Rayonnement électromagnétique des convertisseurs

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Rayonnement électromagnétique
des convertisseurs à découpage
Approche simplifiée par le concept des îlots rayonnants
Jean-Louis Cocquerelle
Christophe Pasquier
Docteur ès Sciences Physiques
Professeur des universités
Docteur de l’université de Nantes
Laboratoire de recherches en électronique de puissance et C.E.M.
EPUN (École Polytechnique de l’université de Nantes)
17, avenue du Hoggar
Parc d’Activité de Courtabœuf, BP 112
91944 Les Ulis Cedex A. France
ISBN 2-86883-560-0
Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous
pays. La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, dune part,
que les cc copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées
à une utilisation collective », et d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but
d'exemple et d'illustration, << toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement
de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite >> (alinéa 1" de l'article 40). Cette
représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une
contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.
O EDP Sciences 2002
Préface
Le rayonnement électromagnétique des dispositifs électroniques modernes est une
préoccupation majeure des concepteurs et utilisateurs, soucieux de respecter les
règles de la compatibilité électromagnétique.
Les mesures directes, bien que parfois délicates, ne présentent pas de problèmes
insurmontables pour les laboratoires compétents au sens de la directive CEM. La
difficulté concerne en réalité, les études de nature prédictive, qu’il conviendrait de
conduire par simulation avant même le routage des cartes. Les circuits analogiques
utilisés en traitement de signal, seraient alors examinés principalement dans le
contexte de l’immunité ou de la vulnérabilité, alors que les cartes numériques et les
cartes de puissance à découpage H.F., le seraient principalement sur le plan de
l’émission, respectivement en champ électrique et magnétique.
Ces études sont difficiles et ne sont actuellement développées que par quelques
laboratoires de recherche. Elles nécessitent des moyens informatiques puissants et
un investissement de temps considérable.
J.L. Cocquerelle et C. Pasquier, dans le cadre du présent ouvrage, présentent une
version didactique, donc accessible sur le plan pédagogique, des résultats de travaux
de recherche autorisant une approche simplifiée du rayonnement des cartes de
puissance à découpage. Ils ont en effet créé dans ce but un concept original, celui
des (( îlots rayonnants », qui correspondent sur une carte électronique à des zones
émettrices de champ magnétique à contribution prépondérante.
Un support informatique est joint au livre, il contient un grand nombre de
représentations graphiques très pertinentes permettant la meilleure compréhension
possible au lecteur.
Je tenais, en préfaçant cet ouvrage, à souligner l’effort que ces deux chercheurs de
l’université de Nantes ont entrepris pour assurer le transfert vers la pédagogie, de
travaux de recherche dans un domaine édicté et soutenu par l’évolution des
technologies en électronique.
Joseph SAILLARD
Vice-président du Conseil Scientifique de l’université de Nantes
Chargé de la Recherche
Note des auteurs
L’évolution des technologies en électronique permet de réaliser des convertisseurs
de puissance à fréquence de découpage de plus en plus élevée. L’étude des champs
émis par de telles structures devient donc une obligation pour le concepteur soucieux
d’éviter la pollution électromagnétique de l’environnement proche et lointain.
Cet ouvrage résulte de travaux de recherche théorique et appliquée, que nous
avons conduits dans cette perspective, au laboratoire d’électronique de puissance
et de compatibilité électromagnétique (LEPCEM), de l’école polytechnique de
l’université de Nantes.
La représentation des champs, dans un livre, simplement réalisé en monochrome,
est forcément réductrice en qualité graphique. Nous avons donc conçu un support
informatique, permettant de visualiser en couleurs et avec une meilleure définition,
la majorité des illustrations du livre ainsi que de nombreuses autres venant en
complément.
Le mode d’emploi est très simple :
L’icône << 8, », portée à droite d’une illustration du livre, indique que celleci est reprise sur le support informatique à la page x de celui-ci ;
L’icône << BCDx-y », portée à gauche dans le texte suivant une illustration du
livre, indique que des représentations complémentaires sont disponibles sur le
support informatique de la page x à la page y ;
Page x », portée en bas et à droite d’une illustration du support
informatique, indique que celle-ci est présente ou annoncée, dans le livre à la page x.
Table des matières
Introduction.................................................................
Chapitre I : Aspects essentiels de l'électronique de puissance ......
I. 1 La commutation en électronique de puissance .................................................................
5
1.1.1 Principes fondamentaux ......................................................................................................... 5
I. 1.2 Commutation dure .................................................................................................................
.6
I. 1.3 Commutation douce .........................................................................................
1.1.4 Commutation adoucie ................................................
........................... 6
1.2 Convertisseurs et composants associés ........................................
1.2.1 Convertisseurs à la fréquence réseau ........................................................................
1.2.2 Convertisseurs à fréquence indus
........................................................................................
1.2.2.1 Les hacheurs de puissance............
...............................................................
1.2.2.2 Les onduleurs ............................
1.2.3 Convertisseurs à fréquence élevée (30k Hz - 100 kHz) ..........................................................
1.2.4 Caractéristiques des SC de puissance associés aux convertisseurs .........................................
1.2.4.1 Le thyristor ou SCR ........................................................................................................................
1.2.4.2 Le thyristor GTO .............................................................................................................................
1.2.4.3 Le MCT ..........................................................................................................................................
1.2.4.4 L'IGBT ........................................................................................
....................................
....................................
1.2.4.5 Le transistor MOS de puissance .........................................
1.2.4.6 Le transistor bipolaire de puissance............
....................................................................
....................................................................
1.2.4.7 Le triac .......................................................
............................................................................
1.2.5 Comparatif et bilan ....
1.3 Formes d'ondes des courants et modèles simplifiés correspondants ..............................
1.3.1 Impulsions très brèves de courant d'un pont à sortie 3 niveaux ............................................
1.3.2 Oscillations de courant en amont ou aval d'un hacheur rapide .............................................
1.3.3 Ondes de base dans les domaines temporel et fréquentiel .....................................................
1.3.3. I Onde rectangulaire ..........................................................................................................................
1.3.3.2 Onde trapézoidale symétrique .........................................................................................................
1.3.3.3 Onde trapézoïdale asymétrique...................................................................
1.3.4 Prise en compte des oscillations de commutation ................................
8
8
9
9
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18
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24
Chapitre II : Présentation simplifiée du rayonnement des cartes de puissance
II. 1 Îlot rayonnant, boucle << topologique n et boucle << équivalente B __..
......................................................................................................
II. I . i << îiot rayonnant >>
11.1.2 e Boucle topologique >> .........................................................................................
.....................
11.1.3 << Boucle équivalente >> ..........................................................
33
35
11.2 Formulation mathématique et représentation spati
11.2.1 Equations électromagnétiques ........................................................................
11.2.2 Application à la boucle élémentaire .......................................................
11.2.2.1 Formulation mathématique .....................................
11.2.2.2Représentations spatiales ........................................
11.2.3 Application à la boucle rectangulaire .....................
.............................
44
11.2.3.1Formulation mathématique ............................................................................................................
11.2.3.2Représentations spatiales ...............................................................................................................
44
50
54
11.2.4 Domaine de validité de l’équivalence << boucle réelle-boucle élémentaire >> ........................
11.2.4.1Première étude : comparaison directe.........................................................
11.2.4.2Deuxième étude : variation de la taille de la boucle carrée .........................
11.2.4.3Troisième étude : variation des dimensions à surface fixée ........................
............................................................................. 63
11.2.4.4 Quatrième étude : troncature ..................
11.2.5 Limite de validité des équat
es dans l’hypothèse du e champ proche n ..........66
11.2.5.1 Présentation du paramètre
.....................................................................................
66
11.2.5.2Influence de pr sur I’évolu
du champ ..................................................................... 68
11.2.5.3Calcul du champ avec et sans simplification .................................................................................. 69
11.2.6 influence d’un plan de masse éventuel ................................................................................
72
11.2.7 Etude simplifiée de l’émission conjuguée de deux boucles .................................................
73
Chapitre III : F.e.m. induite dans une boucle sensible et immunité ..........................................
79
..........
.............................. 80
III .1 Recherche et estimation de la f.e.m. induite
111.1.1 Organigramme de la recherche de e(t) ...............................................................................
80
111.1.2 Blocs de calcul
.................................................................................................... 84
111.1.2.1Bloc de calc
................................................................................................................. 84
III . 1.2.2 Bloc de calcul avec l’hypothèse du champ uniforme ...................................................................
85
111.1.2.3Bloc de calcul avec les hypothèses du champ uniforme et du flux recueilli maximum ....
111.1.2.4Bloc de calcul avec le maximum de simplification .........................................................
.....................................
111.1.2.5Bloc de calcul basé sur la notion d’enveloppe...............................
111.1.3 Application des hypothèses et des méthodes
..............
.................................
111.1.3.1Calcul général ...............................................................................................................................
III .1.3.2Hypothése du champ uniforme .....................................................................................................
111.1.3.3Hypothèse du flux recueilli maximum ..........................................................................................
111.1.3.4Hypothèse de la boucle équivalente ..............................................................................................
5 Méthode de l‘enveloppe ................................................................................................................
111.1.4 Comparaison des résultats obtenus ....................................................................................
111.2 Cartographie en situations typiques .............................................................................
111.2.1 Cas des boucles parallèles .................................................................
111.2.1.1Première position : B, est dans un plan parallèle au-dessus de Bp ..............................................
111.2.1.2Deuxième position : vues suivant une coupe parallèle au plan YZ .............................................
111.2.1.3Quipotentielles de la f.e.m. induite dans l’espace autour de BP.................................................
111.2.2 Cas des boucles perpendiculaires
86
87
87
90
92
93
94
97
99
99
100
101
101
..........
111.3 Optimisation du positionnement de la boucle sensible
Conclusion générale..............................................................................................................
Bibliographie
113
................................................................... 115
INTRODUCTION
Cet ouvrage s’inscrit dans les activités de compatibilité électromagnétique (CEM)
du génie électrique. Il concerne principalement les convertisseurs de puissance à
fréquence de découpage élevée, que l’on trouve par exemple dans les alimentations
des micro-ordinateurs, celles des matériels audio-vidéo modernes, et tous les
dispositifs électroniques de manière générale. Ces structures sont intrinsèquement
génératrices de perturbations conduites et rayonnées, ces dernières pouvant altérer le
fonctionnement de circuits sensibles proches dont, parfois, la carte de commande de
la structure elle-même (autoperturbation).
Les études en CEM concernent généralement le rayonnement à une distance
suffisante pour obtenir une onde plane et ne retenir alors que le champ électrique.
Plusieurs d’entre elles s’intéressent plus particulièrement aux convertisseurs de
puissance et à la prédiction de leur rayonnement. Les méthodes numériques
employées (méthode des moments, des éléments finis.. .) ont souvent pour objectif
la modélisation d’ensemble du convertisseur autorisant l’obtention principalement
du champ électrique global émis. Ces études sont complexes et s’adressent à un
public averti.
Certains logiciels de CEM commercialisés, essentiellement destinés aux cartes
numériques, permettent d’obtenir en 2D et parfois en 3D la cartographie du champ
électrique résultant. Ces logiciels sont spécifiques et onéreux ; les moins coûteux
d’entre eux procèdent parfois à des simplifications extrêmes basées sur l’estimation
dans le << pire des cas >> au sens des normes en CEM.
Si l’on se préoccupe du rayonnement électromagnétique dans l’environnement
immédiat d’une carte électronique numérique, on sait que le champ électrique sera
prépondérant car les circuits utilisés fonctionnent avec des temps de commutation
très courts, (quelques ns) et les gradients de tension correspondants (dv/dt) peuvent
excéder lo9 V/s, alors que les courants étant très faibles (unité courante : le FA) le
champ magnétique proche est très réduit. S’il s’agit en revanche, d’une carte
électronique de puissance à découpage, les temps de commutation sont rarement
inférieurs à loons, mais, dès lors que les courants m i s en jeu se chiffrent en
ampères, le champ magnétique devient important, et son évaluation est nécessaire.
Dans cette perspective, les auteurs de cet ouvrage ont mis à profit l’expérience
pratique qu’ils ont acquise en laboratoire de tests en CEM concernant diverses cartes
électroniques embarquées dans des convertisseurs de puissance à découpage. Cela
leur a inspiré une démarche simplifiée particulière. En effet, au voisinage immédiat
de telles cartes, le champ magnétique mesurable avec une sonde adaptée est
prépondérant, et se situe en des endroits particuliers qu’ils considèrent comme des
<< îlots rayonnants ».
1
Ces << îlots >> sont souvent repérables sur la sérigraphie du circuit imprimé
correspondant. Les auteurs ont alors étudié la possibilité d’assimiler ces e îlots », au
demeurant peu nombreux sur une carte standard, à de simples << boucles
équivalentes ». Cette démarche apporte une simplification évidente accentuée par
l’utilisation de calculs associés allégés ; elle peut sembler manquer de précision,
mais apparaîtra plus pragmatique à la plupart des industriels concepteurs qui
connaissent par expérience les << points chauds >) de leur carte.
Les auteurs ont donc conduit avec précaution une étude spécifique sur le
rayonnement magnétique des boucles de puissance devant permettre d’obtenir un
outil d’évaluation et de représentation du champ magnétique accessible à tous.
Dès lors que le champ est connu en tout point de l’espace, il est possible de
rechercher la force électromotrice qui pourrait être induite dans une boucle sensible
de l’environnement immigdiat du convertisseur. En général, le concepteur ne
souhaite pas mettre en place de blindage ni d’écran et dispose, le plus souvent, d’un
coffret non métallique. Un apport qui a semblé original aux auteurs de ce livre dans
ces conditions, concerne la détermination de l’orientation optimale de cette boucle
sensible pour minimiser directement l’amplitude de la f.e.m. induite.
Cela se traduit pour le concepteur de la façon suivante :
s’il se fixe un point de l’espace environnant, il disposera rapidement, après
simple repérage et spécification des << îlots », des données de positionnement et
d’orientation d’une carte sensible éventuelle. La perturbation sera alors minimisée.
s’il dispose de plusieurs emplacements disponibles à l’intérieur du coffret
pour y fixer la carte sensible qu’il veut ajouter, il pourra obtenir une information
sur les zones à retenir en priorité que nous appellerons par la suite << zones
tranquilles ». Dans ces conditions, la f.e.m. induite dans une boucle victime sera
déjà réduite, le choix d’une orientation optimale pouvant conduire jusqu’à
pratiquement l’annulation.
Le but de cet ouvrage est donc double : proposer au lecteur une approche simple
concernant l’analyse des phénomènes électromagnétiques et les calculs associés, et
le sensibiliser aux implications industrielles pouvant en découler.
2
CHAPITRE I
ASPECTS ESSENTIELS
DE
L'ÉLECTRONIQUE DE PUISSANCE
Ce chapitre a pour but de présenter et de caractériser dans une démarche << CEM »,
les semi-conducteurs utilisés classiquement dans les convertisseurs de l’électronique
de puissance.
L’objectif final est de déterminer les formes d’ondes types des courants qui
pourront être à l’origine du rayonnement magnétique au sein d’un montage.
Avant tout il est donc nécessaire de rappeler l’essentiel sur la commutation.
1.1 La commutation en électronique de puissance
Le fonctionnement des interrupteurs est déterminant au regard de l’importance des
champs qui vont résulter de leur insertion dans un montage.
1.1.1 Principes fondamentaux
Les convertisseurs de l’électronique de puissance sont présents dans la quasitotalité des appareils et systèmes utilisant l’énergie électrique.
Leur rôle est de modifier la source électrique, c’est-à-dire le réseau distribué, soit
alternatif, soit continu, pour satisfaire aux exigences édictées par la nature et les
caractéristiques du récepteur. Les modifications peuvent concerner la nature même
de la source (courant ou tension) ainsi qu’un ou plusieurs de ses paramètres, dont
essentiellement : l’amplitude, la fréquence, le régime de mise à la terre, le débit
maximum.
Le principe fondamental de l’électronique de puissance est de procéder à
l’adaptation des sources uniquement par découpage temporel des tensions et
courants, donc sans pertes appréciables d’énergie.
Les composants, qui assurent les découpages, présentent alors deux phases de
fonctionnement importantes au regard de la CEM : les commutations à l’ouverture et
à la fermeture. Suivant les semi-conducteurs utilisés et la structure du convertisseur
considéré, différents types de commutations sont à considérer :
concernant l’interrupteur, << la commutation D est le mécanisme >> physique
d’ouverture ou de fermeture des semi-conducteurs constituant l’interrupteur. Elle
est soit << commandée D c’est-à-dire provoquée par l’application d’un signal
directement sur la commande du composant, soit << naturelle D ou << spontanée >> si
elle a lieu sans intervention extérieure. Dans ce dernier cas, elle résulte
uniquement du passage par zéro de la tension appliquée au composant ou du
courant qui le traverse ;
pour un convertisseur, le mot commutation est relatif aux événements
concernant les éléments de la structure directement associés aux interrupteurs qui
peuvent être considérés non plus individuellement, mais assemblés dans des sousensembles appelés << cellules de commutation ».
C’est au niveau de celles-ci que l’on introduit les notions de commutation << dure D
et de commutations << douce D et << adoucie ».
5
Chapitre I
Aspects essentiels de l’électronique de puissance
1.1.2 Commutation dure
La commutation dure, également appelée commutation forcée, résulte de l’emploi
d’un composant commandé à l’ouverture et à la fermeture. Les contraintes
importantes qui sont alors imposées à celui-ci dépendent fortement des inductances
de connexion et de câblage et de diverses capacités parasites, ce qui entraîne :
des pertes élevées ;
des surtensions et des surintensités aux bornes de l’interrupteur ;
de rapides variations de tension et courant (dv/dt et di/dt) ;
de fortes oscillations, en particulier pour le découpage à haute fréquence.
Pour limiter ces effets, on peut associer aux semi-conducteurs des circuits d’aide à
la commutation (CALC), dont le rôle essentiel est de réduire les pertes
correspondantes et de limiter les surtensions et/ou surintensités.
1.1.3 Commutation douce
En commutation naturelle ou douce, les interrupteurs présentent une commutation
commandée et une commutation spontanée.
I1 est possible de regrouper ces convertisseurs en deux familles :
la première correspond à des commutations pilotées par les grandeurs d’état
de nature électrique. I1 s’agit par exemple de certains convertisseurs reliés au
réseau alternatif. C’est kgalement le cas des convertisseurs quasirésonnants qui
utilisent un couple de composants passifs L-C pour provoquer l’annulation du
courant ou de la tension.
la seconde est relative aux structures pour lesquelles les commutations
spontanées des interrupteurs sont obtenues consécutivement à la commutation
d’autres interrupteurs, c’est le cas pour les hacheurs de puissance à un thyristor
principal dont l’extinction est assurée par un circuit auxiliaire de nature oscillante
comprenant un deuxième thyristor dit de soufflage.
1.1.4 Commutation adoucie
La commutation est adoucie par l’emploi de CALC associés aux composants, dont
les deux mécanismes essentiels consistent à :
ralentir la montée en courant à la fermeture par adjonction en série d’une
inductance avec l’interrupteur ;
ralentir la croissance de sa tension aux bornes par mise en parallèle d’un
condensateur.
Avec un CALC, le composant est à même de commuter la totalité du courant alors
que la tension à ses bornes reste encore faible ou, par dualité, supporter la totalité de
la tension, le courant étant annulé. A noter pour les puristes qu’on ne peut
théoriquement pas parler de commutation à zéro de courant (ZCS) ou zéro de
tension (ZVS) car ces grandeurs ne font qu’évoluer différemment tout au long de la
commutation et ne sont jamais totalement nulles.
6
Chapitre I
Aspects essentiels de l’électronique de puissance
L’association de ces éléments passifs a bien entendu ses revers, comme le risque
de surtension due à l’inductance à l’ouverture, et de surintensité due au condensateur
à la fermeture, ou encore celui de la génération d’oscillations indésirables. Un
CALC est en conséquence un circuit plus complexe incluant d’autres éléments
comme par exemple une résistance pour dissiper l’énergie liée aux oscillations ainsi
que des diodes pour assurer les connexions unidirectionnelles indispensables.
La figure 1.1 présente un CALC dissipatif opérationnel à l’ouverture et la
fermeture.
L
A
-
+’+
Figure I. 1 :CALC dissipatif
Pour les petites puissances, des CALC plus élaborés peuvent être mis en œuvre.
Ils se composent généralement de condensateurs, d’inductances et d’un autre
interrupteur. La commande de ce dernier permet de réaliser une oscillation locale
qui provoque la commutation du composant principal au <<zérode tension >> ou
<< zéro de courant ». Ce sont les techniques ZVS et ZCS évoquées précédemment.
En conclusion, les CALC améliorent les commutations puisque les surtensions et
surintensités sont réduites au niveau de l’interrupteur qui ne supporte plus seul les
différents traumatismes. Cependant, on ne supprime pas les variations rapides de
courant et de tension (di/dt et dv/dt) qui sont en fait reportées sur les composants
réactifs des CALC, ce qui peut augmenter les probabilités de rayonnement
indésirable, en particulier en champ magnétique, par les éléments bobinés. I1 faut
encore souligner que le renvoi éventuel à la source de l’énergiede commutation ainsi
que celle des oscillations parasites peut réduire la qualité du signal en amont.
1.2 Convertisseurs et composants associés
Ce paragraphe est une présentation sommaire des différents convertisseurs, qui a
pour objectif principal de rappeler quels sont les semi-conducteurs associés, et les
perturbations essentielles qui les caractérisent.
1.2.1 Convertisseurs à la fréquence réseau
11 s’agit essentiellement des redresseurs commandés, des gradateurs et des cycloconvertisseurs.
Ces structures traditionnelles sont réalisées dans une très large plage de puissance,
elles utilisent essentiellement des thyristors commandés par la phase. Les
commutations à l’ouverture des composants sont spontanées. Les vitesses de
commutation sont peu élevées car limitées par la nature des sources et les
caractéristiques des composants.
7
Chapitre I
Aspects essentiels de l’électronique de puissance
Les principales perturbations observées concernent essentiellement les
harmoniques et sous-harmoniques des courants prélevés au réseau. Le rayonnement
à proximité immédiate de ces structures peut être élevé, compte tenu des amplitudes
très fortes des tensions et courants mis en jeu, mais la fréquence de découpage étant
très basse, les champs décroissent très vite avec l’éloignement. On s’intéressera
alors en CEM, essentiellement aux champs dits << proches ».
1.2.2 Convertisseurs à frkquence in dustrielle (< 16 kHz)
I1 s’agit essentiellement des hacheurs de puissance utilisés par exemple dans les
variateurs de vitesse pour moteurs à courant continu et des onduleurs destinés aux
moteurs alternatifs, ou encore aux alimentations statiques de secours.
1.2.2.1 Les hacheurs de puissance
Les sources amont et aval sont de nature continue ce qui n’autorise pas bien sûr la
commutation spontanée des interrupteurs employés. Ceux-ci sont donc commandés
à l’ouverture et à la fermeture. Les commutations génèrent alors des gradients de
courant et de tension importants dans les différentes connexions du convertisseur.
Les composants utilisés en très forte puissance sont des thyristors avec circuit de
soufflage, ou des GTO (thyristors blocables par la commande). En moyenne
puissance, le transistor IGUT est préféré.
Les perturbations conduites couvrent un spectre plus étendu que précédemment,
puisque les fréquences de découpage choisies peuvent atteindre 16 kHz dans un
souci de réduction des bruits acoustiques.
Les vitesses de commutation sont encore peu élevées car toujours limitées par la
nature des sources et les caractéristiques des composants.
Les champs proches, du fait des amplitudes élevées des tensions et des courants,
seront importants et avec un spectre un peu plus étendu en fréquence (pouvant
atteindre quelques MHz) que pour les convertisseurs précédents.
1.2.2.2 Les onduleurs
Les onduleurs ont une structure en pont ou demi-pont et peuvent être regroupés
selon trois familles : les onduleurs de tension, les onduleurs de courant et les
onduleurs à résonance (résonance série ou résonance parallèle).
Les deux premières fainilles utilisent une commande à modulation de largeur
d’impulsion (M.L.I.) unipolaire ou bipolaire ou génèrent des niveaux discrédités
(marches d’escalier). Chaque commande a pour objectif la réduction des
harmoniques de tension OLI de courant aux basses fréquences.
Les onduleurs à résonance sont sur charge réactive, ils utilisent un élément dual en
série ou parallèle pour créer ainsi une source réceptrice oscillante, dont les passages
à zéro des grandeurs électriques autoriseront les commutations naturelles. Les
courants et tensions obtenus sont d’allures sinusoïdales. Les fréquences de
fonctionnement doivent être proches de la fréquence d’oscillation du dipôle LC pour
limiter leurs harmoniques.
8
Chapitre I
Aspects essentiels de l’électronique de puissance
Les onduleurs nécessitent généralement des interrupteurs bidirectionnels en
tension ou en courant, entièrement commandés (GTO, IGBT ou transistors MOS
associés à une diode). Les commutations peuvent avoir lieu plusieurs fois par
période et être irrégulièrement réparties (commande à M.L.I.). C’est alors une
séquence qui se répète à la fréquence de fonctionnement. I1 est ainsi difficile de
parler de fréquence de commutation pour ces composants. On peut toutefois
introduire la notion de << motif ».
Les perturbations conduites sont observables sur l’entrée continue et sont
directement liées aux découpage des ondes réalisant la sortie alternative.
Le rayonnement à proximité dépendra de la puissance mais aussi du type des
composants, puisque leur vitesse de commutation peut être, comme nous le verrons
ensuite, nettement supérieure dans le cas des MOS ou de certains IGBT de dernière
génération.
-
1.2.3 Convertisseurs à fréquence élevée (30 kHz 100 kHz)
L’utilisation de fréquences de fonctionnement élevées permet de s’affranchir des
bruits acoustiques, de diminuer la taille des condensateurs, des inductances, des
transformateurs et de faciliter le filtrage. Cependant, les composants capables de
fonctionner à ces fréquences admettent des limites en courant et tension restreintes.
Ces convertisseurs sont donc principalement utilisés en moyenne et petite puissance.
Les alimentations à découpage constituent l’essentiel de cette famille, elles
assurent principalement la conversion continu-continu et alternatif-continu (ajout
d’un pont redresseur en tête). Techniquement, ces structures du type << hacheur »,
relient des sources de nature différente (hacheur sans accumulation) ou identique
(hacheur à stockage intermédiaire).
Les composants les plus employés sont les transistors MOS de puissance, les
transistors bipolaires et les IGBT rapides. Les vitesses de commutation sont
imposées soit par le composant soit par le CALC. En règle générale, les temps de
commutation sont réduits au maximum pour conserver au convertisseur la meilleure
dynamique possible et de ce fait le rayonnement électromagnétique peut être
important. Sa réduction est possible dans les cas particuliers des alimentations
quasirésonnantes )> ou << résonnantes ».
1.2.4 Caractéristiques des SC de puissance associés aux convertisseurs
Dans cet ouvrage, nous nous limitons aux semi-conducteurs (SC) destinés aux
petites et moyennes puissances et cherchons essentiellement les caractéristiques
concernant leurs commutations et, plus particulièrement, celles qui déterminent les
variations rapides du courant.
Les caractéristiques fournies par les constructeurs sont variées, elles donnent
généralement un aperçu des performances optimales du composant. Les tests sont en
effet réalisés avec des circuits particuliers qui sont pour la plupart exempts des
éléments parasites que l’on peut trouver sur des cartes industrielles (inductances de
ligne, capacités entres pistes, éléments parasites d’autres composants...).
9
Chapitre I
Aspects essentiels de l’électronique de puissance
Compte tenu de cela, certaines valeurs relevables sur des montages industriels
pourraient être beaucoup plus importantes que les niveaux proposés.
Les caractéristiques présentées ci-après pour les différents composants signalés
précédemment ont été prelevées dans différents recueils de constructeurs connus.
Nous y avons sélectionné des semi-conducteurs classiquement utilisés et, pour
chaque famille, des caraciéristiques types, moyennées, en vue d’établir à terme une
forme d’onde de référence du courant commuté.
1.2.4.1 Le thyristor ou SCK
Le thyristor (Silicon Controlled Rectifier) est un composant relativement lent, bien
adapté pour des fonctionnements aux basses fréquences en forte puissance. C’est un
composant unidirectionnel en courant et bidirectionnel en tension, dont la fermeture
est commandée, alors que l’ouverture est spontanée au zéro de courant (figure 1.2).
Figure 1.2 :Thyristor
Le tableau 1.1 ci-dessous, accompagné de sa légende (figure 1.3), présente
quelques caractéristiques sélectionnées de thyristors de différentes gammes.
I
di/dt
dvldtd
t, min
max
(-44s)
200
300
~
500
200
800-1 200
500
O, 1
800-1 400
500
0,2
1 O00
100
1 O00
Tableau I. I :Caractéristiques sélectionnées de quelques thyristors
10
Aspects essentiels de l’électronique de puissance
Chapitre I
Légende :
iT
dildt
-
dildt
dv/dt
“T
Figure 1.3 :Ondes du thyristor
t, (min) : temps minimum estimé pour atteindre le niveau & Irms(max) ;
dildt : vitesse maximale de croissance et de décroissance du courant ;
t, : temps de blocage du thyristor. C’est le temps minimum entre le passage à
zéro du courant dans le sens direct et la montée de la tension directe sans remise
en conduction du thyristor ;
dv/dt : vitesse maximale de croissance de la tension directe du thyristor.
Au-delà de cette valeur, il y a risque d’amorçage intempestif du thyristor.
-
Nous proposons de retenir des ordres de grandeur qui permettront par la suite de
définir l’onde type de courant. A noter que la puissance commutée n’atteint pas le
maximum possible pour le thyristor, du fait que nous souhaitons pouvoir comparer
les différents semi-conducteurs dans une plage de puissance commune.
temps de commutation à la fermeture : 0,l ps à quelques ps ;
di/dt : 30 A/ps à 170 Alps (200 à 1 O00 Alps en non répétitif).
1.2.4.2 Le thyristor GTO
Le GTO (Gate Turn Off), est très utilisé dans le domaine des fortes puissances
(figure 1.4). La fermeture et l’ouverture sont commandées.
Figure 1.4 :GTO
Quelques caractéristiques sélectionnées de thyristors GTO sont données dans le
tableau 1.2.
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