Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Lignes aériennes : échauffements et efforts électrodynamiques par Michèle GAUDRY Ingénieur de l’École centrale de Paris Ingénieur-chercheur au département Postes et Lignes de la Direction des études et recherches d’EDF Secrétaire du groupe CIGRE 22-12 (comportement électrique et thermique des conducteurs) et Jean-Luc BOUSQUET Ingénieur Groupe Coordination électrique et mécanique des ouvrages à la Direction des études et recherches d’EDF 1. 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 1.6 1.7 2. 2.1 2.2 2.3 2.4 Calculs thermiques.................................................................................. Bilan des puissances en régime permanent ............................................. 1.1.1 Effet Joule ........................................................................................... 1.1.2 Ensoleillement .................................................................................... 1.1.3 Convection .......................................................................................... 1.1.4 Rayonnement...................................................................................... Calcul de l’échauffement en régime permanent....................................... Calcul de l’échauffement en régime variable............................................ 1.3.1 Régime de surcharge temporaire...................................................... 1.3.2 Régime de court-circuit ...................................................................... Calcul du courant en régime permanent ................................................... Calcul du courant en régime variable ........................................................ 1.5.1 Régime de surcharge temporaire...................................................... 1.5.2 Régime de court-circuit ...................................................................... Ordre de grandeur des paramètres à prendre en compte dans les calculs d’échauffement ............................................................................... Exemple d’application................................................................................. Efforts électrodynamiques dus aux courants de court-circuit ... Courant de court-circuit .............................................................................. Efforts électrodynamiques : description du phénomène ......................... Modélisation mathématique....................................................................... 2.3.1 Principe de calcul des efforts électrodynamiques ........................... 2.3.2 Application aux portées en câbles de lignes ou de postes ............. Pincement dans un faisceau de conducteurs............................................ 2.4.1 Description du phénomène ............................................................... 2.4.2 Modélisation mathématique.............................................................. — — 4 5 — — — — — — — — — 5 5 5 5 5 6 7 7 7 Doc. D 4 439 2 - 1997 Pour en savoir plus........................................................................................... D 4 439 - 2 — 2 — 2 — 2 — 2 — 3 — 3 — 3 — 4 — 4 — 4 — 4 — 4 — 4 e passage du courant dans un conducteur entraîne l’échauffement de celui-ci ; ce conducteur est également soumis à d’autres phénomènes d’ordre climatique tels que le vent, l’ensoleillement et la température ambiante. Il est donc important de connaître cet échauffement afin d’assurer aux conducteurs une température de fonctionnement compatible, d’une part, avec les matériaux utilisés pour leur fabrication et, d’autre part, avec la flèche de ceux-ci au-dessus du sol et des constructions. D 4 439 L Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 439 − 1 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES _______________________________________________________________________ Par ailleurs, à la suite des travaux de Laplace, nous savons que la circulation de courants dans des conducteurs parallèles induit dans ces conducteurs des forces électromagnétiques proportionnelles au produit des courants circulant dans les deux conducteurs. En cas de court-circuit dans une configuration de ligne ou de poste en conducteurs souples, on mesure alors des surtensions mécaniques (traction et flexion) appelées efforts électrodynamiques au niveau des supports et des isolateurs d’ancrage. On observe également des mouvements de conducteurs très importants. Ces efforts pouvant être considérables, il est indispensable de les prendre en compte dès la conception d’un nouvel ouvrage. Ce sont ces deux phénomènes qui sont étudiés dans cet article. R c résistance linéique en continu du conducteur (Ω · m–1) ; 1. Calculs thermiques µ0 = 4π × 10–7(H · m–1) Les calculs qui sont proposés dans ce paragraphe demandent, pour la plupart d’entre eux, des itérations ; pour cette raison, il est préférable de programmer les algorithmes qui suivent afin d’obtenir des résultats plus rapides et plus précis. (5) = perméabilité magnétique du vide et, par extension, de l’air. 1.1.2 Ensoleillement 1.1 Bilan des puissances en régime permanent La puissance linéique due à l’ensoleillement Ps (W · m–1) est la suivante : Ps = r ϕ D (6) D’une manière générale, le bilan thermique des puissances d’un conducteur en régime permanent (en équilibre thermique) s’écrit de la façon suivante : avec r Puissance d’échauffement = Puissance de dissipation (1) ϕ D coefficient de réceptivité du flux solaire (0 < r < 1) sans dimension, pris par défaut à 0,5 (§ 1.6), flux solaire (W · m–2), diamètre extérieur du conducteur (m). PJoule + Pensoleillement = Pconvection + Prayonnement PJ + Ps = Pc + Pray 1.1.3 Convection La puissance linéique dissipée par convection Pc (W · m–1) est : 1.1.1 Effet Joule λ P c = ∆T s S e ------- Nu D La puissance linéique due à l’effet Joule PJ (W · m –1) s’écrit : PJ = R I 2 avec R I où (2) résistance linéique à 50 Hz et à la température considérée du conducteur (Ω · m–1), courant transité par le conducteur (A) ; R = k R20[1 + α ( θc – θ20 )] (3) avec R20 résistance linéique en continu du conducteur à la température de 20 oC (Ω · m–1), α coefficient de variation de la résistance du conducteur en fonction de la température (oC–1), θc température du conducteur (oC), θ20 température de référence (20 oC) de la valeur de R20 (oC). Le coefficient k s’exprime par : µ0 f 4 1 1 µ0 f 2 k = 1 + -------- ------------- – ----------- ------------- 180 2R c 12 2R c (7) surface d’échange du conducteur (m2), conductivité thermique de l’air ambiant (W · m–1 · K–1), nombre de Nusselt, sans dimension, qui dépend de la vitesse du vent, de sa direction, de sa stabilité et des caractéristiques de la surface extérieure du conducteur [3], ∆Ts échauffement du conducteur par rapport à la température ambiante. Nu s’exprime différemment suivant le type de convection, naturelle ou forcée. En convection naturelle, on a : avec Se λ Nu Nu = A (Gr · Pr)m (8) avec A, m coefficients déterminés expérimentalement ; 2 (4) (formule de Rayleigh limitée à trois termes et valable pour les fréquences inférieures à 150 Hz) avec f fréquence du réseau (Hz) ; D 4 439 − 2 ρ a β gc p D 3∆T s Gr ⋅ Pr = -------------------------------------- nombre de Grashof-Prandtl, µd λ sans unité ; ρa masse volumique de l’air ambiant (kg · Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 (9) m–3) ; Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________ β g cp coefficient de dilatation à pression constante de l’air (K–1) ; accélération normale due à la pesanteur (m · s–2) ; capacité thermique massique à pression constante µd (J · kg–1 · K–1) ; viscosité dynamique de l’air ambiant LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES ε coefficient d’émissivité du conducteur, sans dimension (0 < ε < 1), pris par défaut égal à 0,6 (§ 1.6), = θa + 273,15 température ambiante (K), = θc + 273,15 température du conducteur (K), Ta Tc ∆Ts échauffement du conducteur par rapport à la température ambiante (K), (0) ∆Ts = Tc – Ta = θc – θa. (N · S · m–2 ou Pa · s). 2 ρ a β gc p Dans le produit Gr · Pr, la quantité ------------------------- ne dépend que du µd λ fluide (à la pesanteur g près) et peut s’exprimer, pour l’air atmosphérique, par la formule approchée : 3,912 × 1019 (θ film)–4,69 avec θfilm θa température de l’air au contact du conducteur [(θc + θa)/2](oC) ; température de l’air ambiant (oC). Tableau 2 – Coefficients utilisés en convection forcée Caractéristiques géométriques (1) 0,062 5 d /2 ( D – d ) 0,718 En convection forcée, on a : Nu = BRe n avec B, n (10) Il s’agit donc de calculer un nombre de Reynolds de convection mixte : avec Ren 2 Re 2 + Re n A 1⁄n Re n = ------ ( GR ⋅ Pr ) m ⁄ n B (13) La formule (12) prend en compte la vitesse résultante d’écoulement de l’air qui est la somme vectorielle du flux vertical de convection naturelle et du flux horizontal de convection forcée. Les coefficients A, B, m et n utilisés sont ceux des tableaux 1 et 2. (0) Gr · Pr A m de 102 à 104 de 104 à 106 0,850 0,480 0,188 0,250 P ray = σε S e ( T a + ∆T s ) 4 – T σ 0,8 d/2 ( D – d )0,05 de 2,65 × 103 à 5 × 104 0,718 0,633 = 5,67 × W· · constante de Stefan-Boltzmann, 4 a + σε S e ( θ c + 273,15 ) 4 – ( θ a + 273,15 ) 4 (15) donc RI 2 + r ϕ D ∆T s = -------------------------------------------------------------------------------------------σε ( T a + ∆T s ) 4 – T 4a λ S e ------- Nu + ------------------------------------------------------D ∆T s 1.3 Calcul de l’échauffement en régime variable Le bilan énergétique d’un conducteur en régime variable s’écrit de la façon suivante : Énergie emmagasinée = EJoule + Esolaire – Edissipée (14) S section du conducteur (m2) ; ρc masse volumique du métal constituant le conducteur (kg · m–3) ; c capacité thermique massique du conducteur à 20 oC (J · kg–1 · oC–1) ; θf température du conducteur à la fin du régime transitoire (oC) ; γ coefficient d’échange propre du conducteur : Σ flux thermiques sortant du conducteur γ = -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------θf – θa Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 (16) Le résultat final est obtenu par itération sur ∆Ts . Dans le cas d’une solution informatique, les calculs d’effet de peau (coefficient k ) sont inclus dans la boucle itérative. La résistivité augmente avec la température et modifie ainsi la valeur de ce coefficient. avec La puissance linéique dissipée par un conducteur par rayonnement infrarouge Pray est la suivante : avec 0,048 S ρcc dT = I 2R20 [1 + α(θc – 20)]dt + r ϕ Ddt – πD γ (θf – θa)dt (17) 1.1.4 Rayonnement K–4 0,471 de 2,65 × 103 à 5 × 104 λ 2 RI + r ϕ D∆T s S e ------- Nu D Tableau 1 – Coefficients utilisés en convection naturelle m–2 0,641 d/2 ( D – d )0,718 En remplaçant dans l’équation (1) les différents termes respectivement par ceux obtenus dans les relations (2), (6), (7) et (14), on obtient : (12) nombre de Reynolds de convection naturelle obtenu en écrivant l’égalité des deux équations (8) et (10), d’où : 10–8 n 1.2 Calcul de l’échauffement en régime permanent ρa Dans le calcul de Re, la quantité ------ peut s’exprimer par la µd relation : 1,644 × 109 (θfilm)–1,78. La convection forcée se distingue de la convection naturelle par la vitesse du vent, sans pour cela pouvoir déterminer précisément le passage de l’une à l’autre. Pour cette raison, il est préférable d’utiliser une convection mixte plus représentative des phénomènes physiques. De plus, la convection mixte assure une parfaite continuité dans l’évolution des phénomènes de convection. Re mixte = à 2,65 × B (11) vitesse de l’air ambiant (m · s–1). v de 103 (1) D : diamètre extérieur du conducteur, d : diamètre d’un brin de la couche extérieure. coefficients déterminés expérimentalement ; ρ a vD Re = --------------- nombre de Reynolds ; µd Re 102 (18) D 4 439 − 3 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES _______________________________________________________________________ Σ et I 2 R 20 1 + α ( θ c – 20 ) + r ϕ D flux thermiques = ------------------------------------------------------------------------------πD (19) On distingue 2 types de régimes variables pour les conducteurs de lignes aériennes : — la surcharge temporaire (durée 10 ou 20 min) ; — le court-circuit (durée inférieure à 5 s). 1.3.1 Régime de surcharge temporaire La solution l’expression : de l’équation différentielle (17) πD γ – RI 2 α θ c = A – ( A – θ i ) exp – t ------------------------------- S ρc C avec conduit à – αθ i ) + D ( r ϕ + πγ θ a ) A = --------------------------------------------------------------------------2 πD γ – RI i α (21) θ i température du conducteur au début du régime transitoire (oC) ; La constante de temps τ s’écrit : S ρc c τ = --------------------------------2 πD γ – RI f α On réalise ensuite Ivariable = Ii + ∆I (26) On peut alors poser le pas d’itération suivant : ∆I = 2(θf – θvariable) (27) On effectue un calcul d’échauffement en régime variable avec l’équation (20) en remplaçant I par Ivariable. La boucle itérative est stoppée lorsque θ variable – θ f 0,5°C . 1.5.2 Régime de court-circuit t = A – ( A – θ i ) exp – ---- (20) τ 2 RI i ( 1 À partir de l’équation de calcul d’intensité en régime permanent (15), on en déduit Ii correspondant à θi. (22) Dans le cas d’une solution informatique, les calculs d’effet de peau (coefficient k ) sont inclus dans la boucle de calcul. La résistivité augmente avec la température et modifie ainsi la valeur de ce coefficient. On peut déduire Icc de l’équation (24) : I cc = S ρc c 1 + α ( θ f – 20 ) -----------------ln -----------------------------------α R 20 t 1 + α ( θ i – 20 ) (28) Icc est un courant symétrique. 1.6 Ordre de grandeur des paramètres à prendre en compte dans les calculs d’échauffement ■ Ensoleillement Le tableau 3 donne les valeurs maximales d’ensoleillement relevées à 12 heures TU dans le sud de la France pour les douze mois de l’année. (0) 1.3.2 Régime de court-circuit Celui-ci est considéré comme étant adiabatique. L’équation différentielle (17) prend donc la forme simplifiée suivante : Sρc c dT = I2R 20 [1 + α (θc – 20)]dt (23) Tableau 3 – Valeurs maximales du flux solaire à 12 heures TU Flux solaire (W · m–2) Mois qui a pour solution : 2 α R 20 I f t 1 θ f = 20 – ------ 1 – exp ------------------------- α S ρc c 2 α R 20 I f t + θ i exp ------------------------- S ρc c (24) Dans l’équation (24), il est recommandé d’introduire la valeur de I correspondant au courant thermique équivalent (courant symétrique + composante asymétrique) défini dans la norme CEI 865. Janvier 450 Février 580 Mars 750 Avril 900 Mai 1 000 Juin 1 050 Juillet 1 000 1.4 Calcul du courant en régime permanent Août 980 Septembre 900 Octobre 720 On peut déduire I de l’équation (15) : Novembre 600 Décembre 450 I = λ ∆T s S e ------- Nu + σε S e [ ( θ c + 273,15 ) 4 – ( θ a + 273,15 ) 4 ] – r ϕ D D ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (25) kR 20 [ 1 + α ( θ c – θ 20 ) ] 1.5 Calcul du courant en régime variable 1.5.1 Régime de surcharge temporaire ■ Émissivité, réceptivité Une bonne appréciation de ces deux paramètres peut être donnée par la formulation suivante en fonction de l’âge z (en années) du conducteur, pour une ligne installée à proximité d’une zone urbanisée : 0,7z r ou ε = 0,23 + -------------------1,22 + z Il s’agit de calculer un courant (Ivariable) faisant passer le conducteur d’une température θi à une température θf en un temps t. D 4 439 − 4 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________ LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES ■ Vitesse du vent Pour les calculs thermiques de lignes aériennes, la plupart des réglementations préconisent des vitesses de vent comprises entre 0,5 et 1 m · s–1. 1.7 Exemple d’application Nous rappelons qu’une solution informatique est recommandée du faut des itérations qui sont nécessaires pour ce type de calcul. À partir des différentes équations précédemment définies, il est possible de déterminer les courants permanents et de surcharge admissibles dans un conducteur de ligne aérienne. Prenons l’exemple d’un conducteur de type ASTER 570 dont les caractéristiques sont les suivantes : — section : 570,22 mm2 ; — diamètre extérieur : 31,05 mm ; — diamètre d’un brin : 3,45 mm ; — résistance électrique à 20 oC : 5,83 × 10–5 Ω · m–1 ; — émissivité, absorptivité : 0,7. Conditions climatiques retenues : — température ambiante : 15 oC ; — vitesse du vent : 1 m · s–1 ; — direction du vent : 90o d’incidence ; — puissance solaire : 600 W · m–2. Pour une température du conducteur en régime permanent de 60 oC, nous obtenons un courant permanent de 1 160 A. Pour une température finale du conducteur en régime de surcharge de 90 oC, sur une durée de 10 min, établie à partir du régime permanent (60 oC, 1 160 A), nous obtenons un courant admissible de 1 690 A. 2. Efforts électrodynamiques dus aux courants de court-circuit 2.1 Courant de court-circuit La mise en contact de points à potentiels différents est appelée court-circuit. Dans le cas des réseaux triphasés de transport d’énergie électrique, trois types de courts-circuits peuvent survenir. ■ Lors des courts-circuits triphasés, les trois phases sont mises simultanément en contact. C’est, par exemple, le cas d’une branche qui tombe sur la ligne et se couche sur les trois conducteurs. Ce défaut engendre des forces de répulsion entre les deux phases extérieures du circuit. ■ Pendant les courts-circuits biphasés (ou biphasés-terre s’il y a écoulement du courant par la terre), deux phases seulement sont en contact. C’est le cas d’une branche tombée sur deux conducteurs ou de la perche isolante de travail oubliée entre deux phases. Ce défaut engendre une répulsion des deux conducteurs concernés. ■ Les courts-circuits monophasés entraînent la mise à la terre de la phase concernée. Ce défaut engendre un courant important dans le conducteur concerné. La figure 1 illustre ces différents défauts. Dans le cas des ouvrages de transport d’énergie électrique, l’intensité du courant de court-circuit varie entre 30 et 80 kA. Figure 1 – Les différents types de court-circuit [1] 2.2 Efforts électrodynamiques : description du phénomène La circulation de courants dans des conducteurs parallèles induit dans ces conducteurs des forces électromagnétiques. Ces forces sont attractives ou répulsives (selon que les courants sont de même sens ou de sens opposé) et également réparties le long des conducteurs. Elles sont proportionnelles au produit des intensités circulant dans les deux conducteurs. En cas de court-circuit, on observe alors des surtensions mécaniques appelées efforts électrodynamiques au niveau des supports et des isolateurs d’ancrage, ainsi que des mouvements importants des conducteurs. 2.3 Modélisation mathématique 2.3.1 Principe de calcul des efforts électrodynamiques D’après Laplace, un conducteur électrique parcouru par un courant I1 (A), placé dans un champ magnétique créé par un conducteur parallèle parcouru par un courant I2(A) est soumis à une force électromagnétique F (N/m) : µ0 I1 I2 F = --------- ----------(29) 2π d avec d distance séparant les deux conducteurs (m). Exemples Pour une ligne aérienne à 400 kV sujette à un court-circuit biphasé de 40 kA, on obtient, pour d = 8 m, F = 40 N/m. Pour un faisceau de trois conducteurs en ASTER 570, et une longueur de portée de 500 m, la force électrodynamique vaut environ 1,5 fois la tension mécanique initiale du conducteur. Cet exemple montre qu’il ne faut donc pas la négliger. L’application de la formule (29) est très simple et permet d’obtenir un ordre de grandeur. Toutefois, elle n’est pas suffisante si l’on veut prendre en compte : — les caractéristiques instantanées du courant de court-circuit ; — les mouvements des conducteurs ; — l’élasticité des supports et des conducteurs... Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 439 − 5 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES _______________________________________________________________________ De nombreux programmes informatiques ont donc été développés pour résoudre ces problèmes. Les méthodes de calcul par éléments finis et les nombreuses itérations autorisées par les performances des matériels permettent d’obtenir des résultats numériques très proches des valeurs mesurées expérimentalement. T0 tension initiale du conducteur (N), δ coefficient de dilatation linéaire du matériau (oC–1) ; — les conditions aux limites xi (0,t ) = ϕi (t ) x i ( ,t ) = ψ i ( t ) 2.3.2 Application aux portées en câbles de lignes ou de postes La simulation du comportement dynamique par un modèle mathématique comprend essentiellement le calcul à chaque instant de la position et de la tension de tout point du câble. 2.3.2.1 Hypothèses — Le conducteur est assimilé à un milieu curviligne parfaitement flexible soumis à des forces ponctuelles ou réparties (pesanteur, forces électromagnétiques). L’hypothèse qui consiste à négliger la raideur du câble est d’autant plus justifiée que les forces extérieures appliquées au système sont grandes par rapport à la résistance du câble en flexion. C’est le cas des efforts électrodynamiques dus aux courants de court-circuit importants. — Le matériau est supposé élastique dans le domaine linéaire et son échauffement adiabatique. — Les chaînes de suspension sont représentées par des éléments flexibles et élastiques. Leur rigidité en traction est 1 à 5 fois plus faible que celle du conducteur. — Les chaînes d’ancrage sont représentées par des éléments flexibles et élastiques de même rigidité que le conducteur. avec longueur variable du conducteur (m), ϕ et ψ fonctions du temps dépendant du comportement des supports d’extrémité. Si les extrémités sont fixes, ces fonctions sont constantes ; — les conditions initiales : à l’état initial, la vitesse est nulle en tout point du câble et le profil statique est une chaînette ; — l’amortissement viscoélastique : pour un conducteur toronné, ce phénomène traduit la friction des brins entre eux. L’équation (30) devient alors : ∂ 2 xi ∂x i ∂x i ∂ ρ -------------= ---------- T ----------- + F i ( s,t ) – R f -----------∂s ∂s ∂t ∂t 2 avec Rf résistance par unité de longueur provenant des frottements. Les mesures expérimentales réalisées à l’étranger montrent que, pour ces mouvements de forte amplitude et de basses fréquences, Rf varie entre 0,05 et 0,5 N · S · m2 ; — la résistance de l’air : un élément de conducteur ∆ se déplaçant à une vitesse v subit une force R a (N) de même direction mais de sens contraire au vecteur vitesse et de module : 1 R a = ----- ρ a v 2 Cx D∆ 2 avec 2.3.2.2 Équation de la dynamique L’équation de la dynamique se traduit alors par : ∂x ∂ 2 xi ∂ - = ---------- T ---------i- + F i ( s c ,t ) ρ -------------∂s c ∂s c ∂t 2 (30) coordonnées des points du câble dans un système d’axes de référence (i = 1,2,3), sc abscisse curviligne le long du câble dans l’état déformé, t temps, Fi (s c ,t ) forces extérieures (électromagnétiques, pesanteur, résistance de l’air, vent...), ρ ( s c ,t ) masse linéique variable, avec xi (s,t ) T tension mécanique. 2.3.2.3 Équations complémentaires À cette équation s’ajoutent : — l’équation de conservation de la masse : masse linéique du conducteur dans l’état initial non déformé, dsc0 longueur d’un élément d’arc du conducteur dans l’état initial ; — la loi de comportement du matériau qui se traduit par : θ – θ0 ds c ( T, θ c ) = ds c0 ( T 0 , θ c0 ) [ 1 + δ ( θ c – θ c0 ) ] 1 + --------------- ES avec E module d’Young du matériau (N/m2), S section du conducteur (m2), θc0 température initiale du conducteur, D 4 439 − 6 (33) 1 ----- ρ a v pression dynamique du vent, 2 Cx coefficient de traînée, v vitesse de déplacement de l’élément de conducteur (m/s), ∆ longueur de l’élément de discrétisation du conducteur (m), D diamètre du conducteur (m), ρa masse volumique de l’air (kg/m3) (dans les conditions normales, à 15 oC sous 765 mm de mercure, ρa = 1,228 kg/m3). Pour tenir compte de la résistance de l’air, les programmes calculent un diamètre fictif du conducteur en partant de la section totale des conducteurs du faisceau. Pour les conducteurs de lignes aériennes, on prend généralement : Cx = 1 pour un conducteur simple ; Cx = 1,63 pour un faisceau double ; Cx = 2 pour un faisceau triple ; Cx = 2,3 pour un faisceau quadruple. 2.3.2.4 Détermination des forces électromagnétiques ρ ds c = ρ 0 ds c0 avec ρ 0 (32) (31) La force électromagnétique s’exerçant sur un conducteur C 1 parcouru par un courant d’intensité i1 est la somme de sa force d’induction propre et de la force d’induction mutuelle exercée par le conducteur voisin C2 traversé par un courant d’intensité i2 . dF avec M µ0 = --------- i 1 ds M ∧ 4π 1 -∧i ∇ --------r C1 M1 1 ds 1 + 1 ∇ ---------- ∧ i 2 ds 2 (34) r M2 C2 i1, i2 courants parcourant les éléments de conducteur ds1 , ds2 , ds M, r Mi distance des éléments de conducteur dsi et ds M. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________ LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES 2.3.2.5 Résolution numérique La résolution des équations précédentes se réalise par des méthodes de discrétisation explicites en temps. Pour les différents logiciels existant aujourd’hui sur ce sujet, les méthodes employées sont : différences finies, éléments finis et méthode des caractéristiques. On peut ainsi calculer à tout instant les contraintes en un point donné. Sur les graphes de la figure 2 on peut ainsi suivre l’évolution d’une tension dans un ancrage et le déplacement d’un point à mi-portée. Les valeurs mesurées expérimentalement et les valeurs calculées par éléments finis se superposent assez bien. Pour traiter le problème des efforts électrodynamiques dans les barres rigides de postes, on peut appliquer les mêmes équations en prenant une rigidité infinie de conducteur. Toutefois, le groupe de travail CIGRE 23-02 a proposé une méthode simplifiée [1] qui permet d’évaluer rapidement et surtout manuellement les grandeurs dimensionnantes. 2.4 Pincement dans un faisceau de conducteurs 2.4.1 Description du phénomène Pour augmenter la capacité de transit des ouvrages tout en limitant les pertes et le bruit produit par effet couronne, les conducteurs de phase sont souvent constitués de plusieurs sous-conducteurs réunis en faisceau (faisceau double jusqu’à 225 kV, triple ou quadruple en 400 kV). En cas de court-circuit s’ajoute alors aux efforts électrodynamiques précédemment cités un phénomène supplémentaire appelé pincement. Celui-ci résulte de l’attraction des sous-conducteurs du faisceau parcourus par un même courant et séparés par une distance faible (généralement 600 mm pour les faisceaux doubles ou triples et 400 mm pour les faisceaux quadruples). Il induit des forces très importantes dans les entretoises assurant l’écartement du faisceau, un contact des conducteurs entre ces entretoises et des surtensions mécaniques très importantes qui sont transmises à toute la structure. La bonne connaissance de ces phénomènes est nécessaire car ils sont souvent dimensionnants pour certains éléments (ancrage des conducteurs et entretoises en particulier). La figure 3 permet de comprendre les différentes phases du mouvement. 2.4.2 Modélisation mathématique Plusieurs études expérimentales sur le sujet ont montré la sensibilité du phénomène à de très nombreux paramètres : longueur de la sous-portée, distance entre sous-conducteurs nombre de sousconducteurs, raideur et inertie des ancrages, raideur des entretoises, tension de pose, caractéristiques intrinsèques des sous-conducteurs. Les modèles développés pour l’étude du pincement étant complexes, nous ne donnerons ici que quelques formules simplifiées permettant d’obtenir des ordres de grandeur. Indépendamment de l’intensité du court-circuit, il n’y a contact que lorsque les conditions suivantes sont réunies : ou a s 2d s et s 50a s a s 25d s et s 70a s avec as distance entre sous-conducteurs, ceux-ci étant supposés équirépartis (m), ds diamètre du sous-conducteur (m), Figure 2 – Comparaisons de valeurs calculées par éléments finis et mesurées expérimentalement lors d’essais de court-circuit s longueur de la sous-portée (m). Dans ce cas, la force de tension induite par l’effet de pincement peut être négligée devant la force électrodynamique. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 439 − 7 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 LIGNES AÉRIENNES : ÉCHAUFFEMENTS ET EFFORTS ÉLECTRODYNAMIQUES _______________________________________________________________________ D’après les travaux de Manuzio [2], pour un court-circuit d’intensité efficace inférieure à 40 kA et pour un faisceau de deux conducteurs, on peut déterminer l’effort maximal de compression dans les entretoises Fc(N) par la formule : F c = 1,57 × 10 –3 as I cc T lg ------ds (35) L’allongement des conducteurs, dû à leur rapprochement corrigé de la modification du profil de la chaînette d’une sous-portée, permet d’obtenir la tension du conducteur en fonction de la longueur de contact des câbles et de comparer cette valeur, par l’intermédiaire de l’angle ψ à la force électromagnétique développée sur une entretoise (figures 5 et 6). Une bonne approximation de l’effort maximal de compression Fc d’une entretoise d’un faisceau double est donnée par la relation : Exemple Pour une ligne en faisceau double ASTER 570 traversée par un courant de court-circuit d’intensité efficace 40 kA, on trouve : Fc ≈ 12 000 N avec Icc = 40 000 A, T = 33 000 N, as = 0,4 m, ds = 0,031 m Pour les courants de court-circuit d’intensité supérieure à 40 kA, on constate expérimentalement des surtensions mécaniques induites au niveau des ancrages dont l’amplitude et la fréquence sont très élevées. Ces surtensions apparaissent dans les premiers instants du défaut, comme on peut le constater sur la figure 4. Le calcul de la surtension mécanique dans le conducteur et des efforts engendrés dans les entretoises se fait en recherchant l’équilibre statique d’une sous-portée soumise aux forces de pesanteur et aux forces électromagnétiques, la déformée du conducteur au voisinage de l’entretoise étant considérée comme rectiligne. 2 L as + ds –7 I sp0 – L c F c = 4 × 10 ----- ------------------------- ln -------------------- 2 a s – d s 2d s avec I valeur du deuxième maximum de l’intensité du courant de court-circuit pour les défauts asymétriques ou valeur maximale du courant pour les défauts symétriques (A), L sp0 longueur développée de la chaînette d’une sous-portée dans son état initial (m), L c longueur de contact des conducteurs du faisceau (m). Notons toutefois que ces formules sont très approximatives et limitées aux faisceaux de deux conducteurs. Plusieurs logiciels de calcul développés dans différents pays permettent aujourd’hui l’obtention de résultats fiables. Sur les lignes aériennes du réseau français, on ne rencontre aucun problème dû au pincement. Par contre, dans les postes, l’effet de pincement peut se constater sur certaines connexions semi-tendues. La brusque surtension mécanique peut aller jusqu’à provoquer la rupture de la colonne d’accrochage de la connexion. Figure 3 – Phénomène de pincement sur un faisceau double Figure 5 – Déformée de la développée de la chaînette dans un plan horizontal Figure 4 – Évolution temporelle de la tension mécanique d’un faisceau pour différentes durées de court-circuit [3] Figure 6 – Modification du profil de la chaînette entre deux entretoises D 4 439 − 8 (36) Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Lignes aériennes : échauffements et efforts électrodynamiques P O U R E N par Michèle GAUDRY Ingénieur de l’École centrale de Paris Ingénieur-chercheur au département Postes et Lignes de la Direction des études et recherches d’EDF Secrétaire du groupe CIGRE 22-12 (comportement électrique et thermique des conducteurs) et Jean-Luc BOUSQUET Ingénieur Groupe Coordination électrique et mécanique des ouvrages à la Direction des études et recherches d’EDF Bibliographie Références [1] [2] Ouvrages généraux Échauffements MORGAN (V.T.). – Thermal behaviour of electrical conductors. Research studies press LTD. HOLMAN (J.P.). – Heat transfer. McGraw-Hill Book Company. Efforts électrodynamiques LILIEN (J.L.). – Contraintes et conséquences électromécaniques liées au passage d’une intensité de courant dans les structures en câbles. Thèse de doctorat, Publication no 87 de la faculté de sciences appliquées de Liège (Belgique) (1983). CEI. – Calcul des courants de court-circuit dans les réseaux triphasés à courant alternatif. Norme 909. DALLE (B.) et ROUSSEL (P.). – Mechanical effects of short-circuit currents on overhead lines. A-79-055 IEEE PES, Winter meeting (1979). DALLE (B.). – Étude du pincement d’un faisceau de conducteurs d’une portée de ligne lors d’un court-circuit. Colloque de Sienne, CIGRE (1979). LILIEN (J.L.) et EL ADNANI (M.). – Faisceaux de conducteurs et efforts électrodynamiques. Vers une approche numérique fiable. IEEE, MONTECH 1986 Conference on AC Power Systems, p. 79-84, oct. 1986. Doc. D 4 439 2 - 1997 [3] CIGRE WG 23-02. – Mechanical effects of short-circuit currents in open air substations. Brochure CIGRE (1987). MANUZIO (C.). – An investigation on the forces on bundle conductor spacers under fault conditions. IEEE Transactions PAS, p. 166184, fév. 1967. EL ADNANI (M.). – Efforts électrodynamiques dans les liaisons à haute tension constituées de faisceaux conducteurs. Thèse de doctorat, Publication no 112 de la faculté de sciences appliquées de Liège (Belgique) (1989). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Doc. D 4 439 − 1 S A V O I R P L U S