Génération et propagation du bruit d’un SMPS Eric FELTRIN, Laboratoire Ampère, Lyon & STMicroelectronics, Grenoble - [email protected] 18 avril 2016 e plus en plus de systèmes sont constitués de circuits intégrés pour le traitement du signal et ces circuits sont accompagnés de leur cellule de power management. Pour réduire la consommation et la dissipation thermique, l’intégration du power management avec le cœur numérique et les fonctions analogiques associées devient indispensable. Le grand nombre de circuits intégrés fait de l’efficacité énergétique un enjeu majeur c’est pourquoi une alimentation à découpage (SMPS) a remplacé les régulateurs linéaires (LDO). Mais cette architecture commutant un étage de puissance génère du bruit susceptible de perturber les autres blocs présents sur la même puce. L’étude de l’émission et de la propagation des perturbations dues au découpage de l’étage de puissance devient incontournable pour assurer le bon fonctionnement de la puce et notamment des blocks analogiques sensibles. D L’objectif de cette étude est de modéliser la génération et la propagation du bruit dans un système intégré. Trois formes de bruit ont été identifiées: le couplage capacitif de la sortie de l’étage de puissance avec le substrat et les interconnexions, les interférences conduites dues aux échelons de courant au travers des inductances parasites, les interférences ray- onnées par les interconnections et les fils de bonding. Les modèles de perturbations obtenus seront ensuite comparés à des mesures sur une cellule ”simple” comme une référence de tension puis à un bloc plus complexe, un convertisseur analogique numérique. La finalité de cette étude est de trouver des solutions pour réduire l’impact du SMPS sur le reste du circuit. L’étage de puissance du SMPS L’étage de puissance représente la source de bruit principale du SMPS. La figure 1 présente un modèle de cet étage de puissance. Les interconnexions et les fils de bonding sont modélisés par une inductance et une résistance série. Pour éviter un court-circuit au moment des transitions un délai de non recouvrement est introduit. Les différents états de l’étage de sortie avec la valeur de VLX et les transitions sont présentés sous forme de machine à états dans la figure 2. La sortie VLX est chargée par une large inductance (∼ µH) assimilable à une source de courant en ”dent de scie”. http://jnrdm2016.sciencesconf.org/ • JNRDM TOULOUSE 2016 page 1 of 5 précédent. Pour comprendre l’impact de l’injection de charges à chaque transition, il est nécessaire d’étudier chaque front individuellement. La figure 3 illustre l’injection de charges lors de la transition ¬. L’inversion de VLX due au seuil de la diode est négligée devant la tension d’alimentations et les capacités drain-bulk sont négligées devant les capacités de grille des MOSFETs dans le cadre de l’étude de l’injection de charges dans le circuit. LP V + VP VGP 1 VLX 3 2 4 VGN LN V − VP VN Cgsp Figure 1: Schéma de l’étage de puissance du SMPS 2 1 −∆V +∆V Cgdp P M OS DIODE N M OS Cgdn 4 VLX = VP 3 VLX = VN − VT H VLX = VN VN Figure 2: États de l’étage de puissance Cgsn VN Les sources de bruit L’ensemble du circuit forme un résonateur (les fils de bonding forme l’inductance et les MOSFETs la capacité) [1] qui est excité par les changements d’états de l’étage de puissance. L’amplitude de cette excitation et la fréquence de résonnance dépendent de la transition étudiée. Ces variations font l’objet des prochains paragraphes. Le spectre final est composé de chacune de ses fréquences de résonnance. Excitation du réseau Les principales excitations du réseau sont: les variations du courant dans les interconnexions et les fils de bonding, ainsi que l’injection de charges des MOSFETs lors des commutations. Les variations de courant dans les fils bonding intervient au moment de l’activation ou de la désactivation du PMOS, correspondant aux transitions ¬ et ¯. Le front montant ou descendant de courant engendre une variation des potentiels VP et VN qui excite le réseau RLC du circuit [2]. L’injection de charges ajoute un courant indésirable au moment des transitions qui s’ajoute aux variations présentées dans le paragraphe Figure 3: Injection de charges pour le front ¬ La différence de potentiel aux bornes de Cgsn reste inchangée lors de ce front donc cette capacité n’injecte pas de charge parasite lors de ce front. La tension de grille du PMOS augmente jusqu’à VP , la capacité Cgsp est donc court-circuitée et les charges sont redistribuées de la source vers la grille. Cette recombinaison ne génère donc aucun courant parasite sur l’alimentation. Le cas de Cgdn est un peu plus compliqué. Cette capacité semble court-circuité au potentiel VN mais la diode empêche la redistribution de charges. Les charges sont donc évacuées par le port VLX . Cependant le courant de sortie étant fixé la diode fournira moins de courant au nœud VLX . Ainsi la capacité Cgdn ne génère aucune variation de courant sur l’alimentation. Finalement pour le front ¬ seule la capacité Cgdp contribue à l’excitation du réseau RLC mais il y contribue doublement car les potentiels à ses deux terminaux varient dans des sens opposés. En appliquant le même raisonnement aux trois autres fronts, on obtient les résultats suivants: ¬ ∆Q = Cgdp (∆V − (−∆V )) = 2Cgdp ∆V http://jnrdm2016.sciencesconf.org/ • JNRDM TOULOUSE 2016 page 2 of 5 ­ ∆Q = Cgdn ∆V + Cgsn ∆V = (Cgdn + Cgsn )∆V ® ∆Q = 0 I(V + ) I(V − ) I(V − ) I(V + ) ¯ ∆Q = Cgdp (2∆V ) + Cgsp ∆V + Cgdn ∆V = (2Cgdp + Cgsp + Cgdn )∆V avec ∆V = VP − VN et en négligeant la tension de seuil de la diode. Au cours de la transition ¬, l’injection de charges s’oppose à la diminution du courant due à l’ouverture du PMOS ce qui a pour effet de retarder la conduction sur la diode. Le réseau est excité par la chute retardée du courant. Le bruit de la transition ­ est dû uniquement à l’injection de charges car le courant passe de la diode au NMOS reste donc dans les fils de bonding du V − . Lors de la transition ®, il n’y a pas d’injection de charge. De plus le courant passant du NMOS à la diode, reste constant dans les fils de bonding. La génération de bruit lors de cette transition est donc négligeable. Contrairement à la transition ¬, la transition ¯ s’opère avec un front montant du courant dans les fils de bonding de V + auquel s’ajoute l’injection de charge ce qui engendre une forte excitation du réseau RLC. Une simulation Spice utilisant un modèle de package complexe valide jusqu’à 5GHz. Les courants des ports d’alimentations de l’étage de puissance sont représentés figure : le courant issue V + et le courant issue V − . La zone grisé représente l’injection de charges. On retrouve les comportements à chaque transition décrit dans le paragraphe précédent. On observe également les oscillations du réseau qui font l’objet de la prochaine section. Résonateur RLC On souhaite maintenant déterminer la structure du réseau RLC du circuit dans chaque état pour déterminer les fréquences d’oscillation du bruit généré par l’étage de puissance. La figure 5 présente le schéma équivalent du circuit lorsque le PMOS est activé. Pour simplifier ce schéma, on néglige les résistances d’accès des grilles des MOSFET et la résistance de Ron (6 1Ω). On néglige également les capacités drain-bulk devant les capacités de grille (Cdb Cg ). On obtient pour chaque état les capacités équivalentes de l’étage de puissance suivantes: PMOS: C = 2Cgp + Cgn NMOS: C = Cgp + 2Cgn Figure 4: Évolution des courants lors des transitions (durée: 20ns) Le PMOS est deux fois plus large que le NMOS pour avoir approximativement le même Ron (pour compenser le rapport deux entre les mobilités du PMOS et du NMOS), les capacités du PMOS sont donc deux fois plus grandes que celles du NMOS. La valeur des capacités Cg diminue d’un facteur deux environ entre l’état passant et bloqué. On obtient donc fN M OS ≈ 1.5fP M OS (on s’intéresse pas à l’état bloqué car cet état est fugace: phase de non-overlapping). La fréquence mesurée sur les courbes de la figure est de fP M OS ≈ 130M Hz et fN M OS ≈ 167M Hz. En utilisant le modèle présenté précédemment et les valeurs de capacités extraits du modèle Spice, les fréquences obtenues sont fP M OS ≈ 137M Hz et fN M OS ≈ 164M Hz. Ce calcul semble donc une bonne approche en comparaison du modèle Spice. Les chemins de propagation La génération de bruit étant définie, on cherche les chemins de propagation du bruit de la source vers la victime. Quatre chemins ont été identifiés: le couplage par substrat, le couplage entre les intercon- http://jnrdm2016.sciencesconf.org/ • JNRDM TOULOUSE 2016 page 3 of 5 Modélisation de la propagation VP Cgsp Ronp VN VP Cgdp 2Cgp Cgn Cgdn Cdbn VN VN Cgsn VN Figure 5: Schéma équivalent dans l’état PMOS ON nexions, l’alimentation commune au niveau du PCB [3] et le rayonnement électromagnétique. Le couplage substrat Les MOSFETs de puissance sont isolés pour augmenter l’impédance entre l’alimentation de l’étage de puissance et l’alimentation des autres fonctions analogiques. Cette isolation est présentée figure 6. VLX VP VN N N N ISO Les autres chemins de propagation sont plus conventionnels: le couplage entre interconnexions et la propagation conduite du bruit peuvent être modélisés par extraction du layout et du PCB et le modèle de package intègre déjà le couplage entre les fils de bonding. Pour modéliser la propagation du bruit au sein de la puce, le logiciel développé par CWS permet à partir des données technologiques et du layout de déterminer le bruit à un point donné du circuit. Ce type de logiciel habituellement utilisé pour quantifier l’influence de la partie numérique et sur la partie analogique permet de suivre la propagation du bruit au sein d’une puce entre différents blocs. À partir du modèle de courant des sources de bruit et des paramètres S des cellules sensibles, le logiciel détermine l’impédance des différents chemins de propagation et détermine l’amplitude du bruit aux points d’entrées-sorties des cellules victimes. Un modèle Spice du package et une extraction des paramètres S du PCB ont été inclus dans la simulation pour modéliser les interactions entre les fils de bonding et les pistes extérieures à la puce. La mise en place de l’environnement de travail de ce logiciel est en cours. Les premiers résultats semblent indiquer que le substrat serait le principal chemin de propagation du bruit du SMPS (devant la perturbation due à la propagation conduite par la carte de test). Conclusion N N ISO Figure 6: Schéma en coupe des MOSFETs de puissance Cependant cette isolation reste très perméable, il apparait des diodes et des bipolaires avec le substrat et leurs capacités parasites associées permettant la propagation du bruit dans le substrat extérieur à l’étage de puissance connecté à la masse du circuit [4]. Lors des simulations SPICE, la variations de l’alimentation positive VP polarisant la poche N et NWELL induisent des courants dans les capacités parasites des diodes de jonction ip = Cp dVdtP avec Cp ≈ 17pF . L’étude de la perturbation du SMPS est découpée en trois parties: la génération, la propagation et l’impact du bruit du SMPS sur un bloc analogique voisin. La commutation de l’étage de puissance génère des appels de courant sur les fils d’alimentation. Ce sont ces variations de courant à travers les inductances parasites des interconnexions qui excitent le réseau LC composé des inductances des fils de bonding et de la capacité équivalente des MOSFETs qui peuvent être modélisés par les capacités de grille. Les appels en courant sont dus à l’inductance du filtre de sortie du SMPS qui étant de grande valeur (∼ µH) impose la continuité du courant de sortie. Lors de la commutation ce courant transite de l’alimentation positive à négative (ou inversement) ce qui engendre des fronts de courant. À ces fronts s’ajoutent l’injection de charges des capacités de grille des MOSFETs rendant les commutations encore plus http://jnrdm2016.sciencesconf.org/ • JNRDM TOULOUSE 2016 page 4 of 5 bruyantes. Ce bruit se propage ensuite par l’intermédiaire du substrat (par les diodes et les bipolaires parasites), par couplage entre les interconnexions ou de manière conduite par le réseau d’alimentation du PCB. La modélisation de la propagation du bruit à l’aide d’un logiciel spécialisé est en cours de réalisation et l’impact sur le fonctionnement d’une victime n’a pas encore été traité. Les résultats issus de la modélisation de la chaine complète de perturbation (génération, propagation, impact) seront comparés aux mesures sur des circuits de tests afin de valider la pertinence de l’approche. Ce modèle permettra ensuite de comprendre plus finement les mécanismes internes de perturbations pour pouvoir à terme envisager des modifications de conception pour réduire l’impact du SMPS sur le reste du circuit. Références [1] A. Bhargava, D. Pommerenke, K.W. Kam, F. Centola, and Cheng Wei Lam. Dc-dc buck converter emi reduction using pcb layout modification. Electromagnetic Compatibility, IEEE Transactions on, 53(3):806–813, Aug 2011. [2] G. Aulagnier, M. Cousineau, T. Meynard, E. Rolland, and K. Abouda. High frequency emc impact of switching to improve dc-dc converter performances. In Power Electronics and Applications (EPE), 2013 15th European Conference on, pages 1–9, Sept 2013. [3] Jiwei Fan and T. Harrison. Substrate switching noise analysis and layout/circuit considerations in monolithic power converters. In Energy Conversion Congress and Exposition (ECCE), 2012 IEEE, pages 2610–2615, Sept 2012. [4] V. Binet, Y. Savaria, M. Meunier, and Y. Gagnon. Modeling the substrate noise injected by a dc-dc converter. In Circuits and Systems, 2007. ISCAS 2007. IEEE International Symposium on, pages 309–312, May 2007. http://jnrdm2016.sciencesconf.org/ • JNRDM TOULOUSE 2016 page 5 of 5