La phrase simple Une phrase est un ensemble d'unites lexicales agence selon certaines regles, et qui a un sens. Cet agencement se fait autour d'un noyau. Une phrase simple comporte un seul noyau. En fran~ais comme en creole, ce noyau est Ie plus sou vent un verbe : Mon frere a achete une voiture noyau Fre mwen yon machin achte noyau ,'p /I' " ., '~-If " > ." 1. Les types de phrases 1.1. Les types obligatoires Selon !'information qu' elle veut transmettre, la personne qui parle recourt obligatoirement : • soit a une phrase de type dec1aratif (ou assertif) Pol ap travay Paul travaille • soit a une phrase de type interrogatif Eske Pol ap travay? Est-ce que Paul travaille? • soit a une phrase de type exc1amatif Comme Paul travaille bien! Gade ki jan Pol ap travay byen! • soit a une phrase de type imperatif Travay ! Travaille! 15 ~~ Ces types de phrases sont mutuellement exclusifs: aucune phrase ne peut etre a la fois declarative et interrogative, ou exclamative et imperative, etc. Enfranfais L'interrogation peut s'exprimer par l'inversion du sujet. On distingue deux cas: • Ie sujet est un pronom personnel, il est alors place apres Ie noyau verbal: Travailles-tu? • Ie sujet est un nom, i1 reste a sa place, mais il est repris apres Ie verbe par Ie pronom correspondant Paul travaille-t-il ? En creole L'interrogation ne se marque en aucun cas par Ie deplace­ ment du sujet apres Ie noyau. La langue creole recourt aux deux procedes utilises egalement par Ie fran~ais parle • soit un mot interrogatif Eske ou ap travay ? Eske Pol ap travay? • soit I'intonation seule Ou ap travay? Pol ap travay? 1.2. Les types facultatifs A chacun de ces quatre types obligatoires peut (peuvent) se combiner un ou plusieurs type(s) facultatif(s). On distingue trois types de phrases facultatifs, qui correspondent aux fonnes suivantes : • la fonne negative Patrikpa lave machin nan Patrick n'a pas lave la voiture • la fonne emphatique On met en relief un element de Ia phrase. C'est Patrick qui a lave Ia voiture Se Patrik ki lave machin nan • Ia fonne passive Le complement d' objet direct (COD) du verbe a la fonne active devient sujet du verbe a Ia fonne passive. Le sujet du verbe a la fonne active devient complement d'agent du verbe a la fonne passive. Fonne active: Patrick a lave la voiture COD sujet Fonne passive: La voiture a ete lavee par Patrick sujet complement d'agent En creole Le COD, dans une phrase a la forme active, peut egalement devenir sujet dans une phrase a la fonne passive: Patrik lave machin nan Machin nan lave Yo lave rad ak savon Rad lave ak savon On lave Ie linge avec du savon Le linge se lave avec du savon Cependant ce type de passif ne prend pas en charge I'ex­ pression de I' agent : il correspond a ce que l' on appelle Ie \ « passif court». Remarque Alors qu'une phrase n'appartient qu'a un type obligatoire, elle peut se presenter sous plusieurs foOlles: les types obliga­ toires s'excluent mutuellement, les types facultatifs peuvent se combiner entre eux. Exemples: Ce n'est pas Patrick qui a lave la voiture? Type obligato ire : interrogatif Se pa Patrik ki lave mach in nan? Types facultatifs: negatif, emphatique 2. L'organisation de la phrase simple Nous analysons Ie type de phrase Ie plus courant: la phrase declarative. rl' Nous distinguerons: • la phrase it noyau verbal • la phrase it noyau non verbal A - La phrase a noyau verbal En fran~ais comme en creole, l'ordre des constituants de la phrase simple est Ie suivant: Sujet Verbe Complement a attrape un merle Le chat kenbe yon mel Chat la Examinons les differents types de complements qui peu­ vent accompagner Ie noyau verbal. II A - 1. Le complement d'objet direct Le complement d' objet direct suit directement Ie verbe: la fonction sujet et la fonction COD sont indiquees par la position des noms par rapport au verbe noyau. Si on les permute, ces noms chan gent de fonction : Le gar~on a appele la fille Tigason an rele tiji a rele tigason an La fille a appele Ie gar~on Tifi a Sujet COD Sujet COD Tout verbe ne se construit pas avec un complement d'objet direct. On distingue : a. les verbes qui exigent un COD - aider, battre, dire, prendre ... - ede, bat, di, pran ... exemple : Georges bat son petit frere Joj ap bat ti jre Ii COD COD b. les verbes qui en acceptent un (mais peuvent se construire egalement sans COD) - chanter, lire, manger ... - chante, Ii, manje ... exemple : Nous avons chante des cantiques Nou chante kantik COD COD Les verbes du type a et b sont des verbes transitifs. c. les verbes qui n'acceptent pas de COD - aller, partir, venir ... - ale, pati, vini... exemple : Li ale II est parti ce matin maten an comp. circ. comp. circ. de temps de temps Ce sont des verbes intransitifs. A - 2. Le complement d'objet indirect Certains verbes fonctionnent avec un complement d' objet introduit par une preposition ou complement d' objet indirect : ce sont les verbes transitifs indirects. Les verbes transitifs directs, eux, admettent un complement d' objet direct. Una ap elve ti Ire Ii a Lina eleve son petit frere COD COD ltHeve son petit frere Lina ti fre Ii a Lina __ ____ ~ap elve] - elever en fran~ais, elve en creole, sont des verbes transi­ tifs directs : ils sont accompagnes d'un complement d'objet direct. Lina Lina parle ap pale de son petit frere de titre Ii a COl . Lma ______ ~parltCJ-, __ !.L:\ ~ . ~ap pale Lma -- -- @ti'tfrere -"son pe L__ 'ik\ ~. 'Z' a ---tl Ire l - parler de en fran~ais, pale de en creole, sont des verbes transitifs indirects : ils sont accompagnes d'un complement d'objet indirect. En fran~ais Les prepositions qui introduisent un complement d'objet indirect sont: it (obeir a ... ) et de (parler de ... ). En creole La construction avec complement d' objet indirect est peu frequente. La preposition utilisee est de (ex. : pale de: parler de) : Li pale de papa I La grande majorite des verbes transitifs indirects en fran­ ~ais ont un correspondant creole transitif direct. exemple : Fran~ais Creole avoir besoin de bezwen ecrire a ekri se souvenir de sonje telephoner a telefonen (rele) A - 3. Le complement d'objet second En fran~ais, certains verbes se construisent, dans Ia meme J phrase, avec un complement d'objet direct et un complement . d'objet indirect. Dans ce cas, Ie complement d'objet indirect est appele complement d'objet second (COS). Georges a donne de I'argent a I'enfant COD COS Les verbes se construisant avec un complement d' objet second ont sou vent un sens proche de : - donner: montrer, preter, rendre ... - prendre: demander, emprunter, voler ... annoncer, promettre, raconter ... - dire: En creole, cette construction se releve avec un petit nombre de verbes : les prepositions qui introduisent Ie «desti­ nataire» sont pou et bay. ') Emil pote bannann pou man man I COD COS Emil_u _____ u[p~,,<uu-- .1 .. bannann ~~8, manman I Emile a apporte des bananes a sa mere Mwen Mwen- voye I vljriJ yon let bay jera COD COS -------0. yon let """@,, Jera J' ai envoye une lettre a Gerard Le plus souvent, I'equivalent du complement d'objet second fran~ais est construit, en creole, directement, c'est-a­ dire sans preposition. II est place tout de suite apres Ie verbe (dans Ie 1er des deux exemples qui sui vent, Ie verbe est bay donner, dans Ie 2e , montre: montrer ). Jan bay timoun nan Jean a donne l' enfant Jean a donne de I'argent a l'enfant kob de I'argent Kristof montre kanmarad Ii foto yo Christophe a montre son camarade Ies photos Christophe a montre les photos a son camarade Le verbe est accompagne de deux complements d' objet directs: Ie premier designe Ie «destinataire» du transfert exprime par Ie verbe, Ie deuxieme «l'objet transfere». .~ r Les enfants jouent dans la cour : preposition dans Timoun yo ap jwe nan lakou a : preposition nan - un groupe nominal construit directement Je l' ai vu la semaine derniere M we Ii senmenn pase - un adverbe II travaille vite L ap travay vit - une proposition subordonnee circonstancielle (On est Inverser ces deux complements conduit: - a transformer Ie sens de la phrase Jan bay kab timoun nan - Jean a donne l'argent de l'enfant - ou ala rendre agrammaticale *KristaJmontreJoto yo kanmarad Ii Pour eviter des confusions avec la construction fram;aise, oil Ie complement d'objet second est introduit par une preposi­ tion (donc indirect) et designe Ie «destinataire», on appellera cette construction creole construction it double complement d'objet direct, en soulignant Ie caractere rigoureux de I' ordre : sujet + verbe + COD 1 (destinataire) + COD 2 (objet) timoun nan COD 1 1~Jan ---ll!alj, "kob COD 2 dans Ie cadre d'une phrase comp1exe, voir p. 161) BIle n'est pas venue parce qu'elle est malade Li pa vini paske Ii malad En fran~ais Le groupe nominal complement circonstanciel de lieu peut, exceptionnellement, se construire directement (sans prepo­ sition) : Dominique travaille rue Dessalines Ce type de construction n' est possible qu' avec un groupe nominal comportant un nom propre. Remarque II convient de bien distinguer -Ia preposition bay, que nous avons employee avec Ie verbe : voye -Ie verbe bay, qui se construit avec deux complements d'objet directs, A - 4. Le compliment circonstanciel Le complement circonstanciel apporte des preCISIOns concernant I' action ou I' etat exprimes par Ie noyau de la phrase. Ces precisions concernent essentiel1ement -Ie lieu -Ie temps -la maniere -Ie moyen -Ia cause - Ie but Le complement circonstanciel peut etre: - un groupe nominal construit avec une preposition alors 't . En creole Cette construction directe se rencontre avec les noms propres, mais aussi avec un certain nombre de noms communs qui designent des lieux connus (labank, lapas, larivye, legliz, lekbl, lopital, simitiye, .. ,) POiet ap travay lapos Paulette travaille fa la poste Timoun yo t ap benyen larivye Les enfants se baignaient it la riviere Li poko prallekol EIle ne va pas encore it l'ecole M we Ii lopital Je l' ai vue fa l'h6pital Ces noms, homologues par Ia communaute des locuteurs creolophones, appartiennent a une liste fermee. • II Pi Sont exclus de cette liste les noms qui ne presentent pas une valeur pertinente pour I' ensemble de la communaute - par exemple : TYPES D'INTERFERENCES DU CREOLE EN FRAN<;AIS - jaden (jardin) - lakou (cour) - mache (marche) L ap travay nan jaden an Yo ale nan lakou a n travaille dans Ie jardin Ils sont alles dans la cour Structure creole : V + COD manman Ii Li pa ka obeyi Structure fran~aise : V + COl EIle n'obeit pas a sa mere B - La phrase it noyau non verbal '( II" En fran~ais comme en creole, Ie noyau de la phrase peut etre un autre element qu'un verbe, par exemple un adjectif ou un groupe nominal designant un lieu. En fran~ais, la langue doit recourir, dans ces cas, a la On peut relever, chez certains apprenants, en fran~ais, des verbes construits directement alors que la regIe demande un complement indirect (introduit, la plupart du temps, par la pre­ position it) II n' obeit pas sa mere EIle a telephone sa sreur ** copule etre : Sandra est malade depuis deux jours Les enfants sont it l'ecole aPort-au-Prince En creole, dans les phrases equivalentes, l'element non verbal constitue a lui seulle noyau de la phrase, la langue n' a pas a recourir a une copule Sandra malad depi dejou Timoun yo lekol Potoprens Dans les deux langues, les complements qui accompagnent Structure creole : V + COD destinataire Li bay se'y Structure fran~aise : V + COD objet II a donne un coup de pied + COD objet on kout pye + COS destinataire a sa sreur II.... On peut relever, chez certains apprenants, en fran~ais, des verbes accompagnes de deux complements directs, Ie destina­ taire precedant I' objet: II a donne sa sreur un coup de pied * ",,­ Structure franc;aise : + adverbe V Je connais tres bien Structure creole: V + nom de lieu Mwen pral iekal Certains noms designant des lieux se construisent directe­ ment en creole. Structure franc;aise : + nom de lieu V + prep. l'ecole it Je vais * On peut relever des complements de lieu construits direc­ tement: Je suis aIle l'ecole * Structure creole V (soti) + prep. nan Yo soti nan peyi Lafrans nan chanm nan! Sot; Structure franc;aise : V (sortir) + prep. de Ils viennent de France Sors de la chambre ! On peut relever des complements de lieu indiquant la pro­ venance introduits par en ou dans : IIs sont sortis en France Sors dans la chambre ! III" ** V + COD + adverbe ces gens-Ia II arrive chez certains locuteurs que l' adverbe, dans la phrase franc;aise, soit place apres Ie COD : Je connais ces gens-Ia tres bien. 11II1II> Structure creole + COD l . '; ' " .., EXERCICES Exercice 1 Traduisez les phrases suivantes en creole 1. Ou vas-tu ? 2. Serez-vous Ut demain ? 3. Pierre viendra-t-il ? 4. As-tu achete Ie journal ? 5. QU'a-t-il dit ? Exercice 3 Traduisez les phrases suivantes en creole I. Simon a montre les photos ason camarade. 2. EIle a demande de l' argent a son pere. 3. La maman raconte une histoire a sa petite fille. 4. Jacques a donne cent francs ason neveu. 5. Tu as dit cela aJacqueline? - A quel schema (S + V + ...) correspondent - les phrases fran~aises ? - les phrases creoles obtenues? '7 - Que remarquez-vous concernant la place du sujet par rapport au verbe dans les phrases creoles obtenues? - Peut-on trouver Ie meme type de construction en fran~ais? Exercice 4 Trouvez 10 noms communs designant des lieux qui se cons­ truisent comme lekol dans Li pral leki>1 Exercice 2 Traduisez les phrases suivantes en fran~ais 1. Mwen pa sonje non ri a. 2. Timoun nan pa obeyi manman Ii ditou. 3. Ou pa reponn kesyon an. 4. Mwen reve papa mwen. 5. Li vie ekri direkte a. Exercice 5 Traduisez de fa~on precise les phrases suivantes en 1. Soti nan kizin nan! 2. Soti anba lapli a! 3. Soti deye pyebwa a! 4. Soti anba soley La! 5. Leve ate a! fran~ais. - Que pouvez-vous dire apropos de la construction du comple­ ment verbal - en creole? - en fran~ais ? I!!'w. _TI