser ce faisceau sur la surface du bain de mercure à l’aide d’une lentille convergente de 85 mm de focale. Un hublot transparent à λ = 193 nm permet de passer dans la cuve à mercure qui est pompée jusqu’à atteindre la pression de vapeur saturante du mercure à température ambiante (Pvap = 3,2.10-3 mbar à T = 300 K). En envoyant l’impulsion du laser ArF, une fraction de µs avant le passage des impulsions fondamentales, une « plume » de mercure se forme. La densité d’atome de mercure est donc plus élevée que celle qui se trouve au dessus du bain de mercure liquide sans vaporisation (4.1013 at./cm3 à 20°C). Comme l’intensité VUV varie comme le carré de la densité atomique, on obtient une amplification. Chapitre 4 : Résultats et Discussions - 43 - Chapitre 4 : Résultats et Discussions Ce 4ième chapitre est entièrement consacré aux expériences réalisées durant le stage qui concernent uniquement la caractérisation du rayonnement VUV en fonction de différents paramètres de la source que l’on a fait varier (énergies, conditions de focalisation, décalage temporel entre impulsions...). Je tenterai ensuite d’interpréter les courbes obtenues. 4.1 Quels paramètres expérimentaux faire varier ? Le but de mon stage a consisté à continuer la caractérisation du rayonnement VUV en réalisant des expériences complémentaires par rapport à celles déjà faites par l’équipe LUMEN. Les expériences précédentes qui ont été réalisées concernaient : La variation du gain VUV11 en fonction de la longueur d’onde du laser à colorant (mesurée avec un lambdamètre étalonné) La variation du gain VUV en fonction des énergies des faisceaux fondamentaux sur la cuve à mercure (variation de l’énergie UV à énergie visible fixe et variation de l’énergie visible à énergie UV fixe). Ces expériences ont montré que : 11 La courbe obtenue du gain VUV en fonction de la longueur d’onde du laser à colorant présente une largeur spectrale 4 fois plus grande avec la vaporisation. Cet élargissement de la transition à deux photons est attribuable à la saturation. Cette courbe a montré que l’on obtient un signal VUV maximal avec et sans vaporisation pour une longueur d’onde du laser à colorant identique (625,702 nm). Le signal VUV est presque multiplié par un ordre de grandeur (facteur 6 à 7) dans des conditions expérimentales optimales, facteur qui peut s’élever jusqu’à ∼ 60 lorsque les intensités des faisceaux fondamentaux sont réduites. Le gain observé ne peut pas être attribué à un simple effet de vaporisation (densité atomique NHg qui augmente). Il est affecté par la modification des conditions d’accord de phase et par d’autres effets non linéaires qui entrent en compétition. En l’absence des éléments optiques introduisant des pertes (polariseurs, lames λ/2) une énergie VUV maximale de 2,5 µJ a été obtenue avec le laser ArF (et avec un laser de pompe Nd :Yag différent, délivrant des impulsions de 200 mJ d’énergie), soit ~ 300 W crête ou ~ 1 MW/cm². : On appellera « gain VUV » le rapport entre l’énergie VUV obtenue avec et sans vaporisation Chapitre 4 : Résultats et Discussions - 44 - Les deux principales expériences qui ont été réalisées durant le stage concernent : l’étude du gain VUV en fonction du décalage temporel entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser vaporisateur ArF l’étude du gain VUV en fonction de l’énergie incidente, sur le bain de mercure, du laser vaporisateur ArF. 4.2 Expériences réalisées 4.2.1 Gain VUV en fonction du décalage temporel entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser vaporisateur Le but est de répondre aux questions suivantes : Quel gain VUV maximal peut-on obtenir dans nos conditions expérimentales ? Combien de temps avant le passage des faisceaux fondamentaux dans la cuve à mercure faut-il envoyer l’impulsion du laser ArF pour obtenir ce gain VUV maximal ? Cela revient à déterminer expérimentalement le délai optimal entre les impulsions fondamentales et l’impulsion du laser ArF. a) Conditions expérimentales On applique une HT de 300 V au PM et on se place à la longueur d’onde optimale dans le vide pour le laser à colorant : λvide = 625,702 nm (balayage spectral à l’aide du logiciel informatique qui pilote la rotation du miroir qui se trouve au dessus du réseau). La puissance du laser Nd :Yag à λ = 532 nm est de 2,8 W (mesurée après le miroir réfléchissant à la sortie du laser Nd :Yag) Caractéristiques des faisceaux laser : - Eexc = 2,5 mJ (mesurée à la sortie du laser ArF) PUV = 6,5 mW (mesurée avant l'achromat) Pvisible = 34,2 mW (mesurée avant l'achromat) Pressions : - dans l’enceinte « Pellin-Broca » : 1,8.10-5 mbar dans la cuve à mercure : 1,4.10-2 mbar L’impulsion du laser ArF est détectée à l’aide d’une photodiode dont la zone photosensible est en diamant. L’impulsion du laser Nd :Yag est détectée à l’aide d’une photodiode rapide ThorLabs que l’on pose dans la lumière diffuse du laser. Chapitre 4 : Résultats et Discussions - 45 - Détecter l’impulsion du laser Nd :Yag juste à sa sortie ou détecter les impulsions fondamentales à leur entrée dans la cuve à mercure revient au même étant donné le temps de parcours négligeable de la lumière laser (quelques dizaine de ns). b) Courbe obtenue Figure 4.1 : Gain VUV en fonction du décalage temporel entre l’impulsion du laser ArF et l’impulsion du laser Nd :Yag c) Interprétation des résultats Cette courbe montre que l’on obtient, dans nos conditions expérimentales, un gain VUV d’environ 6,4 lorsque l’impulsion du laser ArF est envoyée environ 0,7 ± 0.1 µs avant le passage des faisceaux fondamentaux dans la cuve à mercure. On imagine qu’il faut 0.7 µs pour que la plume de mercure vaporisée atteigne une forme optimale (densité atomique maximale) au niveau du passage des faisceaux fondamentaux. En estimant que le mercure vaporisé met 0,7 µs pour parcourir 0,5 mm (distance séparant la surface de mercure des faisceaux fondamentaux), la vitesse de vaporisation de la plume serait alors d’environ 700 m.s-1. Chapitre 4 : Résultats et Discussions - 46 - 4.2.2 Gain VUV en fonction de l’énergie incidente, sur le bain de mercure, du laser vaporisateur Le but est ici de voir si le gain VUV augmente tant que l’énergie du laser ArF augmente ou s’il existe une limite au delà de laquelle l’énergie du laser ArF n’a plus d’effet sur l’augmentation du gain VUV (effet de saturation). Il faut connaître précisément l’énergie incidente du laser ArF sur le mercure. Un travail préliminaire a donc consisté à mesurer les transmissions à λ = 193 nm des optiques qui servent à amener le faisceau du laser ArF dans la cuve à mercure (prisme UV, lentille de focalisation et hublot). Ne disposant pas de couples de polariseurs ou d’un atténuateur variable à λ = 193 nm, la difficulté a été de trouver un moyen efficace pour faire varier l’énergie du laser. Heureusement nous disposons de quelques hublots dont on a mesuré les transmissions à λ = 193 nm ainsi qu’un jeu de grilles de densité différente. L’inconvénient des grilles est qu’elles modifient la forme du faisceau. En couplant tous ces éléments, on obtient facilement différentes énergies du laser ArF. a) Conditions expérimentales Les transmissions à λ = 193 nm des optiques servant pour la vaporisation sont de : - 81,8% pour le prisme 81% pour la lentille 90,4% pour le hublot On applique une HT de 300 V au PM et on se place toujours à la longueur d’onde optimale de λvide = 625,702 nm. Caractéristiques des faisceaux laser : - PUV = 14,9 mW (mesurée avant l'achromat) Pvisible = 31,7 mW (mesurée avant l'achromat) Pressions : - dans l’enceinte « Pellin-Broca » : 1,6.10-5 mbar dans la cuve à mercure : 1,1.10-2 mbar Chapitre 4 : Résultats et Discussions - 47 - b) Courbe obtenue Figure 4.2 : Gain VUV en fonction de l’énergie du laser ArF incidente sur la cuve à mercure c) Interprétation des résultats Cette courbe présente clairement un seuil pour les faibles énergies du laser ArF. En effet, on n’a pas de gain tant que l’on n’a pas une énergie suffisante pour vaporiser le mercure. Puis on arrive à une partie quasi linéaire jusqu’à l’apparition d’une saturation qui signifierait qu’on atteint une énergie maximale du laser ArF permettant d’obtenir le gain le plus grand dans nos conditions expérimentales. Enfin on observe une diminution du gain VUV (les trois derniers points qui sont sujet à discussion). On n’est pas en mesure d’interpréter correctement cette courbe pour des énergies plus élevées. Il faudrait prolonger cette courbe pour des énergies plus grandes ou en focalisant plus (car ce qui compte est la densité d’énergie en mJ/cm²). On pourrait alors normalement être capable d’interpréter cette partie de la courbe. Il est possible que l’augmentation de la densité d’atomes de mercure modifie les conditions d’accord de phase, ce qui donnerait un rendement de conversion moins efficace. Le début d’un caractère périodique serait une preuve de la modification des conditions d’accord de phase. Au cours de ces deux expériences, on a rencontré plusieurs difficultés expérimentales : - - avec le temps, du mercure « vaporisé » se dépose sur le hublot d’entrée formant ainsi une tache noire opaque pour les faisceaux visible et UV il est difficile de maintenir l’intensité UV constante, lorsque la boucle de contreréaction n’est pas mise en route, car l’accord de phase du cristal doubleur se dérègle très régulièrement (effet thermique) il faut un certain temps avant d’optimiser le signal VUV (superposition des faisceaux sur le miroir qui se dérègle, rotation du prisme de Pellin-Broca délicate etc.). - 48 - Chapitre 5 : Conclusion et perspectives - 49 - Chapitre 5 Conclusion et perspectives Ce stage, dans un laboratoire de recherche, m’a permis de découvrir avec un grand enthousiasme l’univers des chercheurs. C’est la première fois que j’ai pu autant mettre en pratique mes connaissances en optique et avoir la chance de devenir très vite autonome sur une expérience mêlant physique des lasers et optique non linéaire. D’ailleurs ce stage m’a tellement plu que je poursuis mon sujet de stage en thèse dans la même équipe. Les perspectives de ce sujet débouchent sur un travail de thèse visant à étudier l’utilisation de la source VUV pour la réalisation de nanostructures et de nano-objets. Les mises en place d’un interféromètre VUV et d’un outil de nanolithographie sont également envisagées. De façon plus fondamentale, ce travail cherchera aussi à déterminer plus en détail : - le spectre VUV du rayonnement produit pour déterminer les éventuels processus non linéaires concurrents comme par exemple : la photoionisation à trois photons UV la création d’espèces absorbantes pour le VUV l’émission spontanée amplifiée - l’énergie VUV obtenue lorsque les faisceaux fondamentaux sont colinéaires (en supprimant l’achromat et en ajoutant un afocal) - les facteurs qui modifieraient l’accord de phase (dépendance avec la densité atomique de mercure NHg ?). La diminution de l’accord de phase ∆k pourrait être due à : - l’effet Kerr résonnant à deux photons la population dans l’état 7s 1S0 du mercure la formation d’espèces chargées durant la vaporisation (création d’ions Hg+) les facteurs qui modifieraient la susceptibilité non linéaire du troisième ordre χ(3) : élargissement de la résonance à deux photons modification de la population dans l’état 7s 1S0 du mercure - le nombre d’atomes de mercure vaporisés à partir de mesures d’absorption et de fluorescence (possibilité d’une imagerie de la plume de mercure vaporisé) - la vaporisation à des longueurs d’onde différentes que celle du laser ArF. - 50 - Références - 51 - Références Thèse de M. Luc Museur, « Réalisation d’un laser pour l’ultraviolet lointain et application à l’étude des processus de relaxation radiatifs et collisionnels de dimères et d’agrégats de gaz rares » (1994) soutenue le 21/12/1994 à l’université Paris Nord Thèse de M. Damien Riedel, « Fluorescence et processus photochimiques induits par une source cohérente pulsée VUV à 10eV – Application à l’étude de la gravure de polymères organiques : PMMA et PTFE » (1998) soutenue le 18/11/1998 à l’université Paris Nord M.-C. Castex, L. Museur, C. Olivero et D. Riedel, « Potentialités des sources à 10eV », Journal of Physics IV, volume 9 (1999) S. Chénais, S. Forget, L. Philippet and M.-C. Castex, « Generation of coherent pulsed radiation at 125nm by four-wave mixing in mercury : the route towards a tabletop VUV laser », EOS Meeting, Paris (2006) L. Museur, W. Q. Zheng, A. V. Kanaev and M.-C. Castex, « A Very Convenient Setup to Generate Intense VUV Coherent Light at 125nm with Use of Nonlinear Effects in Mercury Vapor at Room Temperature », IEEE Journal of selected topics in quantum electronics, volume 1, n°3, pages 900-907 (1995) Robert W. Boyd, « Non linear optics », Academic Press Inc., San Diego (1992) J.M. Carter, R.C. Fleming, T.A. Savas, M.E. Walsh, and TB O’Reilly (M.L. Schattenburg and H.I. Smith), « Interference Lithography », Submicron and Nanometer Structures, MTL Annual Report 2003, pages 186-188 (2003) J.-Y. Courtois, « Optique non linéaire - les lasers et leurs applications scientifiques et médicales » - 52 - Annexes - 53 - Annexes 1. Origine physique des effets non linéaires L’apparition de la lumière laser a conduit à la découverte de nouvelles propriétés de la matière ou de l’interaction lumière-matière, qui sont devenues accessibles grâce aux fortes intensités. En optique linéaire les propriétés optiques d’un matériau dépendent de la fréquence de la lumière, de sa polarisation, de sa direction de propagation. En optique non linéaire, elles peuvent aussi dépendre de l’intensité lumineuse et conduire à l’apparition de nouvelles fréquences comme l’addition ou la soustraction de la fréquence des rayonnements ou bien la génération de rayonnements « jumeaux » de fréquences accordables. En effet, le champ électrique de la lumière laser devient comparable au champ intra-atomique Eat responsable du lien entre électrons et cœur ionique (on en donne un ordre de grandeur au paragraphe 2.2). La réponse optique linéaire caractérisée par un indice de réfraction indépendant du champ électrique de l’onde excitatrice, c’est à dire une polarisation induite proportionnelle à l’amplitude du champ laser, cesse alors d’être valable. Ainsi, il apparaît une non-linéarité dans l’expression de la polarisation d’un milieu (que l’on détaille au paragraphe 2.2). Les phénomènes d’optique non linéaires sont donc « non linéaires » dans le sens où ils se produisent lorsque la réponse du matériau (on va voir que c’est sa polarisation) à un champ optique appliqué dépend de manière non linéaire de l’amplitude de ce champ. Par exemple, la génération de second harmonique apparaît comme un résultat de la partie de la réponse qui dépend quadratiquement de l’amplitude du champ optique appliqué. L’intensité de la lumière générée à la fréquence double tend donc à augmenter avec le carré de l’intensité de la lumière laser appliquée. De manière à comprendre l’origine physique des effets non linéaires, nous allons illustrer sur un modèle classique d’électron élastiquement lié l’existence d’une non-linéarité dans l’interaction entre un matériau et un faisceau laser. Un modèle plus rigoureux fait appel à la mécanique quantique et au formalisme de la matrice densité car il permet d’expliquer : La dépendance fréquentielle des susceptibilités non linéaire lorsque le milieu a plusieurs résonances (ce qui est toujours le cas en pratique), et en particulier les différentes exaltations au voisinage des résonances La dépendance des susceptibilités non linéaire avec les populations des différents niveaux. Le modèle classique ne permet pas d’aboutir à l’expression complète de la susceptibilité non linéaire. Il est limité à une seule fréquence de résonance et ne tient pas compte de la probabilité de chaque transition (appelée « force d’oscillateur »). Un matériau peut être essentiellement modélisé comme un ensemble de particules chargées : ions et électrons. Soumises à un champ électrique, les charges tendent à se déplacer. Néanmoins, les ions positifs ayant toujours une masse considérablement supérieure à celle des électrons, on peut considérer en première approximation que seuls les électrons sont animés d’un mouvement. Annexes - 54 - Dans un matériau conducteur, les électrons peuvent se déplacer à travers le matériau aussi longtemps que le champ électrique est appliqué, donnant lieu à un courant électrique. Dans un diélectrique, les particules chargées, fortement liées les unes aux autres, s’éloignent légèrement de leur position d’origine en présence d’un champ électrique. Ces petits déplacements élémentaires se traduisent par l’apparition dans le matériau d’un moment dipolaire électrique induit. r Sous l’action du champ électrique E (t ) sinusoïdal d’une onde laser (champ oscillant à une fréquence de l’ordre de 1013 à 1015 Hz), les charges d’un diélectrique (les électrons) sont soumises à un mouvement oscillant de même fréquence, formant un ensemble de dipôles oscillants. De façon générale, la réponse d’un électron à un champ électrique optique correspond à celle d’une particule dans un potentiel anharmonique (l’extension spatiale du potentiel ne pouvant pas être infinie pour des raisons physiques). On peut décrire une telle situation à l’aide d’un modèle simple où l’électron de masse m et de charge –e est lié au cœur ionique de l’atome par l’intermédiaire d’un ressort, les dipôles étant supposés tous orientés dans la r direction du champ électrique E( t ) . L’évolution de l’écart à l’équilibre x de l’électron sous r l’effet du champ électrique E( t ) sinusoïdal est alors régie par une équation du type : r r r r m&x& = Fe +Fr +Ff (A.1) y z Atome x r r F = ( -e )E + Électron r E r Fr Analogie r Ff r E Figure A.1 : Représentation schématique du mouvement des particules chargées dans un milieu diélectrique soumis à un champ électrique oscillant de fréquence optique r Fe O Masse m Figure A.2 : Représentation du mouvement d’un électron par analogie avec une masse ponctuelle m soumise à une force due au champ électrique de fréquence ω et maintenue au voisinage de sa position d’équilibre O par un ressort exerçant une force de rappel et une force de frottement. Annexes - 55 - Dans cette équation apparaissent trois forces : r La force de Coulomb exercée sur l’électron par le champ électrique E( t ) , force qui induit son oscillation : r r Fe =( - e )E( t ) (A.2) La force de frottement proportionnelle à la vitesse (Γ est le taux d’amortissement lié au rayonnement dipolaire) : r Ff =- 2mΓx& (A.3) Pour de petits déplacements de l’électron autour de la position d’équilibre O, la r force de rappel Fr exercée par l’atome sur l’électron est de type ressort : r Fr = - mw0 2 x (A.4) r Cette force est reliée au potentiel d’énergie par l’équation : U( x ) = - ∫ Fr .dx (A.5) Pour des déplacements plus importants, l’élongation devient trop grande et le potentiel ne peut plus être considéré comme quadratique. Il faut alors ajouter un second terme qui correspond à une correction anharmonique (développement limité en x) : r a b Fr = − mw0 2 x − max2 + mbx3 + ... = − mw0 2 x 1 + 2 x − 2 x 2 + ... (A.6) w0 w0 Ici ω0 est la fréquence de résonance de l’électron et a et b sont des paramètres qui caractérisent la force de la non-linéarité de la réponse. A partir des relations (A.5) et (A.6), on obtient : U( x ) = 1 1 1 mw0 2 x2 + max3 − mbx4 + ... (A.7) 2 3 4 On retrouve dans le premier terme de U(x) l’expression du potentiel harmonique. Ce modèle correspond à la situation physique réelle des électrons dans les matériaux où le potentiel réel n’est pas parfaitement parabolique. Annexes - 56 - U(x) Parabole Potentiel réel x U(x) Parabole Potentiel réel x Figure A.3 : Potentiel d’énergie dans un milieu non centro-symétrique Figure A.4 : Potentiel d’énergie dans un milieu centro-symétrique (a = 0) U(x) = 1/2mω0²x² + 1/3max3 - 1/4mbx4 + … En général le terme en x4 est négligeable devant le terme en x3 U(x) = 1/2mω0²x² - 1/4mbx4 Pour résumé, l’amplitude du mouvement x(t) des électrons au sein du diélectrique ne peut être considérée comme linéaire en champ qu’à la limite où le déplacement des électrons est r petit. Pour des écarts à l’équilibre importants, la force de rappel Fr (plus intense) devient significativement non linéaire en x de manière à contenir le mouvement des électrons au voisinage du cœur ionique. Le mouvement x(t) des électrons n’est plus proportionnel à r E( t ) et n’est donc plus sinusoïdal. Les oscillations se déforment par rapport à une sinusoïde (termes anharmoniques -max2 + bmx3 +…). La réponse anharmonique des électrons donne lieu à une polarisation induite qui n’est plus linéaire en amplitude du champ électrique. Une analyse spectrale de la polarisation induite montre qu’en dehors de la composante principale oscillant à la fréquence du laser ω, la polarisation du milieu contient également des composantes de fréquence 2ω, 3ω…ainsi qu’une composante de fréquence nulle (composante continue). Le mouvement de l’électron peut alors s’écrire comme la somme d’une série de Fourier où apparaissent de nouveaux termes de pulsation 2ω, 3ω, 4ω… en plus de celui à la pulsation ω. Nous allons illustrer cette notion (figures A.5 et A.6) en nous intéressant uniquement au milieu centro-symétrique. En effet la vapeur métallique de mercure que nous utilisons comme milieu non linéaire dans nos expériences est centro-symétrique. On verra que dans un tel milieu, la susceptibilité non linéaire du deuxième ordre χ(2) est nul. Par conséquent, la polarisation ne contient que des composantes de fréquences ω, 3ω, 5ω… (mais pas 2ω). On peut représenter le mouvement périodique de l’électron déformé par la présence d’effets non linéaire comme la somme d’une série de Fourier contenant des termes de fréquences ω, 3ω, 5ω… Annexes - 57 - Figure A.5 : Mouvement périodique d’un électron dans un milieu centro-symétrique (en rouge une sinusoïde parfaite). Ce mouvement « déformé » est clairement non linéaire Terme à la fréquence ω Terme à la fréquence 3ω Terme à la fréquence 5ω + + +… Figure A.6 : Décomposition du mouvement non linéaire de l’électron en une somme de série de Fourier contenant des termes aux fréquences ω, 3ω, 5ω... 2. Doublement de fréquence Lorsqu’une onde intense de pulsation ω (l’onde fondamentale) est envoyée sur un milieu non linéaire, l’expérience montre qu’il y a création d’une onde de pulsation 2ω (l’onde harmonique). C’est le phénomène de doublement de fréquence. Il se produit par exemple à l’intérieur d’un cristal non linéaire de longueur l. On note E(ω)(z) et E(2ω)(z) les amplitudes des ondes fondamentale et harmonique. On suppose l’onde fondamentale suffisamment intense, ou le processus de doublement de fréquence suffisamment peu efficace, pour que l’on puisse négliger la variation de E(ω)(z) au cours de la traversée du milieu non linéaire (E(ω)(z) = E(ω)(0)). On suppose également que les faisceaux sont uniformes sur leur section S. En utilisant les équations de propagation des champs E(ω)(z) et E(2ω)(z) dans le milieu non linéaire et en utilisant les relations : P( ω ) ( 0 ) = SI ( ω ) ( 0 ) = S n( ω ) ( ω ) * E ( 0 ) E ( ω ) ( 0 ) (A.8) et 2µ 0 c 0 P( 2 ω ) ( l ) = SI ( 2 ω ) ( l ) = S [ ] n( 2 ω ) ( 2 ω ) * E ( l ) E ( 2 ω ) ( l ) (A.9) 2µ 0 c 0 [ ] Annexes - 58 - On aboutit à la relation reliant la puissance de l’onde harmonique en sortie du milieu non linéaire P(2ω)(l) à la puissance de l’onde fondamentale à l’entrée du milieu non linéaire P(ω)(0) et de sa surface de focalisation sur le milieu non linéaire : ∆k .l ω 2 d eff l sin 2 2 P ( ω ) ( 0) (A.10) ∆k .l S 2 2 P ( 2ω ) (l ) = 2 1 1 3 ε 0c n ( 2ω ) n (ω ) 2 2 ( ) 2 [ ] où : µ0 : perméabilité magnétique du vide ε0 : permittivité diélectrique du vide l : longueur du milieu non linéaire ω : pulsation de l’onde fondamentale 2ω : pulsation de l’onde harmonique P(ω)(0) : puissance crête de l’onde fondamental à l’entrée du cristal P(2ω)(l) : puissance crête de l’onde harmonique à la sortie du cristal n(ω) : indice de réfraction du milieu non linéaire à la pulsation ω n(2ω) : l’indice de réfraction du milieu non linéaire à la pulsation 2ω deff = d.f(θ) : coefficient non linéaire effectif (avec d = ε0.χ(2)) S : section des faisceaux ∆k = k(2ω) - 2k(ω) (A.11) : accord de phase (lorsque ∆k ≠ 0, le doublement de fréquence est moins efficace) P( 2 ω ) ( l ) Le rendement de conversion est défini par : η = ( ω ) (A.12). P (0) Le doublement de fréquence est donc d’autant plus efficace que la puissance est forte. Pour les lasers pulsés, les puissances crêtes sont fortes et le rendement de conversion est satisfaisant. La relation (A.10) montre que l’effet est proportionnel au carré de la puissance crête de l’onde fondamentale (effet non linéaire du second ordre). Il varie également comme l’inverse de la surface illuminée. Néanmoins, il ne faut pas en conclure que l’on a intérêt à focaliser au maximum le faisceau incident. En effet, une forte focalisation s’accompagne nécessairement d’une rapide divergence du faisceau, qui fait diminuer son intensité lorsque l’on s’éloigne du foyer. Le gain sur l’efficacité du doublement dans la zone focale est alors compensé par des pertes dans d’autres zones du milieu non linéaire. La variation de l’efficacité du doublement de fréquence (A.12) avec la longueur l du milieu non linéaire dépend de manière cruciale des valeurs des indices de réfraction n(ω) et n(2ω). Si la condition d’accord de phase (A.11) est remplie, le transfert d’énergie de l’onde fondamentale vers l’onde doublée est maximal et croît comme l². Annexes - 59 - A l’inverse, si cette condition n’est pas remplie, la puissance du faisceau doublé P(2ω) présente un comportement oscillant en fonction de l (il s’annule pour des valeurs l multiples de 2π/∆k). Cet effet est dû à une interférence destructive entre les champs rayonnés à la pulsation 2ω par les différents points du cristal (voir fin du paragraphe 2.1). La condition d’accord de phase, qui conduit à n(ω) = n(2ω), est réalisée en utilisant un cristal biréfringent, où l’on peut rendre égaux, par exemple, l’indice ordinaire à ω et l’indice extraordinaire à 2ω (l’onde à 2ω ayant une polarisation linéaire orthogonale à celle de l’onde à ω). Comme ce dernier indice dépend de l’angle d’incidence de la lumière sur le cristal, il suffit de tourner le cristal par rapport au faisceau incident pour satisfaire la condition d’accord de phase et ainsi obtenir l’efficacité de doublement maximale. Cristal (milieu non linéaire) ω χ(2) ω 2ω l Figure A.7 : Doublement de fréquence dans un cristal Pour l’expérience sur le doublement de fréquence dans le cristal de KDP (paragraphe 3.2.c), les paramètres utilisés pour tracer la courbe théorique sont : - n(ω) = 1,535 n(2ω) = 1,590 deff = 0,38 pm/V l = 35 mm (longueur du cristal) S = πω02 ω0 = 3 mm (au niveau du cristal) Annexes 3. Courbe de sensibilité spectrale du photomultiplicateur (fournie par le constructeur) - 60 - Lexique - 61 - Lexique (des abréviations et des constantes physiques) h = h 2π = 1,055.10-34 kg·m².s-1, où h : constante de Planck ε0 = 1 = 8,851.10-12 kg-1·m-3·A2·s4 : permittivité diélectrique du vide µ0 c2 µ0 = 1,257.10-6 kg·m·A-2·s-2 : perméabilité magnétique du vide c = 2,998.108 m.s-1 : vitesse de la lumière dans le vide BBO : Borate de Baryum BaB2O4 (pour un cristal non-linéaire) CCD : Coupled Charge Device (dispositif à couplage de charge) CLEO : Conference on Lasers Electro-Optics (à Long Beach en 2006) CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique CVD : Chemical Vapor Deposition (dépôt chimique en phase vapeur) DCM : 4-(dicyanomethylene)-2-methyl-6-(4-dimethylamino styryl)-4H-pyran (colorant utilisé avec la rhodamine 640 dans notre laser à colorant Quantel TDL-50) HT : Haute Tension IR : InfraRouge KTP : Titanyl Phosphate de Potassium KTiOPO4 (pour un cristal non-linéaire) KDP : Potassium Dihydrogène Phosphate KH2PO4 (pour un cristal non-linéaire) KD*P : Potassium Dideutérium Phosphate KD2PO4 (pour un cristal non-linéaire) LPL : Laboratoire de Physique des Lasers LUMEN : Lasers vUv, Matériaux Electroluminescents et Nanostructures MPPU : Mathématique, Physique, Planète et Univers OLED : Organic Light Emitting Diodes (diodes organiques électroluminescentes) ON : Ouverture Numérique OPO : Oscillateur Paramétrique Optique PM : PhotoMultiplicateur TEM : Transverse Électrique Magnétique (pour une onde) TTL : Transistor-Transistor Logic (une des familles de circuits intégrés) UMR : Unité Mixte de Recherche UV : UltraViolet VUV : Vacuum UltraViolet en anglais, ultraviolet du vide ou ultraviolet lointain en français (100 nm < λ < 200 nm, 6,2 eV < E < 12,4 eV) XUV : UltraViolet du domaine des rayons X (λ < 100 nm)