ACV Carbone : LA nouveauté à prendre en main

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ACV Carbone : LA nouveauté à prendre en main
Bâtiments neufs : le label énergie carbone mis à l'épreuve
Actu­Environnement.com ­ Publié le 13/02/2017
La composante carbone fait une entrée remarquée dans un label d'Etat dédié au
secteur du bâtiment. Une nouveauté qui doit permettre de sensibiliser le secteur à
son empreinte carbone et orientera les choix en matériaux et équipements.
© Jürgen Fälchle
Avec le nouveau label Energie+Carbone­ (E+C­), la France fait office de pionnière. La
composante carbone calculée sur le cycle de vie du bâtiment est pour la première fois
intégrée dans un label porté par l'Etat. Son objectif ? Sensibiliser le secteur du bâtiment
à cette question : "Il faut que les acteurs de la construction comprennent ce qui, dans
leur action, a un impact sur le changement climatique", explique Jean­Christophe
Visier, directeur Energie et environnement au CSTB.
La composante carbone est le point le
plus complexe. Elle va induire de
nouveaux réflexes chez les architectes.
Claire Sicard, Citae
L'arrivée de la composante carbone est
en effet une nouveauté remarquée par
les pionniers du secteur : "On ne peut
que s'en féliciter. Il s'agit d'une avancée
fondamentale", commente Hélène
Genin, déléguée générale de
l'association BBCA. L'Association pour
le développement du Bâtiment Bas Carbone a été la première à lancer en 2015 un label
dédié à l'empreinte carbone du bâtiment. Le label E+C­ s'en est bien évidemment
inspiré surtout en matière de méthodologie. Mais les niveaux d'ambition diffèrent : "Le
niveau carbone 1 du label Energie+Carbone­ correspond au parc de construction
actuel. C'est un seuil qui n'est pas représentatif d'une démarche carbone car il
n'impose pas d'effort, mais simplement un état des lieux en réalisant une analyse du
cycle de vie", détaille Hélène Genin. L'association aurait bien aimé un peu plus
d'ambition, surtout que le niveau Carbone 2 est 30% moins exigeant que son label
BBCA. "Le challenge climatique nécessite de passer à la vitesse supérieure", estime la
déléguée générale de l'association.
Faire monter en compétence la filière
Reste que cette nouveauté va bouleverser les habitudes des acteurs de la construction :
"La composante carbone est le point le plus complexe. Elle va induire de nouveaux
réflexes chez les architectes", estime Claire Sicard, responsable mission chez le bureau
d'études Citae. "Il va falloir comparer les produits de construction et faire des choix
entre la performance énergétique et les émissions carbone", ajoute­t­elle. "L'approche
de la conception des bâtiments devra être menée plus conjointement entre bureau
d'études et architecte pour réduire ensemble les émissions de carbone", estime pour sa
part Claudine Clerc, responsable performance énergétique et commissioning chez Arp­
Astrance.
"C'est une rupture fondamentale, estime également Benjamin Haas, chef de projet en
charge du pôle génie énergétique dans les bâtiments au centre de recherche et
innovation Gaz et Energies nouvelles (Crigen). L'ACV carbone va demander une
expertise extrêmement forte et nouvelle. La filière doit monter en compétence". "C'est
la première fois qu'on va s'intéresser au cycle de vie d'un bâtiment. Cela va demander
un immense besoin de formation des bureaux d'étude qui devront réaliser les études
énergétiques et environnementales et suivre l'évolution des coûts de construction en
regard des bénéfices que doivent tirer les maîtres d'ouvrage", confirme Patrice Hennig,
porte­parole de l'association Energies & Avenir.
L'association BBCA, qui forme les professionnels sur ce sujet, s'attend à être fortement
sollicitée surtout dans le segment des logements : "Dans le secteur des bureaux, l'ACV
est une pratique classique. Le segment des logements est beaucoup moins entraîné. Il
va y avoir beaucoup de pédagogie à faire", prévient Hélène Genin. Pour Claudine
Clerc, d'Arp­Astrance, la difficulté sera surtout d'avoir d'une part la quantité de
matériaux mise en œuvre sur une opération et d'autre part ses émissions de carbone
associées. "Le développement des maquettes numériques devrait faire émerger des
logiciels qui permettront de réaliser des ACV sur la base des données architecturales
et techniques renseignées par les différents acteurs directement sur la maquette",
estime la spécialiste.
Des outils encore à rôder
Les outils actuels doivent en effet être modifiés pour prendre en compte le nouveau
label. "Le marché dispose d'outil d'analyse en cycle de vie opérationnel et conformes
au référentiel E+C­. L'Etat accompagne par ailleurs les éditeurs de logiciels dans
l'intégration des éléments du référentiel pour une plus forte diversité sur le marché",
confirme Marie­Christine Roger, chef du bureau de la qualité et de la réglementation
technique de la construction à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages
(DHUP). Le CSTB a en effet mis à jour son logiciel Elodie. "La nouvelle version est
sortie le 16 janvier pour que chacun puisse avoir des logiciels d'application", confirme
Jean­Christophe Visier.
Les données qui vont les alimenter ont elles aussi été corrigées et enrichies. La base de
données environnementales et sanitaires – base de données Inies – a ainsi connu un
lifting ces derniers mois. L'Etat a comblé les vides en fixant des données par défaut là
où elles manquaient. "Jusqu'à maintenant les données des fiches de déclaration
environnementale et sanitaire (FDES) pour les produits de la construction et des
Profils Environnemental Produits (PEP) pour les équipements servaient à faire des
évaluations grossières. Il manquait beaucoup de données. Aujourd'hui, les choses
s'activent. Certains fabricants ont choisi de faire ou refaire leur FDES", constate
Patrice Hennig d'Energies & Avenir.
Soutenir l'innovation Made in France
Avec l'arrivée de ce contenu carbone, la donnée va gagner en valeur. Les fabricants ont
tout intérêt à mettre à disposition des informations précises pour valoriser leurs
produits et équipements surtout que celles mises par défaut par l'Etat sont très élevées.
"Cela va inciter les industriels à donner les informations, confirme Claudine Clerc.
Cela va également stimuler l'innovation vers des produits moins émetteurs. L'approche
sur la totalité du cycle permet également de prendre en compte le transport des
matériaux et va donc stimuler le sourcing local", anticipe la responsable performance
énergétique et commissioning chez Arp­Astrance.
L'Association BBCA prévoit elle aussi de continuer à promouvoir l'excellence. Elle va
harmoniser son label avec celui de l'Etat en intégrant la même méthodologie sur les
indicateurs communs construction et exploitation. Elle envisage de caler son premier
seuil au niveau Carbone 2 du label E+C­ mais va conserver des seuils plus ambitieux
pour encourager l'innovation chez les acteurs qui voudront aller plus loin. "Le label
BBCA garde également ses spécificités avec la valorisation du stockage carbone et de
l'économie circulaire dont elle entend développer et structurer la connaissance pour
leur prise en compte dans la future réglementation", détaille Hélène Genin.
Florence Roussel
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Actu­Environnement © 2003 ­ 2017 COGITERRA ­ ISSN N°2107­6677
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