Géopolitique et relations internationales en Europe

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Chapitre I
Géopolitique et
relations internationales en Europe
aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles
Introduction : Les limites chronologiques de l’époque moderne sont souvent situées entre 1453 (chute de
Constantinople et fin de la guerre de 100 ans) ou 1492 (découverte de l’Amérique) et 1789 (début de la
révolution française). Géographiquement, on situe l’Europe entre la Scandinavie, la Méditerranée, l’Atlantique et
l’Oural. On trouve à cette époque, en Europe, quatre types d’états :
-les empires (Saint-Empire et Empire Ottoman)
-les royaumes (France, Angleterre, Pologne, Suède…)
-les principautés (Grand duché de Lituanie, Grand duché de Russie, états de l'Église)
-les républiques (Venise, Gênes)
Il y a trois grandes phases de l’histoire de l’Europe entre 1492 et 1789 :
-entre le XVIe et le milieu du XVIIe, l’Europe est dominée par les Habsbourg
-entre 1661 et 1715, la France tente d’imposer son hégémonie
-entre 1715 et 1789, quatre puissances dominent : L’Angleterre, la France, la Prusse et l’Autriche
I./ La tentative d’hégémonie des Habsbourg
A/ Puissance et difficultés des Habsbourg
1) L’empire de Charles Quint (1519-1556)
Il domine des relations européennes dans la première moitié du XVIe siècle, il présente trois caractéristiques :
-il est très étendu : au sud de l’Europe, avec les royaumes espagnols (Aragon, Castille, Navarre), les territoires
italiens (Sardaigne, Sicile, Naples, duché de Milan), au nord, avec la Franche-Comté et les Pays-Bas, en Europe
central, avec l’Autriche, la Bohème, la Silésie, la Moravie et une partie de la Hongrie, et dans les colonies
américaines, avec le Pérou et la Nouvelle-Espagne. Depuis 1519, Charles Quint est empereur du St Empire
Romain Germanique (350 états qui forment une confédération).
-Il est très puissant : Charles Quint possède les territoires les plus riches d’Europe et des colonies américaines
(mines d’or et d’argent), il a donc les moyens d’entretenir une armée et une infanterie redoutée dans toute
l’Europe.
-Il présente certaines faiblesses : il est dispersé et hétérogène (langues, institutions, lois…). Charles Quint doit
sans cesse déléguer et voyager.
De plus à partir de 1520, se développe le protestantisme, mené par Martin Luther. Cet essor inquiète l’empereur,
il va mener trois politiques différentes :
-des négociations avec Martin Luther, qui seront un échec
-des persécutions, qui seront aussi un échec
-une guerre, contre les princes protestants, elle sera également un échec.
Le protestantisme s’installe durablement, en 1555 et 1556, Charles Quint abdique, et partage ses titres entre son
fils Philippe II et son frère Ferdinand. Il finit sa vie dans un monastère espagnol.
2) Les deux branches des Habsbourg (du milieu du XVIe, au milieu du XVIIe)
Durant cette période, le fils de Charles Quint, Philippe II, est Habsbourg de Madrid et le frère de Charles Quint,
Ferdinand est Habsbourg et Vienne. Ces deux branches sont très unies et mènent souvent une politique commune
en Europe, comme la défense du catholicisme, et tentent de dominer les relations internationales.
Les Habsbourg de Vienne
Les relations entre princes protestants et catholiques restent tendues. L’empereur de Vienne a de plus en plus de
mal à imposer son autorité. Finalement ces tensions débouchent sur une guerre civile (de religion) : la guerre de
Trente ans, qui dure de 1618 à 1648 (elle fait plus de 10 millions de morts) et va s’internationaliser : l’Espagne,
du côté de l’empereur, et la Suède et la France du côté des protestants (stratégie française pour affaiblir les
Habsbourg). Cette guerre se termine avec une série de traités de Westphalie, et la victoire des princes protestants
allemands qui gagnent plus d’autonomie. L’autorité de l’empereur sort affaiblie de ce conflit, il ne peut plus
dominer les relations internationales.
Les Habsbourg de Madrid
Philippe II a un règne brillant (de 1556 à 1598), c’est le souverain le plus puissant d’Europe. Il agrandit l’empire
colonial espagnol en Asie du sud-est (les Philippines) et remporte une victoire navale sur l’empire Ottoman en
1571 (victoire de Lépante). En 1580, il prend possession du Portugal par filiation (et récupère ainsi des colonies,
dont le Brésil). Lui succèdent Philippe III (1598-1621) et Philippe IV (1621-1655). Le roi d’Espagne laisse
gouverner ses favoris. Au milieu du XVIIIe, l’Espagne aussi est affaiblie car elle ne peut plus exercer son
hégémonie sur l’Europe.
B/ Les principaux concurrents des Habsbourg (du début du XVIe au milieu du XVIIe)
1) l’Empire Ottoman
Au XVI et au XVII, cet empire est en pleine expansion, les ottomans prennent la Turquie en 1453 et continuent à
conquérir des terres. Sous Soliman Le Magnifique (1520-1566), ils s’étendent en Afrique du nord, au MoyenOrient, en Asie Mineure, en Europe du sud-est (Balkans, Grèce…). C’est un empire plus homogène et moins
dispersé que celui des Habsbourg. Sa puissance est démographique (15 à 20 millions d’habitants), économique
(revenus deux fois plus importants que ceux de Charles Quint), militaire (infanterie très crainte : les janissaires),
sans oublier l’importance d’Istanbul. Soliman s’oppose aux Habsbourg en contestant leur domination. Malgré la
victoire de Lépante, la domination des Ottomans reste écrasante en Méditerranée (trois quart des rivages). A
deux reprises leur progression les amène jusqu’aux portes de Vienne :
- en 1529, ils envahissent toute la Hongrie et font le siège de Vienne. Plusieurs semaines plus tard, Soliman
abandonne et la ville reste aux Habsbourg.
-en 1683, les ottomans arrivent une nouvelle fois aux portes de Vienne, et une nouvelle fois c’est une défaite.
Pour l’occasion les pâtissiers viennois créent le croissant.
2) La France
Ce royaume puissant a trois atouts :
-il est homogène, d’un seul tenant, et a accès à la Mer du Nord, à la Manche, à l’Atlantique et à la Méditerranée.
-C’est le plus peuplé : un quart de la population européenne
-Il a les recettes fiscales les plus importantes et peut entretenir une armée puissante.
Cependant la France a connu deux grandes difficultés :
-les guerres de religion (1562-1598) opposant catholiques et protestants. Elle connait son apogée lors de la nuit
de la St Barthélémy (le 24 aout 1572) et la mort de 1000 personnes au Louvre. En 1569, Coligny fait le siège de
Poitiers. La guerre prend fin avec l’édit de Nantes.
-La Fronde (1648-1653), les grands du royaume se soulèvent pendant la minorité de Louis XIV. Elle entraine un
affaiblissement du pouvoir.
Durant ces deux guerres, les Habsbourg d’Espagne sont intervenus et ont menacé la France. Malgré ces
difficultés, elle se pose en rivale de la dynastie habsbourgeoise à deux reprises :
-dans la première moitié du XVIe, lors des guerres d’Italie : les rois français sont fascinés par l’Italie et
souhaiteraient y faire des conquêtes, notamment François 1 er (1515-1547). C’est un roi positif, constructeur de
châteaux. En 1515 il remporte la victoire de Marignan en Italie du nord contre de petits princes italiens, mais en
1525, à la bataille de Pavie, il est défait et fait prisonnier pendant un an. Il est libéré par le paiement d’une
rançon.
-durant la guerre de Trente Ans (1618-1648) : une guerre civile oppose les princes protestants allemands à
l’empereur de Vienne. Les français n’interviennent qu’en 1635 (sous Louis XIII et Richelieu) dans le camp des
protestants. Pour mener la guerre, Richelieu multiplie les impôts des français par quatre. Le but est d’affaiblir les
Habsbourg, et c’est plutôt une réussite : l’autorité de l’empereur est sévèrement atteint.
3) Le royaume d’Angleterre
C’est le moins puissant des rivaux des Habsbourg, mais sous Élisabeth 1 ère (1558-1603) il va s’opposer
violemment à Philippe II. En effet les deux royaumes sont rivaux colonialement (pour la Virginie),
maritimement, commercialement, religieusement, et surtout parce que la royauté entretient des corsaires chargés
d’attaquer les navires espagnols revenant des colonies. En 1588, Philippe II veut se débarrasser de la reine. Il
rassemble ses navires, et cette armée impressionne tellement ses contemporains qu’elle se fait appeler
« l’invincible armada ». Quand la flotte arrive près des côtes anglaises, une tempête disperse les navires et contre
toutes attentes, la mobilisation anglaise de tous les bateaux disponibles résiste. C’est l’échec de l’armada de
Philippe II.
Après Élisabeth Ière, ses successeurs sont moins actifs et moins présents sur la scène internationale, la royaume
reste de deuxième importance.
Conclusion : Durant cette période, les Habsbourg dominent le jeu diplomatique européen. Cependant, à partir de
1640-50, les Habsbourg de Madrid et de Vienne subissent plusieurs revers dont ils ne se remettront pas : ils ne
sont désormais plus capables d’exercer leur hégémonie sur l’Europe.
II./ La tentative d’hégémonie française (1661-1715)
A/ La politique européenne de Louis XIV
1) L’importance de la guerre
Louis XIV règne pendant 54 ans, il en passe 30 à faire la guerre, dont il est l’initiateur la plupart du temps. Il
mène trois guerres principales :
-la Guerre de Dévolution, de 1667 à 1668, contre l’Espagne
-la guerre de Hollande, de 1672 à 1679, contre les Provinces-Unies
-la guerre de la Ligue d’Augsbourg, de 1688 à 1697
2) Les raisons de cette politique belliqueuse
-Le prestige et la gloire. (Guerre de dévolution)
Louis XIV veut montrer sa puissance. On peut prendre pour exemple la guerre de Dévolution : la France déclare
la guerre à l’Espagne, voulant profiter de ce qu’elle est affaiblit pour l’humilier.
-la conquête de territoires.
Le roi de France veut consolider les frontières du nord et de l'est, car elles sont trop proches de Paris. Pour cela il
conquiert l’Artois, la Franche-Comté, le Roussillon (aux espagnols), Strasbourg et l’Alsace (au St Empire)
-l’objectif économique. (Guerre de Hollande)
Les Provinces-Unies naissent d’une guerre de religion. La partie nord protestante déclare son indépendance en
1579. Au cours du XVIIe siècle les 7 provinces constituant les Provinces-Unies deviennent la première puissance
commerciale, la plus puissante. Louis XIV décide d’attaquer le jeune pays, en 1672. L’armée française passe par
les Pays-Bas et conquiert jusqu’aux trois quarts des territoires. Le gouvernement des Provinces-Unies se réunit et
décide d’ouvrir les digues. Les armées françaises sont contraintes de reculer, la guerre s’enlise et
s’internationalise, avec l’intervention des espagnols. En 1679, les Provinces gardent leur indépendance mais les
français prennent la Franche-Comté aux espagnols.
L’Angleterre est la deuxième puissance commerciale européenne, et une rivale coloniale (Louisiane). A partir de
1688, les deux royaumes sont en opposition permanente, voir en guerre, avec la Guerre de la Ligue
d’Augsbourg.
3) La guerre de succession d’Espagne (1701-1715)
A l’origine de cette guerre, un problème de succession :
Le fils de Philippe IV (1621-1655), Charles II (1665-1700) est stupide, laid, feignant, infirme, et surtout stérile.
La succession espagnole devient un enjeu européen. Finalement la diplomatie de Louis XIV impose sur le trône
son deuxième petit fils, Philippe d’Anjou (par Marie-Thérèse). Mais fatigués par les guerres incessantes menées
par la France, la quasi-totalité des pays européens forment une coalition pour attaquer le royaume. La guerre ne
se termine qu’en 1714, la France en sort affaiblie, et ne pouvant plus exercer son hégémonie.
B/ L’Europe en 1715
1) La France
La France est toujours une grande puissance, elle conserve les conquêtes de Louis XIV, mais elle connait une
terrible crise financière : la Guerre de succession d’Espagne a couté très cher. L’état ne peut presque plus payer
ses dettes. Ses problèmes budgétaires l’empêchent d’exercer son hégémonie sur l’Europe.
2) L’Espagne
En 1715, Philippe II d’Anjou est roi d’Espagne, mais c’est un pays vaincu et le grand perdant des dernières
années : elle perd le Portugal (espagnol de 1580 à 1668), l’Artois, le Roussillon et la Franche-Comté ainsi que
ses territoires italiens. Il lui reste quelques colonies. Ce n’est plus une grande puissance.
3) L’Autriche
L’Autriche s’est agrandie, en Hongrie, aux Pays-Bas, en Sardaigne, en Italie… c’est la grande gagnante des
guerres précédentes.
4) L’Angleterre
Elle a gagné le droit de commerce avec les colonies espagnoles et portugaises. Elle a aussi agrandie ses
possessions coloniales (Terre-Neuve et Acadie).
5) Les Brandebourg
C’est un état protestant allemand du St Empire Romain Germanique. Il s’est agrandi pendant la guerre de Trente
ans. En 1701, le prince de Brandebourg négocie avec l’empereur de Vienne le titre de roi de Prusse contre son
intervention contre la France pendant la guerre de succession d’Espagne. Dés le début, ce nouveau pays apparait
comme un état structuré et organisé, qui possède une armée redoutable.
III./ L’Europe au XVIIIe siècle (1715-1789)
A/ Un jeu diplomatique à quatre
1) Nature des relations internationales
Sur le continent européen, aucun état n’est capable de dominer seul les autres états. Quatre pays cependant
sortent du lot : l’Autriche, la Prusse, la France et l’Angleterre. Des alliances se nouent. Outre-mer, une puissance
cherche à instaurer une hégémonie commerciale maritime et coloniale : l’Angleterre. Elle possède l’Amérique du
Nord et les Indes. Son seul concurrent est la France.
2) Les guerres du XVIIIe siècle
La guerre de succession d’Autriche (1740-1748), est à l’origine un problème de succession sur le trône de
Vienne. En 1740, l’empereur de Vienne, Charles VI, meurt. Marie-Thérèse d’Autriche lui succède. La Prusse
conteste la légitimité de l’impératrice et déclare la guerre à l’Autriche. Le conflit s’internationalise : L’Autriche
s’allie à l’Angleterre, et la Prusse à la France. Il y a trois théâtres d’opération : en Silésie dont les prussiens
s’emparent (Autriche/Prusse), aux Pays-Bas conquis par la France pendant la victoire de Fontenoy
(Autriche/France) et sur mer, dans les colonies. La guerre s’achève avec le traité d’Aix-la-Chapelle, en 1748. La
Silésie revient à la Prusse et les Pays-Bas restent autrichiens : Louis XV y renonce, car ils seraient prétexte d’une
nouvelle guerre.
La guerre de Sept ans (1756-1763), est une guerre de revanche sur la Prusse par l’Autriche qui veut récupérer la
Silésie. Cette fois, elle est alliée à la France. La guerre s’achève en sa défaveur par le traité de Paris.
La rivalité coloniale entre la France et l’Angleterre a lieu pendant tout le XVIIIe siècle. Elles s’affrontent
notamment aux Indes et en Amérique du Nord. L’Angleterre remporte presque toutes les possessions (traité de
Paris). La France garde 5 comptoirs indiens et St Pierre-et-Miquelon.
3) Vainqueurs et vaincus
L’Angleterre est le grand vainqueur, elle réussit à s’emparer des colonies françaises, et devient maitresse des
Indes. C’est une puissance de premier plan en Europe. Cependant, en 1778, les colonies américaines se
soulèvent. La guerre d’indépendance américaine dure de 1778 à 1783, pendant laquelle les américains obtiennent
le soutien des français (avec Lafayette et Rochambeau). Cette guerre s’achève avec l’indépendance des ÉtatsUnis.
La Prusse s’est agrandie, avec la Silésie, son armée a également gagné un grand prestige.
La France a un bilan mitigé. Elle perd son empire colonial, mais s’est agrandie : en 1776, la Lorraine devient
française par testament et en 1768, elle achète la Corse aux génois qui ne le contrôle plus.
L’Autriche, a un bilan globalement négatif. Elle a subi des pertes territoriales : la Silésie, l’Italie, des territoires
du St Empire. Le pouvoir de l’empereur a été très affaibli.
B/ Les modifications territoriales périphériques
La Russie est une puissance montante. Elle s’est renforcée sous trois souverains : Ivan le Terrible (1547-1584),
premier tsar, Pierre le Grand (1682-1725) qui déplace la capitale à St-Petersburg, et Catherine II (1762-1796). La
Russie intervient dans la guerre de Sept ans du côté de l’Autriche. A la fin du XVIIIe siècle, elle s’étend jusqu’à
la Mer Noire et espère s’étendre jusqu’en Méditerranée.
La Pologne, royaume catholique est un royaume vaste qui décline au XVIIIe siècle. En 1772, la Prusse,
l’Autriche et la Russie se mettent d’accord pour s’emparer chacun d’un morceau de Pologne : c’est le Premier
Partage de la Pologne. Il y en a un second en 1793 et en 1795 le Pologne disparait totalement jusqu’en 1919.
L’empire Ottoman recule en Europe. Il est menacé par la progression autrichienne (Hongrie et Balkans) et russe
(Mer Noire). C’est « l’homme malade de l’Europe ».
Conclusion : C’est l’échec des tentatives pour établir un empire catholique universel en Europe (rêve de
Charles Quint et Philippe II). Aucune puissance n’a réussi à imposer son hégémonie sur l’Europe. A partir de la
fin du XVIIIe siècle, les « états-nations » s’imposent sur scène, évolution confirmée pendant les siècles qui
suivent.
Chapitre II
Population et démographie en Europe aux
XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles
Introduction : La démographie historique est l’étude des populations passées, de leur évolution, de leur
composition et de leur structure. C’est une discipline récente (environ 50 ans). Avant il était difficile de se faire
une idée précise de la population française. La connaissance de la démographie historique est permise grâce à
plusieurs sources : dépouillement, lecture de dénombrement de population, documents fiscaux (rôle de taille) et
registres de paroisses. Grâce à ces trois types, on arrive à avoir une idée assez précise de la situation
démographique. La démographie est révélatrice de la bonne ou de la mauvaise santé d’un pays. Elle permet de
mieux connaitre la vie des européens : leu vie quotidienne, leur rythme de vie, leurs mœurs et coutumes et leurs
mentalités, c’est aussi révélateur des réussites et difficultés d’un pays : au XVIe siècle, l’Espagne est un pas
puissant, sa population augmente ; au XVIIe, elle connait des difficultés, sa population stagne. Il se produit
l’inverse pour l’Angleterre.
I./ Présentation générale de la population européenne
A/ Une population européenne importante
Au milieu du XVIIe siècle, la population mondiale est de 525 millions d’habitants.
-Inégalement répartie, certaines régions sont désertes (une partie de l’Amérique, de la Sibérie et Asie centrale…)
-la population de concentre dans trois foyers de peuplement : La Chine et Japon (190 millions d’habitants),
l’Inde (130 millions d’habitants) et l’Europe (100 millions d’habitants)
-la population européenne représente 20% de la population mondiale
B/ Une population européenne inégalement répartie
Paris, Istanbul et Londres sont les plus grandes villes européennes, elles comptent plus de 500 000 habitants. Il y
a trois types de régions :
-des régions très densément peuplées (plus de 40 hab/km 2) comme l’Europe du Nord-Ouest (Nord de la France,
l’Angleterre, les Provinces-Unies, les Pays-Bas et l’ouest des pays allemands), le nord de l’Italie et une partie de
l’Autriche.
-des régions moyennement peuplées (entre 20 et 40 hab/km2) comme le sud de la France, la Germanie et la
région de Moscou.
-des régions beaucoup moins peuplées (moins de 20 hab/km2) comme la Scandinavie et les Balkans
C/ Une population européenne croissante
Sur l’ensemble de la période, la population a augmenté : en 1500, on compte environ 75 millions d’européens, en
1650 on en compte 100 millions et en 1789, ils sont environ 200 millions. Il s’agit d’une croissance irrégulière.
Au XVIe siècle, la croissance est générale, au XVIIe, certaines populations baissent (l’Allemagne passe de 20 à
8 millions d’habitants), d’autres sont stables (France) et d’autres augmentent (les Provinces-Unies, la Suède…).
Au XVIIIe, la croissance redevient générale.
II./ Le système démographique européen
A/ Le mariage sous l’ancien régime
Il est quasi général en Europe : le célibat concerne moins de 5% de la population (religieuses et clergé). Les
remariages sont très fréquents après un veuvage. L’âge du premier mariage est relativement élevé : 27 ans pour
les hommes, 26 ans pour les femmes. Il s’agit peut-être du « moyen de contraception » de l’époque.
B/ Une natalité forte
L’essentiel des naissances a lieu pendant le mariage. Les naissances hors-mariages, dites « illégitimes »
représentent moins de 1% des naissances totales. Le taux de fécondité est élevé : entre 6 et 7 enfants/femme. Le
taux de natalité est aussi élevé : 40%0.
C/ La mortalité
La mortalité est élevée à deux niveaux :
-les adultes : deux époux arrivent rarement à l’âge de 40 ans, notamment à cause des risques dus à
l’accouchement. Le taux de mortalité adulte est de 40%0. L’espérance de vie à la naissance est de 27 ans.
-les enfants : sur 4 enfants, un mourra avant un an et un entre 1 et 10 ans. Si l’accouchement est difficile, l’enfant
meurt et parfois la mère aussi. A la fin du XVIIIe siècle, il y a cependant des progrès, avec des écoles de sagesfemmes.
De manière générale, l’encadrement médical est déficient et consiste à des saignées et aux hôpitaux (hôtel-Dieu).
Les crises démographiques sont fréquentes.
III./ Le poids des crises démographiques
A/ Définition
Le nombre de décès augmente beaucoup, tandis que les conceptions et les mariages baissent considérablement.
La crise commence quand la mortalité est plus importante que la natalité. La conséquence est la baisse de la
population (entre 10 et 30% de moins), la dislocation des ménages et la crise économique.
B/ Essai d’explication
- les guerres nombreuses : presque toutes les régions ont connu au moins une guerre. Le passage des gens de
guerre entraine une crise puisqu’ils se servent sur place, pillant les réserves et désorganisent l’économie des
villages.
-les famines, très courantes dans l’ancien régime (problèmes climatiques)
-les épidémies : la dysenterie, la variole (ou petite vérole), le typhus, la peste (fréquente dans tous les pays au
XVIe et XVIIe siècle, elle tue entre un tiers et un quart de la population). La dernière grande épidémie de peste a
lieu entre 1720 et 1722 dans la région de Marseille, venant par bateau du Moyen-Orient. Pendant deux ans, on
isole totalement le secteur concerné. Toutes ces épidémies sont véhiculées par les soldats, les marchands et les
pauvres.
Parfois, plusieurs causes se cumulent, on a alors une catastrophe démographique.
C/ Deux exemples de crises démographiques
Sur le territoire allemand, au début du XVIIIe siècle ; il y a alors une guerre civile qui s’internationalise (guerre
de Trente ans), en plus d’une famine, due à la baisse de température, qui entraine de mauvaises récoltes et des
épidémies de maladies bénignes mais fatales dans ces conditions, en plus de la peste qui frappe plusieurs fois.
Bilan : La population passe de 20 millions (en 1600) à 8 millions (en 1650).
En France, en 1694 et 1693, on cumule mauvaises récoltes (médiocres en 1690, mauvaises en 1691, très
mauvaises en 1692 et en 1693, moyennes en 1694), la guerre de la Ligue d’Augsbourg (qui entraine une
augmentation de la taille) et des épidémies.
Bilan : Un surplus de 1,5 millions de morts (1,7 millions selon Lachiver)
Conclusion : L’Europe est un continent peuplé aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. C’est des trois grands
foyers de population dans le monde à ce moment là. Le système démographique européen est assez exubérant :
les taux de natalité et de mortalité sont élevés et il y a fréquemment des flambées de mortalité. La mort fait partie
du quotidien des français. Tout européen a connu au moins une crise démographique, cela marque profondément
les mentalités : on se rapproche à la religion pour se rassurer.
Chapitre III
L’économie en Europe,
aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles
Introduction : L’économie européenne est avant tout une économie rurale. L’essentiel de la production
économique est réalisée dans les campagnes. 80 à 90% des européens sont des ruraux. L’économie d’ancien
régime présente deux grandes caractéristiques : elle est très archaïque (c’est toujours une économie médiévale, à
faible rendement), mais présente cependant des caractères nouveaux, comme la recherche de profit,
l’élargissement des marchés, l’économie monétaire pénètre tous les secteurs, les états européens ont tendance à
intervenir de plus en plus dans le domaine économique. Quelques états mènent une vraie politique économique,
comme les Provinces-Unies et la France. L’intervention de l’état dans l’économie s’appelle le colbertisme. Au
XVIIIe siècle, tous les états sont impliqués dans l’économie…
I./ La prédominance de l’agriculture
L’agriculture est un secteur qui fait vivre l’essentiel des européens. Elle présente trois particularités :
A/ Dominée par l’activité céréalière
Les paysans européens sont avant tout occupés à cultiver céréales (les bleds : seigle, avoine, orge, froment) qui
sont la base de l’alimentation, on les mange sous forme de pain, de galettes, de bouillies… Sous Louis XIV, une
personne mange un kilo de pain par jour. Ces plantes sont difficiles à cultiver, elles sont exigeantes, demandent
des soins, du temps et de l’espace. Les bleds occupent la majeure partie des terres cultivées en Europe. Il existe
trois grands paysages agraires :
-les paysages d’openfield, ou champs ouverts, caractérisés par des habitats groupés et des parcelles agricoles non
clôturées. On les trouve en Europe du nord, en Hongrie, en Pologne, en Vieille Castille et en île de France. La
culture des bleds domine.
-les paysages de bocages présentent des habitats dispersés, des parcelles encloses, séparées par des haies. On le
trouve dans la façade atlantique, au Portugal, en Espagne du nord ouest. Là aussi, les bleds dominent.
-les paysages de huertas présentent des habitats dispersés et des parcelles agricoles irriguées et protégées par des
haies. On les trouve en méditerranée.
La faiblesse des autres productions agricoles vient de l’exigence de la culture des bleds. Les autres cultures
deviennent secondaires. Pierre Goubert écrit La tyrannie des bleds . Il y a cependant d’autres productions : en
méditerranée on cultive la vigne et l’olivier. On élève des chapons, de la volaille, des chevaux, des bœufs
(surtout pour le labour) et des ovins (transhumance). L’alimentation est peu carnée.
B/ Une agriculture très archaïque
1) Des techniques agricoles souvent rudimentaires
Les labours sont de mauvaise qualité (octobre/novembre). L’outil le plus efficace est la charrue (soc
dissymétrique, qui fend et retourne la terre) mais c’est l’araire qui est le plus utilisé (soc symétrique qui se
contente de fendre la terre). Les semailles sont également de mauvaise qualité : on sème à la volée, ce qui
entraine un ensemencement irrégulier. On utilise peu d’engrais (fumures) car il y a peu d’élevage, les sols
s’épuisent donc rapidement. Les instruments de récoltes sont également peu efficaces. On coupe les bleds à la
faucille, peu à la faux et on utilise un fléau pour les battre, ce qui entraine de grandes pertes.
2) Des systèmes de culture assez figés
Le terroir (ensemble des terres cultivées dépendantes d’une communauté) est divisé en plusieurs soles (trois,
dans le système triennal). L’un est consacré à la jachère, un autre aux bleds d’hiver (froment) et un autre aux
bleds de printemps (avoine). Il faut que tout le village s’entende sur la répartition, sur la rotation des cultures et
sur les dates. Il faut aussi que chacun dispose d’une parcelle sur chaque sole. Dans un système biennal, le terroir
est divisé en deux. Le problème majeur est que l’ensemble des terres n’est pas exploité.
3) Des agricultures ayant peu connu d’innovations
Les pommes de terre arrivent d’Amérique, elles sont caloriques, demandent peu de temps, d’espace, mais le
système figé de culture triennal ou biennal empêche l’innovation. Seules les Provinces-Unies mettent en place un
système d’assolement perfectionné. On réduit les terres en jachère, on développe l’élevage qui permet de
récupérer des fumures comme engrais. La production agricole devient excédentaire. La production devient
excédentaire, et les Provinces-Unies vendent et exportent les produits laitiers (fromages de hollande) et les
tulipes. C’est une exception en Europe.
C/ Une agriculture fragile
1) Faiblesse de rendement
En Russie, pour un grain semé on en récolte trois. On en récolte trois ou quatre en Pologne et en Espagne. On en
récolte 4 à 5 grains. L’Angleterre récolte 6 grains par grain semé. Mais les Provinces-Unies détiennent le record
avec 15 grains récoltés par grain semé.
2) Une agriculture qui assure tout juste l’autosuffisance
Les paysans ne gardent pas l’ensemble de leur récolte :
-prélèvements fiscaux : la dîme (pour l'Église) représente une gerbe sur dix, le prélèvement seigneurial et les
impôts royaux représentent chacun 5 à 10% de la récolte.
-deuxième prélèvement : Il faut aussi payer la location de la terre. Dans le cas d’un fermage, le montant est fixe,
dans le cas d’un métayage, on partage la récolte, souvent moitié-moitié.
-prélèvement « naturel » : il faut mettre de côté une partie de la récolte pour ressemer l’année d’après.
Dans un tel système, il reste peu pour la subsistance d’une famille paysanne. Dans une année normale, les
récoltes permettent juste de survivre.
3) Une agriculture qui a du mal à faire face aux conjonctures difficiles
Les guerres, les crises démographiques et le climat (petit âge glaciaire au XVIIe, qui entraine des hivers froids et
des étés pourris) ont de grandes incidences sur les récoltes. Exemple de l’Alsace.
II./ Un secteur manufacturier secondaire
A/ Les cadres de la production
1) Des cadres structurels assez archaïques
La production est très artisanale. L’outillage et les technique sont les mêmes qu’au Moyen-âge. On utilise
l’énergie humaine, hydraulique, éolienne et animale. La production est très dispersée : on dissémine les ateliers
en ville et à la campagne. Tours est un lieu important de fabrique de soie : on compte 800 ateliers différents en
ville et dans la campagne environnante. Il existe de grandes unités de productions, très rares, comme l’arsenal de
Venise qui regroupe plusieurs milliers d’ouvriers.
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Chapitre IV
La société européenne
aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles
Introduction :
Les historiens ont beaucoup débattu et discuté sur la société d’Ancien Régime : quelle
interprétation lui donner ? Ils se divisaient en deux groupes :
-La société vue comme une société d’ordres. On considère que la société était divisée en trois ordres ; le clergé,
la noblesse et le Tiers-état, classement qui remonte à l’époque médiévale. Au Moyen-âge on distinguait ceux qui
prient, ceux qui combattent et ceux qui travaillent. Cette distinction est avant tout juridique. Chaque ordre a son
propre statut, des comporte des prérogatives et des obligations (ils ne sont pas égaux devant la loi, et ont des
droits inégaux). La Noblesse et la Clergé sont deux ordres privilégiés, avec plus de droit que le Tiers-état.
-Une société avant tout composée de plusieurs classes sociales. Chaque groupe se définit par son niveau de
richesse, son pouvoir économique ou sa dépendance économique. On distingue alors trois groupes : les aisés, les
indépendants, et les dépendants. Il s’agit d’une classification économique.
Ces deux façons de voir sont en fait complémentaires, et juste toutes deux.
I./ Le schéma classique : une société d’ordres
A/ Les Clergés
Ils constituent entre 0,5% et 2% de la population des pays européens.
1) Caractères généraux
Il y en a trois principaux :
-Un ordre privilégié : des privilèges fiscaux (le paient pas l’impôt royal, la taille), économiques (droit de prélever
la dîme) et judiciaire (tribunaux spécifiques : l’officialité).
-des clergés différents : le clergé catholique chrétien, qui reconnait l’autorité du pape, avec des archevêques, des
évêques, des curés…, le clergé orthodoxe (Russie, Ukraine) chrétien ne reconnait plus l’autorité du pape depuis
1054 mais celles des popes (curés) et patriarches (évêques), le clergé anglican, présent seulement en Angleterre,
ne reconnait pas le pape depuis le XVIe siècle, on y trouve des archevêques et évêques. Les femmes ne font pas
parties du Clergé (moniales dans le Tiers-États) car jugées trop impures. Il n’y a pas de clergé dans l'Église
protestante (calviniste et luthérien), mais des pasteurs qui sont plutôt des guides religieux.
-Les clercs se distinguent du reste de la société : par l’apparence (tonsure, soutane…) et par le niveau culturel.
2) Rôle de ces clergés
-Un rôle religieux : les sacrements (baptême, communion, confirmation, mariage, confessions, ordination,
extrême onction pour les catholiques, baptême et communion pour les anglicans), la messe, la catéchèse,
l’enseignement…
-Un rôle politique : dans tous les pays, on trouve des membres du clergé dans les gouvernements. Certains ont
même été à la tête d’un pays (Richelieu, évêque de Luçon devient 1 er ministre de Louis XIII de 1624 à 1642,
Mazarin assure la régence de 1643 à 1661 ; tous deux cardinaux, tous deux impopulaires)
-Un rôle d’enseignement : le système éducatif a trois niveaux :
Les petites écoles, elles sont rares (une pour 30 ou 40 paroisses) mais quand elles existent, le maître d’école est
un prêtre.
Le secondaire, les collèges, avec plusieurs classes. Tous sont dirigés par une congrégation religieuse. (au XVIIIe
siècle, les Jésuites dirigent une centaine de collège, dont celui de Poitiers).
Le supérieur, toutes les universités sont fondées sur demande du pape, et sont dirigées par des clercs. Les plus
anciennes remontent au Moyen-âge (en 1231 Sorbon créé le Sorbonne, et en 1431 se créé celle de Poitiers).
-Un rôle d’assistance et médical : le clergé contrôle les mouvements hospitalier (ou Hôtel-Dieu) et les
établissements de secours aux pauvres.
3) Des clergés très divers
Il y a une grande hétérogénéité du clergé :
Un haut-clergé très riche (évêques, archevêques, patriarches) : ce sont de très grands propriétaires fonciers, avec
de nombreuses seigneuries. A Poitiers, Beaupol de St-Aulaire (1759-1789) gagne 150 000 livres tournois par an,
tandis qu’un paysan moyen gagne 150 livres.
Un moyen-clergé très aisé (abbés, chanoines) : les chanoines de St-Hilaire gagnent 4000 livres tournois par an,
au XVIIIe siècle.
Un bas-clergé aisé (curés, religieux, popes) : René Lecesve, curé à Poitiers (1767-1791) gagne 700 livres par an.
Il existe au sein du Clergé plusieurs classes sociales au sein d’un même ordre.
B/ Les Noblesses
Les nobles représentent environ 1% de la population.
1) Les caractères généraux
-C’est un ordre privilégié : fiscalement (pas de taille), honorifiquement (port de l’épée, titres de noblesse
(d’écuyer à duc et pair), armoiries…), judiciairement (jugés par tribunal du prince/roi (devant le parlement en
France) et n’encourent pas les mêmes peines (décapités mais pas pendus)).
-Des noblesses européennes définies par le « sang » et la « race ». Les nobles se déclarent descendants de
glorieux ancêtres, comme les francs, ou les normands (envahissent l’Angleterre au XIe avec Guillaume le
Conquérant).
-Des noblesses qui se définissent pas certaines valeurs et vertus : le sens du courage, le lignage, le gout des
armes et de la guerre, un certain train de vie (domestiques, réceptions, fêtes, chasses…). « Il faut tenir son
rang ».
2) Les rôles de ces noblesses
-Un rôle politique : par définition, les princes et rois sont de race noble, presque tous les dirigeants aussi. Les
nobles accaparent les postes du gouvernement, de la haute administration, des administrations provinciales. Ils
ont un poids politique démesuré. On distingue la noblesse d’épée (très ancienne, anoblit par des faits militaires)
et la noblesse de robe (plus récente, méprisée par la noblesse de robe, c’est une noblesse administrative ou
achetée (Robins)).
-Un rôle économique : les nobles sont les plus grandes fortunes d’Europe. Ils accaparent, avec le clergé, les
richesses foncières immobilières et seigneuriales : ils ont un poids économique écrasant dans les domaines
agricoles. Ils sont cependant peu présents dans les domaines de production et commerciaux, car ce sont des
activités jugées dérogeantes (certains utilisent des prête-noms).
-Un rôle social : les nobles ont un poids écrasant sur la paysannerie : la grande majorité des seigneurs sont
nobles. C’est un statut envié par tous, un modèle social.
3) Des noblesses très diverses
Du point de vue social, il y a en fait une grande hétérogénéité de la Noblesse.
Au sommet, les « Grands » (ducs et pairs, titulos, grandès, lords) ont un poids économique, politique et social.
Ce sont les plus grandes fortunes et fréquentent de très près le pouvoir.
La noblesse seconde (marquis, comtes, caballeros, gentry…) est surtout installée dans les grandes villes.
La petite noblesse (hobereaux locaux, hidalgos…) vit surtout dans les campagnes, sur sa seigneurie. Elle a un
mode de vie rurale voir paysan.
C/ Le Tiers-état
Il représente 98% de la population européenne.
-Un ordre non privilégié, ni fiscalement, ni honorifiquement, ni économiquement, ni judiciairement. Il est parfois
représenté par certaines assemblées politiques, comme les États-généraux (1614 et 1789).
-Au sein du Tiers-état il y a d’énormes disparités sociales : des différences de richesse.
Chapitre V
Les réformes protestantes
au XVIe siècle
Introduction : Au XVIe siècle, les européens sont très inquiets. L’existence de Dieu est une évidence
mais ils sont traumatisés par les malheurs de la fin du Moyen-âge : une très longue guerre (guerre de Cent ans
1337-1453), des épidémies de pestes (la plus importante, de 1347/48 tue 50% de la population), de nombreuses
famines. On considère tous ces malheurs comme des punitions de Dieu. Le clergé catholique est, en même
temps, dans un état assez particulier. Les papes (Borgia) sont davantage des chefs de guerre, les évêques ne
résident pas souvent dans leur diocèse et veulent cumuler les fonctions (l’évêque de Poitiers était aussi évêque de
Tarbes et archevêque de Toulouse). Les curés n’habitent pas leur paroisse ou son ignorants, ils sont habillés
comme leurs paroissiens, fréquentent les mêmes lieux et ont les mêmes mœurs. Les solutions prônées par
l'Église ne satisfont pas les chrétiens. On pense alors que chacun ira au purgatoire, pour un temps plus ou moins
long. Le pape met donc en vente des Indulgences, qui diminuent le nombre d’années à passer à purgatoire.
Certains en achètent beaucoup. Frédéric de Saxe achète 17 443 reliques sensées assurer 128 000 ans
d’indulgence. Ce genre de pratiques suscite pas mal de scepticisme, beaucoup sont de plus en plus choquées,
indignés ou gênés. Ils vont protester, d’où le nom de « protestants » : l’allemand Martin Luther et le français Jean
Calvin.
I./ La réforme luthérienne
A/ Martin Luther
Martin Luther nait en 1453 dans la province de Thuringe, dans le St Empire Romain Germanique, d’une famille
aisée. Son père est exploitant minier. Il fait des études à l’université de Wittenberg et obtient un doctorat. Lui
aussi est inquiet pour le salut de son âme, il devient prêtre an 1507, puis moine. Il défraie la chronique à la
Toussaint 1517 : le pape décide d’intensifier la vente d’indulgences. Cela choque profondément Martin. Il utilise
l’imprimerie et écrit Les 95 Thèses où il dénonce violemment la vente des indulgences. Il affiche ce texte sur les
murs de son ancienne université. Ça se sait : en 1520, le pape excommunie Martin, qui brûle les lettres en public.
Charles Quint a peur de Martin Luther, il tient à l’unité de son royaume. Il le convoque à Worms en 1521, mais
ils ne parviennent à aucun accord. Cependant Martin rencontre Frédéric de Saxe qui le prend sous sa protection.
Assez vite, d’autres princes adoptent ses idées, par conviction religieuse mais aussi pour s’émanciper de Charles
Quint. En 1530, Luther publie Les confessions d’Augsbourg dans lesquels il développe toutes ses idées. Il meurt
en 1548. Il est alors connu dans toute la chrétienté.
B/ Les grands principes luthériens
Les idées de Luther sont en opposition avec celles du catholicisme, principalement trois grands principes :
-Pour Martin, seule la foi sauve. Pour aller au Paradis, il faut avoir la foi, qui est un don de Dieu. Il s’oppose aux
catholiques car ils pensent qu’il faut multiplier les œuvres.
-Les saintes écritures sont les seules sources de foi. Les catholiques croient en la bible mais respectent aussi les
textes des conciles.
-Chacun peut interpréter les Écritures. Pour les catholiques, seul le clergé est autorisé à interpréter les textes.
Il en découle plusieurs conséquences pratiques : il n’y a plus de clergé, mais des spécialistes, les pasteurs, de
simples guides. Martin rejette un certain de rites et de croyances : les indulgences, le purgatoire, le culte des
saints et ne garde que deux sacrements : le baptême et la communion, mais avec une signification différente.
Pour les catholiques, le pain devient le corps du christ et le vin devient sang, réellement : c’est la
transsubstantiation. Pour les luthériens, le pain devient pain et chair, et le vin devient vin et chair, c’est la
consubstantiation. Luther est favorable à une liturgie plus simple, en langue vulgaire.
C/ La diffusion du luthéranisme
On trouve des partisans de Luther principalement dans deux régions : dans le St Empire Romain Germanique et
en Scandinavie : Suède et Danemark. « La mer Baltique devient la mer Luthérienne »
II./ La réforme calviniste
A/ Jean Calvin
Jean Calvin nait en 1509 en Picardie d’une famille aisée. Son père est gérant des biens du chapitre. Il fait des
études de droit et fréquente plusieurs universités : Paris, Orléans, Poitiers, Bourges. Il se convertit aux idées
protestantes vers 1533-1534 à l’occasion d’un séjour à Angoulême. A cette époque les protestants sont persécutés
par François Ier. Calvin doit quitter la France. De 1534 à 1536 il habite Bâle et de 1536 à 1538 il est à Genève (il
est fichu dehors). Il passe trois ans à Strasbourg et retourne à Genève de 1541 à 1564. En 1536, il publie
L’institut de la religion chrétienne. Il met ses idées en pratique lors de son deuxième séjour à Genève (les
historiens comparent cette période à Kaboul au XXIe siècle). Il meurt en 1564, très connu.
B/ Les principes calvinistes
Les calvinistes croient en la prédestination. Pour Calvin, seuls sont sauvés les élus, les prédestinés, reconnus car
les seuls à avoir la foi. La bible est primordiale : elle contient tout ce que Dieu a voulu faire connaitre aux
hommes. Les sacrements sont limités au baptême et à la communion. Pour les calvinistes, le pain reste pain et le
vin reste vin, mais il y a une présence spirituelle et symbolique du Christ. Pour Calvin la communauté religieuse
doit être très surveillée et encadrée. Il veut mettre à sa tête un consistoire (conseil des chefs de famille) qui
organise la vie religieuse et surveille les fidèles (donne ou pas l’autorisation de communier, au maximum quatre
fois par an, Noël, Pâques, Pentecôte et premier dimanche de septembre). Il veut un culte simple et dépouillé :
supprime les indulgences, le purgatoire, le culte des saints. Les cérémonies ont lieu en langue vulgaire par les
pasteurs dans les temples.
C/ La diffusion du calvinisme
Il se développe dans cinq grandes régions : les cantons suisses, le St Empire Romain Germanique (palatinat), les
Provinces-Unis, l'Écosse et la France (appelés Huguenots, entre 5 et 10% de la population).
Conclusion : Le XVIe siècle est un tournant dans l’histoire religieuse de l’Europe. La géographie du
protestantisme et du catholicisme se fixe. On vit encore aujourd’hui sur cet héritage.
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