I) Approche historique des conceptions de la vision.
1) Une rapide présentation :
C’est au début du XVII
ème
siècle que l’étude de la lumière va dépasser l’étude des chemins suivis par les rayons lumineux.
La physique va s’intéresser à d’autres questions que celle de l’optique « purement géométrique ».
Dans l’Antiquité, on s’intéressait à la vision et non pas à la lumière.
Pour Démocrite (460-370 av. J.C.), la vision résulte d’ « un quelque chose » qui est émis par les corps lumineux et
influence l’œil. Pour Euclide (né vers -325, mort vers -265 à Alexandrie), la vision est provoquée par un « flux visuel »
sortant de l’œil et allant vers l’objet. Platon (428-348 av. J.C) propose une explication combinant les deux précédentes
où la vision résulte de la rencontre d’un « quelque chose » émis par l’œil et par l’objet regardé. Aristote (384-322 av
J.C.) considère que la vision naît du mouvement excité par le corps sensible d’un milieu intermédiaire entre l’objet et
l’œil. Plus tard, Lucrèce (98-55 av J.C.) explique la vision par le fait qu’un ensemble de rayons visuels est émis par l’œil.
Bref, deux théories coexistent : celle d’une émission depuis l’œil (théorie de l’extramission) et celle de la réception dans
l’œil de quelque chose provenant de l’objet (théorie de l’intromission). Galien (131-201), célèbre médecin grec de
l’Antiquité après Hippocrate, met en évidence, en disséquant de nombreux animaux, le rôle du nerf optique dans la
vision, au IIème siècle ap. J.C. Il rejoint les idées platoniciennes en ce qu’il considère qu’un fluide intérieur est
communiqué du cerveau à l’œil par le nerf optique, qui sensibilise l’œil et le rend apte à être impressionnée par le fluide
externe en provenance de l’objet.
Le travail de Ptolémée aux alentours de 150 ap. J.C. constitue une référence de tout ce qui, dans la physique
philosophique de l’époque, pouvait expliquer la sensation visuelle. On y trouve les sensations de couleur et de lumière,
la considération des maxima et minima sensibles. Les Grecs ont su représenter géométriquement la vision ; ils ont ainsi
découvert la loi de la réflexion, selon laquelle l’angle d’incidence est égal à l’angle de réflexion ; ils ont mis en évidence
les phénomènes de réfraction, et ont même, pour une série de milieux, donné une valeur approximative, sous forme de
tables, de la déviation du rayon réfracté.
Au X
ème
siècle, Ibn al-Haythan, savant arabe, connu sous le nom latin d’Alhazen (965-1039) rejette de façon radicale les
théories extramissionistes. Il introduira une autre interprétation géométrique de la vision, fondée sur la réception dans
l’œil par le cristallin exactement, de rayons lumineux.
Il est ainsi obligé, quand il fait entrer dans l’œil des rayons lumineux, de définir les conditions de formation d’une sorte
d’image de l’objet se formant sur le cristallin. Il s’interrogera le premier sur la nature de la lumière en tant qu’entité
physique.
On se posera bien plus tard à partir du XVII
ème
siècle une autre question sur la nature de la lumière : est-ce un
déplacement de matière ou bien un mouvement dans une certaine matière ?
Newton sera un adepte de l’hypothèse corpusculaire tandis qu’Huygens préfère l’hypothèse ondulatoire.
Des expériences nouvelles au XVII
ème
siècle donnent lieu à des descriptions de phénomènes nouveaux comme par
exemple, la diffraction (par Grimaldi, jésuite italien en 1665) et de dispersion de la lumière par le prisme (par Newton en
1666 avec le détail de son interprétation en 1704 dans son ouvrage Opticks).
2) Quelques acteurs du XVII
ème
siècle :
Galilée (1564-1642) : À partir de 1609, il commence à observer le ciel avec une lunette qui comprend un objectif
convergent (une simple lentille) fixé dans un tube cylindrique et un oculaire divergent (une autre lentille) fixé lui aussi
dans un second tube pouvant coulisser dans le premier. Le grossissement était à l’origine de 3. S’il a très peu travaillé
sur la lumière sauf bien entendu dans le domaine de l’astronomie, il est le premier à avoir tenté d’évaluer le temps mis
par la lumière pour faire un aller-retour entre les sommets de deux collines voisines, ceci avec l’aide d’un assistant et
deux lanternes à volet dont la lumière peut être découverte brusquement. Le résultat est peu probant puisque la
mesure est du même ordre de grandeur que le temps de réaction de l’assistant qui devait découvrir la lanterne dès qu’il
apercevait la lumière de la lanterne de Galilée.
Kepler (1571-1630) : Il a jeté les bases de l’optique géométrique en accordant une grande place au rayon lumineux, outil
important pour interpréter la vision et le fonctionnement des lentilles convergentes et divergentes. Il pose clairement le
principe de propagation rectiligne de la lumière de la source vers l’objet (supposée cependant se faire avec une vitesse
infinie). Kepler
Interprète la vision selon le modèle de la chambre noire. Il ouvre ainsi une voie à une nouvelle interprétation
géométrique de la vision. L’œil est assimilé à une chambre noire (avec une lentille) dont l’iris serait le diaphragme, le
cristallin le dioptre convergent, et la rétine, l’écran où se forme une image réelle inversée. Il conclut que la rétine est le
véritable récepteur sensoriel. L’œil est bien pour lui un système optique régi par les seules lois physiques de la
propagation de la lumière.