Reflexions, le site de vulgarisation de l'Université de Liège
© Université de Liège - http://reflexions.ulg.ac.be/ - 21 April 2017
- 5 -
types de cellules : les cellules ciliées (ou cellules sensorielles) et les cellules non-sensorielles (ou cellules
de soutien). D'autres recherches - déjà menées par Brigitte Malgrange - ont permis de révéler la présence
de progéniteurs de cellules ciliées dans l'organe de Corti néonatal. Or, la persistance de ces précurseurs
immatures suggère leur possibilité de développement en période postnatale. Mais pour pouvoir se servir d'une
telle opportunité, encore faut-il d'abord déterminer les signaux moléculaires qui, dans l'épithélium sensoriel de
l'oreille interne, contrôlent le nombre de ces cellules progénitrices, leur différenciation en deux types cellulaires,
et leur organisation. A défaut, comment pouvoir imaginer stimuler, un jour, ces progéniteurs ? Et comment
développer l'espoir de prévenir ou de bloquer, chez l'homme, la dégénérescence des cellules ou, même, de
parvenir à régénérer les cellules essentielles à l'audition ?
« Nous avons divisé le travail de recherche en deux, détaille Brigitte Malgrange. Morgan Bodson, qui réalisait
sa thèse, et le Docteur Ingrid Breuskin ont été très impliqués dans la réalisation de ces deux études. Un des
articles est consacré spécifiquement à l'organe de Corti. Dans cet organe de l'audition, les cellules ciliées -
également appelées cellules sensorielles- permettent la transmission des informations auditives. La seconde
publication s'est penchée sur les neurones auditifs ou neurones du ganglion spiral. Ils constituent le premier
relai nerveux entre l'organe de Corti et le système nerveux central. »
Un pari sur Sox 10
En fait, les chercheurs se sont focalisés sur un des facteurs de différenciation des progéniteurs. « En particulier,
nous avons choisi d'étudier le rôle d'un de ces facteurs de transcription, celui du gène Sox 10, précise Brigitte
Malgrange. La famille des Sox compte plus d'une vingtaine de membres. Ils jouent des rôles importants dans
divers processus au cours du développement et, plus spécialement encore, dans la différenciation cellulaire.
Or Sox 10 s'exprime très fortement, au stade embryonnaire, dans la placode otique dont presque toutes les
cellules de l'oreille interne vont ensuite dériver : ce gène se fixe sur des promoteurs de toute une série de
facteurs impliqués dans la différenciation et la survie des cellules de l'oreille interne. Nous voulions mieux
comprendre son rôle… et nous y sommes parvenus. »
La recherche a été effectuée sur des souris dont le gène Sox10 avait été invalidé, c'est-à-dire qu'il ne
s'exprimait plus. Ces souris avaient été fournies par le laboratoire du Pr Wegner, à l'Université d'Erlangen, en
Allemagne. Dans l'organe de Corti, l'étude a montré que Sox 10 était nécessaire à la survie des progéniteurs
des cellules ciliées. En l'absence de Sox 10, les chercheurs ont constaté un raccourcissement drastique de
l'organe de Corti, une augmentation de la mort cellulaire, et une baisse importance des cellules progénitrices.
« En revanche, nous avons confirmé le fait que Sox 10 n'était pas nécessaire à la survie des cellules gliales
qui accompagnent les neurones dans le ganglion. La nouveauté apportée par notre recherche ? Dans les
autres ganglions du système nerveux périphérique, les neurones privés de cellules gliales ne survivent pas.
Or, dans l'oreille interne, ils y parviennent. En fait, les cellules ciliées sécretent alors les facteurs trophiques
indispensables à la survie des neurones et en particulier de l'un d'entre eux, le Brain-Derived Neutrophic
Factor, BDNF. Dans ce cas, la survie neuronale est donc tout à fait spécifique à l'oreille interne. En définitive,
nos deux études permettent donc de conclure que Sox 10 constitue bel et bien un facteur fondamental pour
le développement de la partie auditive de l'oreille interne », explique Brigitte Malgrange.
Une autre nouveauté découle également des travaux de l'équipe liégeoise. Le gène Sox 10 est impliqué dans
une maladie orpheline (ou maladie rare), le syndrome de Waardenburg-Shah. La surdité fait partie des
différents symptômes liés à cette affection. « Jusqu'à présent, on estimait que cette surdité était liée à une