4) Une propriété “non-naturelle” et objective, inhérente à une chose ou à un fait [a non-
natural, objective property].
La définition 1) ne définit pas, strictement parlant, la valeur elle-même, mais l'idée ou la
croyance des personnes. Une chose peut être désirée pour elle-même, sans avoir
nécessairement une valeur intrinsèque, au sens des définitions 2), 3) et 4).
Un empiriste peut dire: le fait qu'une chose est recherchée pour elle-même ou désirée en tant
que fin en soi, est un indice (ou une preuve faible) que cette chose est bonne en soi. John
Stuart Mill (dans Utilitarianism, ch. 4 «Of What Sort of Proof the Principle of Utility Is
Susceptible») formule une telle preuve faible ou indirecte. Cette preuve faible a la forme:
What is desired (by most people), seems to be desirable. Maintes variantes de cette preuve
sont considérées: X est bon, car X est recherché pour lui-même par de très nombreuses
personnes, ou car X est recherché pour lui-même par toutes les personnes informées et
rationnellement éclairées. L'empiriste ne peut pourtant justifier aucune affirmation générale
[All-Aussage] comme «tous les hommes recherchent le plaisir». Il ne peut pas non plus
déterminer véritablement par l'observation, mais seulement par une interprétation, si les
hommes recherchent une chose pour elle-même, plutôt que pour une autre chose ou valeur,
Un critique de l'empirisme (comme Emmanuel Kant ou George Edward Moore) pourrait
dire: le fait que des hommes recherchent et désirent quelque chose ne permet en aucune façon
de fonder une valeur. On ne peut pas fonder les valeurs sur les aspirations humaines. Il y a
une grande différence entre le fait et la valeur; nous jugeons des faits par des jugements
descriptifs, tandis que nous ne décrivons pas – ou en tout cas pas en premier lieu – le monde
par des jugements de valeur. Dans les jugements de valeur, un élément du devoir est à prendre
en compte, et ce devoir (normativité) échappe à l'empirisme (ou au naturalisme), pour qui il
n'y a que des faits.
La deuxième définition (2) permet de déterminer une valeur intrinsèque, par la méthode de
l'isolation. Une chose est et reste intrinsèquement bonne, indépendamment aussi, de
l'évolution des circonstances; On peut aussi dire qu'une chose reste bonne dans toutes les
conditions et les situations, même lorsqu'il n'y a plus aucun être vivant sensible et désirant. Un
monde propre et ordonné est selon Moore plus beau et plus souhaitable qu'un monde sale et
chaotique, même si il n'y avait plus aucun être humain. (L'hédoniste au contraire conteste
l'existence de telles valeurs objectives.)
La méthode de l'isolation de Georges Edward Moore est une méthode d'essai par
imagination. Des expériences de pensée sur des états hypothétiques prennent la place de
l'empirie. Selon Kant par exemple, la bonne volonté est le seul bien inconditionné, qui reste
bien dans toutes les circonstances imaginables. Seule la bonne volonté à une valeur
absolument constante. Pour l'hédoniste, cela vaut pour le plaisir: le plaisir de l'homme
vertueux est bon en soi, tout comme le plaisir de l'homme dépravé. Pour Kant la valeur
intrinsèque est aussi une valeur morale; pour l'hédoniste, le plaisir est une valeur moralement
neutre.
La définition (2) permet aussi d'affirmer qu'une activité (p. e. un jeu) est bonne en soi, à savoir
ici, si nous jouons à ce jeu pour lui-même, sans égard à l'argent que nous y gagnons (ou
perdons) ou à la fréquence de nos victoires (ou défaites), ou pour la simple motivation du
maintien de notre santé et de notre forme. Pour l'hédoniste, un jeu qui procure de la joie par