Détermination d`une politique optimale de taxation des cigarettes

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Microéconomie – Deug 1 – Semestre 1 – Etat des connaissances 1.
Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Limoges
Sciences Economiques I – Semestre I
Cours de Microéconomie (Mr. P. Rous)
Année Universitaire 2000 - 2001
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La détermination du prix optimal des cigarettes
Quand il s’agit de déterminer le prix des cigarettes on sait que l’Etat joue un jeu ambigu :
. on sait que les ventes de cigarettes constituent une source de revenu substantielle
pour le budget de l’Etat
. mais on sait également que la consommation de tabac est génératrice d’un coût pour
la collectivité dans la mesure où elle contribue à accroître le risque de développer des
maladies cardio-vasculaires ou des cancers du poumon.
On se propose ici d’aborder, en termes micro-économiques la question de la détermination
d’une politique optimale de taxation des cigarettes par les pouvoirs publics. A cet effet, on
construira un petit modèle qui intègre les hypothèses suivantes :
H1 : l’agent représentatif arbitre entre sa consommation de tabac (bien 1) et sa
consommation d’un bien composite x2 (l’ensemble des autres biens). Ses préférences
présentent toutes les bonnes propriétés traditionnellement retenues (convexité...)
H2 : cet agent dispose d’un revenu Y donné
H3 : le prix du bien composite est supposé constant et égal à p2.
H4 : le prix hors taxe des cigarettes est p1.On suppose, compte tenu de la concurrence
que se livrent les fabricants de cigarettes que ce prix p1 est une donnée. Pour simplifier, on
admet que p1 = 1. Le prix des cigarettes TTC est p1 (1 + θ) où θ le taux auquel sont taxées les
cigarettes est un paramètre positif ou nul (on imagine mal qu’il puisse être négatif !).
H5 : la consommation de cigarettes de l’agent représentatif fait croître les dépenses
publiques de santé DPS comme :
DPS = x12
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1°) Représentez la contrainte de budget de l’agent représentatif. Qu’est-ce qui détermine, en
particulier, la pente de cette contrainte budgétaire ?
2°) Quelle est la recette budgétaire de l’état
. si le taux de taxation θ est infini ?
. si le taux de taxation θ est nul ?
3°) Représentez graphiquement l’évolution des recettes budgétaires RB en fonction du taux de
taxation θ.
4°) La spécification de la fonction de dépenses publiques de santé DPS vous paraît-elle
vraisemblable ? Mettez en relation les dépenses publiques de santé avec le taux de taxation θ.
5°) Si l’Etat poursuit le seul objectif de santé publique, quel est le taux de taxation optimal ?
6°) ... et s’il poursuit le seul objectif de maximisation de ses recettes fiscales ?
7°) Un objectif plus vraisemblable serait que l’Etat cherche à maximiser la différence entre
ses recettes fiscales d’une part et ses dépenses de santé d’autre part. Déterminez
graphiquement le taux optimal auquel l’Etat doit taxer les cigarettes.
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Microéconomie – Deug 1 – Semestre 1 – Etat des connaissances 1.
La détermination du prix optimal des cigarettes
Corrigé
1°) La contrainte de budget de l’agent représentatif.
L’agent représentatif (AR) dispose d’un revenu Y. Le prix du bien composite 2 est p2 (on
supposera par la suite que p2 = 1). Le prix des cigarettes hors taxes est p1 = 1. Mais l’AR doit
s’acquitter d’un prix TTC de telle sorte que le prix finalement payé par le consommateur est
p1 (1 + θ). Sa contrainte budgétaire est donc :
Y = p1 (1 + θ) x1 + p2 x2
ce qu’on peut exprimer sous la forme :
x2 =
()
11
22
p1
Yx
pp
Si on admet que p1 = p2 = 1, la pente de la droite de budget dans le plan x1, x2 ne dépend alors
que du taux de taxation. Sur le graphique I de la page suivante apparaissent trois contraintes
de budget correspondant aux cas de figure :
θ = 0 : la pente de la droite de budget est égale à –1
θ = 1 : la pente de la droite de budget est égale à –2
θ = 2 : la pente de la droite de budget est égale à –3
Bien sûr, à chaque droite de budget correspond un équilibre particulier (respectivement : E0,
E1 et E2)
2°) La recette fiscale RF dépend de deux paramètres :
1/ le taux de taxe (qui est déterminé par les pouvoirs publics)
2/ par le niveau de la consommation de cigarettes (qui est déterminé par les
préférences et les possibilités budgétaires des agents économiques). La consommation de
cigarettes est, bien sûr, fonction du prix de vente TTC c’est à dire du taux de taxe θ.
Au final, la recette fiscale RF est donc ainsi déterminée :
RF(θ) = θ . x1(θ)
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avec, on s’en doute, une consommation x1(θ) de cigarettes qui est fonction décroissante du
taux de taxes. On admettra qu’au delà d’un certain prix, le consommateur préfère renoncer à
la consommation de cigarettes (en violation, vous le noterez, de l’hypothèse de quantités
positives de tous les biens).
Il faut bien voir par conséquent que l’augmentation du taux de taxes produit deux effets sur le
montant de la recette fiscale :
. un effet direct positif via le taux de taxe lui-même (à consommation inchangée,
l’augmentation du taux de taxes induirait un accroissement du montant des recettes collectées)
. un effet indirect négatif via la demande de cigarettes qui diminue quand le taux de
taxes (et donc le prix TTC) augmente.
Si le taux θ de taxation est nul, la recette fiscale est nulle. De même, si θ est infini, le prix de
vente TTC des cigarettes est infini : on peut s’attendre, dans ce cas, à ce que la demande de
cigarettes soit nulle : la recette fiscale est nulle ici encore.
On comprend que, si la recette fiscale est nulle pour θ = 0 d’une part et pour θ = + d’autre
part, il existe nécessairement une valeur ˆ
θ pour laquelle la recette fiscale serait maximum.
3°) Représentation graphique de l’évolution des recettes budgétaires en fonction de
l’importance du taux de taxe.
On commence par construire la courbe de demande de cigarettes en fonction de l’importance
du taux de taxes. Pour cela, il suffit, en partant du graphique I qui représente les trois
équilibres correspondant respectivement aux trois cas de figure (θ = 0, 1 et 2) de reporter, sur
un deuxième graphique II, le taux de taxes et la quantité demandée (quantité d’équilibre) de
cigarettes. On obtient ainsi la courbe de demande de cigarettes pour différents niveaux
possibles du taux de taxe.
A partir de cette courbe de demande de cigarettes, il est possible d’apprécier l’importance de
la recette fiscale pour un taux de taxe θ donné : il s’agit de l’aire du rectangle dont les côtés
sont respectivement 0θ et 0 x1(θ).
Vous voyez que la superficie de ce rectangle, qui est nulle pour θ = 0, commence par croître
quand θ augmente puis, à partir d’un certain seuil, diminue jusqu’à s’annuler de nouveau
lorsque θ tend vers l’infini…ce qui permet d’illustrer la maxime selon laquelle « trop d’impôt
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tue l’impôt ». On verra au 6°) comment on détermine, par l’algèbre le taux ˆ
θ pour lequel la
recette fiscale serait maximum.
4°) La spécification (de type quadratique) de la fonction de dépenses de santé traduit l’idée
selon laquelle le risque de développer des maladies graves (génératrices de coûts pour la
collectivité) augmenterait de plus en plus vite quand la consommation de cigarettes
augmente… ce qui est assez vraisemblable. Une analyse statistique corroborerait très
probablement cette hypothèse.
5°) Si l’Etat ne poursuivait qu’un objectif de minimisation des dépenses de santé publique (ce
qui est peu vraisemblable : les ventes de cigarettes rapportent beaucoup à l’Etat…), le taux
optimal θ*DSP serait infini ; la consommation de cigarettes serait nulle (le prix serait en effet
prohibitif), les poumons des consommateurs parfaitement clairs… et les recettes fiscales
égales à zéro !
6°) Si l’Etat ne cherche, cyniquement, qu’à maximiser sa recette fiscale au mépris des
dépenses de santé publique, le taux optimal est alors ˆ
θRF tel que :
RF
ˆ
dRF( )
dθ
θ = 0
…c’est à dire tel que, pour cette valeur, la dérivée de la recette fiscale par rapport à θ
s’annule. On sait en effet que, si la fonction y = f(x) admet un maximum en !
x, en ce point la
dérivée de f(x) s’annule.
Comme on sait que RF = θ . x1(θ), on a par conséquent ˆ
θRF tel que :
x1(ˆ
θRF) + ˆ
θRF . x1’( ˆ
θRF) = 0
… ce qui implique :
ˆ
θRF tel que : 1RF 1RF
ˆˆ
dx ( ) x ( )
ˆ
dθθ
=−
θθ
Ce qui signifie qu'au point ˆ
θ pour lequel la recette fiscale RF est maximum, la pente de la
tangente à la courbe de demande (par rapport à l'axe (0, θ) 1RF
ˆ
dx ( )
dθ
θ est égale à l'opposé du
rapport x1(ˆ
θ) / ˆ
θ. On verra un peu plus loin que ceci correspond au point pour lequel
l'élasticité de la demande de cigarettes par rapport à θ est égale à –1.
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