De la lettre à l'Esprit, par le Verbe et le Sens Écrire ? Le poète est celui, dit l'étymologiste, Qui fait, et donc qui crée, étant ainsi facteur ! Et ce dernier apporte un message, en acteur Du mouvement de vie en lequel on existe… Lorsque naît un poème, arrive la question Taraudant le poète : « Au monde, à quoi ça rime ? Et l'ambiguïté de la formulation Fait alors apparaître une tension qu'exprime Aussi bien l'essentiel que la similitude Des sons qui sont issus de ses vieilles études… Il serait indécent, pour un amant des vers Qu'on ne confiât point sa dépouille à ces vers Qui rendent à la terre, avec application, Ce qui offrait support à son inspiration. Faut-il vraiment prolonger l'existence De cette humanité masochiste et sadique En recherchant, par la voi( ) poétique A corriger ses défauts par des stances ? Musique Un vers doit être dit, et, mieux, être scandé, Afin que par son rythme, et aussi par sa rime, Son esprit se révèle et nous fasse ascender Vers le discernement, et la beauté en prime. Rime et rythme sont musique Concourant à l'harmonie Que construit la symphonie Des vers de l'art poétique. Concours de poésie 2016 De la lettre à l'esprit P. Santschi le 20.6.16 page 1 / 5 Lorsque je cherche un mot pour créer l'harmonie D'un vers bien balancé, ne visé-je à vibrer Avec mon Créateur, dissipant l'atonie Et, ainsi méditant, tendant à calibrer Et le sens, et la rime, en un rythme divin Qui met en mon vécu un somptueux levain? "De la musique avant toute chose Et pour cela préfère l'impair". Verlaine l'a dit mais, pour la cause De l'humanité il eût pu, père D'un original art poétique Faire un grand principe politique Où la MESURE avant toute chose Aurait enfin su gérer les doses De bien, de mal, et de l'inaction A comparer à la réaction… Une fois les mots assemblés Sur le papier sont sclérosés. On peut pourtant les diffuser, Ce qui les rend alors râblés. Mots N'est-ce pas dans les mots qu'est mise la substance Que l'on peut dévoiler en la répercutant Pour que les attentifs retirent de ces stances Un enrichissement tout d'abord rebutant ? Décrypter pour leur cœur le sens de chaque terme, Serait-ce le travail qui conduira, à terme, Le monde à retrouver un chemin moins ardu Que celui où, ces temps, le bon sens est tordu ? Baptiser une chose est, dans son existence, Introduire du fixe, et la réduire, ainsi, À être trop image en troublant son essence. Mais peut-on se passer de ce facteur, ici ? Si l'on trouvait les mots exacts Décrivant la réalité, N'y aurait-il égalité Entre elle et eux ? Par quel impact Agirions-nous sur son futur ? Que deviendrait notre aventure ? Concours de poésie 2016 De la lettre à l'esprit P. Santschi le 20.6.16 page 2 / 5 Lorsque l'on crée un mot, on enrichit le monde. Son ambiguïté, occasion de partage, N'offre-t-elle aux humains la peine et l'avantage De devoir écouter l'univers qu'il émonde ? Le mot est, pour l'humain, ce qui porte l'Esprit. Forme et fond, à la fois, on en paye le prix Par les imprécisions que, toujours, il comporte, Forçant à échanger pour dégager nos portes. Sens N'y a-t-il pas raison À voir que dans les mots, Il n'est pas que des maux, Mais qu’ils vous sont maison Pour abriter le sens Qui est, de tout, l’essence. Est-ce dans le cerveau que sont stockés les mots, Les images, les bruits que nous restituons ? Savons-nous si ce lieu où nous les situons N'est pas qu'un transmetteur à instincts animaux ? Un mot n'a d'intérêt que vu dans son contexte Qui, s'il est ignoré, offre ainsi le prétexte Pour tordre le prochain, rarement pour l'aider. Comment donc, par l'Esprit, le faire précéder ? Vivre ou vibrer, riche exemple de thèmes Dont l'interprétation, en un poème, Permet substitution, car de leur sens Réel, du fond, ils préservent l'essence. Le nom d'une entité Reçu à sa naissance Est une identité ! Mais est-il son essence ? Quel prisme est-il placé dans le mot dont on use Pour décrire l'humain dans ses emportements ? Tout terme offre une image, et ainsi il abuse Auditeur et auteur, souvent inconsciemment ! Concours de poésie 2016 De la lettre à l'esprit P. Santschi le 20.6.16 page 3 / 5 Lorsque, par un outil, on transforme un système, C'est en fait qu'on lui parle, et cette opération, Qu'on peut assimiler au lancer d'un poème, Montre qu'on a trouvé sa langue pour l'action. Ne nous battons-nous pas, d'abord, sur des paroles, Ou sur des opinions, et très peu sur des faits ? Ne pourrait-on, plutôt, confier à Éole, Le soin de dissiper, de ces mots, les méfaits ? On ne voit le réel que tel qu'on le décrit On ne se base alors que sur une apparence Qu'on ne sait dépasser ! Ah ! quelle outrecuidance! Ne peut-on s'affranchir du figé de l'écrit ? Finalement, la vérité, N'est-elle, à la réalité, Ce qu'est la carte au territoire, Un guide parfois dérisoire Ou un symbole intimidant De nos illusions dépendant? Esprit Un texte n'a valeur que lorsqu'on le traduit Par l'action de son sens admis de bonne foi, Améliorée encor chaque fois qu'elle induit Échange auteur-lecteur, par le geste et la voix ! Que cela plaise ou non, les mots ont deux contextes : Celui du récepteur, et du lanceur du texte. Une adhésion au fond devient ainsi miracle Qui se produit parfois, et les mène au pinacle, Construisant une action réellement commune Où l'âme, de ce fait, en les deux est comme Une… Le message des dieux est mieux saisi par l'homme, Quand celui-ci se tait, acceptant la souplesse Dont la phrase et ses mots ne rendent pas la somme De l'intention qu'y met la divine tendresse. Concours de poésie 2016 De la lettre à l'esprit P. Santschi le 20.6.16 page 4 / 5 Ne devrait-on, bien plus, revisiter Bourdieu ? N'a-t-il vu, comme Jean, que le mot était Dieu ? Et son nom, en lui-même, n'est-il révélateur Que l'esprit lie bourde et divin locuteur ? Tournant autour du Verbe, enjeu de toute lutte, Il désigne, acéré, les abus et les buts. S'accrocher à un texte utile au bon vieux temps, Mais qui, lu de nos jours, dégrade le message, N'est-ce scléroser Dieu, ainsi Le limitant, Et par là refuser d'évoluer en sage ? Si la parole est Dieu et si Dieu est amour Quand nous nous exprimons, usant de notre mour, Veillons à nous montrer digne de cet outil En ne livrant ainsi qu'un message abouti. Certes, c'est traduction ; mais de devoir traduire Force notre mental et notre âme à conduire. Au début est le Verbe, Le Verbe est avec Dieu, Et le Verbe, c'est Dieu. Il nourrit, mieux que l'herbe ; Il n'est pas substantif, Il est, pour tout, actif. Pays de Vaud, le 20.6.2016 Retour à Ecrits de P. Santschi Concours de poésie 2016 De la lettre à l'esprit P. Santschi le 20.6.16 page 5 / 5