Inégalités de santé mentale : perspective européenne et des

Congrès national des Observatoires régionaux de la santé 2008 - Les inégalités de santé
Marseille, 16-17 octobre 2008
Institut Santé et Société
Inégalités de santé mentale :
perspective européenne et des
politiques publiques
Vincent Lorant
Congrès FNORS
Marseille 2008
C’est un plaisir pour moi d’être ici ce matin, et c’est un plaisir d’autant plus grand car c’est
la première fois que j’ai l’occasion de partager avec mes voisins du sud les recherches
que j’ai réalisées dans le domaine des inégalités de santé mentale. Ce sont des
recherches qui dépassent largement le cadre de la Belgique et qui sont en général plutôt
des recherches européennes. Je trouve donc que c’est une belle occasion de saluer la
possibilité d’avoir des approches et des séminaires scientifiques qui réunissent non
seulement des chercheurs mais aussi des praticiens, au-delà des frontières.
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Institut Santé et Société
Objectifs
Nature des liens entre position sociale et
santé mentale
Politiques publiques pour réduire les
inégalités de santé mentale
Je vais essayer de répondre à deux grandes questions. La première, c’est quelle est la
nature de la causalité entre position sociale et santé mentale. C’est un élément très
important parce que si l’on veut concevoir des politiques publiques et si l’on veut
concevoir des interventions, on peut se dispenser d’une réflexion sur la nature de la
causalité ou la nature des liens entre ces deux là. J’essaierai à cet égard d’être
relativement parcimonieux en ce qui concerne les données, les chiffres portant sur les
inégalités de santé mentale et au contraire je vais essayer de décomposer cette relation
pour essayer de mieux comprendre à quel type de causalité elle obéit.
J’en viendrai ensuite à la question des politiques publiques c’est-à-dire les interventions
ou des mécanismes qui nous permettent de réduire ces inégalités de santé. Alors il y a un
lien naturellement entre la première et la deuxième question. Vous pouvez concevoir des
politiques publiques efficaces et efficientes que si vous avez une bonne connaissance de
la causalité. Inversement, les politiques publiques et les interventions sont utiles pour
avancer dans la causalité. Il ya deux choses que je ne ferai pas. La première c’est entrer
dans des considérations méthodologiques, et la seconde c’est entrer dans l’épidémiologie
psychiatrique. Donc je n’aborderai pas ici la question de la prévalence des maladies dans
les populations. Sociologue intéressé et actif dans le domaine des inégalités de santé
mentale, c’est à ce titre que j’interviens aujourd’hui.
Institut Santé et Société
Plan
Comprendre les inégalités de santé mentale en
Europe
Ampleur
Décomposer les inégalités
Sens de la causalité
Dimension longitudinale
Les politiques publiques
Modèle de la commission OMS des déterminants sociaux
Equité dans les soins de santé mentale
Première partie : Comprendre les inégalités de sante mentale
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Institut Santé et Société
Source : Lorant, Am J Epi 2003
Ampleur des inégalités de dépression
Meta_prevalence
Meta_incidence
Meta_persistence
Wheaton 1980
Eaton 1981
Bebbington 1981
Brown 1981
Husaini 1981
Brown 1984
Noll 1985
Halldin 1985
Ross 1985
Mavreas 1986
Canino 1987
Kaplan 1987
Kaplan 1987
Vazquez 1987
Hodiamont 1987
Romans 1988
Cheng 1988
Ross 1989
Ulbrich 1989
Hollifield 1990
Cockerham 1990
Sargeant 1990
Carta 1991
Rodgers 1991
Murphy 1991
Murphy 1991
Murphy 1991
Wittchen 1992
Dohrenwend 1992
Horwath 1992
Surtees 1993
Regier 1993
Kessler 1994
Lehtinen 1994
Kovess 1996
Goering 1996
Abas 1997
Lynch 1997
Fichter 1997
Caraveo 1997
Lewis 1998
Cho 1998
Muntaner 1998
Weich 1998
Weich 1998
Weich 1998
Reijneveld 1998
Bijl 1998
Kylyc 1998
Bhagwanjee 1998
Turner 1999
Le Pape 1999
de Snyder 1999
Andrade 2000
Miech 2000
Bracke 2000
Meyer 2000
Araya 2001
Eaton 2001
Andrews 2001
0.1 0.5 1.0 2.0 10
56 études de population sur la dépression
Inégalités socio-économique dans la
prévalence : 1.81 (OR)
Inégalités dans l’incidence : 1.24 (OR)
Inégalités dans la persistence 2.06 (OR)
Dans une revue de la littérature que l’on a faite en 2003, nous avons recensé sur
l’ensemble de la planète plus de 50 études de populations qui permettaient de
comprendre, d’analyser les inégalités de santé mentale. Et comme vous voyez, la
majorité de ces études conduisaient à des résultats se trouvant du côté droit de la figure
suggérant que globalement les populations les plus précaires ont un risque de dépression
beaucoup plus élevé que les populations les moins précaires. En synthétisant ces 50
études qui prenaient principalement l’Amérique du Nord et l’Europe, nous avons observé
que le groupe social le plus modeste avait un risque de dépression 80% supérieur à celui
du groupe social le plus favorisé. Ce qui est également intéressant et l’on avance ici dans
la compréhension de ces inégalités, c’est que lorsqu’on prenait l’incidence ou les
inégalités en matière d’incidence, c’est-à-dire le risque de faire un premier épisode de
dépression, ces inégalités étaient beaucoup plus faibles. Par contre, si l’on s’intéressait
aux inégalités en matière de persistance de troubles psychiatriques, c’est-à-dire soit de
faire un deuxième épisode soit d’avoir des épisodes plus longs, les inégalités croissaient.
Ceci nous donne déjà une indication intéressante sur la nature des inégalités de santé,
moins dans le déclenchement de l’événement, moins dans le déclenchement de
l’épisode, et plus dans la durée et la persistance de l’épisode.
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Institut Santé et Société
Décomposition des inégalités :
dépression
Inégalités plus élevées pour les prévalence
ponctuelle (1-mois) que pour les prévalences sur
la vie
Inégalités croissent avec la comorbidité
Inégalités croissent avec la sévérité
Inégalités très hétérogènes d’une étude à l’autre
Inégalités dépendent du contexte
Plus élevées aux USA qu’en Europe
Très variables en Europe
Continuons si vous le voulez à décomposer ces inégalités. Elles sont beaucoup plus
élevées pour des prévalences estimées sur des périodes relativement courtes et
beaucoup plus faibles si vous prenez des prévalences calculées sur la vie. A nouveau,
ceci est cohérent avec le résultat antérieur.
On a également observé, en particulier dans les études épidémiologiques menées aux
Etats-Unis, je pense à la National Comobirdity survey ou à Epidemiologic Catchment Area
(ECA) Survey of Mental Disorders que les inégalités sont particulièrement prononcées
pour les troubles commorbides, c’est-à-dire des profils cliniques où les patients combinent
plusieurs troubles. Typiquement, dépression et assuétude, dépression et anxiété. C’est
très intéressant, parce que cela veut dire que si l’on veut s’attaquer aux inégalités de
santé mentale, il faut des approches cliniques spécifiques. Les inégalités de santé
mentales croissent également avec la sévérité. Ce qui veut dire que si l’on veut s’attaquer
aux inégalités de santé mentale, il faut prêter attention à tout l’impact de la maladie sur la
vie quotidienne des patients. Par contre, ce que l’on a également trouvé, c’est que ces
inégalités sont très hétérogènes, les points allaient dans tous les sens. Et elles sont, entre
autre, très hétérogènes d’un point de vue géographique.
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Suicide selon l’instruction : Europe (OR)
'
Suicide in Low educ vs. high educ (OR)
0.4
0.6
0.8
1.0
1.2
1.4
1.6
1.8
2.0
2.2
2.4
2.6
2.8
Austria BarcelonaBelgium Denmark England Finland Turin Madrid NorwaySwitzerland
fm fm fm fm fm fm fm fm fm fm
Source : Lorant, Social Science and medecine 2005
Par exemple, on a constaté que des pays comme les Etats-Unis, avaient des inégalités
en matière de santé mentale beaucoup plus prononcées que les pays européens. Ceci
dit, au sein même de l’Europe, nous avons constaté des grandes disparités. Ratio de 1,
ce qui signifie qu’il n’y a pas de différence supérieure à 1, ce qui veut dire que le risque
est plus élevé dans les populations avec des niveaux faibles d’éducation. Qu’est-ce que
vous constatez ? Vous constatez 3 choses. Vous constatez d’abord que globalement,
dans l’ensemble des pays ou des villes européennes que nous avons investiguées, vous
constatez que les autres ratios sont supérieurs à 1 chez les hommes.
Autrement dit, les inégalités en matière de suicide constituent globalement un phénomène
également présent en Europe. Et vous constatez qu’au sein de l’Europe qui globalement
a des systèmes de protection sociale relativement généreux, il y a de grosses disparités.
Regardez en particulier ce qui se passe à Turin et au Danemark.
Pourquoi comparer deux pays aussi différents ? Tout simplement parce que le Danemark
et l’Italie sont deux pays pionniers dans le domaine de la santé mentale et en particulier
deux pays qui ont fort investi dans l’intégration du système de santé mentale de première
ligne. Qu’est-ce que vous constatez, le Danemark et la ville de Turin ne présentent
aucune inégalité en matière de suicide ou une inégalité très faible.
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