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Dans le contexte canadien, les communautés sont d’une grande diversité, faisant
intervenir des facteurs de différenciation comme l’ethnicité, la religion, la situation locale, la
mémoire d’un événement historique; et nombre d’entre elles conjuguent plusieurs de ces
caractéristiques. Certaines communautés sont fortement structurées, d’autres le sont très peu ;
certaines perdurent, d’autres disparaissent. Mais au-delà de ces différences, on peut relever
quelques similitudes. Pour que l’on puisse parler de communautés, il faut qu’il y ait parmi leurs
membres une solidarité et un sens d’appartenance, un intérêt commun, ainsi qu’une forme de
participation et d’organisation. Par ailleurs, toute communauté est potentiellement un lieu de
conflit, notamment en ce qui concerne les questions identitaires et de représentativité; de plus,
les limites de la communauté sont rarement définies de manière précise, au contraire, elles
varient en fonction de la position de l’interlocuteur. Le regard extérieur influe sur la définition des
limites de la communauté. Enfin, si le discours communautaire officiel véhicule souvent l’idée
d’une entité homogène, les communautés sont en réalité hétérogènes et complexes.
Se pose donc la question de savoir si la notion de communauté possède une valeur
analytique ou normative intrinsèque – question abordée dans la conclusion qui vise à poser
quelques jalons en vue d’une perspective informée par les principes du pluralisme juridique.
Dans le contexte actuel, où l’invocation du culturel tend à fonctionner comme le marqueur
“naturalisé” d’une différence présumée immuable, on est confronté au double problème de la
délimitation des entités culturelles juridiquement pertinentes et de la reproduction et de la
stabilisation des référents culturels. Les communautés sont-elles susceptibles de se prévaloir
d’une personnalité juridique (comme semble le suggérer le terme “collectivité” qui sert de
traduction canadienne française à community)? L’inscription purement spatiale de “collectivité”
ne couvre cependant qu’un aspect – peu significatif au demeurant – des diverses acceptions
qui s’attachent au concept de communauté en tant que groupe social ou description du lien
social; elle n’est pas non plus nécessairement la seule à être invoquée à l’appui des droits de