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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT
Année 2012
LES ÉVOLUTIONS RÉCENTES
DANS L’UTILISATION DES BÊTA-BLOQUANTS
POUR LES CARDIOPATHIES SPONTANÉES
DU CHIEN ET DU CHAT
THÈSE
Pour le
DOCTORAT VÉTÉRINAIRE
Présentée et soutenue publiquement devant
LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL
le……………
par
Mileva BERTAL
Née le 29 Janvier 1986 à Paris 14e
JURY
Président : Pr.
Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL
Membres
Directeur : Pr Valérie CHETBOUL
Professeur de Cardiologie à l’ENVA
Assesseur : Dr Renaud TISSIER
Maître de conférences en pharmacologie et toxicologie à l’ENVA
2
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION………………………….………………………………………………….........................................5
PREMIERE PARTIE: LES BÊTA-BLOQUANTS, ETUDE PHARMACOLOGIQUE……………………………7
1. Etude générale des bêta-bloquants..….……………………………………………….……….….………….…..9
1.1. Organisation fonctionnelle du système nerveux …………………………………………………………...9
1.1.1. Le système nerveux végétatif……………………………………………………………………….……………10
1.1.1.1. Organisation du système nerveux sympathique (ou orthosympathique)…….………….11
1.1.1.2. Organisation du système nerveux parasympathique………………………………………………13
1.1.2. Rôles du système nerveux végétatif……….………………………………………………….………..……14
1.2. Transmission de l’information au sein du système sympathique………………………………….16
1.2.1. Les catécholamines endogènes……………………………………………………………………….…………16
1.2.2. Les catécholamines exogènes ou molécules sympathomimétiques…………………………..17
1.2.3. Les récepteurs adrénergiques……………………………………………………………………………………18
1.2.3.1. Classification des récepteurs adrénergiques………………………………………………………..…18
1.2.3.2. Localisations des récepteurs adrénergiques……………………………………………………………19
1.2.3.2.1. Les récepteurs de sous type α1 et α2…………………………………………………………………..19
1.2.3.2.2. Les récepteurs β1 cardiaques ……………………………………………………………………………..19
1.2.3.2.3. Les récepteurs β2 pulmonaires et des muscles lisses vasculaires………………………...19
1.2.3.3. Caractéristiques des différents types de récepteurs et de leurs agonistes………………20
1.3. Conséquences de l'activation des récepteurs bêta-adrénergiques……………………….………21
1.3.1. Effets de l'activation des récepteurs bêta sur la pression artérielle……………………………22
1.3.2. Effets myocardiques de l'activation des récepteurs bêta…………………………………………..22
1.3.3. Autres effets liés à l'activation des récepteurs bêta…………………………………………………..23
1.3.4. Conséquences d’une stimulation excessive des récepteurs bêta :
la régulation négative ou « down regulation »…………………………………………………………………….24
3
1.4. Les antagonistes bêta-adrénergiques (bêta-bloquants)………………………………………………..24
1.4.1. Découverte des bêta-bloquants…………………………………………………………………………….…..24
1.4.2. Structure chimique des bêta-bloquants ……………………………………………………………….……24
1.4.3. Propriétés pharmacocinétiques des bêta-bloquants..……………..……………………….….......26
1.4.4. Propriétés pharmacodynamiques des bêta-bloquants.………………………………………………27
1.4.4.1. Cardiosélectivité……………………………………………………………………………………………………..27
1.4.4.2. Activité agoniste partielle (activité sympathomimétique intrinsèque = ASI)…….……..27
1.4.4.3. Caractéristiques des principaux bêta-bloquants………………………….……………..…………..28
1.4.4.4. Autres propriétés de certains bêta-bloquants…………………………………………………………28
1.4.5. Effets pharmacologiques cardiovasculaires des bêta-bloquants……………………..…………28
1.4.6. Effets indésirables décrits des bêta-bloquants………………………………………………..…………29
2. Etude spéciale des bêta-bloquants utilisés en médecine vétérinaire….….………………………..31
2.1. Le propranolol………………………………………………………………………………………………………………31
2.2. Le metoprolol……………………………………………………………………………………………………………….33
2.3. L’aténolol……………………………………………………………………………..………………………………………33
2.3.1. Données pharmacologiques………………………………………………………………………………………33
2.3.2. Etude pharmacocinétique de l'aténolol sur huit chats sains………………………………………33
2.3.3. Etude des effets sur la fréquence cardiaque et certaines variables
échocardiographiques…………………………………………………………………………………………………………36
2.4. Le carvedilol………………………………………………………………………………………………………….………37
2.4.1. Pharmacocinétique du carvedilol après administration intraveineuse et orale à
des chiens sains et conscients……………………………………………………………………………………….…….37
2.4.2. Résultats apportés par les études pharmacodynamiques antérieures (1985-1999)…..38
2.4.3. Effets hémodynamiques du carvedilol administré oralement à des chiens sains……….39
2.4.4. Etude pharmacodynamique du carvedilol sur huit chiens sains…………………………………40
2.4.5. Effets cardiovasculaires et rénaux du carvedilol chez des chiens présentant
une régurgitation mitrale et chez des chiens sains ………………………………………………….………….42
4
SECONDE PARTIE : LES BÊTA-BLOQUANTS, ETUDE CLINIQUE…………………………………………….47
1. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la myocardiopathie dilatée…...…..49
1.1. Mise en évidence de l’augmentation de la concentration en catécholamines lors de
MCD et de son rôle dans l’évolution de la maladie………………………………………………………………49
1.2. Etudes cliniques de l’utilisation de bêta-bloquants chez des chiens atteints
de MCD………………………………………………………………………………………………………………………….…...52
1.2.1. Etude rétrospective de la survie des chiens atteints de MCD avec insuffisance
cardiaque congestive traités à la digoxine, au furosémide et au propranolol……………..………52
1.2.2. Comparaison des effets du carvedilol et du metoprolol chez des chiens atteints
de MCD……………………………………………………………………………………………………………………………….54
1.2.3. Utilisation de carvedilol chez les chiens atteints de MCD…………………………………………..57
2. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la MVD….……………………………………61
2.1. Mise en évidence de l’augmentation de la concentration en catécholamines lors de
MVD………….…………………………………………………………………………………………………………………..……61
2.2. Etudes cliniques de l’utilisation de bêta-bloquants chez les chiens atteints de MVD.……62
2.2.1. Confrontation des effets du lisinopril et de l’aténolol sur les variables
hémodynamiques et la fonction de contraction du ventricule gauche sur des
chiens présentant des régurgitations mitrales expérimentales…………………………..……………….62
2.2.2. Effets du traitement au carvedilol sur des chiens atteints de MVD associée à
une insuffisance cardiaque…………………………………………………………………………………………….……64
3. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la myocardiopathie
hypertrophique féline (MCH)…………………………………………………………………………………….……….67
3.1. Données récentes concernant l’utilisation des bêta-bloquants dans le traitement
de la MCH………………………………………………………………………………………………………………..………….68
3.2. Effets de l’aténolol sur le NT-proBNP et la Troponine chez des chats
asymptomatiques atteints de myocardiopathie hypertrophique…………………………………………69
5
4. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement des sténoses aortiques et
pulmonaires canines …………………………………………………………………………………………………..……..73
4.1. Influence de l’utilisation des bêta-bloquants sur la durée de survie des chiens atteints
de sténoses aortiques sous-valvulaires …………………………………………………………………………….…73
4.2. Influence de l’utilisation des bêta-bloquants sur la durée de survie des chiens atteints
de sténoses pulmonaires…………………………………………………………………………………………………….77
5. Utilisation des bêta-bloquants pour le traitement de l’insuffisance cardiaque…….……….79
5.1. Mise en évidence des modifications au sein du système sympathique lors
d’insuffisance cardiaque……………………………………………………………………………………….…….………79
5.2. Utilisation du metoprolol chez des chiens insuffisants cardiaques suite à une MCD
ou une MVD………………………………………………………………………………………………………………………..81
5.3. Effets du traitement au carvedilol sur des chiens insuffisants cardiaques suite à une
MVD mitrale………………………………………………………………………………………………………………..……..83
6. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement des arythmies……….…………………….…..85
6.1. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la fibrillation atriale.……………..……86
6.2. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement des arythmies ventriculaires……….….86
6.2.1. Comparaison des effets de quatre traitements anti-arythmiques pour
la myocardiopathie arythmogène ventriculaire droite du Boxer………………………………..………..87
6.2.2. Intérêt de la bithérapie mexiletine-sotalol par rapport à l’utilisation de mexiletine
ou de sotalol seuls pour le traitement des arythmies ventriculaires familiales du
Berger Allemand…………………………………………………………………………………………………………….……91
6.2.3. Comparaison de l’association sotalol–mexiletine au sotalol seul dans le traitement
de chiens Boxer atteints d’arythmies ventriculaires……………………………………………….……………92
CONCLUSION……......................................................................................................................97
LISTE DES FIGURES………………………………………………………………………….………………….………………98
LISTE DES TABLEAUX………………………………………………………………………………….…………..…………..99
BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………………………………..……….……………101
ANNEXES……………………………………………………………………………………………………..……….…………..107
6
INTRODUCTION
Grâce aux progrès réalisés ces dernières années en échocardiographie des carnivores
domestiques, les différentes affections cardiaques de ces espèces sont de mieux en mieux
connues, et diagnostiquées à la fois plus précisément, et plus précocement.
En outre, ces avancées en imagerie médicale permettent d’évaluer l’efficacité des
traitements mis en place : lors de suivis réguliers, les valeurs obtenues à partir des images
échocardiographiques sont comparées aux valeurs mesurées avant l’initiation de la
médication. Ainsi, les traitements de ces cardiopathies ont également été largement
explorés ces dernières années, afin d’adapter au mieux le dosage des molécules employées,
tout en tenant compte du stade d’évolution de la maladie.
Les traitements ayant une action neuro-hormonale ont été particulièrement étudiés
ces dernières années, à la fois chez l’homme et chez l’animal. En effet, lors de cardiopathie
chez le chien et le chat, le taux de survie à partir de l’apparition des signes cliniques est
souvent très court, malgré l’utilisation des différents traitements à disposition : agents
inotropes positifs, diurétiques, inhibiteurs calciques, etc. De plus, la progression d’une
cardiopathie (puis à terme d’une insuffisance cardiaque) fait intervenir des modulateurs
neuroendocrines, qui induisent des changements adaptatifs associés à une activation
chronique du système rénine-angiotensine-aldostérone et du système nerveux sympathique.
Les traitements « neuro-hormonaux » ont donc pour objectif de diminuer voire de bloquer la
production de certaines molécules du système neuroendocrinien, qui accélèrent l’évolution
des cardiopathies, et sont ainsi délétères pour l’organisme. Il s’agit en particulier des IECA
(Inhibiteurs de l’Enzyme de Conversion de l’Angiotensine), qui s’opposent à l’activation du
système Rénine-Angiotensine-Aldostérone, de la spironolactone, antagoniste de
l’aldostérone, et des bêta-bloquants, qui empêchent la stimulation des systèmes
noradrénergique et adrénergique.
Chez l’homme, l’insuffisance cardiaque se caractérise notamment par des
concentrations élevées en catécholamines circulantes. Il a été par ailleurs démontré que les
catécholamines réduisaient la viabilité et la synthèse protéique de cardiomyocytes humains
isolés. L’utilisation de bêta-bloquants chez l’homme permet ainsi d’améliorer la fonction
systolique du myocarde, d’augmenter la capacité à l’exercice physique et de prolonger la
survie des patients.
7
Chez les carnivores domestiques, de nombreuses affections trouvent des indications
dans l’utilisation de bêta-bloquants. Chez le chien, il s’agit en particulier des sténoses
aortiques et pulmonaires, de la maladie valvulaire dégénérative et de la dysplasie mitrale, et
de la myocardiopathie dilatée. Chez le chat, la principale cardiopathie pour laquelle les bêtabloquants sont à l’étude est la myocardiopathie hypertrophique. De plus, les bêta-bloquants
correspondent aux anti-arythmiques de classe II de la classification de Vaughan-Williams, ce
qui constitue une indication supplémentaire à leur utilisation.
Dans ce travail, nous nous attacherons à rassembler les données pharmacologiques
obtenues chez les carnivores domestiques jusqu’à ce jour, puis à faire une synthèse des
études cliniques vétérinaires publiées au cours de ces dix dernières années sur cette
thématique.
8
PREMIЀRE PARTIE :
LES BÊTA-BLOQUANTS, ÉTUDE PHARMACOLOGIQUE
9
10
1. Etude générale des bêta-bloquants
1.1. Organisation fonctionnelle du système nerveux ([48])
Le système nerveux périphérique peut être subdivisé en deux entités distinctes : le système
nerveux cérébro-spinal et le système nerveux végétatif (figure 1).
Le système nerveux cérébro-spinal, ou somato-moteur, assure l’innervation des muscles
striés squelettiques. Il est soumis à une commande volontaire.
Le système nerveux végétatif, appelé aussi système nerveux autonome, assure l’innervation
des viscères, c'est-à-dire des muscles lisses, des glandes, et du cœur. Sa commande n’est pas
volontaire. Son activité est contrôlée par différents centres en interaction, qui ajustent son
activité en fonction de nombreuses influences émanant de différentes structures du système
nerveux central.
L’organisation périphérique de ces deux systèmes est un élément clé de leur distinction.
Ainsi, dans le système cérébro-spinal, les motoneurones émanant de la substance grise de la
moelle épinière gagnent sans relai synaptique les fibres musculaires qu’ils commandent. Ces
neurones à conduction rapide possèdent une gaine de myéline.
La partie périphérique du système nerveux végétatif est, quant à elle, bi-neuronale. Ainsi, le
neurone émanant de la substance grise de la moelle épinière, dit neurone pré-ganglionnaire,
rejoint un ganglion où il établit un contact synaptique avec un second neurone, dit postganglionnaire, qui gagne les cellules effectrices. Le neurone pré-ganglionnaire est myélinisé,
le neurone post-ganglionnaire est non-myélinisé.
Figure 1 : Organisation périphérique du système nerveux cérébro-spinal et du système nerveux (SN)
végétatif, d’après Richard et Orsal, [52]
11
Les systèmes nerveux cérébro-spinal et végétatif se distinguent également par les
neurotransmetteurs et les récepteurs qu’ils utilisent (figure 2). Ces différences revêtent une
très grande importance en pharmacologie comme en thérapeutique.
Au niveau des jonctions neuro-musculaires, en revanche, le neurotransmetteur est le même
pour le système nerveux cérébro-spinal et pour le système nerveux végétatif : il s’agit de
l’acétylcholine. Son récepteur est dit nicotinique car il est activé par cette substance.
Figure 2 : Représentation schématique des systèmes nerveux cérébro-spinal et végétatif
d’après Pilot-Storck, [48]
1.1.1. Le système nerveux végétatif
Le système nerveux végétatif a pour rôle de maintenir l’homéostasie durant les périodes où
l’activité physique ou émotionnelle est modifiée, en participant aux adaptations du corps à
ces situations de stress.
Les synapses effectrices du système nerveux végétatif présentent des différences, qui
révèlent en réalité deux sous-unités au sein du système nerveux végétatif : le système
nerveux orthosympathique et le système nerveux parasympathique.
Ces deux systèmes assurent notamment un contrôle modulateur du fonctionnement
d’organes qui ont une activité automatique, comme le cœur et l’intestin. Les rôles des
systèmes sympathique et parasympathique sont le plus souvent opposés, mais sont parfois
distincts ou complémentaires.
12
1.1.1.1 Organisation du système nerveux sympathique (ou orthosympathique)
([48])
Le système nerveux sympathique périphérique émerge de la moelle épinière, entre le
premier segment thoracique et le troisième segment lombaire.
Les corps cellulaires des neurones pré-ganglionnaires sont situés dans la corne latérale de la
moelle épinière, et ces neurones émergent par la racine ventrale de la moelle épinière
(figure 3). Les neurones pré-ganglionnaires gagnent ensuite la chaîne ganglionnaire
paravertébrale par un rameau communicant blanc. Ces neurones pré-ganglionnaires sont
myélinisés.
Là, ils peuvent établir un relai synaptique avec un neurone post-ganglionnaire qui rejoindra
le nerf spinal via un rameau communicant gris (les neurones post-ganglionnaires ne sont pas
myélinisés). Ce nerf spinal est dit mixte car il renferme à la fois des fibres motrices du
système nerveux cérébro-spinal et des fibres orthosympathiques.
Figure 3 : Représentation des trajets nerveux au sein du système sympathique
d’après Richard et Orsal, [52]
Cependant, tous les neurones pré-ganglionnaires n’établissent pas de relai synaptique dans
le ganglion paravertébral correspondant à leur site d’émergence. En particulier, en région
crâniale et caudale, des neurones pré-ganglionnaires traversent la chaine ganglionnaire
paravertébrale et rejoignent un ganglion plus volumineux, correspondant à la fusion de
plusieurs ganglions. C’est le cas en région antérieure des ganglions cervical crânial et moyen
et du ganglion cervico-thoracique, et en région postérieure des ganglions coeliaque,
mésentérique crânial et mésentérique caudal (figure 4). Là, les neurones pré-ganglionnaires
établissent un contact synaptique avec des neurones post-ganglionnaires qui rejoignent
leurs cellules cibles via un nerf orthosympathique propre.
13
Figure 4 : Représentation schématique du système nerveux sympathique,
d’après Richard et Orsal, [52]
La glande médullosurrénale est un cas particulier dans l’organisation du système nerveux
sympathique. Elle est en effet l’équivalent d’un ganglion de la chaîne paravertébrale, tant
d’un point de vue fonctionnel qu’embryologique. Elle reçoit ainsi une innervation préganglionnaire. Ses cellules, dites chromaffines, sont équivalentes à des neurones postganglionnaires, mais ce sont des cellules endocrines qui suite à une stimulation par des
neurones pré-ganglionnaires vont déverser dans la circulation sanguine une hormone :
l’adrénaline.
Cette hormone est proche structuralement de la noradrénaline,
neurotransmetteur des neurones sympathiques post-ganglionnaires.
qui
est
le
14
1.1.1.2. Organisation du système nerveux parasympathique ([48])
Le système parasympathique émerge du système nerveux central en deux sites : un site très
crânial au niveau du tronc cérébral, et un site très caudal, allant du deuxième au quatrième
segment sacré (figure 5).
Les neurones pré-ganglionnaires du parasympathique crânien participent ainsi aux nerfs
crâniens III, VII, IX et X. Les trois premiers se distribuent localement à l’œil, aux glandes
salivaires et lacrymales.
Le nerf X, appelé nerf vague, a une distribution très vaste puisqu’il innerve tous les viscères
du tronc (encolure, thorax et abdomen), à l’exception des viscères pelviens. Il innerve ainsi le
cœur, les bronches et le tube digestif à l’exception de ses portions les plus distales.
Les neurones pré-ganglionnaires du parasympathique sacré forment le nerf pelvien qui
innerve les viscères pelviens, notamment la portion distale du gros intestin, la vessie et les
organes génitaux.
Figure 5 : Représentation du système nerveux parasympathique,
d’après Richard et Orsal, [52]
15
Contrairement aux neurones pré-ganglionnaires sympathiques qui établissent un relai
synaptique à distance de leurs cellules cibles, les neurones pré-ganglionnaires
parasympathiques établissent un relai synaptique à proximité de leurs cellules cibles, voire
dans la paroi des organes-cibles (figure 6). Les neurones post-ganglionnaires
parasympathiques sont donc très courts.
Figure 6 : Représentation schématique des relations pré et post-ganglionnaires
des fibres efférentes parasympathiques et sympathiques, d’après Riviere, [55]
SNC : Système Nerveux Central
ACh : Acétylcholine
NE : Norépinéphrine (= Noradrénaline)
1.1.2. Rôles du système nerveux végétatif ([55])
La plupart des viscères sont innervés à la fois par le parasympathique et l’orthosympathique,
qui produisent le plus souvent des effets opposés sur une même structure (figure 7). Par
exemple, la stimulation des fibres parasympathiques du nerf vague provoque une baisse de
la fréquence cardiaque, tandis que celle des nerfs cardiaques sympathiques accélère la
fréquence cardiaque.
Les voies du système sympathique et la médullosurrénale, étroitement associés, sont
souvent désignés comme l’axe sympatho-surrénalien. Cet axe est extrêmement actif. Son
activité varie subtilement d’un instant à l’autre, en fonction des besoins de l’organisme.
Ainsi, les changements requis pour le maintien de l’homéostasie ont lieu en permanence.
L’axe sympatho-surrénalien peut aussi mettre en place des actions massives sur toutes les
structures innervées par le système sympathique. Ceci se produit, par exemple, en réponse à
une peur intense. Par conséquent, l’activité cardiovasculaire est accélérée : une
augmentation de la fréquence cardiaque, de la force de contraction myocardique, du débit
cardiaque, et de la pression artérielle se produit. Le sang est redistribué des territoires
splanchnique et cutané vers les muscles squelettiques volontaires, les pupilles se dilatent, la
concentration de glucose sanguin augmente. L’organisme est ainsi préparé à réagir
efficacement au stimulus ayant provoqué cette réaction, contrôlée par le système
sympathique.
16
Inversement, le système nerveux parasympathique fonctionne principalement pour réguler
des changements localisés à un organe, et n’est pas organisé pour des actions massives.
Tandis que l’activation sympathique aboutit à une dépense d’énergie, le parasympathique
agit pour générer et épargner cette énergie biologique. Par exemple, la digestion des
nutriments est augmentée par une stimulation de l’activité parasympathique intestinale. La
consommation en oxygène du myocarde et l’utilisation de l’énergie sont diminuées par une
stimulation vagale, par l’intermédiaire d’une baisse de fréquence cardiaque et de la force de
contraction cardiaque.
Figure 7 : Représentation des innervations par le système nerveux végétatif, d’après Pilot-Storck, [48]
17
1.2. Transmission de l’information au sein du système sympathique
1.2.1. Les catécholamines endogènes
Les catécholamines sont les amines agissant directement sur le système sympathique, en
activant les récepteurs des cellules effectrices. Par conséquent, les nerfs adrénergiques ne
sont pas indispensables à leurs effets.
La noradrénaline, l’adrénaline et la dopamine sont les catécholamines endogènes : ce sont
les transmetteurs nerveux et humoraux sympathiques de la plupart des mammifères. La
noradrénaline et la dopamine transmettent des informations dans des régions spécifiques
du système nerveux central, mais la noradrénaline est aussi le neurotransmetteur de la
plupart des jonctions neuro-effectrices sympathiques périphériques. L’adrénaline est
l’hormone principale libérée par la médullosurrénale. Les catécholamines sont stockées sous
une forme inactive à l’intérieur de structures granulaires dans les terminaisons nerveuses et
les cellules chromaffines.
Ces deux substances, ainsi que la dopamine, sont synthétisées à partir de la tyrosine (figure
8). La dernière étape de la synthèse, produisant de l’adrénaline à partir de la noradrénaline,
n’a lieu que dans la glande médullo-surrénale.
Figure 8 : Synthèse des catécholamines, d’après Pilot-Storck, [48]
18
L’information est transmise d’un nerf à l’autre, et d’un nerf à l’organe effecteur, par un
processus appelé transmission neuro-hormonale (figure 9). Ce processus implique la
libération par une terminaison nerveuse d’un neurotransmetteur chimique, qui interagit
avec des récepteurs spécialisés de la cellule innervée. L’activation du récepteur initie des
réponses physiologiques caractéristiques dans la cellule effectrice.
Le neurotransmetteur de tous les ganglions (à la fois sympathiques et parasympathiques) et
de la plupart des jonctions neuro-effectrices du parasympathique est l’acétylcholine. La
noradrénaline est le transmetteur libéré dans la majorité des jonctions neuro-effectrices du
système sympathique, et est considéré comme le neurotransmetteur du sympathique.
Figure 9: Transmission de l’information au sein d’une jonction neuro-effectrice sympathique,
d’après Combrisson, [14]
1.2.2. Les catécholamines exogènes ou molécules sympathomimétiques
L’activité sympathomimétique d’une molécule dépend de l’analogie de sa structure avec
celle des médiateurs adrénergiques endogènes. La noradrénaline et l’adrénaline ont en
commun le fragment β-phenylethylamine, qui correspond à un cycle benzène et une chaine
latérale éthylamine. Une substitution peut se faire sur le cycle aromatique, sur les carbones
de la chaine latérale, ou sur le fragment amine.
L’isoproterenol est une catécholamine qui ne se trouve pas de manière physiologique dans
le corps ; elle est synthétisée chimiquement. De subtiles différences pharmacologiques
peuvent être mises en évidence en comparant les effets cardiovasculaires de l’isoproterenol
avec ceux de l’adrénaline et de la noradrénaline.
19
Les molécules sympathomimétiques ou adrénergiques sont donc des substances à l’origine
de réponses physiologiques similaires à celles provoquées par les médiateurs adrénergiques
endogènes : leurs effets pharmacologiques miment l’activité du système nerveux
sympathique. Les effets pharmacologiques des molécules sympathomimétiques passent par
l’activation des récepteurs adrénergiques, situés sur des cellules effectrices innervées par le
système nerveux sympathique. Des adrénorécepteurs non innervés sont aussi présents sur
certains types de cellules.
L’adrénaline, la noradrénaline, et l’isoproterenol ont un groupe hydroxyle sur les 3e et 4e
carbones du noyau benzène (figure 10). Le 3,4-dihydroxybenzène étant aussi nommé
catéchol, les catécholamines correspondent aux amines sympathomimétiques contenant ce
noyau.
Figure 10 : Structure chimique des principales molécules adrénergiques, d’après Wang et al. [70]
Noradrénaline
Adrénaline
Isoproterenol
1.2.3. Les récepteurs adrénergiques ([55])
Les récepteurs adrénergiques sont des macromolécules localisées à la surface de la
membrane des cellules innervées par des neurones adrénergiques (et certaines cellules non
innervées). Ils ont pour fonction de reconnaître les médiateurs adrénergiques endogènes : la
noradrénaline et l’adrénaline, et d’interagir avec. Cette interaction déclenche une série
d’événements intracellulaires complexes, qui provoquent des modifications spécifiques de
l’activité de la cellule effectrice.
1.2.3.1. Classification des récepteurs adrénergiques
La toute première séparation des récepteurs adrénergiques en deux principales classes, α et
β (Ahlquist, 1948), était fondée sur les capacités relatives de la noradrénaline, de
l’adrénaline et de l’isoproterenol à provoquer des effets excitateurs ou inhibiteurs sur une
série de tissus (cœur, vaisseaux, poumons). Les réponses excitatrices étaient le plus souvent
associées aux récepteurs α, et les réponses inhibitrices, aux récepteurs β.
Les récepteurs cardiaques β excitateurs constituent l’exception principale de cette règle, et
ont mené à la distinction de différents types de récepteurs β, nommés β1 et β2 (Lands et al.
1967). Plus tard, les récepteurs α furent également séparés en sous-types α1 et α2.
20
Depuis, chaque type de récepteur a été partagé en de nombreuses sous-classes, aux profils
pharmacodynamiques distincts.
1.2.3.2. Localisations des récepteurs adrénergiques
De nombreux tissus contiennent à la fois des récepteurs α1 et α2, ou β1 et β2 dans
différentes proportions, qui varient notamment selon les espèces (Sun et al. 2002). Le plus
souvent, un sous-type domine, et confère au tissu ou organe sa classification fonctionnelle.
1.2.3.2.1. Les récepteurs de sous type α1 et α2
Les récepteurs α1 et α2 se localisent en particulier au niveau des fibres musculaires lisses
des viscères et de l’endothélium des vaisseaux. La stimulation de ces récepteurs provoque
une contraction de ces fibres, et donc notamment une vasoconstriction des artérioles et
veines systémiques.
Les récepteurs α1 sont ceux situés sur les cellules effectrices, tandis que les récepteurs des
terminaisons nerveuses sont appelés α2. Les récepteurs α1 sont donc ceux des vaisseaux
innervés, tandis que les α2 sont principalement localisés aux régions extra-synaptiques des
fibres musculaires lisses vasculaires et à certains types de cellules non innervées.
1.2.3.2.2. Les récepteurs β1 cardiaques
Le récepteur fonctionnellement prédominant dans le myocarde des mammifères est de
sous-type β1. Ce récepteur est activé, par ordre de puissance, par l’isoproterenol, puis de
manière équivalente par l’adrénaline et la noradrénaline (l’isoproterenol est 10 à 20 fois plus
actif sur le cœur que l’adrénaline et la noradrénaline). L’activation des récepteurs β1
cardiaques engendre une réponse sympathomimétique caractéristique, avec des effets
inotrope, chronotrope, dromotrope, bathmotrope et tonotrope positifs. L’augmentation de
la fréquence et de la contractilité cardiaques est à l’origine d’une augmentation de la
consommation en oxygène du myocarde, et d’une vasodilatation coronarienne métabolique.
1.2.3.2.3. Les récepteurs β2 pulmonaires et des muscles lisses vasculaires
Les récepteurs β adrénergiques des poumons et de la vascularisation périphérique sont
principalement de sous-type β2. Ces récepteurs sont activés fortement par l’isoproterenol et
l’adrénaline, mais faiblement par la noradrénaline.
Les récepteurs β2 pulmonaires provoquent une relaxation des muscles lisses bronchiolaires
et par conséquent une bronchodilatation.
Les récepteurs β2 des muscles lisses vasculaires sont présents dans différents tissus, où ils
produisent une vasodilatation et réduisent la résistance vasculaire. Bien que cela soit encore
21
incertain, il semblerait que la plupart des récepteurs β2 vasculaires soient non innervés, et,
comme pour les récepteurs β2 pulmonaires, ils dépendraient principalement de l’adrénaline
circulante pour l’activation et le tonus adrénergique basal.
Il est important de signaler que la classification α1-α2 et β1-β2 des récepteurs est une
simplification à l’extrême, et qu’il existe de nombreuses divisions en sous-types (Alberts
1993, Feldman 1993, Barnes 1993, Westfall et Westfall 2006). Il existe notamment des
récepteurs β3 et β4. Cependant, la pertinence clinique de ces divisions en médecine
vétérinaire n’est pour le moment pas avérée.
1.2.3.3. Caractéristiques des différents types de récepteurs et de leurs
agonistes
Tableau 1 : Caractéristiques des principaux types de récepteurs adrénergiques, d’après Reiter, [51]
Récepteurs
Localisations majoritaires
Récepteurs β1
Cardiaque,
Post-synaptique
Récepteurs β2
Vascularisation
périphérique, Bronches,
Extra et présynaptique
Post-synaptique
Extra et présynaptique
Récepteurs α1
Récepteurs α2
Agoniste
prédominant
Augmentation
de Noradrénaline
fréquence cardiaque = Adrénaline
et de contractilité
Vasodilatation,
Adrénaline
Bronchodilatation
Effet prédominant
Vasoconstriction
Vasoconstriction
Noradrénaline
Adrénaline
L’adrénaline est un puissant stimulant α, et est également très active sur les récepteurs β
(tableau 1). Elle provoque donc à la fois une vasodilatation dans les vaisseaux contenant des
récepteurs β2 (ex : muscles squelettiques), et une vasoconstriction dans les vaisseaux où les
récepteurs α sont prédominants (ex : viscères abdominaux). Le flux sanguin est donc
augmenté dans certaines régions en réponse à la vasodilatation, et diminué dans les zones
où la vasoconstriction prédomine.
L’isoproterenol est un agoniste β sélectif. Il provoque une vasodilatation, une chute de la
pression artérielle diastolique, une baisse des résistances périphériques, et une
augmentation du flux sanguin dans les zones contenant des récepteurs β.
Le cœur est activé par l’adrénaline, la noradrénaline, et l’isoproterenol. L’isoproterenol est le
plus puissant des trois, et provoque une augmentation importante de la force contractile du
myocarde, de la fréquence cardiaque, et du débit cardiaque.
La noradrénaline augmente aussi la force contractile du myocarde, mais provoque une
bradycardie à son pic d’effet, du fait d’une augmentation du tonus vagal. De plus, la
vasoconstriction périphérique induite par la noradrénaline est susceptible de diminuer le
retour veineux, limitant ainsi l’augmentation du débit cardiaque, malgré l’activation du
cœur.
22
La noradrénaline a une affinité plus grande pour les récepteurs β1 que pour les β2;
l’adrénaline a approximativement la même affinité pour les deux types de récepteurs (figure
11).
Figure 11 : Organisation périphérique schématique du système orthosympathique,
d’après Pilot-Storck, [48]
1.3. Conséquences de l’activation des récepteurs bêta-adrénergiques
Les récepteurs β-adrénergiques sont des récepteurs à sept passages transmembranaires,
couplés à l’adenylcyclase par une protéine G (figure 12). Leur stimulation induit la formation
d’AMP cyclique (à partir d’ATP), second messager qui par une cascade d’activations
engendre les effets.
23
Figure 12 : Schéma de la stimulation d’un récepteur couplé à une protéine G, d’après Jaspard, [23]
1.3.1. Effets de l’activation des récepteurs bêta sur la pression artérielle
La noradrénaline administrée par voie intraveineuse provoque une augmentation dosedépendante de la pression artérielle systolique et diastolique, du fait de son effet
vasoconstricteur. Le pouls est peu modifié.
L’adrénaline, quant à elle, induit en général une chute de la pression artérielle diastolique,
accompagnée ou non d’une faible augmentation de la pression systolique. Ceci est dû à son
effet vasodilatateur. Cependant, l’injection d’une grande quantité d’adrénaline (1-3 µg/kg)
en bolus provoque une augmentation prononcée de la pression artérielle.
L’isoproterenol augmente l’intensité du pouls en abaissant la pression diastolique, par son
effet vasodilatateur.
1.3.2. Effets myocardiques de l’activation des récepteurs bêta
L’isoproterenol, l’adrénaline et la noradrénaline sont de puissants stimulants myocardiques.
Ils augmentent la force de contraction du cœur et élèvent la fréquence cardiaque. Ces effets
sont provoqués par l’activation des récepteurs β du myocarde et des cellules pacemaker. Les
récepteurs β myocardiques dominants sont les récepteurs β1.
L’effet inotrope positif observé avec ces trois agents concerne à la fois les atria et les
ventricules. L’inotropisme positif de l’ensemble du cœur est caractérisé par une éjection
systolique plus rapide et plus puissante. L’intervalle systolique est raccourci, tout comme la
relaxation diastolique. La consommation en oxygène est accentuée dans une mesure
proportionnelle à l’augmentation du travail cardiaque. Par conséquent, le rendement
cardiaque est amoindri, au prix d’une augmentation de la contractilité cardiaque produite
par les catécholamines.
24
L’accélération de fréquence cardiaque (effet chronotrope positif) induite par les
catécholamines est due à des modifications de l’activité des cellules pacemaker.
Le processus de dépolarisation spontanée est accéléré dans le nœud sino-atrial : la vitesse
du potentiel d’action est accrue dans ces cellules et d’autres cellules du système de
conduction. Les fibres de Purkinje sont affectées de manière similaire par l’adrénaline et la
noradrénaline. Des cellules latentes ou normalement inactives sont activées par ces agents ;
elles deviennent plus excitables et se dépolarisent plus facilement, voire même
spontanément. La période réfractaire est diminuée.
La noradrénaline, l’adrénaline et l’isoproterenol augmentent l’excitabilité du myocarde,
conduisant à de graves tachyarythmies, particulièrement chez des animaux sensibilisés ou à
fortes doses.
1.3.3. Autres effets liés à l’activation des récepteurs bêta
Les récepteurs β sont également présents sur d’autres organes que le cœur, et sont à
l’origine de divers effets, synthétisés dans le tableau 2.
Tableau 2 : Principaux effets de l’activation des récepteurs β1 et β2 adrénergiques,
d’après Riviere et al. [55]
Effets β1
Effets cardiaques :
- Chronotrope positif (fréquence)
- Inotrope positif (contractilité)
- Dromotrope positif (conduction)
- Bathmotrope positif (excitabilité)
- Tonotrope positif (tonus)
- Lusitrope négatif (compliance)
Effets métaboliques :
- Augmentation de la lipolyse
Effets β2
Effets sur les fibres musculaires lisses :
Relaxation des fibres musculaires
lisses : vaisseaux (vasodilatation),
bronches (bronchodilatation), utérus,
intestins
(diminution
du
péristaltisme)
Effets métaboliques :
- Augmentation de la glycogénolyse
(hépatique et musculaire) et de la
néoglucogenèse (hépatique)
- Augmentation de la libération
d’insuline
Effets rénaux :
- Augmentation de la sécrétion de
rénine
par
l’appareil
juxtaglomérulaire
25
1.3.4. Conséquences d’une stimulation excessive des récepteurs β1 : la
régulation négative ou « down regulation »
Chez l’homme, l’installation d’une insuffisance cardiaque congestive s’accompagne de
modifications caractéristiques dans la physiologie des récepteurs β-adrénergiques, la
principale étant la régulation négative des récepteurs β1 (« down regulation »). Dans le cœur
humain sain, la proportion des récepteurs β avoisine les 75% de β1 pour 25% de β2.
Néanmoins, lors d’insuffisance cardiaque, cette distribution change, et approche les 60% de
récepteurs β1 pour 40% de récepteurs β2. A ces modifications du nombre de récepteurs β
s’ajoutent des altérations de la sensibilité de ces récepteurs, qui correspondent à une
inhibition partielle des couplages avec les protéines G ([51]).
Chez les carnivores domestiques, ces mécanismes protecteurs de la fonction cardiaque sont
moins bien connus, mais se produisent également ([9]).
1.4. Les antagonistes bêta-adrénergiques (bêta-bloquants)
1.4.1. Découverte des bêta-bloquants ([55])
En 1906, Dale exposa que le traitement préalable des chats avec des alcaloïdes de l’ergot de
seigle empêchait certains des effets hémodynamiques de l’adrénaline. Ces études
constituent la première mise en évidence de l’action des molécules désormais connues
comme bloquantes du système adrénergique. Ces molécules exercent leurs effets
pharmacologiques en occupant le site de fixation des récepteurs adrénergiques. Ainsi, les
agonistes adrénergiques ne peuvent plus se lier à leurs récepteurs, et les effets agonistes
sont abolis ou notablement diminués.
Les effets bloquants adrénergiques des alcaloïdes de l’ergot ont pu être mis en évidence
uniquement sur les récepteurs désignés comme α par Ahlquist (1948). Cependant, Powell et
Slater (1958) et Moran et Perkins (1958) ont démontré que le 3,4-dichlorophenyl, analogue
de l’isoproterenol, inhibait sélectivement les réponses transmises par les récepteurs β
décrits par Ahlquist. Cette molécule, le dichloroisoproterenol, bloquait la vasodilatation, la
stimulation cardiaque, et les effets relaxants sur les fibres musculaires lisses bronchiques des
catécholamines, mais n’avait pas d’effet sur les effets α. L’hydrochloride de propranolol fut
par la suite identifié comme un agent bêta-bloquant, et servit de « prototype » pour l’étude
de ce groupe.
1.4.2. Structure chimique des bêta-bloquants
Le dichloroisoproterenol fut la première molécule à démontrer un blocage spécifique des
récepteurs bêta-adrénergiques. Comme il provoquait également une stimulation initiale de
ces mêmes récepteurs, les études ultérieures furent dirigées vers l’identification d’autres
agents bêta-bloquants, dépourvus de cette propriété agoniste. Le propranolol est
structurellement apparenté à ce précurseur mais a quant à lui très peu d’effets agonistes.
26
Le propranolol et les antagonistes β apparentés ont une structure légèrement semblable à
l’agoniste β isoproterenol. Ces composés ont une amine secondaire isopropyl-substituée sur
la chaine carbonée latérale : ce fragment semble important pour une interaction efficace
avec le récepteur β. Un grand nombre de bêta-bloquants furent découverts comme
présentant des actions pharmacodynamiques diverses, suggérant l’existence de nombreux
sous-types de récepteurs β (Gauthier et al. 2000, Ignarro et al. 2002, Maggioni et al. 2003).
Les antagonistes β présentent des ressemblances structurales avec les agonistes β (figure
13). Les sept régions transmembranaires des récepteurs β-adrénergiques forment une
structure cylindrique, à laquelle les agonistes, comme les antagonistes, peuvent se lier.
Figure 13 : Structure chimique des principaux bêta-bloquants, d’après Tian et al. [64]
Isoproterenol (agoniste β)
Aténolol
Carvedilol
Propranolol (antagoniste)
Metoprolol
Sotalol
27
1.4.3. Propriétés pharmacocinétiques des bêta-bloquants ([51])
Les agents bêta-bloquants diffèrent considérablement les uns des autres par leurs propriétés
pharmacocinétiques (absorption, biodisponibilité, métabolisme, liaison aux protéines,
volume de distribution, liposolubilité, demi-vie, activité de métabolites…) (tableau 3). Cela
introduit une véritable complexité dans la sélection d’un agent bêta-bloquant. Il existe deux
grandes catégories de bêta-bloquants d’un point de vue métabolique.
Les agents éliminés par un métabolisme hépatique (ex : propranolol, métoprolol) ont
tendance à être liposolubles, et ont des biodisponibilités variables avec des demi-vies
courtes (nécessitant des administrations plus fréquentes).
Les molécules éliminées inchangées, majoritairement par voie rénale (comme l’aténolol, le
sotalol…) ont tendance à être hydrosolubles avec des biodisponibilités moins variables et des
demi-vies longues. Les bêta-bloquants restent non-ionisés ou seulement partiellement
ionisés au pH physiologique. La biotransformation enzymatique change un composé
liposoluble en un composé hydrosoluble et ses métabolites excrétables (peu actifs ou
inactifs). Elle a lieu dans le foie.
Les médicaments métabolisés par le foie connaissent un métabolisme substantiel avant la
distribution vasculaire généralisée, conduisant le plus souvent à une différence de dose
efficace lorsque l’administration intraveineuse et l’administration orale sont comparées pour
la même molécule (effet de premier passage).
Bien que requérant une adaptation du dosage, les insuffisances rénales et hépatiques ne
provoquent pas de différences cliniques notables dans la réponse à l’administration des
molécules bêta-bloquantes.
Tableau 3 : Récapitulatif des données pharmacocinétiques de quelques bêta-bloquants chez l’homme,
d’après Bomassi [9], et Moïse [38] (adapté du Braunwald’s Heart Disease 8e édition, 2008)
Propranolol
Aténolol
Métoprolol
Carvedilol
Sotalol
Puissance = 1
Puissance = 1
Puissance = 1
Puissance = 0,3
Puissance = 1*
Blocage β1 et β2
Blocage β1**
Blocage β1**
Blocage β1**
Blocage β1 et β2
T1/2 = 1 à 2h
T1/2 = 4,5h
T1/2 = 3h
T1/2 = 1h
T1/2 = 4,8h
biodisponibilité
biodisponibilité
biodisponibilité
biodisponibilité
biodisponibilité
augmentant avec de 80%
> 50%
de 10 à 50%
de 90%
une
administration
orale chronique
(10 à 60%)
Elimination
Elimination
Elimination
Elimination
Elimination
hépatique, agent rénale,
agent hépatique, agent hépatique, agent rénale,
agent
lipophile
hydrophile
lipophile
lipophile
hydrophile
* Puissance : comparée à celle du propranolol, auquel a été attribuée une puissance de 1
** Blocage β1-sélectif à dose faible, qui devient non sélectif à forte dose
28
1.4.4. Propriétés pharmacodynamiques des bêta-bloquants
1.4.4.1. Cardiosélectivité ([51])
Les utilisations cliniques des antagonistes β reposent sur le blocage des récepteurs de soustype β1. De ce fait, une molécule provoquant un blocage sélectif β1 offre les mêmes
possibilités thérapeutiques que les bloquants non sélectifs, mais avec un risque réduit de
voir apparaître des effets indésirables liés à la perte des effets bénéfiques de la stimulation
β2. Ceci est particulièrement intéressant chez les patients diabétiques insulinodépendants et
les patients présentant une sensibilité au niveau des voies respiratoires.
Les bêta-bloquants plus actifs sur les récepteurs β1 que sur les β2 sont dits cardiosélectifs,
car l’élément principal de leur utilisation clinique correspond à l’antagonisme des récepteurs
β1 cardiaques.
Le premier agent bêta-bloquant étudié fut le propranolol, agent non sélectif, ayant une
affinité similaire pour les récepteurs β1 et β2. Les bêta-bloquants de seconde génération
furent par la suite introduits, antagonistes sélectifs β1 par rapport aux récepteurs β2
(tableau 4). Cependant, la sélectivité n’est pas absolue, et dépend en particulier de la dose
utilisée : par exemple, le carvedilol est un agent légèrement sélectif, mais il devient
rapidement non sélectif à des doses plus élevées.
1.4.4.2. Activité
intrinsèque : ASI)
agoniste
partielle
(ou
activité
sympathomimétique
L’ASI correspond au fait que certains agents bêta-bloquants exercent des effets d’agonisme
partiel. De ce fait, ils maintiennent une stimulation basale des récepteurs β, tout en
empêchant, par leur activité antagoniste, l’activation d’autres récepteurs par des
catécholamines endogènes ou administrées.
Un premier avantage de l’ASI est que le tonus basal des récepteurs β1 et des récepteurs
pulmonaires β2 pourrait prévenir une dépression cardiaque et une bronchoconstriction.
L’autre avantage de cette stimulation β de faible ampleur pourrait être de réduire la
tendance à la régulation positive (« up-regulation ») du nombre de récepteurs β, que peut
engendrer une thérapie au long cours avec des antagonistes β. L’interruption d’un
traitement par un bêta-bloquant, quel qu’il soit, doit de ce fait être progressive si le
traitement a été durable, pour éviter une sensibilité accrue aux agonistes, secondaire à cette
régulation positive.
29
1.4.4.3. Caractéristiques des principaux bêta-bloquants
Tableau 4 : Classification des principaux bêta-bloquants, d’après Reiter, [51]
ASI : Activité Sympathomimétique Intrinsèque
Non sélectifs (β1 et β2)
Avec ASI
Sans ASI
Alprenolol
Carvedilol
Penbutolol
Labetalol
Pindolol
Nadolol
Oxprenolol
Propranolol
Sotalol
Timolol
Sélectifs (β1)
Avec ASI
Acebutolol
Celiprolol
Sans ASI
Aténolol
Bisoprolol
Metoprolol
Nebivolol
Esmolol
1.4.4.4. Autres propriétés de certains bêta-bloquants
Les bêta-bloquants possèdent par ailleurs des propriétés individuelles pouvant être
intéressantes dans certaines situations cliniques, et susceptibles de déterminer le choix de
l’une ou l’autre de ces molécules.
Par exemple, le labetalol et le carvedilol sont également bloquants des récepteurs αadrénergiques ; le bucindolol et le nebivolol possèdent des propriétés vasodilatatrices. Le
propranolol est doté d’effet stabilisateur de membranes à très fortes concentrations, par
blocage des canaux sodiques. Enfin, le sotalol fait partie des molécules anti-arythmiques de
classe III, que nous détaillerons dans la seconde partie.
1.4.5. Effets pharmacologiques cardiovasculaires des bêta-bloquants
Les molécules bêta-bloquantes produisent leurs effets bénéfiques sur la fréquence et le
rythme cardiaque par une action indirecte, en inhibant les effets du système nerveux
adrénergique, ou de molécules adrénergiques exogènes (noradrénaline, adrénaline,
isoproterenol, dopamine, dobutamine). Tous les composés possédant une activité bloquante
des récepteurs β adrénergiques font partie des molécules anti-arythmiques de classe II.
Le degré d’activité du système nerveux végétatif à un moment donné joue un rôle important
dans la détermination du niveau d’effets pharmacologiques que va produire un agent
bloquant adrénergique. Par exemple, l’administration d’une molécule bêta-bloquante à un
patient au calme provoque des effets cardiovasculaires très modérés, car au repos, le cœur
n’est pas soumis à une influence sympathique prononcée. Lors d’un exercice physique, au
contraire, une augmentation de la fréquence, de la force contractile et du débit cardiaque se
produit, résultant de l’augmentation de l’activité du système nerveux sympathique. Si le
patient est soumis à un exercice durant un traitement au propranolol, ces réponses
cardiaques caractéristiques ne sont pas obtenues, car les récepteurs β-adrénergiques du
cœur sont bloqués par cette molécule. Cette molécule empêche les effets inotrope et
chronotrope positifs des catécholamines sur le cœur, en bloquant les récepteurs β1, et
antagonise l’action arythmogène des catécholamines.
30
Dans les conditions physiologiques, les récepteurs β2 vasculaires ne participent que d’une
manière limitée à la régulation homéostatique. Par conséquent, les agents bêta-bloquants
affectent la pression artérielle davantage par leurs effets sur le débit cardiaque que sur les
effets vasculaires périphériques. La vasodilatation produite par l’isoproterenol ou
l’adrénaline est bloquée par le propranolol, cependant, et la réponse vasoconstrictrice à
l’adrénaline (réponse α) pourrait en être accentuée. Les effets vasoconstricteurs de la
noradrénaline ou autres agonistes α ne sont pas bloqués par le propranolol.
Les voies aériennes bronchiolaires sont sous dominance sympathique, ce qui entretient un
état actif de relaxation des muscles lisses bronchiolaires. En bloquant les récepteurs β2, le
propranolol inhibe l’activité bronchodilatatrice sympathique et provoque une
bronchoconstriction. Cet effet est particulièrement néfaste an cas de réactions allergiques et
d’asthme bronchiolaire. Un blocage β1-β2 non sélectif est contre-indiqué dans ce contexte.
Les agents sélectifs, comme les agents non-sélectifs, ont des effets chronotrope et inotrope
négatifs. Parce que les agents sélectifs ont moins d’effet inhibiteur sur les récepteurs β2 (qui
provoquent une dilatation artériolaire et bronchique), ils ont moins de risques de provoquer
une vasoconstriction périphérique ou une bronchoconstriction que les agents non-sélectifs.
L’administration à court terme de bêta-bloquants diminue le débit cardiaque. Le flux sanguin
vers la plupart des organes autres que le cerveau est réduit : le débit de filtration
glomérulaire peut être légèrement abaissé (sans conséquences pour un patient dont la
fonction rénale est normale). Avec un blocage non sélectif, le blocage β2 induit une
augmentation des résistances périphériques ; lors d’utilisation à long terme, la résistance
périphérique totale retrouve sa valeur initiale.
Les antagonistes β abaissent la fréquence cardiaque sinusale, particulièrement lorsque le
contrôle sympathique de cœur est dominant, diminuent le taux de dépolarisations
spontanées par des foyers ectopiques, ralentissent la conduction atriale et du nœud atrioventriculaire, et augmentent la période réfractaire du nœud atrio-ventriculaire. Bien qu’il ait
été supposé que ces effets soient dus exclusivement au blocage des récepteurs β1, les
récepteurs β2-adrénergiques pourraient eux aussi être impliqués.
La libération de rénine par l’appareil juxta-glomérulaire est facilitée par la stimulation
sympathique. Les bêta-bloquants inhibent donc le système rénine-angiotensine-aldostérone,
et réduisent par ailleurs la conversion de la pro-rénine en rénine.
1.4.6. Effets indésirables décrits des bêta-bloquants ([15])
Chez l’homme, les effets bénéfiques rapportés de l’utilisation des bêta-bloquants ne sont
pas immédiats après la mise en place du traitement.
Chez les patients cardiopathes, les performances cardiaques peuvent dépendre de la
dominance accrue de l’activité sympathique, qui fait partie des mécanismes compensateurs
pour le maintien des paramètres hémodynamiques.
31
Le blocage de l’influx sympathique sur les récepteurs β1 cardiaques, particulièrement s’il a
lieu brutalement, peut précipiter une décompensation cardiaque ou une insuffisance
cardiaque. A court terme, les propriétés inotrope et chronotrope négatives de ces agents
font donc de la décompensation un risque majeur, qui impose une mise en place progressive
du traitement, associée à un protocole de dosages réguliers.
Chez l’homme, par exemple, dans le cas de l’insuffisance cardiaque due à une
myocardiopathie dilatée, une dose initiale faible est administrée oralement afin de
déterminer si le patient peut tolérer l’effet inotrope négatif de la molécule à court terme. Si
le patient ne décompense pas suite à cette dose faible, celle-ci est progressivement
augmentée, par paliers d’environ 50 à 100% chaque semaine, chacun associé à un titrage, et
ce sur un à trois mois. Finalement, les dosages peuvent atteindre jusqu’à quinze fois la dose
initiale administrée.
32
2. Etude spéciale des bêta-bloquants utilisés en médecine vétérinaire
2.1. Le propranolol
Le propranolol est un agent non sélectif ayant une affinité équivalente pour les récepteurs
β1 et β2. C’est un antagoniste pur (pas de capacité à activer les récepteurs β-adrénergiques).
Base faible (pKa=9,45), hautement lipophile (pénètre aisément dans le système nerveux
central), il se lie fortement aux protéines plasmatiques tissulaires ([51]). Par conséquent, le
propranolol a un large volume de distribution. Il est presque complètement absorbé.
Le propranolol est métabolisé essentiellement dans le foie en quelques produits d’oxydation
et leurs conjugués, qui sont éliminés dans les urines. Un des produits de cette oxydation, le
4-hydroxypropranolol, présente des propriétés pharmacologiques similaires à celles du
propranolol, et pourrait contribuer à accroitre ses effets.
Le métabolisme hépatique du propranolol est saturable. Par conséquent, le taux d’extraction
est élevé, et dose-dépendant ; seule une faible fraction de la dose prise oralement échappe
au métabolisme de premier passage et rejoint la circulation systémique. De ce fait, la
biodisponibilité orale est faible mais pourrait augmenter suite à des administrations
répétées, par saturation des enzymes hépatiques. De même, la disponibilité orale augmente
avec des doses croissantes. La clairance totale du propranolol est très élevée. Les altérations
du flux sanguin hépatique dues à des variations physiologiques (telles que l’alimentation) ou
pathologiques (comme l’insuffisance cardiaque), ou à l’administration concomitante d’autres
molécules pourraient affecter la clairance du propranolol.
Du fait des grandes variations de clairance et de biodisponibilité d’un patient à l’autre, il
existe une large gamme de dosages efficaces par voie orale. La relation entre la
concentration plasmatique et les effets est complexe. Le propranolol a une demi-vie
relativement courte chez l’homme (3 à 6h) ([51]).
La dose de propranolol requise pour supprimer les arythmies induites par les catécholamines
chez le chien est de 0,1 à 1,0 mg/kg pour des doses intraveineuses, et de 2 à 4 mg/kg, divisée
en 2-3 prises, pour des doses orales ([18]). Les doses doivent être réparties en deux ou trois
prises quotidiennes. Les concentrations plasmatiques thérapeutiques vont de 40 à 85 ng/mL
chez les patients humains, et sont probablement similaires chez les chiens et chats.
Le propranolol, comme d’autres bêta-bloquants, abaisse la fréquence sinusale, réduit la
conduction à travers le nœud atrioventriculaire et permet une repolarisation plus
homogène. Les augmentations d’automaticité produites par les augmentations de tonus
sympathique sont abolies ([18]).
Les doses de propranolol permettant d’atteindre des concentrations plasmatiques
thérapeutiques (>100 ng/mL) ont des effets cellulaires et électrophysiologiques directs. Ces
effets sont caractéristiques des molécules anti-arythmiques de classe IA et sont qualifiés
d’effets quinidine-like. L’électrocardiogramme est très peu affecté par le propranolol, sauf
en ce qui concerne l’abaissement de fréquence cardiaque.
33
Le propranolol produit une diminution dose-dépendante de la contractilité cardiaque et du
métabolisme associé. La baisse de contractilité et de fréquence s’associe à des diminutions
de débit cardiaque, du volume d’éjection, de la pression artérielle systolique, et de la
consommation en oxygène du myocarde. Ces effets sont particulièrement prononcés après
une administration intraveineuse et doivent être anticipés lors d’administration orale chez
des patients atteints d’insuffisance cardiaque congestive ou de myocardiopathie. Les effets
du blocage des récepteurs β dépendent du statut fonctionnel du myocarde, du tonus
sympathique prévalent, et du nombre de β-adrénorécepteurs ([18]).
D’autres effets pharmacologiques importants du propranolol résultent du caractère non
sélectif de l’activité bloquante des récepteurs β-adrénergiques, et incluent une diminution
de la libération de rénine, une bronchoconstriction, une vasoconstriction, et une inhibition
de la libération d’insuline.
Des concentrations toxiques de propranolol provoquent une bradycardie, une insuffisance
cardiaque, et une hypotension. Un bronchospasme et une hypoglycémie peuvent également
survenir.
De plus, le propranolol étant un agent bêta-bloquant hautement lipophile, la dépression du
système nerveux central et la désorientation font partie des effets secondaires à rechercher.
Un traitement au propranolol est à l’origine d’une diminution du flux sanguin hépatique,
réduisant ainsi la clairance des molécules dépendant du métabolisme hépatique pour leur
élimination.
Le propranolol potentialise notablement la baisse de conduction atrioventriculaire produite
par les agents bloquant les canaux calciques et les anti-arythmiques de classe IA.
L’administration simultanée de propranolol et d’un agent bloquant des canaux calciques
(ex : verapamil) peut produire des réductions très importantes de fréquence et de
contractilité cardiaques.
Les indications potentielles du propranolol incluent la tachycardie sinusale, les arythmies
ventriculaires et supraventriculaires, la myocardiopathie hypertrophique, l’hypertension
artérielle systémique, l’hyperthyroïdie, et les phéochromocytomes. Le traitement par le
propranolol est hautement influencé par le tonus sympathique préexistant, qui détermine le
nombre de récepteurs β ([18]).
L’administration de propranolol ou d’une autre molécule bloquante β-adrénergique à un
patient étant devenu dépendant du tonus adrénergique pour maintenir sa fréquence
cardiaque et sa contractilité peut être mortelle. Une régulation positive (« up regulation »)
peut se produire lors d’administration chronique de propranolol ou d’autres molécules bêtabloquantes. Une administration chronique de propranolol, par exemple, peut donner lieu à
une augmentation du nombre de récepteurs adrénergiques, ou de leur affinité, provoquant
des arythmies cardiaques graves, et nécessitant une interruption du traitement. Le
propranolol est contre-indiqué chez les patients présentant une bradycardie sinusale, un
bloc atrioventriculaire ou une insuffisance cardiaque congestive grave. Les patients souffrant
d’obstruction chronique des voies aériennes, devant subir une anesthésie ou recevant des
molécules bloquant l’entrée du calcium doivent être surveillés de près si une thérapie au
propranolol est envisagée ([18]).
34
2.2. Le metoprolol
Le metoprolol est un agent sélectif des récepteurs β1. A doses faibles, il a un effet β2 très
limité à inexistant. Il est dépourvu d’ASI, presque complètement absorbé, et métabolisé par
le foie, par le système de la mono oxygénase. Les concentrations plasmatiques obtenues
varient largement d’un patient à l’autre. La demi-vie plasmatique est de 3 à 4h chez l’homme
([51]).
2.3. L’aténolol
2.3.1. Données pharmacologiques
L’aténolol est un agent β1-sélectif, hydrophile, dépourvu d’ASI, et d’action longue ([51]). A
des doses plus élevées, il pourrait inhiber les récepteurs β2. Il est incomplètement absorbé
(environ 50%) et largement excrété sans modification dans les urines. Une bioaccumulation
est possible chez les patients insuffisants rénaux.
L’aténolol a été utilisé avec succès pour abaisser la fréquence cardiaque, la conduction
atrioventriculaire, et éliminer les extrasystoles ventriculaires chez des chiens atteints de
myocardiopathies spontanées. L’aténolol étant faiblement lipophile, il traverse difficilement
la barrière hémato-encéphalique, limitant ainsi les effets secondaires liés au système
nerveux central.
2.3.2. Etude pharmacocinétique de l’aténolol sur huit chats sains
Il s’agit d’une étude ([50]) réalisée en 1996 par M. Quiñones et son équipe, aux Etats Unis, et
publiée dans l’American Journal of Veterinary Research. L’objectif de cette étude a été de
déterminer les différentes variables pharmacocinétiques de l’aténolol chez le chat, afin de
définir le nombre de prises quotidiennes nécessaires chez cette espèce.
Protocole de l’étude :
Neuf chats de race Domestic shorthair sains (huit femelles et un mâle) d’environ six mois ont
été intégrés à cette étude. Huit de ces chats ont reçu progressivement des doses croissantes
d’isoproterenol (0,25 ; 0,5 ; 1,0 et 2,0 µg/kg) par voie intraveineuse, afin de déterminer leur
réponse cardiaque de référence suite à la stimulation β-adrénergique.
La fréquence cardiaque était enregistrée avant, pendant et après l’administration
d’isoproterenol. Les manipulateurs attendaient que la fréquence cardiaque soit revenue à la
valeur de repos avant d’administrer la dose suivante (plus élevée). La fréquence cardiaque
maximale après chaque dose d’isoproterenol était enregistrée.
Après ce test à l’isoproterenol, permettant de connaître la réponse physiologique des chats
étudiés, une dose orale de 3 mg/kg d’aténolol a été administrée à chaque chat, une fois par
jour pendant 3 jours. Au 3e jour, les chats ont subi un autre test à l’isoproterenol à doses
35
croissantes, afin d’évaluer l’effet bêta-bloquant de l’aténolol. Chaque dose d’isoproterenol
(0,25 ; 0,5 ; 1,0 et 2,0 µg/kg) a été administrée à 6h (n=8), 12h (n=4) et 24h (n=8) après la
dernière dose d’aténolol, pour déterminer la réponse de la fréquence cardiaque en présence
d’aténolol. De plus, des prises de sang ont été effectuées au moment des tests à
l’isoproterenol pour déterminer la concentration plasmatique d’aténolol correspondante.
Les résultats sont présentés en figure 14.
Résultats :
Figure 14 : Moyenne +/- écart type des concentrations plasmatiques d’aténolol
après administration intraveineuse (1 mg/kg) et orale (3 mg/kg) (Quiñones et al. [50])
La baisse de concentration plasmatique entre 1h et 12h a été régulière chez la plupart des
chats, quelle que soit la voie d’administration. Lors de la 1 ère heure après administration
intraveineuse, en revanche, la décroissance a été plus rapide, suggérant une cinétique
multicompartimentée dans cette espèce.
La 1ère valeur obtenue après administration intraveineuse était de 2100 +/- 300 ng/mL
d’aténolol plasmatique. Elle correspond à la valeur maximale. La concentration 12h après
administration IV était de 60 +/- 20 ng/mL.
Les concentrations maximales d’aténolol étaient de 2300 +/- 600 ng/mL, et étaient atteintes
à 1,0 +/- 0,5 heure après administration orale du médicament. Douze heures après
administration orale, la concentration plasmatique était de 200 +/- 90 ng/mL.
La demi-vie de l’aténolol après administration intraveineuse était de 3,5 +/- 0,5 heure.
Après administration par voie orale, la biodisponibilité moyenne était de 90%, avec un
coefficient de variation de seulement 10%. La demi-vie d’élimination était entre 2,9 et 4,1
heures, avec une moyenne de 3,7 heures et un coefficient de variation de 11%.
36
Tableau 5 : Concentrations d’aténolol dans le plasma (ng/mL)
après 3 jours d’administration orale (3 mg/kg/j) d’après Quiñones et al. [50]
Pour les 8 chats étudiés, l’aténolol se trouvait à des concentrations thérapeutiques à 6h, et
pour 4 de ces chats, cette concentration était encore suffisante à 12h. En revanche, au bout
de 24h, les concentrations plasmatiques d’aténolol étaient en deçà de la concentration
thérapeutique, et ce pour tous les chats étudiés (tableau 5).
Pharmacodynamique :
La fréquence cardiaque de repos avant l’aténolol et l’isoproterenol était en moyenne de 208
bpm, avec des valeurs comprises entre 180 et 240 bpm.
En l’absence d’épreuve à l’isoproterenol, l’aténolol administré oralement a provoqué une
diminution significative de la fréquence cardiaque de repos à 6h (20 +/- 16%) et 12h (26 +/4%) après la dernière prise du médicament. Une diminution non significative a été observée
à 24h.
Aucune différence significative dans les réponses de la fréquence cardiaque n’a été observée
parmi les 4 doses d’isoproterenol testées, que ce soit en présence ou en l’absence
d’aténolol. Pendant l’épreuve à l’isoproterenol, les diminutions de fréquence cardiaque (déjà
augmentées par l’isoproterenol) provoquées par l’aténolol étaient de 18 +/- 11% et 15 +/11% à 6h et 12h, respectivement, après administration du médicament. A 24h, l’aténolol
n’avait pas d’effet significatif sur les fréquences cardiaques lors de l’épreuve à
l’isoproterenol. Ces résultats sont en adéquation avec les concentrations plasmatiques
d’aténolol après 3 jours d’administration orale à 3 mg/kg/j ; la concentration en aténolol à
24h était notablement plus basse que celle observée à 6h et 12h.
Conclusions :
La demi-vie de l’aténolol chez les chats de cette étude était de 3,5 +/- 0,5 heures après
administration IV et 3,7 +/- 0,4 heures après administration orale. Ces valeurs n’étaient pas
significativement différentes. (Remarque : L’aténolol a une demi-vie de 5 à 9 heures chez
l’homme).
La biodisponibilité orale de l’aténolol obtenue dans cette étude (90%) est égale à celle
rapportée chez le chien (90%) et plus élevée que celle rapportée chez l’homme (50 à 60%).
Dans cette étude, le pic de concentration plasmatique en aténolol des chats se situait à
environ une heure après administration orale.
37
L’inhibition de la réponse en fréquence cardiaque à l’épreuve à l’isoproterenol apporte une
mesure quantitative fiable du blocage des β-adrénorécepteurs. Le pourcentage de
diminution de l’élévation de fréquence cardiaque induite par l’isoproterenol était significatif
6h et 12h après administration d’aténolol. Cependant, il n’y avait pas d’effet détectable de
l’aténolol à 24h.
Les résultats de cette étude suggèrent que l’aténolol est un β-antagoniste efficace chez le
chat, et que ses effets sur les chats sains sont d’une durée d’au moins 12h après
administration orale de 3 mg/kg, une fois par jour. Cependant, le blocage β n’était plus
observable à 24h. Par conséquent, dans un cadre clinique, une administration toutes les 12h
serait plus appropriée. Il est possible que chez les chats dont la fonction rénale est altérée,
une administration quotidienne unique d’aténolol procure un blocage β plus durable.
2.3.3. Etude des effets sur la fréquence cardiaque et certaines variables
échocardiographiques
Cette étude prospective ([53]) a été réalisée par Riesen et al. et est parue dans le Journal of
Veterinary Internal Medicine en 2011. Elle était en destinée à comparer les effets de
l’ivabradine (agent chronotrope négatif) et de l’aténolol, sur la fréquence cardiaque et
certaines variables échocardiographiques (témoignant de la fonction ventriculaire gauche)
de chats sains. Seuls les résultats obtenus suite au traitement par l’aténolol ont été
rapportés ici.
Protocole d’étude :
10 femelles stérilisées de race Domestic Shorthair, âgées de 2 à 7 ans, ont été étudiées, et 5
ont reçu de l’aténolol pendant 4 semaines. La dose d’aténolol administrée était de 6,25
mg/chat/12h, ce qui correspondait à une dose moyenne d’aténolol de 1,3 mg/kg (entre 1,0
et 1,7 mg/kg) toutes les 12h.
Les conclusions ont été les suivantes :
L’aténolol a été bien toléré, aucun effet secondaire n’a été observé. Aucune modification de
poids ou des analyses biochimiques n’a été détectée avec ce traitement.
L’aténolol n’a pas provoqué pas de modification des différentes mesures réalisées lors de
l’échocardiographie (sous sédation) : diamètre atrial gauche en systole et diastole, diamètre
ventriculaire gauche en systole et diastole.
La fréquence cardiaque était diminuée de manière significative : avant le traitement par
l’aténolol, la fréquence cardiaque moyenne était de 204 +/- 32 bpm ; après le traitement, la
fréquence cardiaque moyenne était de 144 +/- 20 bpm. Ceci correspond à une diminution de
27 +/- 10%.
38
Cet effet chronotrope négatif de l’aténolol pourrait permettre de diminuer la consommation
en oxygène du myocarde, afin de prévenir le développement d’une ischémie myocardique.
2.4. Le carvedilol
Le carvedilol est un bêta-bloquant de troisième génération, non sélectif, et doté de
propriétés vasodilatatrices, dues principalement à un blocage α1 ([51]). Ce panel d’activités
pharmacologiques est susceptible de limiter les potentiels effets indésirables. Contrairement
à d’autres bêta-bloquants non sélectifs, le risque d’augmentation de la postcharge dû au
blocage β2 pourrait être compensé par le blocage α1. De plus, le blocage bêta non sélectif
provoqué par le carvedilol pourrait limiter la tachycardie réflexe due à la vasodilatation.
Il n’a pas d’ASI et est pourvu de propriétés anti-oxydantes, caractérisées par une stabilisation
membranaire. Ces propriétés anti-oxydantes pourraient réduire le stress oxydatif associé à la
progression d’une insuffisance cardiaque. Le carvedilol est lipophile, métabolisé par le foie,
et possède des métabolites actifs. L’alimentation réduit le taux d’absorption du carvedilol,
et, par conséquent, retarde l’apparition du pic de concentration plasmatique. Cependant, la
dose n’affecte pas le degré d’absorption de la molécule. Le carvedilol est hautement
métabolisé, et moins de 2% de la dose absorbée est excrétée sans modification dans les
urines. La voie majeure d’élimination de ces métabolites est l’excrétion biliaire.
2.4.1. Pharmacocinétique du carvedilol après administration intraveineuse et
orale à des chiens sains et conscients
Cette étude ([7]), publiée dans l’American Journal of Veterinary Research en 2005, a été
réalisée par Arsenault et al. Elle a porté sur 8 chiens sains, répartis en deux groupes : un
groupe a reçu 175 µg/kg de carvedilol par voie intraveineuse, l’autre 1,5 mg/kg de carvedilol
per os. Puis les deux groupes ont été permutés, afin que chaque chien ait reçu
alternativement le carvedilol par voie intraveineuse et per os. Les concentrations
plasmatiques de carvedilol étaient ensuite mesurées par spectrophotométrie par
fluorescence.
Les résultats obtenus ont été les suivants (tableau 6):
L’administration intraveineuse et orale de carvedilol était bien tolérée chez tous les
chiens. Néanmoins, après l’administration intraveineuse de carvedilol, les chiens
présentaient une brève période de légère sédation (inférieure à 2h), ce qui était également
le cas de certains chiens après administration orale. Un des chiens a développé une toux, à la
fois après administration intraveineuse et orale. Ceci a été attribué à l’effet
bronchoconstricteur du carvedilol, par blocage des récepteurs adrénergiques β2.
39
Tableau 6 : Valeurs pharmacocinétiques obtenues sur 8 chiens sains
après administration intraveineuse ou orale de carvedilol, d’après Arsenault et al. [7]
Pic de concentration
(valeur médiane)
Demi-vie d’élimination
(valeur médiane)
Temps de résidence
(valeur médiane)
Volume de distribution
au repos
Temps pour atteindre la
concentration maximale
(valeur médiane)
Biodisponibilité médiane
après administration
orale
Administration IV (175 µg/kg)
476 ng/mL [203-1920]
Administration orale (1,5 mg/kg)
24 µg/mL [9-173]
282 minutes [19-1021]
82 minutes [64-138]
360 minutes [19-819]
182 minutes [112-254]
2,0 L/kg [0,7-4,3]
90 minutes [60-180]
2,1% [0,4-54]
Dans cette étude, le temps de résistance médian était d’environ 3h par voie orale, ce qui
limiterait nettement son utilisation clinique potentielle. Cependant, les études
pharmacodynamiques démontrent une réponse jusqu’à 12h, ce qui permet une
administration biquotidienne.
Conclusions :
L’administration de 175 µg/kg de carvedilol par voie intraveineuse, tout comme
l’administration orale de 1,5 mg/kg de carvedilol, est bien tolérée chez des chiens sains et
conscients.
Le carvedilol administré à 1,5 mg/kg per os deux fois par jour permet d’atteindre un pic de
concentration plasmatique thérapeutique chez la plupart des chiens sains. Cependant, une
grande variabilité est observée concernant les pics de concentrations plasmatiques d’un
individu à un autre, ce qui suggère l’intérêt d’un suivi de la concentration plasmatique du
carvedilol lors d’utilisation clinique.
2.4.2. Résultats apportés par les études pharmacodynamiques antérieures
(1985-1999)
En 1987, Sponer et al. ([61]) évaluaient l’effet bloquant des récepteurs β après
administration orale et intraveineuse de carvedilol sur des chiens sains et conscients. Ils
décrivaient une courbe dose-réponse sur la base de l’inhibition par le carvedilol de la
tachycardie résultant de l’administration d’un bolus unique d’isoproterenol.
40
L’inhibition de la tachycardie induite par l’isoproterenol était observable 16h après
administration de 3 mg/kg de carvedilol per os. Ils décrivaient aussi une réduction de la
pression artérielle systolique après administration intraveineuse de carvedilol. La pression
artérielle systolique moyenne diminuait de 8 mmHg après administration de 0,1 mg/kg.
Cette même équipe rapporta une diminution de la résistance vasculaire systémique après
administration intraveineuse de carvedilol à des chiens sains et conscients ([63]). Dans la
même publication, des effets neuroendocrines et hypotenseurs suite à une administration
quadri-quotidienne de 6 mg/kg de carvedilol per os ont été rapportés.
Une étude in vivo sur des rats a montré que le carvedilol par voie intraveineuse inhibait de
manière significative la réponse vasodilatatrice transmise par les récepteurs β2, et suggère
que le carvedilol inhibe les adrénorécepteurs β1 et β2 à un degré similaire in vivo ([41]).
L’activité α1-bloquante du carvedilol participe à la réduction de la pression artérielle.
Cependant, l’activité α-bloquante du carvedilol chez les chiens est 3,8 fois moins puissante
que l’activité bêta-bloquante ([27]).
2.4.3. Effets hémodynamiques du carvedilol administré oralement à des chiens
sains
Cette étude ([6]) publiée en 2005 dans l’American Journal of Veterinary Research a été
réalisée par Abbott et al. Elle a permis de comparer plusieurs variables hémodynamiques
(fréquence cardiaque, pression artérielle systémique, pression artérielle pulmonaire,
pression atriale droite, index cardiaque, index de résistance vasculaire systémique, et index
de résistance vasculaire pulmonaire) au repos et après deux épreuves distinctes : l’une à
l’isoproterenol et l’autre à la phenylephrine. Elle a porté sur 24 chiens sains, répartis en un
groupe traité au carvedilol, et un groupe témoin ne recevant pas de traitement.
La phenylephrine est un agoniste sélectif des récepteurs α1 adrénergiques (effet
vasoconstricteur), et l’isoproterenol est un agoniste β-adrénergique non sélectif.
Le groupe traité était composé de 18 chiens (pesant entre 16,4 et 28,4 kg). Trois doses de
carvedilol (administré per os) ont été testées sur des groupes de 6 chiens : 1,55 mg q12h
(soit 0,08 mg/kg q12h en moyenne [0,07-0,09]); 3,125 mg q12h (soit 0,15 mg/kg q12h en
moyenne [0,13-0,17]) et 12,5 mg q12h (soit 0,54 mg/kg q12h en moyenne [0,44-0,76]), sur
une période de 7 à 10 jours. Le groupe contrôle était composé des six chiens restants, et
recevait une petite quantité d’aliment du commerce, similaire à celui dans lequel les
comprimés étaient administrés au groupe traité.
Les variables hémodynamiques sus-citées étaient mesurées préalablement à l’administration
du carvedilol le premier jour, puis 2h, 4h et 6h après le comprimé du matin lors des jours 1, 7
et 10. L’épreuve à l’isoproterenol correspondait à l’administration intraveineuse d’un bolus
de 1 µg/kg, et l’épreuve à la phenylephrine correspondait à l’administration intraveineuse
d’un bolus de 8 µg/kg. La fréquence cardiaque était mesurée à 2h et 6h après le bolus
d’isoproterenol, et la pression artérielle était mesurée à 2h et 6h après le bolus de
phenylephrine.
41
Les résultats obtenus ont été les suivants :
Au repos, aucune différence significative n’a été observée pour les valeurs hémodynamiques
étudiées entre le groupe ayant reçu un traitement au carvedilol et le groupe contrôle.
La différence de fréquence cardiaque entre la mesure après isoproterenol et la mesure au
repos était d’autant plus faible que la dose administrée de carvedilol était élevée. Une
relation linéaire a été obtenue.
La différence de pression artérielle entre la mesure après phenylephrine et la mesure au
repos n’a montré aucune différence significative entre le groupe traité au carvedilol (quelle
que soit la dose) et le groupe contrôle (même si l’augmentation de pression artérielle en
réponse à la phenylephrine était légèrement plus faible pour des doses plus élevées de
carvedilol).
Conclusions de cette étude :
Le carvedilol n’a pas eu d’effet sur les variables hémodynamiques étudiées (fréquence
cardiaque, pression artérielle systémique, pression artérielle pulmonaire, pression atriale
droite, index cardiaque, index de résistance vasculaire systémique, et index de résistance
vasculaire pulmonaire) ni sur la fréquence cardiaque au repos, suite à un traitement de 7 à
10 jours à des doses moyennes entre 0,08 mg/kg q12h et 0,54 mg/kg q12h.
Pour la gamme de doses évaluée (doses moyennes comprises entre 0,08 mg/kg q12h et
0,54 mg/kg q12h), on assiste à une atténuation dose-dépendante de la réponse de la
fréquence cardiaque à l’isoproterenol, qui met en évidence un antagonisme β-adrénergique.
Le carvedilol n’a qu’une faible influence sur l’augmentation de la pression artérielle en
réponse à la phenylephrine aux doses utilisées, mais cette influence augmente avec la dose
de carvedilol. Les doses employées (inférieures ou égales à 0,54 mg/kg q12h) ne permettent
donc pas un blocage α1, mais celui-ci pourrait avoir lieu à des posologies plus élevées (ou
suite à un bolus de phenylephrine à une concentration moindre).
2.4.4. Etude pharmacodynamique du carvedilol sur huit chiens sains
Cette étude ([21]) a été réalisée par Gordon et al. et a été publiée en 2006 dans le Journal of
Veterinary Internal Medicine. Elle a porté sur 8 chiens âgés de 2 à 5 ans, en bonne santé,
conscients, non contraints, pesant entre 20 et 25 kg.
Du carvedilol à 1,5 mg/kg leur a été administré per os toutes les 12h pendant au moins 5
jours consécutifs (la posologie et la fréquence d’administration ont été déterminées afin
d’assurer un blocage bêta continu sur 24h, sur la base d’études pharmacodynamiques
pilotes effectuées sur des chiens sains et conscients, et soumis à l’épreuve de
l’isoproterenol).
42
L’efficacité du blocage bêta a été évaluée à partir du pourcentage de réduction de la
fréquence cardiaque, du pourcentage de réduction de la pression artérielle, et des réponses
de certaines variables échocardiographiques suite à l’administration d’un agoniste bêta non
sélectif, l’isoproterenol, en présence et en l’absence (valeurs de référence) de carvedilol. Le
blocage bêta a été considéré comme efficace pour les doses de carvedilol qui atténuaient les
tachycardies induites par l’isoproterenol d’au moins 50% sur 24h.
L’administration de carvedilol a été réalisée sans dosage, et à la fin de l’étude, il a été arrêté
brutalement. Aucun effet secondaire n’a été observé sur aucun chien.
Les mesures de fréquence cardiaque et de pression artérielle étaient réalisées en continu sur
24h par intervalles de 5 min, pour les valeurs de référence (sans carvedilol) et après une
administration orale à long terme de carvedilol.
La dose sélectionnée d’isoproterenol augmentait les valeurs de fréquence cardiaque de
référence (sans carvedilol) à 180-240 bpm sur les mêmes chiens de manière reproductible,
ce qui correspondait au double de la fréquence cardiaque de repos.
Résultats :
Il n’y a pas eu de différence significative entre les valeurs de base des fréquences cardiaques
et celles sous carvedilol pour 6 chiens ; pour les deux autres, les valeurs de fréquence
cardiaque sous carvedilol étaient plus basses que les valeurs de référence.
Pour la pression artérielle diastolique et la pression artérielle moyenne, les valeurs de base
et celles sous carvedilol n’étaient pas significativement différentes. Pour la pression
artérielle systolique de 4 chiens sur 7, les valeurs référence étaient plus hautes que les
valeurs sous carvedilol, tandis que les valeurs n’étaient pas significativement différentes
pour les 3 autres chiens.
Le carvedilol donnait lieu à une atténuation de la réponse tachycardique à l’isoproterenol,
de 54 à 76% pendant 12h. L’atténuation de cette réponse tachycardique était seulement de
30% à 24h.
Le pouls n’était pas différent pour 5 chiens sur 7, mais était réduit avec l’administration de
carvedilol, comparé aux valeurs de référence, pour les 2 chiens restants.
La réponse hypotensive à l’isoproterenol dont attestaient les valeurs de pression artérielle
était atténuée de 80-100% pendant 12h et restait atténuée de 48-100% à 24h, suggérant un
blocage β2 majeur pendant 12h, puis une baisse d’efficacité à 24h. La réponse hypotensive
à l’isoproterenol était plus prononcée pour la pression artérielle systolique.
L’atténuation des réponses des paramètres pharmacodynamiques à l’épreuve à
l’isoproterenol était significativement corrélée avec le pic de concentration plasmatique du
carvedilol. Une corrélation entre le pourcentage d’atténuation de la réponse tachycardique
induite par l’isoproterenol et le pic de concentration plasmatique du carvedilol a ainsi été
observée.
43
Conclusions :
Dans cette étude, le carvedilol a eu des effets négligeables sur la pression artérielle (pression
artérielle systolique diminuée significativement pour 4/7 chiens pendant les 24h d’étude). Le
carvedilol n’a donc pas semblé augmenter la postcharge des chiens de cette étude.
Les résultats de cette étude confirment ceux d’Abbott et al. ([6]), qui rapportaient qu’une
administration orale au long cours de carvedilol atténuait la fréquence cardiaque en réponse
à l’isoproterenol chez des chiens conscients et en bonne santé.
Les mesures des concentrations plasmatiques de carvedilol de cette étude ont indiqué une
large variabilité individuelle dans le pic de concentration. Une différence allant jusqu’à 20
fois la concentration plasmatique la plus basse avec la même dose orale a été observée.
L’atténuation de la réponse tachycardique induite par l’isoproterenol a montré une forte
corrélation avec le pic de concentration plasmatique de carvedilol.
Chez des chiens conscients et en bonne santé, l’administration orale au long cours de
carvedilol à l’origine d’une concentration plasmatique supérieure à 80-100 ng/mL a permis
d’atteindre une efficacité de 100% pour la réponse de la fréquence cardiaque à
l’isoproterenol, pendant une durée de 12h, suggérant un blocage bêta complet. De plus,
pour une concentration plasmatique obtenue de 20-45 ng/mL, une efficacité de 50% a été
atteinte et un blocage bêta cliniquement important a été observé.
Cette étude suggère également qu’une administration toutes les 12 heures est nécessaire
pour éviter une atténuation substantielle du blocage bêta entre les prises.
Remarque : La dose effective médiane choisie pour cette étude (ED=dose efficace de
carvedilol atténuant la tachycardie isoproterenol-induite d’au moins 50% pour 24h) ne tient
pas compte des modèles expérimentaux sur la régurgitation mitrale, qui définissent la dose
efficace pour une atténuation de cette tachycardie de 100%. Cependant, la population cible
du carvedilol incluant des chiens présentant une maladie cardiaque spontanée, une ED100%
pourrait ne pas être possible sans risque d’effets indésirables. Cela reste néanmoins une des
limites de l’étude.
2.4.5. Effets cardiovasculaires et rénaux du carvedilol chez des chiens
présentant une régurgitation mitrale et chez des chiens sains
Cette étude ([69]) est issue du Journal of Veterinary Medical Science et a été publiée en
2002. Elle a été réalisée par Uechi et al. Quinze chiens ont été inclus, dont 8 ont servi de
contrôle, et 7 ont servi de tests pour la régurgitation mitrale iatrogène. Du carvedilol (à 0,2 ;
0,4 et 0,8 mg/kg per os) a été administré, et les concentrations plasmatiques de carvedilol
ont été analysées par chromatographie en phase liquide de haute performance. La réponse
à l’isoproterenol et à le phenylephrine ont été évaluées.
44
La régurgitation mitrale iatrogène a été produite par une chirurgie intra-thoracique, lors de
laquelle le péricarde a été ouvert, et un crochet a été introduit à travers l’apex afin de
couper les cordages mitraux. La réussite de cette opération a ensuite été évaluée par
échocardiographie Doppler, la surface de régurgitation mitrale devait occuper au moins 2/3
de la surface atriale gauche au mode Doppler couleur. L’étude a été réalisée entre 3 et 4
mois après l’induction de ces régurgitations mitrales.
L’isoproterenol était administré par voie intraveineuse pendant 5 minutes à 0,025
µg/kg/min, et la phenylephrine était injectée à 5 µg/kg. Le placebo ou du carvedilol à 0,2 ou
0,4 mg/kg était administré pendant 4 jours. L’isoproterenol ou la phenylephrine étaient
injectés avant l’administration de carvedilol, puis à 3h, 12h, 24h, 36h et 48h après son
administration.
Résultats :
Les concentrations de carvedilol après prise orale ont augmenté 1 à 4 heures après
administration. Pour chaque dosage, le pic d’administration se situait entre 1 et 4 heures
après ingestion, et la concentration plasmatique se rapprochait de la ligne de base après
environ 8h. A la dose de 0,2 mg/kg, la concentration plasmatique de carvedilol était de
moins de 0,5 ng/mL au bout de 4h.
Dans le groupe contrôle, la fréquence cardiaque a diminué de manière significative par
rapport au placebo 3h après l’administration de 0,2 mg/kg et 0,4 mg/kg de carvedilol. La
fraction de raccourcissement n’a pas montré de différence entre la valeur initiale et les
valeurs sous traitement pour les chiens traités avec 0,2 mg/kg et 0,4 mg/kg de carvedilol.
Dans le groupe de régurgitation mitrale expérimentale, la fréquence cardiaque a diminué
significativement pendant 12h chez les chiens recevant 0,2 mg/kg de carvedilol, et pendant
24h chez les chiens recevant 0,4 mg/kg de carvedilol. En revanche, la pression artérielle
systolique, moyenne et diastolique, et la fraction de raccourcissement n’ont pas montré de
différence significative par rapport à la valeur initiale, que ce soit pour les chiens recevant
0,2 mg/kg ou ceux recevant 0,4 mg/kg de carvedilol.
Dans le groupe contrôle, la réponse de la fréquence cardiaque à l’isoproterenol chez les
chiens recevant 0,4 mg/kg de carvedilol était significativement atténuée pendant 36h. L’effet
chronotrope de l’isoproterenol était aussi atténué après 3h chez les chiens recevant 0,2
mg/kg de carvedilol. La réponse de la fraction de raccourcissement à l’isoproterenol n’était
pas différente entre les chiens recevant 0,2 mg/kg ou 0,4 mg/kg de carvedilol et les chiens
du groupe contrôle. Aucune différence de fréquence cardiaque ou de pression artérielle
systolique n’a été observée en réponse à la phenylephrine chez les animaux étudiés.
45
Conclusions :
L’effet bradycardisant du carvedilol par voie orale était dose-dépendant et durait entre 3h et
24h chez les chiens à régurgitation mitrale iatrogène. Par conséquent, la dose utilisable en
pratique pourrait être comprise entre 0,2 et 0,4 mg/kg per os une fois par jour.
Dans cette étude, la réponse de la fréquence cardiaque à l’isoproterenol était diminuée de
40% avec 0,4 mg/kg de carvedilol per os. Cependant, conformément aux études
précédentes, le carvedilol n’a pas permis de diminuer la réponse hypertensive suite aux 5
µg/kg de phenylephrine, un agoniste α-adrénergique.
La fréquence cardiaque et la pression artérielle moyenne des chiens à régurgitation mitrale
iatrogène ont diminué pendant 24h suite à l’administration de carvedilol, mais la fraction de
raccourcissement n’a pas été affectée.
En tenant compte du risque de l’administration brutale de bêta-bloquants, l’utilisation d’une
dose de 0,2 mg/kg de carvedilol per os semble pertinente pour initier un traitement en
préservant la fonction contractile et en diminuant la fréquence cardiaque, chez les animaux
insuffisants cardiaques. Puis, il peut être bénéfique de faire des titrages réguliers jusqu’à
atteindre une dose de 0,4 mg/kg. En effet, la dose de 0,2 mg/kg a provoqué une diminution
de fréquence cardiaque, mais n’a pas affecté la fonction rénale, la pression artérielle, ni la
fonction de contraction du ventricule gauche. A l’inverse, le carvedilol à 0,4 mg/kg diminuait
la fréquence cardiaque, la pression artérielle, et le flux sanguin rénal. Cette dose doit donc
être atteinte progressivement.
46
Conclusion de la première partie :
D’après ces études, les bêta-bloquants sont bien tolérés par les animaux sains, et montrent
des propriétés pharmacocinétiques semblables à celles observées chez l’homme.
La dose idéale pour le blocage bêta chez les carnivores domestiques atteints de cardiopathie
spontanée est inconnue, et semble difficile à déterminer.
En effet, une grande variabilité est remarquée entre les pics de concentrations plasmatiques
de bêta-bloquant d’un animal à l’autre, et les données pilotes chez des chiens atteints de
pathologies cardiovasculaires avancées conduisent à la même observation. De plus, les
populations de récepteurs β et les caractéristiques de liaison semblent être modifiées lors de
l’évolution d’une maladie cardiaque. Les études sur chiens sains, par conséquent, présentent
d’évidentes limites concernant les conclusions possibles pour les populations malades.
Les données chez l’homme insuffisant cardiaque chronique et les bénéfices concernant la
diminution de mortalité en fonction de la dose de bêta-bloquants utilisée suggèrent que
l’administration de la dose maximale tolérée est l’objectif à atteindre. Ces rapports sont en
faveur d’un blocage complet et continu des récepteurs bêta, si cela est possible.
La plus grande limite de ces études est qu’elles aient été menées chez des chiens sains. La
population cible de chiens est constituée de chiens cardiopathes, caractérisés pour nombre
d’entre eux par un certain degré de dysfonction systolique et d’augmentation du tonus
adrénergique. Ceci représente une potentielle contre-indication majeure pour des agents
inotropes et chronotropes négatifs, comme le carvedilol ou l’aténolol.
Les chiens présentant une cardiopathie spontanée, cependant, devront subir une mise en
place progressive du blocage bêta, avec un protocole de titrage défini, limitant ainsi une
partie des potentiels effets indésirables à court terme. Par ailleurs, la mise en place du
blocage bêta en stade précoce de la maladie pourrait probablement limiter les effets
indésirables.
47
48
SECONDE PARTIE :
LES BÊTA-BLOQUANTS, ÉTUDE CLINIQUE
49
50
1. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la myocardiopathie
dilatée (MCD)
La myocardiopathie dilatée primitive (MCD) est une maladie dégénérative du myocarde,
caractérisée par une dysfonction systolique d’un ou des deux ventricules, à l’origine d’une
dilatation ventriculaire puis atriale, lorsque la maladie évolue. Une dysfonction diastolique
peut également apparaître.
Bien que ces caractéristiques puissent être observées dans de nombreuses cardiopathies
canines secondaires, le terme de MCD est réservé aux situations lors desquelles l’étiologie
est indéterminée. Par conséquent, le diagnostic de cette cardiopathie est établi par
exclusion d’autres causes connues d’altération de la fonction systolique et de dilatation
consécutive des cavités cardiaques.
La prévalence de la MCD est évaluée entre 0,5% et 1,1%. Elle est la plus élevée chez les
chiens de races pures, grandes et géantes, et certaines races sont prédisposées, notamment
le Doberman Pinscher, le Dogue Allemand, l’Irish Wolfhound, le Terre Neuve et le Boxer
([29]).
La MCD évolue dans un premier temps sous forme « occulte » ou « subclinique », sans
symptôme fonctionnel apparent. Puis, les chiens atteints manifestent une dyspnée, une
toux, et une tachypnée, signes d’une insuffisance cardiaque congestive gauche. Celle-ci peut
ensuite évoluer vers une insuffisance cardiaque globale. Les symptômes d’une baisse de
débit cardiaque incluent une faiblesse, des syncopes, une intolérance à l’effort, voire un
choc ([29]).
Une forme rythmique est également possible, sans être systématiquement associée à une
dilatation cavitaire. Elle est le plus souvent rencontrée chez les chiens de race Boxer et
Doberman Pinscher.
La morbidité et la mortalité liées à la MCD sont encore très élevées, malgré les traitements
conventionnels par les IECA, les diurétiques, et les agents inotropes. Ceci pourrait être dû
aux conséquences de l’activation du système sympathique. La durée de vie attendue à partir
de l’apparition des signes cliniques est extrêmement courte, avec une moyenne de 5 mois
seulement, et ce malgré le traitement médical mis en place ([44]).
Chez l’homme, les bêta-bloquants sont les molécules permettant l’augmentation de la
fraction d’éjection la plus remarquable. Les traitements chroniques des patients humains par
des bêta-bloquants améliorent la fonction systolique, la tolérance à l’exercice, la qualité de
vie, et augmentent la durée de vie ([44]).
1.1. Mise en évidence de l’augmentation de la concentration en
catécholamines lors de MCD et de son rôle dans l’évolution de la maladie
L’équipe de Tidholm a réalisé cette étude ([66]), publiée dans l’American Journal of
Veterinary Research en 2005, sur 45 chiens de 17 races moyennes à grandes. Ces chiens ont
été divisés en trois groupes :
51
-
-
-
Groupe 1 : 15 chiens présentant des signes cliniques et échocardiographiques de
MCD, à savoir une fraction de raccourcissement < 25% et une dilatation cavitaire.
Confirmation radiographique d’une cardiomégalie gauche ou globale, en association
avec un œdème pulmonaire ou un épanchement pleural.
Groupe 2 : 15 chiens atteints de MCD (mêmes critères échocardiographiques que
pour le groupe 1), mais pas de signes radiographiques d’insuffisance cardiaque
congestive.
Groupe 3 : 15 chiens contrôles cliniquement sains (aucune anomalie à l’examen
clinique, échocardiographique et radiographique). Les chiens contrôles étaient
similaires aux chiens des deux autres groupes en termes d’âge, de sexe et de race.
Quel que soit leur groupe, les chiens n’ont reçu ni traitement ni alimentation hyposodée
avant de participer à l’étude.
Résultats :
La fréquence cardiaque était significativement augmentée chez les chiens ayant des
signes cliniques de MCD (groupe 1), comparée à la fréquence cardiaque des chiens à MCD
préclinique et au groupe contrôle (tableau 7).
Tableau 7 : Valeurs médianes des fréquences cardiaques (FC) dans les 3 groupes
Groupe 1 (MCD clinique)
FC = 183 +/- 49 bpm
Groupe 2 (MCD préclinique)
FC = 126 +/- 48 bpm
Groupe 3 (contrôle)
FC = 95 +/- 16 bpm
Pour comparer les concentrations en noradrénaline chez les différents groupes, il a été
choisi d’étudier le rapport Noradrénaline urinaire / Créatinine urinaire. En effet, comme de
nombreuses hormones, les catécholamines sont sécrétées de manière pulsatile, et une
mesure de concentration plasmatique n’aurait été le reflet que d’un instant précis.
Les rapports Noradrénaline urinaire / Créatinine urinaire et Adrénaline urinaire / Créatinine
urinaire étaient significativement augmentés chez les chiens à MCD clinique, comparés aux
chiens à MCD préclinique et au groupe contrôle. La moyenne de chaque rapport chez les
chiens à MCD préclinique était située entre la moyenne de ce rapport chez les chiens à MCD
clinique et celle chez les chiens du groupe contrôle.
Une autre étude ([32]) a été réalisée en 2006 par l’équipe de M. Marcondes Santos,
afin de rechercher une corrélation entre les concentrations plasmatiques de noradrénaline
et certaines variables échocardiographiques chez des chiens insuffisants cardiaques, atteints
de MCD ou de maladie valvulaire mitrale dégénérative (MVD). Elle a été publiée dans
l’American Journal of Veterinary Research. Les résultats ont été les suivants :
52
Les concentrations plasmatiques de noradrénaline étaient significativement plus élevées
chez les chiens atteints de MVD ou de MCD que chez le groupe contrôle, et ce même pour
les chiens ne présentant pas de signes cliniques.
La seule corrélation mise en évidence concernait les valeurs de fraction de raccourcissement
des chiens atteints de MCD. Plus les concentrations en noradrénaline étaient élevées chez
ces chiens, plus la fraction de raccourcissement était faible.
Les concentrations en noradrénaline n’étaient pas corrélées avec les valeurs
échocardiographiques des chiens atteints de MVD.
Conclusions :
Les concentrations en catécholamines sont augmentées chez les chiens atteints de MCD par
rapport aux chiens sains. Cette augmentation est plus prononcée lorsque la MCD est clinique
que lors des stades précliniques.
Il existe une corrélation négative entre les concentrations en noradrénaline et les valeurs de
fractions de raccourcissement chez les chiens atteints de MCD.
Bien que la stimulation sympathique soit considérée comme bénéfique à court terme, elle
est reconnue comme délétère dans les situations chroniques, induisant notamment une
fréquence cardiaque élevée (ainsi qu’une augmentation de la post charge, des troubles du
rythme, et de la fibrose).
Remarques : Dans certaines études faites chez l’homme atteint d’insuffisance cardiaque, la
concentration en noradrénaline était augmentée, mais la concentration en adrénaline ne
l’était pas. Le fait que les concentrations à la fois d’adrénaline et de noradrénaline aient été
augmentées chez les chiens de la première étude citée ([66]) pourrait être attribuable au fait
que les chiens étaient en insuffisance cardiaque congestive aiguë, avant l’initiation de tout
traitement.
Ceci pourrait indiquer que la médullo-surrénale et les terminaisons nerveuses sympathiques
sont simultanément activées lors d’insuffisance cardiaque aiguë, tandis que les terminaisons
nerveuses sympathiques sont la source majeure de catécholamines plasmatiques suite à une
stimulation adrénergique chronique attribuable à une insuffisance cardiaque.
La baisse de densité des récepteurs adrénergiques contribue également à augmenter la
concentration en noradrénaline plasmatique chez les patients insuffisants cardiaques.
53
1.2. Etudes cliniques de l’utilisation de bêta-bloquants chez des chiens atteints
de MCD
1.2.1. Etude rétrospective de la survie des chiens atteints de MCD avec
insuffisance cardiaque congestive traités à la digoxine, au furosémide et au
propranolol
Cette étude ([65]) a été réalisée par A. Tidholm à l’Hôpital Vétérinaire Albano de Stockholm,
et publiée dans le Journal of Veterinary Cardiology en 2006. Elle est née de l’observation que
le temps moyen de survie chez des chiens atteints de MCD avec insuffisance cardiaque de
classe III à IV est compris entre 100 et 130 jours sous IECA selon les études ([2], [3]).
Dans l’étude précédente ([66], voir paragraphe 1.1, page 49), il a été mis en évidence que les
concentrations en catécholamines étaient augmentées chez les chiens atteints de MCD et
insuffisants cardiaques.
Le propranolol fait partie des agents bêta-bloquants non sélectifs. Il a été démontré chez
l’homme que cette catégorie de bêta-bloquants pouvait apporter des bénéfices cliniques
majeurs dans le traitement de l’insuffisance cardiaque par rapport aux agents β1-sélectifs.
Le propranolol a été souvent utilisé chez le chien jusqu’à présent, principalement pour le
traitement des arythmies.
L’utilisation d’agents bloquants des récepteurs β adrénergiques chez les chiens insuffisants
cardiaques chroniques reste controversée, du fait des effets secondaires redoutés et de la
faible tolérance de ces molécules chez ces patients. Le but de cette étude était d’évaluer la
survie et les effets secondaires potentiels chez les chiens dont l’insuffisance cardiaque est
attribuable à une MCD, traités avec du furosémide, de la digoxine et du propranolol.
Critères d’inclusion dans l’étude :
1) Mise en évidence par examen échocardiographique d’une dilatation ventriculaire
gauche, d’une dilatation atriale gauche et d’une fraction de raccourcissement < 25%.
Absence d’autres lésions cardiaques significatives.
2) Confirmation radiographique d’une cardiomégalie gauche ou globale, d’un œdème
pulmonaire ou d’un épanchement pleural.
Protocole de l’étude :
Soixante-deux chiens de 21 races différentes (moyennes et grandes), atteints de MCD et
insuffisants cardiaques de classe IV (selon la classification NYHA, présentée en annexe 1) ont
été intégrés à l’étude. Ces chiens étaient âgés de 10 mois à 12,5 ans à la première
présentation, avec une moyenne d’âge de 7 +/- 2,5 ans.
Les motifs de consultation étaient des difficultés respiratoires au repos (100%), une toux
(73%), une intolérance à l’effort (60%), une dysorexie (42%), une polydipsie (15%), une perte
de poids (13%), ou des syncopes (11%).
54
Les examens cliniques d’admission révélaient : une dyspnée au repos (100%), un souffle
systolique d’intensité modérée (grade II-III/VI) (56%), une ascite (6%), un œdème pulmonaire
(97%), un épanchement pleural (3%).
Les fréquences cardiaques étaient comprises entre 140 et 270 bpm (moyenne de 186 +/- 38
bpm). Les ECG révélaient des fibrillations atriales (50%), et des extrasystoles ventriculaires
(14%).
Ces chiens ont été traités initialement à la digoxine (dose moyenne de 0,009 mg/kg/j) et au
furosémide (dose moyenne de 3,6 mg/kg/j). Une fois les signes d’insuffisance cardiaque
résolus, soit environ une semaine après la présentation initiale, du propranolol a été ajouté à
ce traitement, à la dose moyenne de 2,4 mg/kg/j. Tous les chiens ont reçu un traitement à la
digoxine de 0,004 à 0,015 mg/kg (médiane de 0,009 mg/kg) en 2 prises. Aucun changement
de dose n’a été effectué en cours de traitement. Les doses journalières totales de
furosémide étaient comprises entre 1,5 et 6,7 mg/kg avec une dose journalière moyenne de
3,6 mg/kg. Le furosémide était donné 2 fois par jour à tous les chiens, et la dose était
augmentée si besoin, selon l’évolution de la maladie.
Le propranolol a été ajouté une fois les signes d’insuffisance cardiaque chroniques résolus,
soit environ une semaine après la présentation initiale. La posologie à atteindre était de 1
mg/kg q8h, avec une dose de départ de 50% de cette posologie pendant les 2 à 4 premiers
jours. Les doses journalières totales de propranolol étaient comprises entre 1,5 et 3,4 mg/kg,
avec une moyenne de 2,4 mg/kg. Cette dose était répartie en 3 prises, et n’a pas été
modifiée en cours de traitement. Aucune autre molécule anti-arythmique n’a été donnée.
Les traitements par la digoxine et le propranolol n’ont pas été interrompus ni modifiés
pendant toute la durée de la thérapie ; pour le furosémide, la dose a été adaptée à
l’évolution clinique de l’animal.
Un traitement adjuvant à la levothyroxine (à 0,002 mg/kg) a été administré à 15 chiens dont
7 ont été diagnostiqués hypothyroïdiens. Ce traitement n’a pas eu d’influence sur la durée
de survie des animaux insuffisants cardiaques. De la spironolactone a été ajoutée à 4 chiens,
et de l’enalapril à 2 chiens, quelques jours avant leur décès.
Résultats :
La réapparition d’une insuffisance cardiaque congestive grave s’est produite chez 10 chiens
(16%) pendant le premier mois de traitement. Il n’a pas été possible de déterminer si cela
était attribuable au traitement en cours, ou s’il s’agissait de l’évolution naturelle de la
maladie. Cependant, la réapparition des symptômes n’a coïncidé pour aucun chien avec la
mise en place du propranolol.
Les durées de survie obtenues lors de cette étude ont été de 8 à 1335 jours, avec une
médiane de survie de 126 jours. Cinquante-deux chiens ont été euthanasiés, et 9 sont morts
subitement. Un chien a été perdu lors des suivis. Quarante-quatre chiens ont été
euthanasiés suite à la progression de leur insuffisance cardiaque. Huit chiens ont été exclus
des analyses statistiques, car il a été considéré que leur décès n’était pas d’origine
cardiaque.
55
Une autopsie a été réalisée sur 33 chiens. Des fibres musculaires plus fines que la norme (< 6
µm), avec un aspect ondulé, ont été retrouvées chez 32 chiens. La forme de MCD
caractérisée par une infiltration fibro-graisseuse du myocarde n’a été retrouvée que chez un
seul chien de race Boxer.
Le taux de survie était de 34% à un an, et de 20% à 2 ans.
Conclusions :
Dans la présente étude, le traitement au propranolol chez des chiens atteints de MCD et
insuffisants cardiaques a été bien toléré : la médication a été administrée sans interruption
et sans modification pour tous les chiens de l’étude, et aucun effet secondaire n’a été
observé (à l’exception d’une baisse d’appétit chez 2 chiens).
Pour les 62 chiens atteints de MCD et insuffisants cardiaques traités avec de la digoxine, du
furosémide et du propranolol (sans utilisation d’IECA), la médiane de survie obtenue a été de
126 jours, le taux de survie à 1 an de 34%, et le taux de survie à 2 ans de 20%. Ces résultats
sont donc analogues à ceux obtenus lors des traitements aux IECA ([2], [3]).
Cette étude a donc montré une augmentation de la durée de vie par rapport aux
précédentes études, lors d’ajout de propranolol au traitement conventionnel par la digoxine
et le furosémide.
Remarque :
Chez l’homme, les thérapies combinées d’un IECA et d’un bêta-bloquant ont montré une
meilleure efficacité chez les patients insuffisants cardiaques que chaque traitement
indépendamment. Cette combinaison de traitements n’a pas encore été évaluée chez le
chien insuffisant cardiaque.
1.2.2. Comparaison des effets du carvedilol et du metoprolol chez des chiens
atteints de MCD
L.A. Nikolaidis a réalisé avec son équipe une étude ([42]) publiée en 2006 dans le Journal of
the American College of Cardiology. Son objectif était de déterminer s’il existait des
différences cliniques notables entre les antagonistes sélectifs des récepteurs β1adrénergiques, tels que le metoprolol, et les antagonistes combinés des récepteurs β1, β2,
et α1-adrénergiques, tels que le carvedilol. Chez l’homme, le COMET (Carvedilol Or
Metoprolol European Trial) a montré en 2003 que le carvedilol était supérieur au metoprolol
dans la réduction de la mortalité, même si les mécanismes mis en jeu demeurent incertains.
En théorie, un blocage adrénergique combiné devrait être plus efficace, du fait de
l’antagonisme des effets de la noradrénaline au niveau des trois types de récepteurs post56
synaptiques. Cependant, peu de preuves directes de l’importance et de la durabilité des
propriétés bloquantes β2 et α1 ont été apportées.
Protocole de l’étude :
Trente-trois chiens des deux sexes, pesant de 14 à 17 kg ont participé à l’étude. Des valeurs
de référence de leurs variables hémodynamiques ont été mesurées, puis ils ont été soumis à
une stimulation ventriculaire droite rapide (240 bpm) afin d’induire une MCD.
Toutes les mesures hémodynamiques et métaboliques ont été répétées une fois la MCD
développée, puis les chiens ont reçu de façon randomisée du carvedilol à 25 mg q12h per os
(n=10), ou du metoprolol à 100 mg/j per os (n=8). (Ces doses reposent sur des études
préliminaires sur des chiens atteints de MCD induites par stimulation, et avaient montré des
réductions comparables de la fréquence cardiaque). Le traitement était maintenu pendant 3
jours, pendant lesquels la stimulation cardiaque était suspendue. Un dernier groupe de
chiens (n=5) subissait le même protocole sans recevoir de traitement, afin de servir de
contrôle. Le suivi des mesures hémodynamiques a été réalisé lors du 4e jour, après la
dernière dose.
La consommation en oxygène du myocarde, le travail systolique du ventricule gauche, et
l’efficacité mécanique du myocarde ont été calculés. La réponse de la fréquence cardiaque à
l’isoproterenol (bolus intraveineux de 0,2 µg/kg/min) a été évaluée avant, après le
développement de la MCD, et le matin du 4e jour de traitement. Chaque chien a par ailleurs
reçu des bolus croissants (0,05 à 0,4 µg/kg/min) de noradrénaline, avant traitement et à la
fin du 3e jour de celui-ci par les antagonistes respectifs.
Enfin, des analyses métaboliques ont été effectuées, afin de mesurer les concentrations en
glucose transmyocardique, en acides gras non estérifiés, en insuline plasmatique et en
glucagon, avant et après traitement par le carvedilol ou le metoprolol. Les concentrations
en noradrénaline ont également été mesurées (par chromatographie sur phase liquide).
Après le 4e jour de traitement, les chiens ont été euthanasiés au pentobarbital.
Résultats :
Le carvedilol et le metoprolol étaient associés à des diminutions (significatives) analogues de
la fréquence cardiaque au repos (baisse de 44 +/-5 bpm). Les deux agents ont apporté une
atténuation similaire de la réponse de la fréquence cardiaque à l’injection d’isoproterenol.
La fréquence cardiaque était significativement diminuée chez les animaux traités par l’un des
deux agents par rapport aux animaux contrôles.
Tous les chiens ont manifesté des augmentations comparables et significatives de la pression
télédiastolique dans le ventricule gauche, de la fréquence cardiaque, de la résistance
systémique vasculaire, ainsi qu’un déclin progressif des performances contractiles du
ventricule gauche, du débit cardiaque, du volume d’éjection systolique, et de la pression
artérielle moyenne, durant l’évolution de la MCD.
57
Les deux traitements étaient associés à une baisse significative de la pression télédiastolique
dans le ventricule gauche, qui était significativement plus marquée pour le carvedilol. Les
deux traitements ont également augmenté le débit cardiaque et le volume d’éjection
systolique, mais le bénéfice était significativement plus important avec le carvedilol. De
même, ces effets bénéfiques étaient associés à des réductions plus franches de la pression
artérielle systolique avec le carvedilol qu’avec le metoprolol.
Les deux traitements ont eu des effets comparables sur la consommation en oxygène du
myocarde, mais le carvedilol a eu des effets plus favorables sur le travail d’éjection et le
rendement mécanique. D’après la comparaison avec le groupe contrôle, ces effets n’étaient
pas dus à la récupération suite à l’arrêt de la stimulation cardiaque.
Le carvedilol était associé à un flux sanguin rénal, hépatique, et des muscles squelettiques
presque doublé, alors qu’il n’y avait pas de différence significative avec le metoprolol.
Durant la progression de la MCD, les deux groupes ont présenté des augmentations
significatives des taux de noradrénaline. Le carvedilol a eu des effets plus notables sur la
limitation des taux de noradrénaline (carvedilol : -0,35 +/- 0,11 nmol/L ; metoprolol : -0,05
+/- 0,02 nmol/L).
Lors de l’injection de noradrénaline exogène (0,4 µg/kg/min), le metoprolol a accentué
l’augmentation de pression artérielle provoquée, tandis que le carvedilol a atténué cette
réponse de pression à la noradrénaline. Les deux traitements ont atténué les effets de la
noradrénaline sur le débit cardiaque et le volume d’éjection systolique de manière
comparable.
Concernant les effets métaboliques, la MCD avancée était caractérisée par une
augmentation de la concentration en insuline plasmatique, en glucagon, et en acides gras
non estérifiés, tandis que la concentration de glucose plasmatique restait inchangée.
Le carvedilol a provoqué une augmentation significative de la concentration en insuline
plasmatique, et une diminution des taux plasmatiques d’acides gras non estérifiés et de
glucagon. Le metoprolol n’a, quant à lui, pas eu d’effets sur ces valeurs. Par conséquent,
l’assimilation de glucose myocardique était augmentée de manière significative après le
carvedilol, comparé au metoprolol. Aucun traitement n’a modifié les concentrations de
glucose circulant.
L’assimilation d’acides gras non estérifiés était diminuée dans la MCD, mais l’injection
d’isoproterenol a augmenté massivement l’assimilation des acides gras non estérifiés par le
myocarde, ainsi que la consommation en oxygène du myocarde. Ces effets étaient transmis
principalement par les récepteurs β2-adrénergiques, car ils demeuraient inchangés en
présence de metoprolol. Par contre, ils étaient annulés par le carvedilol.
L’isoproterenol supprimait l’assimilation myocardique de glucose. Cet effet était inchangé
par le metoprolol, mais antagonisé par le carvedilol, et donc transmis par les récepteurs β2.
58
Conclusions :
Le carvedilol permet à court terme une amélioration plus importante que le metoprolol de la
fonction ventriculaire gauche (volume d’éjection systolique), de la perfusion des organes
(rein, foie, et muscle squelettique), et des variables hémodynamiques étudiées (pression
artérielle systolique et diastolique, débit cardiaque), chez le chien vigile atteint de MCD
grave. Il offre aussi des bénéfices neuro-hormonaux (limitation des taux de noradrénaline) et
métaboliques plus importants que le metoprolol.
Le carvedilol permet un blocage β1 analogue à celui provoqué par le metoprolol, aux doses
utilisées dans cette étude. Cependant, la majorité de ses effets bénéfiques est attribuable au
blocage α1, qui engendre une diminution des résistances périphériques vasculaires. Ceci
limite la charge ventriculaire, augmente le débit cardiaque et le volume d’éjection systolique
et diminue la pression télédiastolique ventriculaire gauche.
Le carvedilol, agent bêta-bloquant non sélectif, présente donc de réels avantages par
rapport aux bêta-bloquants sélectifs dans le traitement de la MCD.
1.2.3. Utilisation de carvedilol chez les chiens atteints de MCD
Cette étude ([45]) a été réalisée par A. Oyama et al. et publiée dans le Journal of Veterinary
Internal Medicine en 2007. Il s’agit d’une étude clinique prospective, avec contrôle placebo,
en double aveugle et randomisée, de l’efficacité du carvedilol chez les chiens atteints de
MCD.
Les animaux ont été recrutés au sein de 3 sites : les Hôpitaux des Universités Vétérinaires de
l’Illinois et de l’Ohio, et le Centre d’Urgences et de Soins Intensifs de l’Illinois. Vingt-trois
chiens ont participé à l’étude : 16 chiens ont reçu du carvedilol et 7 un placebo. Un bilan
radiographique, échocardiographique et neuro-hormonal a été effectué dans les 2 groupes.
Les races représentées étaient le Doberman Pinscher (carvedilol : 9 ; placebo : 6), Grand
Danois (carvedilol : 4 ; placebo : 1), Rottweiler (carvedilol : 2) et Bouvier des Flandres
(carvedilol : 1).
Les chiens sélectionnés révélaient un volume télésystolique indexé au poids corporel
supérieur à 35 mL/m² en l’absence de cause sous-jacente identifiable et ne présentaient pas
d’insuffisance cardiaque congestive. Un traitement cardiaque conventionnel, incluant de la
digoxine, pouvait être administré, à condition que la dose ait été inchangée depuis au moins
deux semaines.
Il était demandé aux propriétaires d’évaluer l’activité de leur chien, sa mobilité, son attitude,
et son appétit, au moyen de grilles de notations préalablement établies.
Le carvedilol ou le placebo, présentés sous forme de gélules de même aspect, étaient
ensuite prescrits pendant une durée de 4 semaines. Les chiens ont reçu initialement 0,05
mg/kg per os q12h pendant 7 jours, puis ont subi une augmentation hebdomadaire de dose
jusqu’à 0,1 ; 0,2 puis 0,3 mg/kg per os q12h. Les propriétaires surveillaient alors l’apparition
de difficultés respiratoires, d’une baisse d’appétit ou d’un affaiblissement de leur animal, et
59
ne passaient pas à la dose suivante si l’un de ces signes était observé. Suite à ces 4 semaines
de titrage, les chiens ont reçu 3 mois de traitement ininterrompu, à la dose de 0,3 mg/kg per
os q12h.
A la fin de ces 4 mois, les chiens ayant reçu un placebo pendant la 1ère phase de l’étude ont
suivi le même protocole de traitement au carvedilol que l’autre groupe, avec 4 semaines de
titrages puis 3 mois à 0,3 mg/kg per os q 12h.
Résultats :
Dans chaque groupe, 1 chien est mort subitement pendant la période de titrage. Pendant la
phase de traitement chronique, 2 chiens du groupe traité au carvedilol sont morts
soudainement et un chien du groupe placebo a été euthanasié à cause de son insuffisance
cardiaque. Treize chiens du groupe traité au carvedilol et 5 chiens du groupe placebo ont
donc terminé l’étude.
Les trois mois de traitement chronique au carvedilol n’ont pas amélioré significativement les
volumes télédiastolique et télésystolique du ventricule gauche, ni la fraction d’éjection, par
rapport aux chiens recevant le placebo. Les dimensions atriales et ventriculaires gauche,
l’intervalle systolique et les paramètres neuro-hormonaux (dont le dosage de noradrénaline
et d’adrénaline plasmatiques) n’ont pas non plus montré de différence significative. Aucun
des traitements n’a modifié la perception de la qualité de vie par les propriétaires.
Les résultats de cette étude sont cependant à nuancer. Ils concernent un faible nombre
d’animaux, et montraient une grande variabilité entre les animaux. Certains chiens
présentaient une bonne réponse, notamment concernant la fraction d’éjection. Ces résultats
reposent sur des mesures échocardiographiques, connues pour être l’objet d’une variabilité
inter-jour et inter-opérateur.
De plus, il est possible que la dose employée ici ait été inappropriée. Chez l’homme, les
résultats les plus satisfaisants ont été obtenus chez les patients recevant les doses les plus
élevées.
Les divergences entre les résultats en médecine humaine et ceux de cette étude pourraient
également s’expliquer par des différences de gravité, de stade, et d’étiologie de la MCD
entre le chien et l’homme. En effet, le diagnostic de la MCD est plus tardif chez l’animal que
chez l’homme, ce qui compromet l’efficacité d’un traitement par les bêta-bloquants. Les
chiens de cette étude souffraient d’une maladie relativement avancée, d’après les
échocardiographies réalisées au moment du diagnostic. Or, plus la maladie évolue, plus les
lésions myocardiques irréversibles deviennent importantes, rendant la réponse aux
interventions thérapeutiques moins probable. Un traitement plus précoce et plus efficace
chez les chiens semble donc nécessiter une détection de la maladie chez les animaux
asymptomatiques, atteints de cardiopathie encore occulte.
Enfin, une réponse positive au blocage β se traduisant par un remodelage ventriculaire
requiert en général un traitement d’au moins 3 mois, et est influencée à la fois par la durée
et la posologie. Un suivi plus long des patients aurait peut-être pu modifier les conclusions
tirées ici.
60
Conclusions :
Chez le chien atteint de MCD, des doses de carvedilol supérieures à 0,3 mg/kg q12h
semblent être requises pour provoquer un remodelage ventriculaire et une amélioration de
la fonction myocardique après 3 mois. Cependant, la dose optimale à utiliser chez les
animaux atteints de cardiopathies spontanées est à ce jour inconnue.
Conclusions concernant l’utilisation des bêta-bloquants pour le traitement de la MCD:
Il n’a pas encore été démontré que les bêta-bloquants augmentaient significativement la
durée de survie des chiens atteints de MCD.
Cependant, la durée de survie des chiens atteints de MCD avec insuffisance cardiaque
congestive et traités par des bêta-bloquants (en plus du traitement conventionnel par la
digoxine et le furosémide) est comparable à la durée de survie des chiens atteints de MCD
et traités par des IECA.
Le bêta-bloquant le plus adapté au traitement de cette maladie semble être le carvedilol,
en raison des avantages apportés par le blocage α. L’utilisation du propranolol et du
metoprolol semble néanmoins pertinente, comme l’ont illustré les deux premières études
citées.
Ces 3 molécules engendrent une diminution de la fréquence cardiaque, une baisse de la
pression télédiastolique dans le ventricule gauche, une amélioration de la fonction
contractile et ainsi du volume d’éjection systolique. Elles permettent d’abaisser la
consommation en oxygène par le myocarde et les concentrations en noradrénaline (ce qui
évite à long terme la régulation négative des récepteurs bêta). Leur utilisation est donc
intéressante dans le traitement de la MCD chez le chien.
La posologie à utiliser est pour le moment mal définie. Chez les chiens atteints de MCD,
aucun effet significatif du carvedilol n’a été observé à la dose de 0,3 mg/kg q12h ([45]). En
revanche, la posologie de 1,5 mg/kg q12h choisie par Nikolaidis et al. ([42]) a permis
d’améliorer la fonction ventriculaire gauche et la perfusion des organes. Il apparait donc
nécessaire d’employer des doses élevées pour obtenir les effets bénéfiques du carvedilol.
61
62
2. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la MVD
La MVD, d’étiologie encore inconnue, affecte principalement la valve mitrale et représente
la cardiopathie acquise canine la plus fréquente ([12]).
La MVD mitrale est à l'origine d'une insuffisance de coaptation systolique des deux feuillets
mitraux. Si le volume régurgité devient important, les complications incluent entre autres :
une dilatation atriale gauche, puis ventriculaire gauche, une hypertension artérielle
pulmonaire, un œdème pulmonaire (insuffisance cardiaque gauche), des tachyarythmies
principalement supraventriculaires, et à un stade ultime une ascite et un épanchement
pleural (insuffisance cardiaque droite). La rupture de cordage est une autre complication
potentielle de la MVD mitrale, concernant plus d'un chien sur dix, et engendrant dans plus
de 90% des cas un reflux systolique important.
L'évolution de la MVD comporte deux phases : une phase de compensation caractérisée par
l'absence d'insuffisance cardiaque congestive (stade 1 de la classification ISACHC, présentée
en annexe 2) pendant laquelle des modifications hémodynamiques et cardiaques peuvent
cependant apparaître (hypertension artérielle pulmonaire, rupture de cordage ou encore
dilatation cavitaire définissant le stade 1b ISACHC); une phase de décompensation,
caractérisée par la présence d'une insuffisance cardiaque congestive gauche ou globale
(stades 2 et 3 ISACHC). Cette évolution est lente : plusieurs années peuvent s’écouler entre
la découverte d’un souffle cardiaque et l’apparition de signes cliniques d’insuffisance
cardiaque. Cependant, une fois déclarée cliniquement, l’évolution de la maladie s’accélère et
la plupart des chiens symptomatiques développent une insuffisance cardiaque réfractaire au
traitement médical, en moyenne au bout de quelques mois.
L’augmentation du tonus au sein du système nerveux sympathique associé à la MVD peut
aboutir à une réduction du nombre de cardiomyocytes, ainsi que du nombre d’éléments
contractiles au sein de chaque cardiomyocyte ([31]). Il a donc été suggéré d’évaluer l’effet
des bêta-bloquants durant différentes phases de la MVD.
2.1. Mise en évidence de l’augmentation de la concentration en
catécholamines lors de MVD
Marcondes Santos et al. dans l’étude précédemment citée ([32], voir paragraphe 1.1.
page 50), avaient recherché une corrélation entre les concentrations plasmatiques de
noradrénaline et certaines variables échocardiographiques chez des chiens insuffisants
cardiaques, atteints de MCD ou de MVD.
Les conclusions étaient les suivantes :
Les concentrations plasmatiques de noradrénaline étaient significativement plus
élevées chez les chiens atteints de MVD que dans le groupe contrôle, et ce même pour les
chiens ne présentant pas de signes cliniques.
Les concentrations en noradrénaline n’étaient pas corrélées avec les valeurs
échocardiographiques des chiens atteints de MVD.
63
2.2. Etudes cliniques de l’utilisation de bêta-bloquants chez les chiens atteints
de MVD
2.2.1 Confrontation des effets du lisinopril et de l’aténolol sur les variables
hémodynamiques et la fonction de contraction du ventricule gauche sur des
chiens présentant des régurgitations mitrales expérimentales
Cette étude ([40]) a été réalisée par Nemoto et al. en Caroline du Sud en 2002, et publiée
dans le Journal of the American College of Cardiology. Son objectif était de déterminer si
l’ajout d’un bêta-bloquant à la médication de chiens atteints de régurgitations mitrales
induites expérimentalement et traités par un IECA était bénéfique.
Protocole de l’étude :
Onze chiens adultes croisés et en bonne santé, pesant de 18,6 à 26,8 kg, ont été suivis dans
le temps, depuis leur admission, où ils ne présentaient pas d’anomalie, puis pendant les 9
mois suivants la rupture de leurs cordages tendineux, expérimentalement induite.
Trois mois après l’intervention, un traitement quotidien au lisinopril à la dose de 20 mg per
os a été mis en place chez tous les animaux. Après 3 mois de traitement par cet IECA, un
blocage bêta a été induit progressivement par de l’aténolol, à une dose de départ de 12,5
mg par jour, pour atteindre une dose totale de 100 mg par jour. Les animaux ont alors été
suivis pendant 3 mois supplémentaires (figure 15). Les premières mesures réalisées avant la
rupture de cordage ont servi de contrôle. A l’issue des 9 mois d’étude, les animaux ont été
euthanasiés.
Figure 15 : Protocole de traitement des chiens de l’étude, d’après Nemoto et al. [40]
RM : Régurgitation Mitrale
Résultats :
Quel que soit le traitement mis en place (lisinopril seul, ou lisinopril + aténolol), le
pourcentage de régurgitation n’a pas été significativement modifié, et est toujours resté
supérieur à 50%.
64
Le lisinopril seul a permis de réduire de manière significative la pression dans le ventricule
gauche en fin de diastole, la pression dans les capillaires pulmonaires, et la tension de la
paroi du ventricule gauche en fin de diastole.
Le débit systolique était abaissé après 3 mois de régurgitation mitrale. Il était modérément
ré-augmenté sous lisinopril, mais pas de manière significative. En revanche, lors de la
thérapie combinée associée à l’aténolol, le débit systolique a augmenté de manière
significative pour retourner à des valeurs usuelles (analogues aux valeurs mesurées avant la
création chirurgicale de la régurgitation mitrale).
La constante de rigidité en fin de systole est un index de contractilité indépendant de la
charge. Sa valeur était abaissée après 3 mois de régurgitation mitrale. Elle a modérément
augmenté (de manière non significative) sous lisinopril, puis elle a augmenté davantage lors
de la thérapie combinée, pour être significativement plus haute que la valeur en
régurgitation mitrale sans traitement, et devenir similaire à la valeur lors de l’admission
(avant régurgitation mitrale). L’aténolol a ainsi permis de rétablir la contractilité du
ventricule gauche.
Conclusions :
Le lisinopril seul (entre 0,75 mg/kg/j et 1 mg/kg/j per os) a permis de réduire de manière
significative la pression dans le ventricule gauche en fin de diastole, la pression dans les
capillaires pulmonaires, et le stress pariétal du ventricule gauche en fin de diastole.
Cependant, les effets du lisinopril sur le débit systolique et la contractilité du ventricule
gauche ont été non significatifs pour les chiens de cette étude.
Seul l’ajout d’un bêta-bloquant (l’aténolol, à des doses comprises entre 3,7 mg/kg/j et 5,4
mg/kg/j per os) a permis d’augmenter significativement les valeurs de débit systolique et de
contractilité du ventricule gauche, allant jusqu’à rétablir les valeurs initiales (celles mesurées
avant instauration de la régurgitation mitrale).
De plus, l’ajout d’aténolol a permis de réduire davantage la pression télédiastolique
ventriculaire gauche et la pression dans les capillaires pulmonaires par rapport au lisinopril
seul.
Enfin, la fréquence cardiaque était réduite de manière significative après l’ajout de l’aténolol
au traitement.
65
2.2.2. Effets du traitement au carvedilol sur des chiens atteints de MVD mitrale
associée à une insuffisance cardiaque
La réponse au carvedilol est susceptible d’être différente entre les chiens cardiopathes et les
chiens sains, mais aussi selon le type d’atteinte cardiaque (MCD ou MVD, maladie mitrale
acquise ou induite expérimentalement, maladie symptomatique ou asymptomatique, etc.).
Marcondes-Santos et al. ont publié en 2007 une étude clinique prospective dans le Journal
of Veterinary Internal Medicine ([33]). Cette étude portait sur 25 chiens de propriétaires,
pour lesquels un diagnostic de MVD mitrale avait été établi. Seuls les chiens présentant une
régurgitation mitrale modérée à grave et une dilatation atriale gauche ont été inclus dans
l’étude, et répartis dans les classes I à IV de la grille NHYA (annexe 1) selon la gravité des
signes d’insuffisance cardiaque.
Les chiens ont ensuite été répartis en deux groupes homogènes en termes de classification
fonctionnelle, d’âge et de sexe. Pour les animaux ayant reçu un traitement avant l’étude (du
furosémide, associé ou non à de la digoxine ou à un vasodilatateur), ce dernier a été arrêté à
l’inclusion dans le protocole.
Une évaluation clinique, radiographique, ECG et échocardiographique a été réalisée avant la
mise en place du traitement (T0), et après 3 mois (T1).
Le groupe A, constitué de 13 chiens, a reçu un traitement conventionnel, composé de
benazepril (0,3-0,5 mg/kg q24h) pour les chiens de classe I. Pour les chiens de classe
supérieure ou égale à II, le protocole était du benazepril (0,3-0,5 mg/kg q24h), de la digoxine
(0,0055 mg/kg q12h, avec une digoxinémie de 1-2 ng/mL mesurée 1 semaine après
l’initiation du traitement), et un régime hyposodé, pendant les 3 mois d’étude. De la codéine
(0,3 mg/kg q8h) et un diurétique étaient utilisés seulement si nécessaires, chez les chiens de
classe II ou plus.
Le groupe B, constitué de 12 chiens, a reçu le même traitement que le groupe A, auquel a
été ajouté du carvedilol à 0,3 mg/kg q12h. La dose initiale de carvedilol était de 0,15-0,2
mg/kg q12h pendant une semaine, puis elle était augmentée à 0,3 mg/kg q12h après
évaluation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle. Seul un chien du groupe B a
continué à recevoir du carvedilol aux doses initiales, en raison de valeurs trop basses de
pression artérielle (≤ 100 mmHg) depuis l’instauration du traitement.
La grille de Functional Evaluation of Cardiac Health (FETCH), comprenant 17 questions
adressées aux propriétaires, a été utilisée à T0 et T1 pour évaluer la gravité des signes
cliniques, et ainsi la qualité de vie des animaux.
Résultats :
Les résultats attribués aux animaux de l’étude par leurs propriétaires (score FETCH) ont
montré une association significative avec les classes fonctionnelles d’insuffisance cardiaque
au moment de l’étude.
66
La différence de qualité de vie du score FETCH entre T0 et T1 n’était pas significativement
différente pour les chiens du groupe A. Cependant, une amélioration statistiquement
significative a été observée entre T0 et T1 pour les chiens du groupe B. Les plus franches
améliorations du score de qualité de vie au sein du groupe B après 3 mois de traitement ont
pu être confirmées par l’amélioration associée de la classe fonctionnelle.
Les concentrations plasmatiques en noradrénaline de tous les chiens au début du traitement
ont révélé une corrélation positive modérée avec la classification fonctionnelle de
l’insuffisance cardiaque. Bien que les résultats aient indiqué une tendance à la diminution
des valeurs de noradrénaline plasmatique dans le groupe B après 3 mois de traitement,
aucune différence significative n’a été constatée.
Une baisse significative de la pression artérielle systolique a été observée pour le groupe B
entre T0 et T1. Les moyennes de pression artérielle diastolique n’ont pas montré de
différence significative entre T0 et T1 dans aucun des deux groupes.
Aucune différence significative des variables échocardiographiques étudiées n’a été
détectée entre T0 et T1 pour aucun des deux groupes.
Conclusions :
L’utilisation du carvedilol a permis une amélioration de la qualité de vie des animaux étudiés,
et de la classification fonctionnelle de leur insuffisance cardiaque, après 3 mois de
traitement à 0,3 mg/kg per os q12h.
Le carvedilol pourrait, de plus, exercer un effet anti-hypertenseur, illustré par la diminution
de pression artérielle systolique après 3 mois de traitement.
Le carvedilol semble donc présenter un intérêt dans le traitement de la MVD mitrale
conduisant à une insuffisance cardiaque.
Conclusions sur l’utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la MVD spontanée et
expérimentale chez le chien:
Lors de régurgitation mitrale expérimentalement induite, l’aténolol à des doses comprises
entre 3,7 mg/kg/j et 5,4 mg/kg/j per os a permis d’augmenter significativement le débit
systolique et la contractilité cardiaque. Cet effet bénéfique laisse présupposer son intérêt
dans le traitement de la MVD spontanée.
D’autre part, le carvedilol, administré à 0,3 mg/kg q12h pendant 3 mois a montré une
amélioration de la qualité de vie et une diminution de la classe fonctionnelle des chiens
insuffisants cardiaques lors de MVD mitrale spontanée. Il pourrait, de plus, exercer un
effet anti-hypertenseur, illustré par une diminution de la pression artérielle systolique.
67
68
3. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la myocardiopathie
hypertrophique (MCH) féline
La MCH est la cardiopathie acquise féline la plus fréquente. Elle représente plus de la moitié
des myocardiopathies diagnostiquées chez cette espèce (contre 20% pour les
myocardiopathies restrictives, et 10% à la fois pour les myocardiopathies dites non classées
et celles dites dilatées). La MCH peut survenir à n’importe quel âge, mais atteint
préférentiellement les adultes jeunes ou d’âge moyen, avec une prédominance nette des
mâles ([13]).
La MCH est caractérisée par un épaississement variable de la paroi ventriculaire gauche et
du septum interventriculaire, réduisant la taille des cavités ventriculaires concernées. Dans
2/3 des cas, l’épaississement est diffus, impliquant toute une paroi ventriculaire voire
l’ensemble du myocarde ventriculaire. Dans le 1/3 des cas restant, l’épaississement est
localisé à une région du myocarde ([18]). Lorsque l’hypertrophie se localise au niveau du
septum sous-aortique, et provoque une gêne à l’obstruction du sang vers l’aorte, la MCH est
dite obstructive (MCHO) ([59], [17]).
Les signes cliniques de MCH sont provoqués en grande partie par la dysfonction diastolique.
Elle correspond à une réduction du remplissage ventriculaire dû à une relaxation anormale,
avec diminution de la compliance du myocarde, à l’origine de pressions télédiastoliques
élevées dans le ventricule gauche (et réduction corrélative du débit systolique et de
l’éjection cardiaque) ([13]).
L’évolution de la MCH est variable, mais l’insuffisance cardiaque congestive est l’une des
issues cliniques fréquentes. Bien que les mécanismes conduisant à la décompensation
clinique ne soient pas totalement compris, un certain nombre de facteurs de risque ont été
suggérés, notamment la tachycardie et la présence d’une dilatation atriale.
Chez l’homme, des options de traitement chirurgical, interventionnel, et pharmacologique
existent, même si une majorité de patients (95%) ne sont traités que médicalement ([59]).
Chez le chat, le traitement de la MCH est seulement médical. Comme chez l’homme, la
réponse de chaque patient aux médications est très variable, et le choix des molécules les
plus bénéfiques n’a pas encore été standardisé.
Trois principales classes thérapeutiques sont utilisées lors de MCH féline afin d’améliorer la
fonction diastolique ([13]) : les IECA, les inhibiteurs calciques de la famille des
benzodiazépines (diltiazem), et les bêta-bloquants (aténolol, ou propranolol).
Lors de MCH, les bêta-bloquants sont utilisés pour leur effet sur la fonction diastolique et
l’ischémie, principalement par augmentation du temps de remplissage ventriculaire et
coronarien (action chronotrope négative). Ils sont indiqués lors de MCH avec tachyarythmie
majeure, arythmies ventriculaires, ou gradient sous-aortique systolique important. Le
propranolol est cependant déconseillé lors d’insuffisance cardiaque ([13]).
Le propranolol est utilisé à la dose de 0,1 à 1 mg/kg, 2 ou 3 fois par jour, per os, ou 2,5 à 10
mg par chat, 2 ou 3 fois par jour, en commençant par les faibles doses.
69
L’aténolol est utilisé à la dose de 0,2 à 1 mg/kg 1 ou 2 fois par jour, per os, ou 6,25 à 12,5 mg
par chat, 1 ou 2 fois par jour, en commençant par les faibles doses. Il est souvent préféré au
propranolol, car il réduit le risque de bronchospasme, et ne nécessite pas 3 prises par jour
([13]).
Chez les chats asymptomatiques, de nombreux cliniciens sont en faveur de l’utilisation de
bêta-bloquants, en particulier si une obstruction dynamique des voies d’éjection du
ventricule gauche est présente. Il y a cependant peu de données attestant que l’aténolol
limite l’obstruction aux voies d’éjection des chats à MCHO.
En revanche, certaines inquiétudes ont été soulevées en raison d’études réalisées chez
l’homme, indiquant que les bêta-bloquants pourraient provoquer des bradycardies
inappropriées, réduire la tolérance à l’effort, augmenter la taille de l’atrium gauche et
altérer sa fonction, réduire le remplissage du ventricule gauche, et favoriser le
développement de thrombi.
Enfin, le traitement médical précoce de la MCH féline est d’autant plus remis en cause que
de nombreux chats atteints de MCH restent asymptomatiques pendant de nombreuses
années, et ont souvent des durées de vie normales, qu’ils soient traités ou non ([47], [67]). Il
est donc extrêmement difficile d’évaluer l’effet bénéfique des traitements mis en place.
3.1. Données récentes concernant l’utilisation des bêta-bloquants dans le
traitement de la MCH
La seule étude prospective, en double aveugle, et contrôlée, comparant l’efficacité clinique
de l’aténolol, du diltiazem et de l’énalapril chez des chats atteints d’insuffisance cardiaque
n’a jamais été publiée. Les résultats intermédiaires apparaissant dans le résumé de
communication orale au congrès ACVIM de 2003 ([19]) révélaient que les chats recevant de
l’aténolol et du furosémide avaient une durée de survie significativement plus courte que les
chats traités seulement au furosémide.
De plus, ils indiquaient que le blocage bêta pourrait accélérer la réapparition d’un œdème
pulmonaire chez les chats ayant développé une insuffisance cardiaque à cause d’une MCH
ou d’une myocardiopathie restrictive (MCR). Ceci suggère qu’un blocage bêta pourrait avoir
des effets néfastes sur les chats présentant l’une de ces cardiopathies ([5]). Cependant, lors
de la présentation orale de cette étude, des résultats plus encourageants avaient été
évoqués.
Au Congrès de l’American College of Veterinary Medicine en 2000 ([71]), une
communication portant sur l’efficacité comparative du diltiazem et de l’esmolol sur la
réduction de vitesse du flux éjectionnel ventriculaire gauche et de la fréquence cardiaque
des chats atteints de MCH avait été présentée. Celle-ci mettait en évidence que l’esmolol,
utilisé par voie intraveineuse, réduisait significativement la fréquence cardiaque ainsi que la
vitesse du flux sanguin dans les voies d’éjection du ventricule gauche. Le diltiazem, quant à
lui, ne réduisait cette dernière que dans une moindre mesure. La pression artérielle n’avait
cependant pas été mesurée lors de cette étude, et était susceptible d’influencer les résultats
obtenus pour les vitesses d’éjection.
70
Face à ce manque de preuves et de données cliniques, il a été choisi de développer ici une
étude récente, proposant une approche nouvelle pour l’étude de l’efficacité des bêtabloquants dans le traitement de la MCH féline.
3.2. Effets de l’aténolol sur le NT-proBNP et la Troponine chez des chats
asymptomatiques atteints de myocardiopathie hypertrophique ([26])
Il s’agit d’une étude réalisée par Jung et Kittleson à l’Université de Davis en Californie, en
2011. Elle a été publiée dans le Journal of Veterinary Internal Medicine la même année.
L’ischémie myocardique qui se produit lors de MCH semble jouer un rôle important dans
l’évolution de la cardiopathie, par la production d’une myocytolyse, et le remplacement du
tissu lésé par de la fibrose, dont l’accumulation participe à la dysfonction diastolique. La
preuve d’une nécrose continue des myocytes chez les chats atteints de MCH grave a été
apportée par des études antérieures à celle présentée ici, montrant que la concentration de
Troponine I cardiaque (cTnI) était systématiquement augmentée chez ces chats ([22]).
L’aténolol, antagoniste adrénergique β1-sélectif, a été utilisé de manière empirique pendant
des décennies pour traiter les chats atteints de MCH avant l’installation de l’insuffisance
cardiaque.
Chez l’homme, et dans une moindre mesure chez le chien et le chat, les biomarqueurs
cardiaques ont joué un rôle non négligeable dans la détection précoce des maladies
subcliniques, la prédiction d’un pronostic à long terme et le suivi des modifications
hémodynamiques et thérapeutiques en réponse à un traitement.
L’augmentation de la Troponine I cardiaque circulante est hautement sensible et spécifique
d’une nécrose myocardique. Elle permet d’établir un diagnostic de lésion myocytaire
permanente et constitue un indicateur pronostique ([26]).
Le pro-BNP est sécrété en réponse à divers facteurs, en particulier l’augmentation de tension
de la paroi myocardique. Plus récemment, l’ischémie myocardique a été identifiée comme
un stimulus pour sa libération. Le BNP a une demi-vie courte car il est rapidement dégradé,
tandis que le NT-proBNP est dégradé plus lentement et a une demi-vie plus longue. C’est
donc celui qu’on utilise pour les tests diagnostiques. Il est utilisé en clinique afin d’identifier
les maladies cardiaques affectant la tension myocardique, ou provoquant une ischémie, et
apporte des éléments pour le pronostic à long terme.
Il a été précédemment rapporté que les concentrations en cTnI et NT-pro-BNP étaient toutes
deux accrues chez les chats présentant divers degrés de sévérité de MCH ([22]).
Dans l’hypothèse où l’administration au long cours d’aténolol à des chats atteints de MCH
graves aurait des effets bénéfiques sur l’ischémie myocardique et/ou la nécrose des
myocytes, les concentrations circulantes de NT-proBNP et/ou cTnI seraient diminuées suite à
ce traitement.
71
Protocole d’étude :
Six chats de race Maine Coon ou croisés Maine Coon, pesant de 3,8 à 5 kg (avec une
médiane de 4,5 kg), issus d’une colonie de recherche, asymptomatiques mais présentant une
MCH significative, ont été inclus.
Le diagnostic de MCH a été établi par examen échocardiographique, mettant en évidence
une augmentation d’épaisseur de la paroi libre ventriculaire gauche ou du septum
interventriculaire en diastole (supérieure à 6 mm), en coupe petit axe transventriculaire
obtenue par voie parasternale droite. Toute maladie concomitante pouvant avoir une
influence sur cette mesure (en particulier une insuffisance rénale ou une hyperthyroïdie, à
l’origine d’une hypertension systémique) constituait un critère d’exclusion des chats de
l’étude.
La gravité de la MCH était définie par l’importance de l’hypertrophie concentrique du
ventricule gauche : lorsque la paroi libre du ventricule gauche ou du septum
interventriculaire en diastole avait une épaisseur supérieure à 7 mm, ou lorsqu’un
épaississement marqué des muscles papillaires était observé.
Les 6 chats ont été traités par 12,5 mg d’aténolol per os q12h pendant 30 jours. La médiane
d’âge de ces chats au moment de l’étude était de 11 ans ([8-14ans]), ils comportaient 4
mâles et 2 femelles.
Résultats :
Les concentrations initiales de NT-proBNP et cTnI étaient supérieures aux valeurs de
référence chez tous les chats de l’étude. Les concentrations des deux biomarqueurs étaient
très variables d’un chat à l’autre, avec des facteurs allant jusqu’à 10 ou 20.
Une corrélation positive entre les concentrations de NT-proBNP et de cTnI a été mise en
évidence au cours de cette étude.
Il n’y a pas eu de différence significative identifiée pour chaque biomarqueur entre la valeur
initiale et la valeur après traitement. Pour un chat, la concentration en NT-proBNP a été
doublée après un mois d’aténolol ; pour deux chats, les concentrations ont diminué pour
rejoindre les valeurs de référence, mais sans que ces changements aient une pertinence
clinique. Le traitement prolongé à l’aténolol a donc été sans effet sur la libération de NTproBNP et cTnI chez ces chats, et n’a pas permis de limiter cette libération.
La limite majeure de cette étude est qu’elle n’a porté que sur 6 chats.
72
Conclusions :
Les concentrations initiales de NT-proBNP et cTnI étaient supérieures aux valeurs de
référence chez tous les chats de l’étude, atteints de MCH.
Les concentrations en NT-proBNP et cTnI n’ont pas été modifiées de manière significative
par l’administration prolongée d’aténolol.
Ceci suggère que le traitement des chats atteints de MCH asymptomatique par l’aténolol per
os (12,5 mg/chat q12h) durant un mois a peu ou pas d’effet bénéfique sur l’ischémie
myocardique (pas de diminution du NT-proBNP) ou la mort des myocytes induite par
l’ischémie (pas de modification de la cTnI).
Conclusions concernant l’utilisation des bêta-bloquants pour le traitement de la MCH
féline :
Il y a actuellement très peu d’études sur cette thématique, et aucun consensus n’a été
publié sur l’utilisation des bêta-bloquants pour la MCH féline.
Le traitement pendant un mois des chats atteints de MCH asymptomatique par l’aténolol
(12,5 mg/chat q12h) n’a pas d’effet sur les valeurs des concentrations plasmatiques en NTproBNP et cTnI.
73
74
4. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement des sténoses aortiques et
pulmonaires canines
Il existe trois formes de sténoses aortiques : les sténoses supra-valvulaires, valvulaires, et
sous-valvulaires. La sténose sous-aortique est la forme la plus fréquente chez le chien. La
lésion correspond généralement à un anneau ou un bourrelet de tissu fibreux ou fibromusculaire, situé juste en dessous de la valve aortique, et se prolongeant à travers ou
encerclant la chambre de chasse du ventricule gauche ([28]). Une obstruction dynamique de
la chambre de chasse du ventricule gauche peut accompagner l’obstruction adynamique
chez certains chiens ([43]).
La sténose aortique sous-valvulaire est une maladie cardiaque congénitale et héréditaire
affectant un certain nombre de chiens de grandes races, comme les Terre-neuves, les
Golden Retrievers, les Boxers, les Bergers Allemands, et les Rottweilers. Les chiens atteints
sont susceptibles de présenter une intolérance à l’effort, des syncopes, et une mort
prématurée (avec risque de mort subite) suite à leur cardiopathie.
Les sténoses aortiques sont classées en trois catégories, en fonction de la gravité de la
sténose et de ses conséquences sur le gradient de pression systolique (entre l’aorte et le
ventricule gauche). Ainsi, les sténoses très modérées engendrent un gradient de pression
compris entre 15 et 35 mmHg, les sténoses modérées entre 36 et 80 mmHg, et les sténoses
graves sont celles dont le gradient de pression systolique est supérieur à 80 mmHg.
4.1. Influence de l’utilisation des bêta-bloquants sur la durée de survie des
chiens atteints de sténoses aortiques sous-valvulaires
L’étude de Kienle, Thomas et Pion ([28]) est une analyse rétrospective de 195 cas de
sténoses aortiques sous-valvulaires diagnostiqués à l’Université Davis en Californie de 1967 à
1991. Elle a été publiée dans le Journal of Veterinary Internal Medicine en 1994.
Quatre-vingt seize de ces cas n’ont pas été traités et étaient disponibles pour les évaluations
de suivi. Cette étude a permis d’établir le pronostic de survie à long terme des chiens
atteints de sténose aortique sous-valvulaires sans traitement, et ce en fonction de la gravité
de la sténose. Ainsi, le pronostic à long terme pour les chiens atteints de sténose sousaortique très modérée ou modérée est favorable (médiane de survie de 30,5 mois et 51,1
mois respectivement), tandis que le pronostic pour les chiens atteints de sténose sousaortique grave est très réservé (médiane de survie de 18,9 mois).
La moyenne d’âge au moment du diagnostic était de 18,3 mois, et la médiane de 7,0 mois.
Au total, 69% des diagnostics étaient établis sur des chiens d’âge inférieur à 12 mois, et
seulement 19% chez des chiens de plus de 2 ans.
Parmi les 96 chiens non traités, 81 (84,4%) étaient asymptomatiques lors du premier
examen, et étaient évalués du fait de la présence d’un souffle cardiaque.
Le tableau 8 indique les durées de survie des 96 chiens, entre la naissance et le décès ou le
dernier suivi.
75
Tableau 8 : Durée de survie de 96 chiens atteints de sténose sous-aortique et non traités,
d’après Kienle et al. [28]
Issue lors du dernier suivi
Vivants
- Asymptomatiques
- Symptomatiques
Décédés
- Euthanasiés
- Mort subite
- Complications
- Autre cause de décès
Nombre de
chiens (%)
43 (44,8)
33 (34,4)
10 (10,4)
53 (55,2)
10 (10,4)
21 (21,9)
7 (7,3)
15 (15,6)
Médiane de
survie (mois)
51,1
49,7
68,9
13,7
3,9
14,4
103
21,6
Valeurs de
survie (mois)
6,8-132
6,8-132
17,8-102
2,3-204
2,7-10,1
2,3-105
11,8-151
3,9-204
Au moment du dernier contact de suivi, 43 chiens (44,8%) étaient vivants et 53 chiens
(55,2%) étaient décédés. Parmi ceux-ci, 28 étaient décédés ou avaient été euthanasiés à
cause de leur cardiopathie, 10 avaient été euthanasiés au moment du diagnostic, et 15
étaient décédés d’une autre cause non liée à la cardiopathie.
Les données des gradients de pression entre le ventricule gauche et l’aorte pour 58 de ces 96
chiens sont regroupées dans le tableau 9 :
Tableau 9 : Gradients de pression entre le ventricule gauche et l’aorte pour 58 des chiens de l’étude
(Kienle et al. [28])
Issue
Nombre de
chiens
Vivants
- Asymptomatiques
- Symptomatiques
Décédés
- Euthanasiés
- Mort subite
- Complications
- Autre cause de décès
30
24
6
28
8
12
3
5
Médiane de
gradient de
pression
(mmHg)
36,5
34,5
71,5
100
100
103
20
36
Valeurs de
gradients de
pression
(mmHg)
16,0-100
16,0-92,0
50,0-100
16,0-175
23,0-145
18,0-175
16,0-48
32,0-144
Le gradient de pression médian entre le ventricule gauche et l’aorte chez les 58 chiens non
traités était de 49 mmHg ([16-175], moyenne de 63,4 mmHg). Lors du suivi, 30 de ces chiens
étaient toujours vivants (6 symptomatiques), 12 étaient morts subitement, 3 étaient morts
de complications cardiaques, 3 d’autres causes, et 10 avaient été euthanasiés.
L’évaluation de la gravité de la sténose comme facteur de risque pour le développement de
signes cliniques (incluant la mort subite) a montré que les patients atteints de sténose sous76
aortique grave (gradient de pression systolique supérieur à 80 mmHg) avaient 16 fois plus de
probabilité de mourir soudainement, et 11,6 fois plus de probabilité de développer des
signes cliniques que les chiens atteints de sténoses très modérées (15 à 35 mmHg) ou
modérées (36 à 80 mmHg).
La durée de survie médiane pour l’ensemble des 86 chiens était de 40,5 mois ([2,3-204],
moyenne de 49,7 mois). La médiane de durée de survie du groupe des sténoses graves (18,9
mois) était significativement plus courte que celle du groupe des sténoses modérées
(51,1mois), et il n’y avait pas de différence entre les groupes des sténoses très modérées et
modérées.
L’étude rétrospective d’Orton et al. ([43]) recense 44 cas de sténose sous aortique
diagnostiqués entre 1991 et 1998 à l’Université Vétérinaire du Colorado aux Etats-Unis. Elle
a été publiée dans le Journal of American Veterinary Medical Association en 2000.
Parmi ces 44 cas, 22 ont été traités chirurgicalement (opération à coeur ouvert :
membranectomie avec ou non myectomie septale), et les 22 autres n’ont pas subi
d’intervention. Les 22 chiens non traités chirurgicalement ont reçu un traitement médical
bêta-bloquant au long cours : de l’aténolol à une dose comprise entre 0,7 et 1,2 mg/kg, per
os, q24h. Les chiens traités chirurgicalement ont également reçu ce traitement médical à
l’aténolol.
Les durées de vie cumulatives ont été comparées entre ces deux groupes (il n’y avait pas de
groupe contrôle non traité).
Résultats :
Les durées de survie n’étaient pas significativement différentes entre le groupe de chiens
ayant subi la correction chirurgicale et traité par l’aténolol et le groupe traité seulement
médicalement. Les valeurs ne sont pas indiquées dans la publication, mais il est précisé que
comparativement aux résultats de survie de l’étude de Kienle et al. ([28]), les médianes de
survie sont plus longues, en particulier pour les chiens atteints de sténose très serrée, ce qui
suggère un effet bénéfique de l’administration de ce bêta-bloquant.
Par la suite, l’étude de Meurs et al. ([35]) a comparé la durée de survie de chiens
atteints de sténose sous-aortique et traités soit par valvuloplastie par dilatation au
ballonnet, soit par l’aténolol au long cours. Les chiens étaient atteints de sténose sousaortique très serrée (pic de gradient de pression systolique ≥ 80 mmHg), et étaient
réexaminés annuellement pendant 9 ans ou jusqu’à leur décès.
Parmi les 38 chiens de l’étude, 10 ont subi une valvuloplastie par dilation au ballonnet et ont
été réexaminés à 6 semaines, afin de déterminer la faisabilité de la procédure. Les 28 chiens
restants ont été répartis au hasard pour subir cette même opération (n=15) ou être traités à
l’aténolol à long terme (n=13).
77
L’aténolol était administré par comprimés de 25 mg, ce qui correspondait à des doses de 0,5
à 1,5 mg/kg per os, q12h (moyenne de 0,85 mg/kg q 12h).
L’âge moyen des chiens au moment de l’initiation du traitement par l’aténolol était de 11 +/5,5 mois ([5-24 mois]). Le pic moyen de gradient de pression systolique avant la mise en
place du traitement à l’aténolol était de 122 +/- 41 mmHg ([80-215 mmHg]). Le pic moyen du
gradient de pression systolique après 6 semaines de traitement à l’aténolol était de 113 +/46mmHg ([50-200 mmHg]). Il n’était pas diminué significativement par rapport au gradient
avant traitement.
Au moment où l’étude a été achevée, 21 des 28 chiens (75%) pour lesquels des informations
de suivi à long terme avaient été obtenues étaient décédés.
Sur les 15 chiens ayant subi une valvuloplastie par dilatation au ballonnet, 9 étaient morts
subitement, 3 d’insuffisance cardiaque congestive, et 1 d’endocardite. Les 2 chiens restants
étaient toujours en vie, et étaient âgés de 52 et 108 mois à la fin de l’évaluation.
Sur les 13 chiens traités à l’aténolol, 5 étaient morts subitement et 3 d’insuffisance
cardiaque congestive. Les 5 chiens restants étaient toujours vivants, et âgés entre 40 et 70
mois.
La médiane de survie des chiens traités par valvuloplastie (55 mois [12-108 mois]) n’était pas
significativement différente de celle des chiens traités par l’aténolol (56 mois [10-99]). Cette
étude ne comportait pas de groupe contrôle avec des chiens non traités.
Cependant, la médiane de survie obtenue lors de l’étude de Kienle et al. ([28]) n’était que de
19 mois pour les chiens atteints de sténose sous-aortique très serrée. Il semblerait donc à
nouveau que le traitement par l’aténolol (comme le traitement par valvuloplastie par
dilatation au ballonnet) ait un effet bénéfique sur la durée de survie des animaux atteints de
sténose sous-aortique.
Par ailleurs, les doses d’aténolol utilisées dans cette étude ont été bien tolérées. Une des
limites de cette étude demeure néanmoins la gamme relativement large de dosages
employés, qui pourraient jouer un rôle dans l’évolution de la cardiopathie et donc conduire à
des résultats hétérogènes.
Conclusions :
L’administration au long cours d’un traitement bêta-bloquant comme l’aténolol semble avoir
un effet bénéfique sur la durée de survie des chiens atteints de sténose sous-aortique, et
particulièrement chez ceux qui présentent une sténose grave.
Les différents traitements chirurgicaux comparés à ce traitement médical (intervention à
cœur ouvert sous circulation extra-corporelle et valvuloplastie par dilatation au ballonnet)
ne semblent pas apporter de bénéfice supplémentaire par rapport au traitement médical
par un bêta-bloquant.
78
4.2. Influence de l’utilisation des bêta-bloquants sur la durée de survie des
chiens atteints de sténoses pulmonaires
La sténose pulmonaire est considérée comme la troisième cardiopathie congénitale du chien
en terme de prévalence. Comme dans le cas des sténoses aortiques, les chiens ayant un
gradient de pression supérieur à 80 mmHg ont été classés comme atteints de sténose grave,
et présentent des risques de développer une insuffisance cardiaque droite, pouvant se
traduire par une ascite et des signes cliniques d’intolérance à l’effort, des syncopes, ainsi que
des risques de mort subite. La valvuloplastie par dilatation au ballonnet est le meilleur
traitement disponible dans ce cas. Elle est recommandée dans les cas graves associés à une
hypertrophie ventriculaire droite modérée à grave, ou lorsque les chiens atteints sont
symptomatiques ([25]).
L’étude de Johnson et al. ([25]) a été publiée dans le Journal of Veterinary Internal Medicine
en 2004. Elle comportait 81 chiens, dont 40 ont subi une dilatation par ballonnet, tandis que
41 n’en ont pas subi. Les chiens ayant subi la valvuloplastie étaient traités par un bêtabloquant (aténolol à 1 mg/kg per os q12h) au moins 2 semaines avant l’opération. Ce bêtabloquant était maintenu au moins 6 mois après la valvuloplastie par dilatation au ballonnet,
et jusqu’à la visite de contrôle. Le traitement médical était alors arrêté, sauf si les résultats
de l’intervention étaient considérés comme insatisfaisants, et qu’il y avait des signes
d’obstruction dynamique de la chambre de chasse du ventricule droit, en raison d’une
hypertrophie persistante myocardique droite.
Sur les 41 chiens n’ayant pas subi de valvuloplastie par dilatation au ballonnet, 13 ont été
traités durablement à l’aténolol à 1 mg/kg per os q 12h. Ils ont subi des échocardiographies
de contrôle aussi souvent que possible (intervalles non indiqués dans l’étude).
Un suivi a été disponible pour les 41 chiens n’ayant pas subi de valvuloplastie, avec un âge
médian de survie au dernier suivi de 46 mois. Vingt de ces chiens (49%) sont restés
asymptomatiques jusqu’à ce dernier contrôle, et 14 des chiens symptomatiques (34%) sont
décédés ou ont été euthanasiés des suites de leur cardiopathie.
La valvuloplastie par dilatation au ballonnet n’a pas eu d’effet significatif sur la durée de
survie des animaux. Les facteurs de risque pour le décès lié à la sténose pulmonaire étaient
le gradient de pression, l’hypertrophie ventriculaire droite, et la régurgitation de la valve
tricuspide. Les chiens ayant présenté des signes cliniques lors de l’examen d’admission
avaient un risque 16 fois plus important de décès par rapport aux chiens asymptomatiques.
L’âge, le sexe, et l’usage de bêta-bloquants n’étaient pas significativement associés avec la
durée de survie.
Conclusions :
Cette étude ne permet pas de conclure à un effet bénéfique de l’administration d’aténolol à
long terme sur la durée de survie des chiens atteints de sténoses pulmonaires.
79
Conclusions sur l’administration de bêta-bloquants pour le traitement des sténoses
aortiques et pulmonaires du chien :
L’administration au long cours d’un traitement bêta-bloquant comme l’aténolol semble
avoir un effet bénéfique sur la durée de survie des chiens atteints de sténose sousaortique, et particulièrement chez ceux qui présentent une sténose grave. Il manque
cependant des études comparant le traitement médical à un groupe non traité pour
confirmer cette observation.
Les différents traitements chirurgicaux comparés à ce traitement médical (correction
chirurgicale ouverte et valvuloplastie par dilatation au ballonnet) ne semblent pas
apporter de bénéfice supplémentaire par rapport au traitement médical par un bêtabloquant.
L’efficacité d’un traitement par les bêta-bloquants pour augmenter la durée de survie des
chiens atteints de sténose pulmonaire n’a pas été démontrée.
80
5. Utilisation des bêta-bloquants pour le traitement de l’insuffisance
cardiaque
Lors d’insuffisance cardiaque, la baisse du débit cardiaque entraîne une forte stimulation
sympathique. Cette dernière se traduit par une augmentation de la fréquence et de la
contractilité cardiaques, ainsi que de la consommation du myocarde en oxygène. Elle
provoque également une désensibilisation de la cellule en récepteurs β1 myocardiques
(« down regulation » ou régulation négative). Ces mécanismes, tout d’abord compensateurs,
deviennent rapidement délétères : ils augmentent l’ischémie de la cellule myocardique et
perturbent ses échanges ioniques. Ce phénomène favorise la fibrose et l’apoptose (mort
cellulaire programmée) et altère la fonction ventriculaire, ce qui aggrave l’insuffisance
cardiaque ([9]). Les bêta-bloquants, par leur action antagoniste sur les récepteurs β
myocardiques, limitent les actions et les conséquences de ces phénomènes compensateurs
délétères, ce qui améliore la fonction cardiaque.
Chez l’homme, les bêta-bloquants sont devenu un traitement incontournable des patients
insuffisants cardiaques. Un large programme d’études cliniques ([10, 46]) a testé l’effet du
carvedilol et a montré sa capacité à augmenter la durée de survie des patients insuffisants
cardiaques, principalement ceux atteints de MCD. D’autres études ont documenté de
nombreuses améliorations cliniques incluant l’augmentation de la fraction d’éjection, une
progression retardée du remodelage cardiaque, une augmentation de la densité des
récepteurs β, et une augmentation de la durée de vie ([4]). L’utilisation des bêta-bloquants
chez l’homme permet aussi un recours moins fréquent aux hospitalisations du fait de
l’aggravation de l’insuffisance cardiaque, une diminution de la classification fonctionnelle
NYHA de l’insuffisance cardiaque (annexe 1), et une amélioration du bien être et de la
qualité de vie ([4]). Enfin, de nombreuses études chez l’homme ([1, 31]) ont mis en relation
l’augmentation des concentrations de noradrénaline avec la létalité.
5.1. Mise en évidence des modifications au sein du système sympathique lors
d’insuffisance cardiaque
L’insuffisance cardiaque congestive est caractérisée par une augmentation des résistances
vasculaires périphériques et une tachycardie, résultant des activations neuro-hormonales du
système nerveux sympathique et du système rénine-angiotensine-aldosterone.
Cette étude réalisée par Uechi et al. ([68]) en 2002 a été publiée dans le Journal of
Veterinary Medical Science. Elle a permis de comparer les concentrations plasmatiques de
catécholamines et la fréquence cardiaque de chiens présentant une régurgitation mitrale
induite expérimentalement, de chiens atteints de diverses cardiopathies spontanées (MCD,
insuffisance valvulaire, dirofilariose), et de chiens sains.
Les critères d’inclusion au groupe des chiens atteints de cardiopathie étaient la présence
d’un souffle cardiaque, et les critères échocardiographiques d’une maladie cardiaque. Les
chiens étaient définis comme insuffisants cardiaques s’ils manifestaient des signes de
léthargie, une toux nocturne, une dyspnée lors de stress, une fréquence cardiaque
81
augmentée, une congestion pulmonaire et/ou un œdème pulmonaire lors de l’examen
clinique. Aucun chien n’a reçu de traitement.
Trente-deux chiens (15 femelles et 17 mâles), atteints de cardiopathies, de races variées et
âgés de 1 à 18 ans ont été inclus. Les chiens ont été classés selon la classification ISACHC
(annexe 2). Onze chiens ont servi de contrôle.
Résultats :
La fréquence cardiaque au repos était significativement plus élevée chez les chiens à
régurgitation mitrale (116 +/- 30 bpm) que chez les chiens du groupe contrôle (71 +/- 2
bpm).
La concentration en noradrénaline au repos était significativement plus haute chez les chiens
à régurgitation mitrale (443 +/- 151 pg/mL) que chez les chiens du groupe contrôle (173 +/54 pg/mL). La concentration en adrénaline au repos était significativement plus haute chez
les chiens à régurgitation mitrale (454 +/- 121 pg/mL) que chez les chiens du groupe contrôle
(229 +/- 33 pg/mL). Les concentrations en adrénaline et en noradrénaline au repos étaient
analogues dans le sang artériel et dans le sang veineux.
Les fréquences cardiaques étaient significativement plus élevées chez les insuffisants
cardiaques de grade Ib (129 +/- 26 bpm), de grade II (144 +/- 28 bpm) et de grade III (153 +/20 bpm) que chez les chiens contrôles (87 +/- 23 bpm).
Les concentrations en noradrénaline étaient aussi significativement plus élevées chez les
chiens de grade Ib, II et III que chez les chiens du groupe contrôle. En revanche, les
concentrations en adrénaline ne différaient pas significativement entre le groupe contrôle,
les chiens de grade Ib, II et III.
Conclusions :
Les augmentations des concentrations plasmatiques en catécholamines et de la fréquence
cardiaque au repos chez les chiens atteints d’insuffisance cardiaque spontanée dépendent
du degré de l’insuffisance cardiaque. L’activation chronique du système sympathique
provoque une augmentation durable de la fréquence cardiaque, qui implique un pronostic
défavorable pour l’animal. Bien que la stimulation sympathique soit considérée comme
bénéfique à court terme, elle est reconnue comme délétère à plus long terme.
Les augmentations de l’activité du système nerveux sympathique lors d’insuffisance
cardiaque laissent penser que l’utilisation d’un traitement bloquant des récepteurs
adrénergiques β pourrait être bénéfique, et que ce traitement pourrait être suivi par la
mesure des différentes neuro-hormones impliquées dans la progression de l’insuffisance
cardiaque.
82
5.2. Utilisation du metoprolol chez des chiens insuffisants cardiaques suite à
une MCD ou une MVD
L’action des bêta-bloquants étant variable en fonction du tonus sympathique préalable de
chaque patient, les effets indésirables de ces molécules seront principalement observés chez
les animaux tributaires de cette stimulation sympathique pour le maintien de leur débit
systolique (c'est-à-dire les animaux en insuffisance cardiaque aiguë ou en choc). Les effets
inotrope et chronotrope négatifs des bêta-bloquants peuvent en effet contribuer à
l’aggravation de l’insuffisance cardiaque congestive. Les bêta-bloquants pourraient donc
être davantage adaptés aux animaux les moins symptomatiques, lors d’insuffisance
cardiaque débutante, ou aux animaux à des stades plus avancés mais déjà stabilisés par un
traitement cardiaque.
Cette étude rétrospective de Rush et al. ([56]) a été publiée en 2002 dans le Journal of
Veterinary Cardiology. Elle a porté sur 87 chiens atteints de MVD ou de MCD, suivis à
l’Université Vétérinaire de Tufts dans le Massachusetts, et ayant été traités au metoprolol
entre 1991 et mai 2000. Son objectif était d’évaluer les effets indésirables du metoprolol, et
les évolutions cliniques de ces chiens.
Protocole d’étude :
Tous les chiens atteints de MVD ou MCD ayant reçu du metoprolol entre 1991 et mai 2000
ont été inclus dans l’étude. Ils ont été classés en deux groupes : insuffisants cardiaques ou
non insuffisants cardiaques, selon la présence d’œdème pulmonaire, d’épanchement
pleural, ou d’ascite d’origine cardiogénique.
Le metoprolol était mis en place en association avec d’autres molécules de traitement
cardiaque, à des doses faibles (0,2 à 0,4 mg/kg q12h), et était augmenté graduellement
pendant plusieurs semaines en fonction des besoins, jusqu’à 0,4 à 0,8 mg/kg q12h.
Les animaux insuffisants cardiaque de classe IV de la classification NYHA étaient le plus
souvent hospitalisés et traités pour leur insuffisance cardiaque. Puis, le metoprolol était
ajouté, une fois que les signes cliniques étaient améliorés et que les patients étaient atteints
d’une insuffisance cardiaque de classe inférieure ou égale à III. (Il n’est pas recommandé de
mettre en place cette médication chez les insuffisants cardiaques de classe IV).
Résultats :
Quatre-vingt sept chiens atteints de cardiopathie ont été traités par le metoprolol. Une
arythmie a été retrouvée chez 53 des 64 chiens atteintes de MCD, et chez 8 des 23 chiens
atteints de MVD.
La dose médiane finale du metoprolol était de 0,86 mg/kg/j ([0,15-3,33]). La dose médiane
finale était significativement plus basse chez les chiens atteints de MCD (0,82 mg/kg/j [0,153,06]) que chez les chiens atteints de MVD (1,12 mg/kg/j [0,29-3,33]). Le metoprolol était
administré le plus souvent toutes les 12h (n=77), mais parfois toutes les 24h (n=2) ou toutes
83
les 8h (n=8). Tous les chiens recevaient au moins un autre médicament à effets cardiaques
que le metoprolol (furosémide, digoxine, ou IECA).
Les informations de suivi ont été disponibles pour 84 des 87 chiens étudiés. La durée du
traitement était variable, allant de 1 à 3094 jours (médiane de 181 jours), mais il n’y avait
pas de différence significative de durée de traitement entre les chiens atteints de MCD et
ceux atteints de MVD.
Le metoprolol a été interrompu chez 22 chiens à cause d’effets secondaires, liés à la
réapparition de l’insuffisance cardiaque, ou suite à une mauvaise observance du traitement
par les propriétaires. Treize chiens ont présenté des effets indésirables connus ou suspectés
du metoprolol. Ceux-ci comprenaient des syncopes (n=4), une insuffisance cardiaque (n=2),
des diarrhées (n=2), une faiblesse (n=1), une alopécie (n=1) et une agressivité (n=1). Il n’y
avait pas de différence significative entre les chiens atteints de MCD ou de MVD concernant
les effets indésirables, ni entre les chiens atteints ou non atteints d’insuffisance cardiaque.
Le taux total d’effets indésirables était de 16%.
La durée médiane entre la mise en place du metoprolol et le premier examen de contrôle
était de 40 jours ([1-1284]). La moyenne des classes d’insuffisance cardiaque des chiens de
l’étude (classification NYHA) n’était pas significativement différente après le traitement au
metoprolol par rapport au premier examen après mise en place du traitement.
Une réduction de la fréquence cardiaque minimale mesurée a été observée entre la visite
initiale (136 bpm) et la première visite de contrôle (120 bpm). La baisse de fréquence
cardiaque était significative chez les chiens atteints de MCD mais pas chez les chiens atteints
de MVD.
Il n’y avait pas de différences significatives de mesures échocardiographiques (incluant les
volumes télésystolique et télédiastolique du ventricule gauche, et la fraction de
raccourcissement) entre les deux études échocardiographiques (avant et pendant le
traitement au metoprolol).
Les données sur la survie des patients ont été obtenues pour 80 des 87 chiens de l’étude.
La survie entre le diagnostic de la cardiopathie et le décès (ou l’arrêt de l’étude, pour les
chiens toujours en vie au moment du recueil des données) allait de 4 à 3147 jours (médiane
de 347 jours).
La médiane de survie entre l’initiation du traitement au metoprolol et le décès (ou l’arrêt de
l’étude, pour les chiens toujours en vie au moment du recueil des données) était de 244
jours ([4-3094]), et n’était pas significativement différente entre les chiens atteints de MCD
et les chiens atteints de MVD, ni entre les chiens avec ou sans insuffisance cardiaque.
84
Conclusions :
L’administration de metoprolol s’est accompagnée de peu d’effets secondaires (taux global
de 16%) aux doses utilisées (médiane de 0,86 mg/kg/j), et l’existence d’une insuffisance
cardiaque n’a pas favorisé l’apparition d’effets indésirables. Cependant, le metoprolol n’a
été initié que chez les chiens atteints d’une insuffisance cardiaque allant jusqu’à la classe III
de la classification NYHA (ou non insuffisants cardiaques).
Une réduction de la fréquence cardiaque a été observée entre la visite initiale et la première
visite de contrôle. La baisse de fréquence cardiaque était significative chez les chiens atteints
de MCD mais pas chez les chiens atteints de MVD.
Aucune différence significative de mesure échocardiographique (incluant les volumes
télésystolique et télédiastolique du ventricule gauche, et la fraction de raccourcissement) n’a
été constatée entre les deux études échocardiographiques (avant et pendant le traitement
au metoprolol).
L’absence de groupe contrôle (non traités au metoprolol) ne permet pas de conclure quant
aux effets du metoprolol sur la durée de survie des patients.
5.3. Effets du traitement au carvedilol sur des chiens insuffisants cardiaques
suite à une MVD mitrale
L’étude de Marcondes et al. ([33]) citée dans le paragraphe II.2.2.2. (p 63) concernait 25
chiens pour lesquels un diagnostic de MVD mitrale avait été établi. Seuls les chiens
présentant une régurgitation mitrale modérée à grave et une dilatation atriale gauche
avaient été choisis, et répartis dans les classes I à IV de la grille NHYA, suivant la gravité des
signes d’insuffisance cardiaque. (Se reporter aux conclusions sus-citées).
Conclusion sur l’utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de l’insuffisance
cardiaque chez le chien :
Le metoprolol à des doses de 0,2 à 0,4 mg/kg q12h n’a pas permis d’observer de
modifications échocardiographiques entre l’examen avant traitement et le premier
examen de suivi. Ces deux examens n’étaient pas toujours réalisés après une même durée
de traitement au metoprolol.
L’utilisation du carvedilol à la dose de 0,3 mg/kg q 12h a permis d’observer une
amélioration de la qualité de vie des patients, associée à une amélioration de la
classification fonctionnelle de l’insuffisance cardiaque, après 3 mois de traitement.
Le carvedilol semble de plus présenter un effet anti-hypertenseur. Il s’agit donc pour le
moment de la molécule de choix dans le traitement de l’insuffisance cardiaque due à une
MCD ou une MVD chez le chien.
85
86
6. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement des arythmies
Parmi leurs diverses propriétés, les bêta-bloquants constituent les anti-arythmiques de
classe II selon la classification de Vaughan-Williams. Ils agissent par dépression de la
conduction calcico-sodique au cours de la phase 2 du potentiel d’action de la cellule
cardiaque (figure 16). A forte dose, ils dépriment également l’entrée du sodium pendant la
phase 0 et la sortie du potassium pendant la phase 4. Ils sont donc indiqués lors de troubles
du rythme supraventriculaire et ventriculaire ([9]). Les principaux anti-arythmiques de classe
II utilisés chez le chien et le chat sont le propranolol et l’aténolol, mais le metoprolol,
l’esmolol et le pindolol font également partie de cette catégorie.
Enfin, le sotalol fait partie des anti-arythmiques de classe III. La classe III regroupe des
molécules qui ont pour effet principal d’allonger la durée du potentiel d’action et celle de la
période réfractaire, par action sur les canaux potassiques des phases 3 et 4. Le sotalol est à
la fois bloquant bêta-adrénergique, et inhibiteur des canaux potassiques. Il est généralement
utilisé à des doses comprises entre 1,5 et 2,5 mg/kg q12h, et administré per os. Il est
fortement excrété et semble présenter un risque pro-arythmique assez bas. Comme pour
d’autres bêta-bloquants, il peut être préconisé d’employer des doses plus faibles (50% de la
dose) si une dysfonction myocardique est présente. Ainsi, les principaux effets indésirables
(baisse d’inotropisme, bradycardie, hypotensions, faiblesse, et blocs atrioventriculaires)
seront évités, ou plus facilement contrôlés.
Figure 16 : Sites d’action des anti-arythmiques de la classification de Vaughan-Williams,
d’après Bomassi, [9]
87
6.1. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement de la fibrillation atriale
La fibrillation atriale (FA) est la tachyarythmie supraventriculaire la plus fréquemment
diagnostiquée chez le chien ([57]). Elle se développe le plus souvent lors de dilatation atriale,
secondairement à une cardiopathie. Les conséquences hémodynamiques de la FA sont une
baisse du débit cardiaque et le développement de signes cliniques d’insuffisance cardiaque.
Des élévations majeures de la fréquence cardiaque (supérieure à 200 bpm chez le chien)
peuvent être à l’origine de dysfonctions atriales et ventriculaires systoliques induites par la
tachycardie, même en l’absence de cardiopathie associée. Bien que la plupart des chiens
présentant une FA manifestent des signes cliniques caractéristiques, certains d’entre eux
sont asymptomatiques moment du diagnostic.
Le traitement de la FA a pour but de diminuer la fréquence cardiaque, et de maintenir le
rythme sinusal par l’utilisation d’agents anti-arythmiques. Le pronostic est variable, et
davantage réservé en présence d’une cardiopathie sous-jacente (par exemple une MCD).
Les posologies de bêta-bloquants recommandées lors de FA aiguë et chronique sont les
suivantes ([57]) :
-
Aténolol : 0,25 à 1 mg/kg per os q12h
Carvedilol : 0,25 à 1 mg/kg per os q12h
Metoprolol : 0,25 à 1 mg/kg per os q12-24h
Une étude expérimentale ([60]) publiée par l’équipe de Sharifov dans le Journal of the
American College of Cardiology en 2004 a permis d’évaluer le rôle des systèmes
parasympathique et orthosympathique dans l’apparition des FA sur modèle canin. La
conclusion de cette étude était que la stimulation cholinergique est probablement le facteur
principal intervenant dans les FA spontanées dans ce modèle animal, et le tonus
adrénergique ne fait que favoriser l’apparition et le maintien des FA provoquées par le
système cholinergique.
6.2. Utilisation des bêta-bloquants dans le traitement des arythmies
ventriculaires
Le traitement des arythmies ventriculaires (AV) est une question controversée. Il n’existe pas
de consensus sur le moment le plus opportun pour traiter, le meilleur type de traitement, ou
le suivi optimal de ce dernier.
La majorité des anti-arythmiques ventriculaires a, paradoxalement, un effet proarythmogène. Par conséquent, la prescription de ces molécules n’est pas sans risques.
Différents principes de mise en place du traitement ont été proposés par les cliniciens ([34]).
Il semble ainsi logique de traiter les extrasystoles ventriculaires (ESV) lorsqu’elles
engendrent des conséquences hémodynamiques. De plus, l’identification du phénomène de
« R sur T » (*), ou d’une tachycardie ventriculaire durable chez un patient ayant une
cardiopathie sous-jacente devrait également être à l’origine d’une médication.
88
Certains auteurs ont suggéré de traiter si plus de 10 ESV étaient observées sur une séquence
ECG ponctuelle, si des doublets ou triplets d’ESV se produisaient, ou si la fréquence
cardiaque était supérieure à 160 bpm. Il faut néanmoins préciser qu’aucun de ces
paramètres n’a pu être corrélé à une augmentation du risque de mort subite. Par
conséquent, l’évaluation clinique de l’animal et la recherche d’une cardiopathie sont
probablement les facteurs les plus importants dans la décision de traiter ([34]).
La classification des AV est rappelée dans le tableau 10 :
Tableau 10 : Classification des arythmies ventriculaires selon Lown, d’après Spyckerelle, [62]
Grade 0
Grade 1
Grade 2
Grade 3
Grade 4
Aucune ESV
ESV isolées et monomorphes
ESV bigéminées, trigéminées ou polymorphes
Doublet ou triplet d’ESV
Phénomène « R sur T » ou tachycardie ventriculaire (≥ 4 ESV consécutives)
(*) Le phénomène de « R sur T » correspond à la survenue d’une extrasystole ventriculaire (onde R)
sur la période vulnérable du potentiel d’action (sommet de l’onde T du QRS précédent).
6.2.1. Comparaison des effets de quatre traitements anti-arythmiques pour la
myocardiopathie arythmogène ventriculaire droite du Boxer
Contrairement à la MCD classique décrite chez les grandes races (et caractérisée notamment
par une dilatation des cavités ventriculaires et un dysfonctionnement systolique associé à
l’apparition rapide d’une insuffisance cardiaque congestive), la myocardiopathie du Boxer
est caractérisée par des AV potentiellement létales, ou responsables de lipothymies ou de
syncopes, mais sans dilatation cavitaire marquée. Plusieurs études ont permis de mettre en
évidence une forte ressemblance avec la myocardiopathie ventriculaire droite arythmogène
de l’homme, notamment dans la présentation clinique, les mécanismes pathogéniques, et
les lésions histologiques associées ([8]).
La myocardiopathie arythmogène ventriculaire droite (MAVD) est une cardiopathie du Boxer
adulte. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 7 à 8 ans environ, mais les symptômes
peuvent apparaître à tout âge. Il s’agit d’une maladie à transmission génétique suivant un
modèle autosomal dominant, à pénétrance incomplète. Il a néanmoins été suggéré qu’un
certain nombre de facteurs environnementaux (dont l’alimentation) pourraient avoir une
influence sur le développement de la maladie ([62]).
Le diagnostic repose donc principalement sur l’ECG, mais un enregistrement
électrocardiographique normal pendant quelques minutes n’est pas suffisant pour exclure
une MAVD.
89
Les modifications histologiques associées à la MAVD incluent une atrophie et une diminution
du nombre des cardiomyocytes, associées à une infiltration adipeuse (65% des cas), ou
fibroadipeuse (35% des cas) du myocarde. Ces lésions sont identiques à celles décrites lors
de MAVD chez l’Homme ([8]).
Les tachyarythmies ventriculaires sont fréquentes chez les Boxers atteints de MAVD et
peuvent mener à l’apparition de syncopes ou de mort subite. Différentes molécules antiarythmiques peuvent être prescrites pour tenter de réduire le nombre d’ESV, la gravité (ou
grade) de l’arythmie, les signes cliniques, et les risques de mort subite.
Les molécules anti-arythmiques les plus utilisées sont la quinidine, le procaïnamide, la
mexiletine (aux Etats Unis), l’aténolol, le propranolol, le sotalol, et l’amiodarone ([36]). Cette
liste est fondée en partie sur les recommandations actuelles émises chez l’homme.
Cependant, il n’y a pas d’étude globale évaluant l’efficacité de ces traitements chez les
Boxers présentant des arythmies ventriculaires fréquentes.
La mexiletine est un anti-arythmique de classe I, qui agit par inhibition des canaux sodium
rapides. Elle n’est actuellement plus disponible en France.
La modulation du système nerveux autonome par des bêta-bloquants diminue le nombre
d’ESV et le taux de mortalité associé aux AV malignes chez l’homme ([16]).
L’étude prospective de Meurs et al. ([36]) a été réalisée en 2002 à l’Université
Vétérinaire de l’Ohio aux Etats-Unis, et publiée dans le Journal of the American Veterinary
Medical Association. Son objectif était de comparer les effets de quatre traitements antiarythmiques chez des chiens de race Boxer présentant des ESV secondaires à une MAVD.
Quarante-neuf chiens ont pu être intégrés à cette étude.
Protocole d’étude :
Le grade de l’arythmie de chaque animal inclus était noté à 1 (ESV simple et uniforme), 2
(bigéminée, trigéminée, ou les deux), 3 (doublets, triplets ventriculaires, ou les deux), ou 4 (R
sur T : l’ESV apparaît sur le tracé de l’onde T précédente ; tachycardie ventriculaire : 4 ESV ou
plus, ou les deux), avant tout traitement. Les chiens présentaient des cavités cardiaques de
taille normale, et n’étaient atteints d’aucune maladie cardiaque ou systémique
concomitante. Ils présentaient au moins 500 ESV sur un enregistrement Holter de 24h.
Chaque chien a reçu l’un des quatre traitements anti-arythmiques suivants :
-
Aténolol : 0,3 à 0,6 mg/kg per os q12h
Procainamide : 20 à 26 mg/kg per os q8h
Sotalol : 1,5 à 3,5 mg/kg per os q12h
Association de mexiletine : 5 à 8 mg/kg per os q8h, et d’aténolol : 0,3 à 0,6 mg/kg per
os q12h
90
Tous les chiens ont reçu leur traitement pendant 21 à 28 jours, et un enregistrement Holter
post-traitement a été réalisé. Les chiens ayant développé des effets indésirables (syncopes,
dépression, troubles gastro-intestinaux) considérés comme majeurs lors des 21 premiers
jours ont été exclus de l’étude.
L’efficacité du traitement a été définie comme une réduction de plus de 85% du nombre
d’ESV. Un effet pro-arythmogène a été attribué au traitement si le nombre d’ESV avait
augmenté de plus de 85% après traitement (cette valeur tient compte de la variabilité de
fréquence des ESV d’un jour à l’autre chez le chien).
Résultats :
Soixante-et-un chiens présentant au moins 500 ESV/24h ont été intégrés à l’étude, parmi
lesquels 20 avaient déjà présenté au moins un épisode de syncope. Douze chiens ont été
retirés de l’étude avant les 21 jours de traitement à cause de l’apparition (n=6) ou de
l’augmentation de la fréquence (n=3) des syncopes, ou encore de signes de dépression et
d’anorexie. Quarante-neuf chiens sont allés au bout d’au moins 21 jours de traitement,
parmi lesquels 17 faisaient des syncopes.
Aucune différence significative d’âge, de nombre d’ESV/24h, de fréquence cardiaque
sinusale (maximale, moyenne, et minimale) de grade d’arythmies ou de présence de
syncope n’a été observée entre les 4 groupes, avant traitement.

Aténolol :
Seize chiens ont reçu de l’aténolol. Cinq chiens ont été exclus de l’étude à cause du
développement ou de l’augmentation du nombre des syncopes. Les 11 chiens restants
comprenaient 7 femelles et 4 mâles âgés de 5 à 11 ans (médiane de 10 ans).
Le nombre d’ESV, le grade d’arythmie, la fréquence cardiaque (maximale, moyenne et
minimale), ou la présence de syncopes n’étaient pas significativement différentes avant et
après le traitement par l’aténolol (0,3 à 0,6 mg/kg per os q12h).

Procaïnamide :
Quatorze chiens ont reçu du procaïnamide. Trois chiens ont été exclus prématurément de
l’étude à cause de signes de dépression et de troubles gastro-intestinaux. Onze chiens ont
terminé l’étude, parmi lesquels 6 femelles et 5 mâles, âgés de 2 à 11 ans (médiane de 7 ans).
Le nombre d’ESV, le grade d’arythmie, la fréquence cardiaque (maximale, moyenne et
minimale), ou la présence de syncopes n’étaient pas significativement différentes avant et
après le traitement par le procaïnamide (20 à 26 mg/kg per os q8h).
91

Sotalol :
Dix-huit chiens ont reçu du sotalol. Deux chiens n’ont pas terminé l’étude à cause de
l’apparition ou de l’augmentation des syncopes. Seize chiens sont allés au bout du
traitement, parmi lesquels 11 femelles et 5 mâles, âgés de 3 à 13 ans (médiane de 9 ans).
Neuf chiens ont présenté une réduction supérieure à 85% des ESV, et 1 chien a présenté une
augmentation supérieure à 85% des ESV.
Sept chiens ont montré une diminution du grade de l’arythmie, 1 chien a eu une
augmentation du grade de l’arythmie, et 8 chiens n’ont pas présenté de changement de ce
grade.
Des réductions significatives des ESV, des grades d’arythmie, des fréquences cardiaques
(maximale, moyenne et minimale) ont été observées.
Le nombre de syncopes n’a pas été significativement modifié par le traitement.

Mexiletine-aténolol :
Treize chiens ont reçu le traitement mexiletine et aténolol, dont 2 ont été exclus de l’étude à
cause de l’apparition de syncopes. Les 11 chiens restants comportaient 5 femelles et 6
mâles, âgés de 2 à 12 ans (médiane de 6 ans).
Huit chiens ont présenté une réduction supérieure à 85% des ESV, et 2 chiens ont présenté
une augmentation supérieure à 85% des ESV.
Sept chiens ont montré une réduction du grade de l’arythmie, aucun n’a eu d’augmentation
de ce grade, et 4 n’ont pas eu de modification de grade d’arythmie.
Des réductions significatives des ESV, des grades d’arythmie, des fréquences cardiaques
(maximale et moyenne) ont été observées.
La fréquence cardiaque minimale et la présence de syncopes n’ont pas été significativement
modifiées par le traitement.
Conclusions :
Les traitements par le sotalol (1,5 à 3,5 mg/kg q12h) et par l’association de mexiletine (5 à 8
mg/kg q12h) et d’aténolol (0,3 à 0,6 mg/kg q8h) ont été bien tolérés et ont réduit
significativement les ESV et le grade d’arythmie chez les Boxers étudiés, après 21 à 28 jours
de traitement.
Les administrations de procaïnamide (20-26 mg/kg q8h) et d’aténolol seul (0,3 à 0,6 mg/kg
q12h) n’ont pas permis de réduire significativement l’une ou l’autre de ces variables. Il est
possible que la dose d’aténolol employée ait été trop faible, car la fréquence cardiaque
maximale n’a pas été significativement réduite. Il s’agit cependant de la dose habituelle
prescrite en clinique.
92
Le sotalol ayant à la fois des propriétés de blocage β non sélectif et d’inhibition des canaux
potassium, il n’est pas possible d’attribuer ses effets anti-arythmiques à l’une ou l’autre, ou à
ces deux propriétés. Il apparait comme ayant des effets pro-arythmogènes négligeables chez
le chien Boxer (ce qui est également le cas chez l’homme).
Aucun des 4 traitements proposés n’a permis de réduire significativement l’incidence des
syncopes.
Le protocole de cette étude, portant sur un nombre important de chiens (61 boxers) et
randomisée, apporte une grande fiabilité aux résultats.
6.2.2. Comparaison de l’association sotalol–mexiletine au sotalol seul dans le
traitement de chiens Boxer atteints d’arythmies ventriculaires
L’objectif de cette étude, réalisée par l’équipe de R. Prosek en 2006 ([49]), était d’évaluer
l’effet de deux protocoles anti-arythmiques sur le nombre d’ESV, la tachycardie ventriculaire
et/ou sur le phénomène de « R sur T », et les épisodes de syncopes chez les chiens Boxer
atteints d’AV.
Des Boxers présentant plus de 500 ESV ou des arythmies de grade 4 (c'est-à-dire des « R sur
T », ou plus de 3 ESV consécutives, ou les deux) sur la base d’un enregistrement au Holter
sur 24h ont été traités par voie orale soit avec du sotalol seul, soit avec du sotalol associé à
la mexiletine pendant 13 à 17 jours. Les chiens étaient exclus de l’étude s’ils avaient d’autres
maladies concomitantes, mais pas si leur fonction cardiaque était altérée ou si les
dimensions des cavités cardiaques étaient modifiées. Les enregistrements Holter étaient
comparés pour évaluer le nombre d’ESV et de tachycardies ventriculaires par 24h, les
phénomènes de « R sur T », et les syncopes.
Seize Boxers ont été répartis de façon randomisée en deux groupes : 8 chiens ont reçu du
sotalol (1,5-3 mg/kg q12h), et 8 ont reçu du sotalol et de la mexiletine (1,5-3 mg/kg q12h et
5-7,5 mg/kg q8h). L’efficacité du traitement était définie par une réduction supérieure à 85%
du nombre d’ESV et/ou une disparition absolue des tachycardies ventriculaires.
Une réduction de plus de 85% du nombre d’ESV a été observée chez 7/8 chiens traités au
sotalol et à la mexiletine, et chez 2/7 chiens traités au sotalol seul.
De plus, les chiens du groupe sotalol-mexiletine ont présenté une réduction de 100% (7/7)
des tachycardies ventriculaires et/ou des « R sur T », tandis que la réduction a été de
seulement 33% (2/6 chiens) dans le groupe sotalol seul, montrant une différence
significative de la réponse entre les deux groupes.
Une réduction significative de la fréquence cardiaque maximale et moyenne a été observée
chez les chiens traités par l’association mexiletine-sotalol, comparée au sotalol seul.
Le nombre de syncopes n’a pas été significativement modifiée par le traitement, quel que
soit le groupe étudié.
93
Conclusions :
L’association du sotalol (1,5-3 mg/kg q12h) et de la mexiletine (5-7,5 mg/kg q8h) a montré
davantage d’effets bénéfiques que le traitement au sotalol seul, pour les AV des Boxers
étudiés. Elle a permis une réduction de plus de 85% des ESV chez 7 chiens sur 8, et une
réduction de 100% des tachycardies ventriculaires et phénomènes de « R sur T », ainsi
qu’une réduction significative de la fréquence cardiaque, par rapport au sotalol employé
seul. Les effets étaient appréciables après 13 à 17 jours de traitement.
Le traitement anti-arythmique combiné sotalol-mexiletine semble efficace chez le Boxer
atteint d’arythmies ventriculaires, mais requiert d’autres investigations.
6.2.3. Intérêt de la bithérapie mexiletine-sotalol par rapport à l’utilisation de
mexiletine ou de sotalol seuls pour le traitement des arythmies ventriculaires
familiales du Berger Allemand
L’équipe de Moïse et al. a démontré en 1994 l’existence d’une prédisposition héréditaire au
développement d’AV et à la mort subite chez de jeunes animaux appartenant à des familles
de Bergers Allemands, en Europe et aux Etats Unis. Les chiens atteints présentent jusqu’à
60% d’AV par 24h, mais il existe de nombreuses variations phénotypiques, allant de
quelques ESV aux tachycardies ventriculaires polymorphes, avec des fréquences cardiaques
supérieures à 350 bpm. Dans la grande majorité des cas, le seul signe clinique est la mort
subite, le risque de mort subite étant corrélé à la gravité des AV. Les animaux les plus
vulnérables à la mort subite ont entre 12 et 50 semaines (avec un pic entre 20 et 28
semaines). Néanmoins, les chiens survivant au-delà de 2 ans présentent des AV nettement
moins fréquentes et graves, et le risque de mort subite devient alors infime. Les morts
subites surviennent le plus souvent lors du sommeil, lors du repos après un exercice, ou tôt
le matin peu après le réveil.
Les anti-arythmiques administrés par voie orale les plus utilisés dans le traitement des AV en
médecine vétérinaire sont la mexiletine, le sotalol, l’aténolol, le procaïnamide et
l’amiodarone ([20]).
Le sotalol est un bêta-bloquant non sélectif appartenant aux anti-arythmiques de classe III.
Son efficacité anti-arythmique a été démontrée à la fois chez le Boxer présentant des AV
spontanées, et chez l’homme atteint d’AV et réfractaire aux anti-arythmiques de classe I.
Les bénéfices d’une thérapie combinée de sotalol et de mexiletine ont été mis en évidence
chez l’homme, ainsi que chez des chiens Boxers atteints de MAVD ([49]). De surcroit, des
études électrophysiologiques réalisées sur des fibres de Purkinje isolées au sein du
laboratoire de l’étude ont suggéré que la co-administration permettait une réduction plus
importante des dépolarisations spontanées et déclenchées que le sotalol ou la mexiletine
utilisés seuls.
94
Cette étude ([20]) a été réalisée par Gelzer et al. à l’Université de Cornell aux Etats-Unis, et
publiée en 2010 dans le Journal of Veterinary Cardiology. Elle a porté sur 12 chiens Bergers
Allemands atteints d’AV (médiane d’âge de 20 semaines), issus d’une colonie de chiens
développée à l’Université de Cornell en 1988.
L’objectif de ce travail a été de déterminer la variabilité spontanée des AV, et d’évaluer
l’effet anti-arythmique de la mexiletine, du sotalol, et de l’association mexiletine-sotalol chez
ces Bergers Allemands atteints d’AV familiales.
Une molécule était reconnue comme ayant une activité anti-arythmique efficace si la
réduction de la fréquence des AV était supérieure à 80% (car la variabilité de la fréquence
des AV d’un jour à l’autre est de 80-85% chez les chiens et les humains). Néanmoins, ces
données sont très dépendantes de la race, de l’âge, et de l’existence d’une affection
structurale sous-jacente.
Protocole d’étude :
Douze chiens Bergers Allemands atteints d’AV ont été inclus dans l’étude après mise en
place d’un Holter pendant 24h à 17 semaines, afin de sélectionner le phénotype « grave »,
caractérisé par une AV importante prédisposant à une mort subite.
Les critères d’inclusion dans l’étude étaient que les ESV représentent plus de 5% des
complexes ventriculaires sur 24h, et que le nombre total d’ESV sur 24h soit supérieur à 6000
(ce qui correspond à plus de 250 ESV par heure).
Neuf chiens sur 12 ont reçu du sotalol en monothérapie (2,5 mg/kg per os q12h), 11/12 ont
reçu la mexiletine en monothérapie (8 mg/kg per os q8h) et 12/12 ont reçu la bithérapie aux
mêmes doses. Vingt-quatre heures avant chaque période de traitement, un enregistrement
Holter a été réalisé afin de servir de contrôle.
Au 6e jour de chaque période de traitement, un enregistrement Holter sur 24h a été réalisé
pour évaluer l’effet anti-arythmique du traitement instauré. Un délai de 4-7 jours sans
médication a été respecté entre chaque période de traitement. Ce délai a été déterminé à
partir des données pharmacocinétiques obtenues chez des Bergers Allemands par le
laboratoire de l’étude.
Les concentrations plasmatiques ou sériques de mexiletine et sotalol ont été mesurées au 6e
jour de chaque période de traitement.
L’analyse des AV était faite selon les critères suivants :
1) Nombre total d’ESV en 24h
2) Nombre d’ESV isolées par 24h
3) Nombre de doublets/triplets d’ESV par 24h
4) Nombre de salves d’ESV (≥3 ESV) ou tachycardie ventriculaire par 24h
95
Résultats :
Douze chiens ont été étudiés, 8 mâles et 4 femelles, de poids moyen 20 kg.
Pendant la période de l’étude, les 12 chiens ont présenté une médiane de 25,5 ESV par 24h,
5924 doublets/triplets ventriculaires par 24h, et 586 salves de tachycardie ventriculaire par
24h. Les patients n’ont pas reçu de traitement anti-arythmique pendant ces périodes
d’enregistrement.
La thérapie combinée mexiletine-sotalol a réduit le nombre d’ESV isolées et le nombre total
d’ESV sur 24h chez un nombre plus élevé de chiens (5/12 et 6/12) que la mexiletine (1/11 et
2/11) et le sotalol (2/9 et 1/9) (p<0,05).
Cette thérapie combinée a engendré une réduction (statistiquement significative) de 62% du
nombre total d’ESV par 24h, contre seulement 26% pour la mexiletine seule et 13% pour le
sotalol seul. (Le pourcentage de réduction des ESV avec la bithérapie excède la variabilité
spontanée des AV, par la méthode d’analyses statistiques employée ici).
De plus, cette association a provoqué une baisse de 68% des ESV isolées, contre 17% par la
mexiletine seule et 40% pour le sotalol seul.
Enfin, elle a permis une diminution de 75% des doublets/triplets d’ESV, tandis que les
traitements à la mexiletine seule et au sotalol seule ne les diminuaient que de 43% et 28%
respectivement.
Aucun traitement n’a réduit la fréquence d’apparition des tachycardies ventriculaires. La
monothérapie au sotalol a augmenté les salves de tachycardies ventriculaires.
A dose égale, les concentrations plasmatiques de mexiletine (à la fois au pic et au minimum
d’absorption) étaient plus hautes lorsque les chiens recevaient concomitamment du sotalol
que lors de monothérapie à la mexiletine. Les concentrations de sotalol étaient quant à elles
inchangées dans les 2 cas.
Conclusions :
L’association de mexiletine et de sotalol permet de réduire significativement le nombre total
d’ESV sur 24h, les ESV isolées, et les doublets/triplets d’ESV, chez les chiens Bergers
Allemands atteints d’AV familiales, après 6 jours de traitement.
Cette efficacité de la thérapie combinée mexiletine-sotalol pourrait s’expliquer soit par
l’augmentation de la concentration plasmatique en mexiletine observée lors de l’association
des deux molécules, soit par un effet combiné de la mexiletine et du sotalol.
Les monothérapies à la mexiletine (8 mg/kg per os q8h) et au sotalol (2,5 mg/kg per os q12h)
n’ont pas engendré de réduction significative des ESV. Non seulement le sotalol n’a pas eu
d’effet anti-arythmique significatif, mais son administration s’est accompagnée d’un effet
pro-arythmogène, caractérisé par une augmentation des tachycardies ventriculaires. Il est
donc préférable de l’utiliser en association avec une autre molécule plutôt qu’en
monothérapie.
96
Remarques:
Chez les Bergers Allemands affectés, le risque de mort subite est associé à la présence de
salves de tachycardies ventriculaires : c’est avant tout ce qu’il faut réduire. Dans cette étude,
aucun des protocoles thérapeutiques n’a permis d’améliorer ce paramètre.
Le protocole de cette étude prospective confère une grande fiabilité à ses résultats. En
revanche, elle comportait peu de chiens, et pas de groupe témoin. Ses conclusions ne sont,
par ailleurs, pas extrapolables à d’autres âges, races ou pathologies.
Conclusions concernant l’utilisation des bêta-bloquants pour le traitement des arythmies
chez le chien :
L’efficacité des bêta-bloquants dans le traitement de la FA chez le chien n’a pour l’instant
pas été démontrée.
Le sotalol semble être le bêta-bloquant le plus efficace pour le traitement des AV canines,
en particulier lorsqu’il est associé à la mexiletine. L’association de mexiletine et de sotalol
permet de réduire significativement le nombre total d’ESV sur 24h, les ESV isolées, et les
doublets/triplets d’ESV, chez les chiens Bergers Allemands atteints d’AV familiales, après 6
jours de traitement.
Le sotalol, et l’association de l’aténolol et de la mexiletine ont également montré des
effets bénéfiques dans le traitement de la MAVD du Boxer. Les traitements par le sotalol
(1,5 à 3,5 mg/kg q12h) et par l’association de mexiletine (5 à 8 mg/kg q12h) et d’aténolol
(0,3 à 0,6 mg/kg q8h) ont été bien tolérés et ont réduit significativement les ESV et le
grade d’arythmie chez les Boxers étudiés, après 21 à 28 jours de traitement.
Les doses efficaces de sotalol sont comprises entre 1,5 et 3,5 mg/kg q12h, seul ou en
association, et les effets sont appréciables dès 6 jours de traitement.
97
98
CONCLUSION
Ce travail a permis de mettre en évidence que le champ d’application de l’utilisation
des bêta-bloquants est extrêmement vaste au sein des cardiopathies spontanées du chien et
du chat. Cependant, les résultats obtenus chez les carnivores domestiques sont à ce jour
décevants, comparés aux résultats obtenus en cardiologie humaine. Deux principales raisons
sont souvent invoquées pour expliquer ces divergences.
D’une part, la précocité du diagnostic et de la mise en place des bêta-bloquants lors de
cardiopathie sont des éléments clés de la réussite de ce traitement. Par conséquent, une
détection encore plus précoce des cardiopathies, par le biais de dépistages effectués avant
l’observation des signes cliniques, pourrait probablement permettre d’observer des effets
bénéfiques supérieurs à ceux rapportés jusqu’à présent dans la littérature, notamment à
long terme.
D’autre part, les très grandes variations individuelles dans la réponse à une posologie choisie
compliquent fortement l’établissement d’un protocole de médication. Il semble donc
nécessaire, comme cela est fait chez l’homme, d’avoir recours à des titrages sanguins, afin
d’associer pour chaque animal une réponse clinique à une concentration plasmatique. Ceci
est pour le moment réalisé de manière exceptionnelle en médecine vétérinaire.
Certaines données cliniques sont néanmoins encourageantes, notamment dans le cas
des sténoses aortiques, de l’insuffisance cardiaque congestive et des AV. Il est donc
nécessaire d’avoir recours à d’autres études prospectives sur les bêta-bloquants, afin
d’obtenir une connaissance plus approfondie de cette classe de médicaments, et de les
employer de manière plus appropriée. De plus, il a été observé tout au long de ce travail que
l’apparition d’effets secondaires était extrêmement rare, et ce d’autant que l’initiation du
traitement était effectuée de manière progressive.
Enfin, ce travail a souligné à plusieurs reprises l’intérêt des bêta-bloquants dans le
cadre de thérapies combinées. L’association avec d’autres agents anti-arythmiques a par
exemple été explorée pour le traitement des AV. Le bénéfice de ces bithérapies était, dans
cette dernière indication, supérieur à celui observé lors de monothérapie. L’utilisation des
bêta-bloquants en association avec d’autres molécules est donc une possibilité à considérer,
ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour le traitement des cardiopathies spontanées des
carnivores domestiques.
99
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Organisation périphérique du système nerveux cérébro-spinal et du système
nerveux végétatif (d’après Richard et Orsal ([52])
p9
Figure 2 : Représentation schématique des systèmes nerveux cérébro-spinal et végétatif
(d’après Pilot-Storck, [48])
p10
Figure 3 : Représentation des trajets nerveux au sein du système sympathique
(d’après Richard et Orsal [52])
p11
Figure 4 : Représentation schématique du système nerveux sympathique,
(d’après Richard et Orsal [52])
p12
Figure 5 : Représentation du système nerveux parasympathique,
(d’après Richard et Orsal [52])
p13
Figure 6 : Représentation schématique des relations pré et post-ganglionnaires des
fibres efférentes parasympathiques et sympathiques (d’après Riviere, [55])
p14
Figure 7 : Représentation des innervations par le système nerveux végétatif
(d’après Pilot-Storck, [48])
p15
Figure 8 : Synthèse des catécholamines (d’après Pilot-Storck, [48])
p16
Figure 9: Transmission de l’information au sein d’une jonction neuro-effectrice sympathique
(d’après Combrisson, [14])
p17
Figure 10 : Structure chimique des principales molécules adrénergiques
(d’après Wang et al. [70])
p18
Figure 11 : Organisation périphérique schématique du système orthosympathique
(d’après Pilot- Storck, [48])
p21
Figure 12 : Schéma de la stimulation d’un récepteur couplé à une protéine G
(d’après Jaspard, [23])
p22
Figure 13 : Structure chimique des principaux bêta-bloquants (d’après Tian et al. [64])
p25
Figure 14 : Moyenne +/- écart type des concentrations plasmatiques d’aténolol après
administration IV (1 mg/kg) et orale (3 mg/kg) (d’après Quiñones et al. [50]) p34
Figure 15 : Protocole de traitement des chiens de l’étude (d’après Nemoto, [40])
p62
Figure 16 : Sites d’action des anti-arythmiques de la classification de Vaughan-Williams
(d’après Bomassi, [9])
p85
100
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Caractéristiques des principaux types de récepteurs adrénergiques
(d’après Reiter, [51])
p20
Tableau 2 : Principaux effets de l’activation des récepteurs β1 et β2 adrénergiques
(d’après Riviere et al. [55])
p23
Tableau 3: Récapitulatif des données pharmacocinétiques de quelques bêta-bloquants
chez l’homme, d’après Bomassi [9], et Moïse [38] (adapté du Braunwald’s
Heart Disease 8e édition, 2008)
p26
Tableau 4 : Classification des principaux bêta-bloquants (d’après Reiter, [51])
p28
Tableau 5 : Concentrations d’aténolol dans le plasma (ng/mL) après 3 jours
d’administration orale (3 mg/kg/j) (d’après Quiñones et al. [50])
p35
Tableau 6 : Valeurs pharmacocinétiques obtenues sur 8 chiens sains après administration
intraveineuse ou orale de carvedilol (d’après Arsenault et al. [7])
p38
Tableau 7 : Valeurs médianes des fréquences cardiaques dans les 3 groupes
p50
Tableau 8 : Durée de survie de 96 chiens atteints de sténose sous-aortique et non traités
(d’après Kienle et al. [28])
p74
Tableau 9 : Gradients de pression entre le ventricule gauche et l’aorte pour 58 des chiens
de l’étude (d’après Kienle et al. [28])
p74
Tableau 10 : Classification des arythmies ventriculaires selon Lown
(d’après Spyckerelle, [62])
p87
101
102
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108
ANNEXE 1:
Classification NYHA (New York Heart Association)
Classe I
Classe II
Classe III
Classe IV
Patient porteur d’une cardiopathie sans limitation de l’activité physique. Une activité
physique ordinaire n’entraine aucun symptôme.
Patient dont la cardiopathie entraîne une limitation modérée de l’activité physique,
sans gêne au repos. L’activité quotidienne ordinaire est responsable d’une fatigue,
d’une dyspnée, de palpitations ou d’un angor.
Patient dont la cardiopathie entraîne une limitation marquée de l’activité physique
sans gêne au repos.
Patient dont la cardiopathie empêche toute activité physique. Des signes
d’insuffisance cardiaque ou un angor peuvent exister même au repos.
ANNEXE 2: Classification ISACHC
(International Small Animal Cardiac Health Council)
Classe I
Présence d’une cardiopathie.
Absence de signes cliniques.

IA:
Absence de signes de compensation (pas de surcharge volumique du ventricule
gauche).

IB:
Signes de compensation à l’échocardiographie ou à la radiographie
(ex. : surcharge volumique du ventricule gauche, ou dilatation de l’atrium gauche)
Présence d’une cardiopathie, avec signes faibles à modérés d’insuffisance
cardiaque.
Signes cliniques d’insuffisance débutante à l’effort ou lors d’excitation.
Au repos, absence d’évidence clinique de fonction systolique diminuée.
Un traitement est indiqué.
Présence d’une cardiopathie, avec signes cliniques d’insuffisance cardiaque
avancée.
Signes cliniques présents au repos.
Cardiomégalie apparente à l’échocardiographie ou à la radiographie.
Affaiblissement majeur ou mort probables en l’absence de traitement.
Classe II
Classe III

IIIA:
Un traitement à domicile est possible.

IIIB:
Une hospitalisation et des traitements de soins intensifs sont requis.
109
LES ÉVOLUTIONS RÉCENTES DANS L’UTILISATION DES BÊTA-BLOQUANTS
POUR LES CARDIOPATHIES SPONTANÉES DU CHIEN ET DU CHAT
Auteur : BERTAL Mileva
Résumé:
Malgré les différents types de traitements dont l’utilisation s’est généralisée ces dernières années pour les
cardiopathies spontanées du chien et du chat, la durée de survie moyenne à partir de l’apparition des
premiers symptômes est le plus souvent très courte.
Chez l’homme, les bêta-bloquants représentent une des classes médicamenteuses ayant démontré des
effets bénéfiques sur l’évolution de l’insuffisance cardiaque. Huit principales molécules sont désormais
utilisées en cardiologie humaine : l’aténolol, le bisoprolol, le carvedilol, le metoprolol, le nebivolol, le
propranolol, l’acébutolol et le sotalol. Il a été démontré que leur utilisation permettait d’améliorer la
fonction myocardique, d’augmenter la capacité à l’exercice physique, et de prolonger la survie des patients.
Ce travail constitue une synthèse bibliographique, regroupant les études consacrées à l’utilisation des bêtabloquants chez les carnivores domestiques au cours de ces dix dernières années. La première partie réunit
les données pharmacologiques obtenues chez le chien et le chat, et la seconde partie analyse les essais
cliniques réalisés en cardiologie chez ces espèces.
Le champ d’application de l’utilisation des bêta-bloquants est très vaste au sein des cardiopathies
spontanées du chien et du chat. Néanmoins, les études prospectives sont à ce jour peu nombreuses (6 chez
le chien, et aucune chez le chat), et concernent le plus souvent un faible nombre d’animaux. Les molécules
les plus étudiées chez les carnivores domestiques sont le carvedilol, l’aténolol, le sotalol, et dans une
moindre mesure, le metoprolol.
Les résultats obtenus sont hétérogènes, et relativement décevants par comparaison à ceux obtenus chez
l’homme. Certaines données cliniques sont néanmoins encourageantes chez le chien, notamment lors de
sténose aortique, l’aténolol ayant un effet bénéfique sur la durée de vie. Par ailleurs, lors d’insuffisance
cardiaque congestive secondaire à une maladie valvulaire dégénérative ou une myocardiopathie dilatée, le
carvedilol semble engendrer une amélioration de la qualité de vie et de la classe fonctionnelle de
l’insuffisance cardiaque. Enfin, dans certains cas d’arythmies ventriculaires, en particulier chez le Boxer
(myocardiopathie arythmogène droite) et le Berger Allemand (arythmies ventriculaires familiales), le sotalol
employé en thérapie combinée engendre une diminution significative du nombre des extrasystoles
ventriculaires par 24 heures.
D’autres études, prospectives, en double aveugle contre placebo, sont à présent nécessaires pour mieux
définir la place des bêta-bloquants dans le traitement des cardiopathies spontanées du chien et du chat.
Selon les études préliminaires pré-citées, leur utilisation semble en effet prometteuse dans ces espèces.
Mots clés : BÊTA-BLOQUANTS / CARDIOPATHIE / INSUFFISANCE CARDIAQUE / MYOCARDIOPATHIE DILATEE
/ MYOCARDIOPATHIE HYPERTROPHIQUE / STENOSE AORTIQUE / STENOSE PULMONAIRE / ARYTHMIE /
CATECHOLAMINE / UNITE DE CARDIOLOGIE / CARNIVORE / CHIEN / CHAT
Jury :
Président : Pr
Directeur : Pr Valérie CHETBOUL
Assesseur : Dr Renaud TISSIER
THE RECENT EVOLUTIONS IN THE USE OF BETA-BLOCKERS
FOR CANINE AND FELINE SPONTANEOUS HEART DISEASES
Author: BERTAL Mileva
Summary:
Despite the different kinds of treatments whose use has recently become widespread for canine and
feline spontaneous heart diseases, the average survival time from the onset of symptoms is usually
very short.
In humans, beta-blockers represent a therapeutic class with proven beneficial effects on heart failure
evolution. Eight drugs are now commonly used in human cardiology: atenolol, bisoprolol, carvedilol,
metoprolol, nebivolol, propranolol, acebutolol and sotalol. It has been shown that their use enhances
myocardial function, increases exercise tolerance, and extends patients’ survival.
This work is a bibliographical review, including studies on the use of beta-blockers in dogs and cats
over the last decade. The first part includes the pharmacological data obtained in dogs and cats, and
the second part analyzes the clinical trials performed in cardiology in these species.
The scope of use of beta-blockers is extensive among spontaneous canine and feline heart diseases.
To date, however, very few prospective studies are available (6 in dogs and none in cats), and they
usually only involve a small number of animals. The most studied beta-blockers in dogs and cats are
carvedilol, atenolol, sotalol, and to a lesser extent, metoprolol.
Results of these studies are heterogeneous, and relatively disappointing in comparison with those
obtained in human cardiology. However, some clinical data are encouraging in dogs, among others
regarding aortic stenosis, for which atenolol has a beneficial survival effect. Moreover, in congestive
heart failure secondary to degenerative mitral valve disease or dilated cardiomyopathy, carvedilol
potentially leads to improved quality of life and functional heart failure class. Finally, in some cases of
ventricular arrhythmias, especially in Boxer dogs (arrhythmogenic right ventricular cardiomyopathy)
and German Shepherd dogs (familial ventricular arrhythmias), sotalol used in combination therapy
induces a decrease in the number of premature ventricular complexes per 24h.
Further prospective, double-blind, placebo-controlled studies are now required to better understand
the place of beta-blockers in the treatment of spontaneous canine and feline heart diseases, as
according to the previously mentioned pilot trials, their use seems rather promising in these species.
Key-words:
BETA-BLOCKERS / CARDIOPATHY / HEART FAILURE / DILATED CARDIOMYOPATHY / HYPERTROPHIC
CARDIOMYOPATHY / AORTIC STENOSIS / PULMONIC STENOSIS / PULMONARY STENOSIS /
ARRHYTHMIA / CATECHOLAMINE / CARNIVORE / DOG / CAT / VETERINARY UNIVERSITY / ALFORT /
CARDIOLOGY UNIT
Jury:
President : Pr
Directeur : Pr Valérie CHETBOUL
Assesseur : Dr Renaud TISSIER
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